Ce thème et le précédent se ressemblent, j'espère que ce ne sera pas gênant à la lecture ! C'était une erreur d'appréciation de ma part, mais j'avais très envie d'écrire dessus.
Bonne lecture !
Univers de A Link Between Worlds mais en version moderne et sans royauté.
2- Lavio x Link – Mon héros !
- Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur…
Lavio était tellement recroquevillé sur lui-même que c'était un miracle qu'il soit capable d'avancer.
Si vous sondiez son entourage, il s'accorderait sur le fait qu'il était un lâche, un couard. Le genre à fuir le danger plutôt qu'à l'affronter. Celui qui pouvait vous sortir du sommeil pour vous envoyer vérifier un bruit suspect à l'entrée ou fouiller sous son lit.
Le voir explorer une maison hantée tenait presque du miracle. Et de l'incohérence.
Un cri suraigu lui vida les poumons alors qu'il se faisait surprendre par un faux cadavre plongeant du plafond.
C'était la terreur de trop.
Les larmes aux yeux, il se roula en boule sur le sol, secoué par des hoquets déchirants, marmonnant des appels à l'aide et tous les regrets qu'il avait d'avoir tenté par cette folle aventure.
« client à terre, je répète, client à terre. Terminé. »
- Bien reçu, je procède à l'évacuation. Terminé.
Soupirant théâtralement, Link rangea son talkie-walkie à sa ceinture et en extirpa sa lampe torche, se frayant un chemin à travers les décors et les mécanismes, prenant la direction approximative de l'urgence à traiter.
- Monsieur ? M'entendez-vous ? L'interpella-t-il une fois à sa hauteur.
Il travaillait pour l'animation depuis quelques mois maintenant et ce n'était pas la première fois qu'il avait à faire quitter des clients trop émotifs.
Des gémissements étouffés s'élevaient de la forme recroquevillée rendant difficile la communication. Ça allait être d'un simple…
Les mains sur les hanches, il se redressa, étirant sa nuque et détendant les épaules, prêt à devoir l'affronter, jetant un rapide coup d'œil aux caméras installées.
Ne surtout pas oublier la présence des collègues.
Prudent, il s'accroupit et détourna le faisceau de la torche, tendant le bras pour l'agripper par l'épaule. Mais il eut à peine le temps de le frôler que l'inconnu se releva en sursaut pour lui sauter au cou, geignant.
- Vous êtes venus me sauver ! Mon héros !
Inutile de tendre l'oreille, il était parfaitement capable d'imaginer les rires et plaisanteries des autres employés.
Peut-être n'entendra-t-il plus parler d'ici deux réincarnations ?
Prenant sur lui, il s'efforça de lui faire lâcher prise.
- Monsieur, je vais devoir vous demander de cesser de vous accrocher à moi, énonça-t-il du ton le plus plat possible. Nous devons quitter la zone au plus vite. Avez-vous besoin de soin ?
- Partir ! J'ai besoin de partir de cet enfer !
- Pouvez-vous marcher seul ou avez-vous besoin d'assistance ?
Pourquoi tombait-il toujours sur ces profils ? Les petits vieux perdus, les militaires en plein flashbacks, les femmes enceintes, les mineurs regrettant d'avoir menti sur leurs âges…
À croire que c'était un jeu de la part de l'équipe de surveillance… C'était fort possible, les connaissant.
- J'ai les jambes qui tremblent.
Un nouveau soupir quitta ses lèvres mais il se releva et il l'attrapa par sous les aisselles, le tirant sur ses pieds, glissant un bras autour de ses omoplates et le sien au-dessus de ses épaules, le traînant à moitié vers la sortie.
Le talkie-walkie crépita en cours de route et le décrocher fut une vraie galère et un casse-tête de jonglage, mais il y parvint, grognant au micro.
- Quoi ? Vous trouvez que c'est le moment ? Terminé.
« bouge ton cul, monsieur le héros, un groupe arrive. Terminé. »
Il allait lui répondre vertement quand une autre communication intervint.
« vu la tronche qu'il tire toujours, ils pourront croire qu'il fait partie du décor. Terminé. »
L'appareil gémit pitoyablement alors qu'il le serrait un peu trop fort sous la colère qu'il ressentait.
- Ouvrez encore vos gueules et la galerie possédera deux cadavres supplémentaires. Allez vous faire foutre. Terminé.
- Ouh, monsieur le héros est quelqu'un de susceptible.
- Il peut aussi vous lâcher et vous laisser vous débrouiller. Pour information, il vous reste plus des deux tiers à parcourir. Bonne chance.
Le client claque audiblement la bouche, démontrant qu'il se taisait.
- Bien. On se dépêche.
En temps normal, il l'aurait reconduit à la sortie de la maison hantée de la maison hantée ou à l'infirmerie, selon son état, mais pas cette fois.
Lavio observa l'espèce de cour intérieure crasseuse où des poubelles et des engins rouillés s'entassaient, des mégots détrempés recouvrant le sol. On était très loin de l'atmosphère féerique du parc d'attraction, les rires éloignés les atteignant.
- Où sommes-nous ?
- Notre coin de pause, à l'équipe technique et aux autres employés de la maison. Café ?
Le gobelet jetable était aussi laid que celui disponible dans tous les distributeurs de boissons chaudes du pays, loin de ceux esthétiques vendus dans tout le parc.
Lavio le recouvrit de ses mains encore tremblantes, regardant le sol où il triturait un mégot délavé de la pointe de sa chaussure.
- C'est l'heure de ma pause, expliqua l'employé. Et bien que j'exècre travailler quand je ne suis pas payé, vous bazarder entre les mains de ma collègue pour finalise la prise en charge n'aurait aucun sens.
- Merci, je suppose…
Ils se turent, buvant leurs cafés à petites gorgées. Le claquement de la pierre à feu d'un briquet le fit sursauter et il vit son vis-à-vis allumer une cigarette.
- Ne me regardez pas comme ça, ce n'est pas moi qui prend le sol pour un cendrier géant. Sur toute la population du parc, je ne suis pas l'unique fumeur, vous savez.
Piquant un fard de honte, il retourna son attention vers ses pieds, creusant la terre sablonneuse de ses chaussures.
- Vous aimez les maisons hantées ?
- Je déteste ça, marmonna-t-il.
- Mais alors pourquoi… non, oubliez, je m'en fous. Vous faîtes partie de ces connards qui aiment foutre le bordel et attirer l'attention, c'est ça ?
Il ne le regardait pas, fixant l'extrémité rougeoyante de sa cigarette, son air amer le vieillissant prématurément.
- P… pas du tout. Je suis vraiment désolé pour vous avoir forcé la main.
- C'est mon job.
Rien dans son attitude n'invitait à la conversation, et pourtant… pourtant, Lavio sentit comme un déclic et sa langue se délia alors que ses yeux se posaient sur le profil baigné par la lueur criarde des néons.
- En fait, il y avait cette fille…
Et merde, pensa Link en reprenant du café.
- Il est en retard.
- Ne sois pas injuste, Yuga. Nous sommes arrivés bien trop tôt, aussi.
S'assurant de sa coiffure grâce à son miroir de poche, sa petite amie lui darda un regard réprobateur.
- Justement, lui aussi devrait l'être ! C'est le minimum requis lorsqu'on a quelque chose de si important à annoncer que nous devons planifier ! Nous ne sommes pas des chiens que l'on peut siffler à tout instant.
- J'imagine que c'est ce qu'on appelle le sens de l'amitié ? Cingla une voix glaciale dans l'angle mort du grand roux.
Celui-ci tourna la tête, une réplique sur le même ton au bout des lèvres, prête à jaillir pour remettre en place l'intrus.
Mais il changea d'avis quand ses yeux croisèrent ceux métalliques qui le fixait, le visage de pierre.
Il y avait quelque chose chez lui de vaguement irritant, comme un indice qu'il ne parvenait pas à formuler. Une impression qui lui échappait sans cesse.
Loin de se démonter, l'inconnu tourna vers la jeune lolienne.
- Vous devez être Hilda, j'imagine ? Lavio m'a énormément parlé de vous. Quel dommage qu'il avait faux sur toute la ligne.
- Comment oses-tu… s'emporta Yuga.
Il s'était levé si vite que sa chaise percuta le sol avec fracas alors qu'il se redressait de toute sa hauteur, appréciant intérieurement la différence de taille. Mais son adversaire était loin de se démonter. Les mains sur les hanches, il releva la tête, ne cillant pas un instant.
Ce fut sur ces entrefaites qu'arriva Lavio, un verre dans chaque main, son habituel sourire nerveux aux lèvres. Son teint perdit quelques tons quand il prit conscience de la situation.
- Ne vous battez pas, couina-t-il.
Il renversa pratiquement les commandes en les plaçant sur la table, hésitant sur la démarche pour désamorcer le conflit. Ils attiraient déjà l'attention alors qu'ils se contentaient de se toiser.
Et autant il connaissait les tendances bretteurs du verbe de son ami, autant Link n'avait rien à lui envier…
- Hilda, tu es aussi charmante que jamais ! Lança-t-il dans l'espoir de détourner l'attention.
- Merci bien. Yuga, assieds-toi, tu me fais honte.
Marmonnant dans son souffle, il obéit, fusillant du regard son adversaire qui le lui rendit bien.
- Tu voulais nous voir ? Poursuivit-elle.
- Ah oui ! Les amis, je vous présente Link !
Soudainement enthousiaste, il s'empara par la force de sa main, la serrant visiblement, un large sourire aux lèvres.
- Nous sommes ensemble !
Il n'y eut rien. Ni félicitations, ni blague, ni même un commentaire sarcastique sur les critères inexistants de leur ami commun. Rien. Juste un silence gênant qui s'étirait en longueur, incommodant les voisins qui détournèrent rapidement le regard vers autre chose.
Malgré son apparente confiance en soi, Link pouvait très clairement sentir son compagnon trembler, alors il recouvrit leurs mains liées de sa libre, caressant doucement ses phalanges pour le réconforter.
- Je vois que vous avez déjà fait connaissance, poursuivit-il sur un ton étranglé.
- C'est une manière de le dire, commenta Yuga.
Sans leur adresser un mot ou un regard, il guida son petit ami jusqu'à la dernière chaise puis alla quérir une pour lui, plaçant leurs boissons devant eux, commençant à siroter son café.
- Donc, Link, voici Hilda et Yuga, nous nous connaissons depuis presque toujours.
Quand Lavio était nerveux, il était bavard à l'extrême. Ce n'était pas quelque chose qui dérangeait Link qui se trouvait lui-même trop taiseux, mais le sentiment ne paraissait pas partagé au vu de la tête que les deux autres faisaient.
Incapable de se réfréner, il claqua sa tasse en la reposant un peu trop fort sur sa soucoupe, attirant leurs regards sur lui.
- Lav' m'a parlé de vous. Vous êtes les deux connards qui l'ont envoyé à la maison hantée.
L'accusation les surprit tous les trois, mais si son partenaire avait des étoiles dans les yeux, les deux autres avaient l'air d'avoir mordu dans un citron, clairement peu repantants.
- Vous êtes déjà si proches pour vous être raconté vos anecdotes humiliantes ? Renifla hautainement son voisin.
- Et… et bien, nous sortons ensemble, alors…
- J'y travaille, le coupa-t-il de sa voix tranchante. J'ai été celui chargé de l'évacuer. Une vraie plaie.
- Menteur, tu as été sous le charme directement !
- Ça ne change rien au fait que t'étais un peu boulet. T'as niqué ma chemise ce jour-là.
- Je t'en ai offert une neuve pour la remplacer !
- Correction, j'ai dû te harceler pour que tu me la rembourses.
Le petit sourire qu'ils arboraient désamorçait tout doute sur la véritable porté de leur échange. Ce n'était pas une dispute, une pluie de reproches, c'était un échange de taquineries dont les deux autres se trouvaient être les spectateurs forcés, à leur énervement.
- Donc, c'était la raison de notre rendez-vous ? Ta mise en couple ? Résuma Hilda.
Elle avait ressortit son miroir et vérifiait son maquillage cette fois, l'air désintéressée.
- Non. Bien sûr, c'est une annonce importante, surtout pour mes deux meilleurs amis ! Mais un SMS aurait largement suffit, non ?
Un tic d'agacement agita la main de Yuga, ses doigts pianotant la surface de la table.
- Va aux faits Lavio, exigea la jeune lolienne. Nous avons mieux à faire que de t'écouter déblatérer.
Aucun des deux n'avait leurs yeux rivés sur les deux tourtereaux, ratant l'éclair de douleur crispant les traits doux de leur ami commun. Une fois de plus, ce ne fut pas le cas pour Link dont la mâchoire se crispa visiblement, leurs attitudes négligentes tapant un point sensible.
- Ils n'ont pas l'air intéressé. Tu es sûr de vouloir les y inviter ?
- C'est un élément très important ! Je souhaite être bien entouré !
- Permets-moi d'émettre un doute sur la qualité de cet entourage…
Il détourna le visage à la fin de sa phrase, croisant le regard furibond de Hilda. Tiens, elle était subitement intéressée ?
Puéril, Lavio enfonça son doigt dans le creux de la joue à plusieurs reprises, le taquinant, attirant un sourire attendri avant que sa main ne fut attrapée, un baiser appuyé contre le dos de ses doigts.
Décidant avoir suffisamment joué avec les nerfs de leur public, il revint à eux, gardant sa main dans la sienne, la détournant légèrement pour en présenter le dos.
- Ça ferait très plaisir à Lavio que vous soyez présents à notre cérémonie de mariage. Mais si je peux avoir voix au chapitre, je préférerais ne pas vous y voir.
Ceignant son annulaire, siégeait un anneau fin couleur argent, semblable à l'un des nombreux parsemant la main noueuse reposant sur la table.
Maintenant qu'ils les savaient là, ils ne pouvaient plus l'ignorer. Un peu comme Lavio, au fond…
- Alors ? Satisfait de notre représentation ?
- C'était parfait !
Incapable de se retenir, Lavio trépignait sur place avant de sauter au cou de son compagnon qui le laissa faire, un petit sourire aux lèvres, alors qu'il lui enlaçait la taille d'un bras, les rapprochant pour l'embrasser dans le cou.
- Je n'arrive pas à croire que tu sois resté en contact avec de tels enfoirés. Quel genre de personne en défierait une autre de faire face à tous ses pires déclencheurs de crises de panique ? Et plus encore, ne prendrait pas de ses nouvelles pendant tous ces mois ?
- D'affreuses gens. Arrête de serrer les mâchoires, tu vas te faire mal, le conseilla-t-il. Et ce n'est pas comme si je comptais les revoir !
- Y'a intérêt… grommela-t-il en resserrant sa prise sur lui.
- Oh mon héros en armure étincelante, gazouilla-t-il.
- Oh non, par pitié !
"J'ai débarqué dans cette maison hantée tout seul parce que je pensais que je n'aurais pas peur, mais maintenant j'ai peur et je te tiens peut-être la main."
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