Chapitre 4

Deux jours plus tôt

Elle ne ressentait plus rien, plus aucune sensation n'était perceptible, excepté celle d'un froid intense qui englobait et écrasait toutes les autres. Il faisait noir. Si noir, et si froid. Avec peine, Gabi ouvrit une paupière, puis une autre. Elle entendit une voix s'adresser à elle, mais ne percevait encore rien d'autre qu'une silhouette. Soudain, la douleur qui l'avait amenée jusqu'ici s'éveilla à nouveau. Cette fois, elle était sourde, différente. Comme si quelque chose manquait. Les traits du visage penché vers elle gagnèrent peu à peu en précision. C'était Tyus.

- Gabi, Gabi est-ce que vous m'entendez ?
- Oui… répondit-elle faiblement. Qu'est-ce qui s'est passé ?

Le docteur tira une chaise près du lit d'hôpital, et vint s'asseoir à ses côtés.

- Vous êtes arrivée ici il y a quelques heures… dans un état critique. Nous avons dû intervenir assez rapidement.
- "Intervenir" ? demanda-t-elle, d'une voix à peine audible.
- Gabi, vous sortez du bloc opératoire. Vous êtes encore un peu sous l'effet de l'anesthésie.
- Vous m'avez opérée ?!

Elle tenta de se relever, mais une vive douleur dans son bas-ventre l'en dissuada immédiatement.

- Calmez-vous, je vais vous expliquer. Mais… Il faut que vous m'écoutiez attentivement.

Doucement, Tyus vint poser une main sur celle de la jeune femme alitée. Elle plongea son regard dans le sien, y lut une peine teintée de tristesse, et elle comprit… sans vraiment comprendre. Déjà, ses yeux s'embuèrent de larmes. Le docteur émit une légère pression sur la main de Gabi, prit une profonde inspiration, et commença à parler. Elle entendit très distinctement la première phrase, puis, son cerveau s'enraya, lui enleva le son et ne lui laissa que les images, qui devenaient de plus en plus floues. Les lèvres de Tyus bougeaient, mais Gabi ne percevait que des bribes. Sa bouche s'entrouvrit, ses yeux s'éteignirent, et son cœur se mit à battre au ralenti.

- Je suis désolé, Gabi… Je sais que ça fait beaucoup d'informations d'un coup. Je peux vous mettre en contact avec un psychologue, si vous le souhaitez.

Devant l'absence de réaction de la jeune femme, Tyus intensifia légèrement la pression qu'il exerçait sur sa main.

- Est-ce que vous voulez que j'appelle Ricardo ?
- Non, surtout pas. Personne ne doit savoir…
- Gabi, vous…
- Personne. S'il vous plaît, le coupa-t-elle.
- Très bien… Vous avez ma parole. Mais, Gabi… Ne restez pas seule face à ça. Je veux que vous me promettiez que vous allez au moins prendre rendez-vous avec un psychologue. Je repasserai plus tard pour vous donner d'autres informations, et pour répondre à vos questions si vous en avez. On doit aussi prendre un rendez-vous de contrôle dans quelques jours. Je finis mon service dans quelques heures, je vous déposerai chez vous si vous voulez.

Elle hocha faiblement la tête. Il la regarda intensément, et, il ajouta :

- Je suis tellement désolé…

Dès qu'il eut quitté la pièce, Gabi porta ses mains à sa bouche. Elle fut soudainement secouée de spasmes. Des larmes explosèrent sur son visage et dévalèrent ses joues en cascades. Son cœur et sa gorge, quant à eux, se serrèrent tant qu'elle eut l'impression d'être en train d'étouffer.