Correctrice : Clina

Personnages : Bud d'Alcor, Syd de Mizar

Mention de : Hilda de Polaris, Fenrir d'Alioth, Andromède Shun, Phoenix Ikki

Ship : aucun

Type d'écrit : fraternité, réconfort

Arc temporel : après la résurrection de tout le monde, quelques années après la fin de l'animé

Lieu : Le palais d'Asgard

Nombre de mots : 2150

Titre : Pardon fraternel


La neige revenait doucement sur les terres d'Asgard. Elle était encore fine et légère, une simple couche immaculée au lever du jour qui s'évaporait avec le soleil de l'après-midi. Après tout ce n'était que l'automne. Bientôt le froid polaire étendrait son manteau sur tout le Royaume. Le jour serait quasiment inexistant, et la nuit deviendrait la norme pour quelques semaines. La neige tomberait sans fin, dissimulant tout sous sa longue cape glaciale et scintillante. Il serait alors beaucoup moins agréable d'errer en forêt. Et Bud se fit la réflexion en observant les bois du domaine royal, que Fenrir resterait peut-être plus avec eux. Le Loup du Nord restait malgré tout un animal solitaire qui détestait être enfermé. Il ne leur accordait pas son amitié, ni sa confiance. Et le Tigre Blanc ne pouvait pas le blâmer. Ils n'étaient personne pour Fenrir. De plus, l'enfant sauvage qu'il avait été, n'avait pas tous les codes de la société humaine. Cependant, il revenait chaque soir aux pieds de leur Reine. Hilda tissait lentement mais sûrement une relation amicale ou fraternelle avec lui. Ou plutôt leur Souveraine apprivoisait le Loup avec sa bienveillance et sa douceur, lui laissant sa part de solitude et de liberté. Il faisait le deuil de sa Meute à sa manière. Peut-être que les autres guerriers Divins devraient y mettre du leur aussi… Mais Bud savait qu'il n'était pas aisé d'accepter une différence. Ô pas qu'il soit mal considéré par ses frères d'armes. Il avait été bien accepté. Mais il ne se sentait pas toujours à sa place au palais. En cela, il était un peu semblable à Fenrir, à observer avec envie l'extérieur.

« Préparerais-tu un plan d'évasion ? », plaisanta la voix familière de son frère dans son dos.

Bud bougea légèrement pour observer son double parfait. Ils se trouvaient sur la muraille entourant le palais de Vahalla. Il n'était pas de garde. Le Tigre Blanc était juste sorti prendre l'air. Ce n'était pas tant que les lieux soient irrespirables, qu'une habitude d'être à l'extérieur. Après tout il avait été fils de paysan quasiment toute sa vie. Syd avait eu une vie bien différente. Il était beaucoup plus à l'aise à la Cour et dans l'entourage de leur Reine que Bud ne pourrait jamais l'être. Cependant malgré leur passif, malgré la haine que Bud avait manifesté à l'égard de son frère lors de son combat contre le Phoenix, Syd l'avait accepté. Celui-ci avait jusqu'à son dernier souffle manifesté un attachement à son frère jumeau. Et après leur retour à la vie, le Tigre Noir avait tout fait pour intégrer Bud à sa vie et au groupe des Guerriers Divins. Et en repensant à ce combat, Bud enviait le lien étroit et fusionnel qui unissait le Phoenix à son frère Andromède. Il aurait aimé avoir ce genre de relation avec Syd. Mais il n'avait compris que trop tard l'importance de leur lien et que sa haine n'était qu'illusoire. Sinon pourquoi aurait-il toujours protégé son jumeau ? Cela étant, ils avaient une seconde chance. Il ne pouvait que faire mieux que lors de sa précédente vie.

« Qu'est-ce qui te fait croire cela ? », questionna-t-il avec un sourire amusé. Il pouvait se montrer joueur par moments.

« Tu observes la forêt avec beaucoup d'attention. À moins que tu n'attendes un potentiel ennemi ? », répliqua Syd en croisant les bras sur le bord de la muraille. Son regard se perdit à son tour vers le lointain.

« J'ai plus l'habitude d'être en extérieur qu'à l'intérieur », justifia faiblement Bud. « Et je me demandais où pouvait courir Fenrir chaque jour. » Ce qui n'était pas un mensonge.

Le Tigre Blanc se fit la remarque qu'il était légèrement tendu. Ce qui était ridicule vu que Syd était son frère jumeau. Bud lança un regard en coin à son frère, qui lui, semblait admirer le paysage forestier avec un léger sourire. Ils n'avaient jamais vraiment parlé de leur passé commun, de leur lien et de ce qu'ils s'étaient plus ou moins avoués avant de perdre face aux Saints d'Athéna. Ils ne combattaient pas pour la bonne cause. Mais les motivations de Bud étaient plus personnelles, plus sombres. Il ne faisait pas que protéger Syd. Il l'enviait, lui qui avait pu rester avec leurs parents. C'était mal. Bud le savait. Mais encore aujourd'hui, il peinait à accepter l'idée que son frère avait toujours su et qu'il l'acceptait tel qu'il était. Si physiquement il n'y avait entre eux aucune différence, il n'en allait pas de même pour le caractère. Tellement de choses les avaient séparés au cours de leur vie, que parfois Bud doutait d'obtenir le pardon de son frère et d'arriver à avoir une vraie relation fraternelle avec lui. Pourtant ce n'était pas l'envie qui lui manquait d'avancer. Mais il y avait à son goût trop de regrets et culpabilité entre eux. Du moins de son point de vue, parce qu'il ignorait quelle était l'opinion de son jumeau sur le sujet. Il n'avait que les rares informations que Syd avait laissé filtrer durant leur combat contre le Phoenix.

« As-tu réellement toujours senti ma présence ? », questionna finalement le Tigre Blanc. Son frère tourna la tête et le fixa avec un léger sourire pendant de longues secondes, qui s'écoulèrent comme de longues minutes pour Bud.

« Bien sûr. Pourquoi aurais-je menti ? », répliqua calmement Syd, bien qu'étonné que son frère aborde ce sujet-là. Après tout n'avaient-ils pas tout fait jusqu'ici pour éviter d'en parler ? « Je n'avais aucune raison de mentir au vu de la situation. », ajouta-t-il lentement.

Bud se contenta d'acquiescer. C'était logique en soi. À quoi aurait servi de mentir aux portes de la mort ? Le Tigre Blanc n'avait jamais vraiment prêté attention aux mimiques de son jumeau alors qu'il veillait tapi dans l'ombre, totalement invisible et inexistant. Il avait suivi aveuglément les ordres d'Hilda alors possédée. Il avait plus ou moins protégé Syd, avant d'attendre sa mort pour lui voler sa place de Guerrier Divin. Il n'en était pas fier aujourd'hui. Et il comprenait la colère d'Ikki face à ce comportement. Pour le peu qu'il en avait vu, le Phoenix serait mort pour son frère sans l'ombre d'un doute. L'inverse était vrai aussi. De toute évidence les liens du sang et fraternels étaient sacrés aux yeux du guerrier d'Athéna. Et Bud enviait aussi cette aisance à aimer son frère, qu'il peinait encore un peu à ressentir. Ô il aimait Syd. Il regrettait ses gestes et ses propos passés. Il ne doutait pas que leur lien n'avait jamais été totalement rompu. Il se demandait juste comment obtenir une rédemption peut-être peu méritée. Mais au fond le problème était plutôt sa propre culpabilité d'avoir compris trop tard ce qu'il ressentait vraiment pour son jumeau, au-delà de cette colère et jalousie derrière lesquelles il se cachait. Il devait se pardonner à lui-même. Et cela semblait plus compliqué que d'obtenir le pardon de Syd.

« Quand nous nous sommes rencontrés enfant dans les bois, j'ai compris. Tu me ressemblais tellement. Et tu as eu ce regard de compréhension face au couteau que je t'ai offert pour racheter la vie de ce lapin… Et le silence obstiné de nos parents face à mes questions n'ont fait que confirmer mes soupçons. Nous étions jumeaux. Ils avaient appliqué la loi d'Asgard. Et je m'en suis voulu d'avoir eu plus de chance que toi. », raconta lentement Syd tout en regardant à nouveau le paysage légèrement enneigé au loin. Il y avait une forme de tristesse dans sa voix. « Puis j'ai imaginé ce qu'aurait été ma vie, notre vie, si personne ne nous avait séparés. Je ne savais pas comment te rejoindre. On ne me laissait pas beaucoup de liberté et de temps libre. Je crois qu'ils avaient compris que s'ils relâchaient leur surveillance, je filerais directement te rejoindre. Et ils redoutaient les conséquences pour nous deux… Mais cela ne changeait rien au fait que j'imaginais ce que je pourrais te raconter, ce que pourraient être nos jeux, quelle relation fraternelle on aurait eu… Si cela m'a consolé un temps, ensuite ces rêveries m'ont fait ressentir un immense vide. Jusqu'à ce que notre Reine ne me donne l'Armure Divine. Et là j'ai senti ta présence dans les ténèbres du palais. Et j'ai compris que nous étions enfin réunis. Je rêvais que tu sortes de l'ombre, de te parler… Mais je ne pouvais pas. J'ignorais ce que tu en pensais, toi. »

Un nouveau silence s'installa. Syd laissa le temps à son frère d'assimiler ses propos. Il espérait que Bud sentirait toute la sincérité qu'il mettait dans ses mots en cet instant. Cette relation fraternelle il en avait rêvé quasiment toute sa vie. Alors même si c'était encore balbutiant et par moments compliqué entre eux, il ne désirait pas la perdre à nouveau. Ce serait invivable maintenant qu'ils avaient eu l'occasion de se parler pour de vrai. Syd ne comptait pas reculer, revenir en arrière. Et la seule chose qui pouvait briser leur fraternité nouvellement ressuscitée était la culpabilité de Bud. Alors même si les mots et les émotions n'étaient pas forcément son point fort, le Tigre Noir essayait vraiment de reconstruire leur lien. Ils avaient l'immense chance de pouvoir réécrire leur histoire. Et la reine Hilda leur accordait le droit de vivre en plein jour tous les deux, de servir Asgard de concert. Elle envisageait même de modifier la loi sur les jumeaux… Mais il fallait que Bud commence à se pardonner.

« J'ai été odieux et injuste avec toi… », murmura Bud après de longues minutes à observer son frère avec attention. « Je voulais ta place. J'ai laissé Andromède te blesser mortellement. Les choses que j'ai dites après… Crois bien que je le regrette, mais… » Il ne savait pas comment expliquer ou justifier ce qu'il avait fait.

« Je ne t'en veux pas. Je ne t'en ai jamais voulu. », rétorqua Syd avec une certaine douceur. « Tu es mon frère, mon jumeau. Ce lien surpassera toujours le reste. »

« J'étais jaloux de toi, en colère. Je t'ai laissé te faire tuer sous mes yeux… Comment peux-tu me pardonner si facilement ? », questionna Bud douloureusement. La réponse pourrait le faire souffrir. Il le savait. Mais il avait besoin de comprendre pour aller de l'avant, pour gagner sa rédemption face à son jumeau.

« Parce que je t'ai toujours compris. », répondit Syd avec sincérité. Le froncement de sourcils de Bud le fit sourire légèrement. « Crois-tu que si les rôles avaient été inversés, si j'avais été à ta place je n'aurais pas été jaloux de toi, de ta vie ? Crois-tu que j'aurais mieux accepté de vivre dans l'ombre, d'être inexistant et de te regarder avoir une vie confortable ? Ne réponds pas. Tu risques de me rendre meilleur que je ne le suis. »

« Peut-être mais… C'est moi qui ait eu cette vie. Et même si tu comprends, tu as le droit de m'en vouloir. Alors pourquoi autant de clémence et d'affection envers moi ? » C'était plus fort que lui, Bud avait besoin de comprendre.

« Parce que tu es mon frère. » La réponse était simple et efficace. « Nous avons commis des erreurs. Nous avons une nouvelle vie, et ce lien que je chéris tant, je peux aujourd'hui le vivre et le construire avec toi. Cela me suffit. Ce ne sera peut-être pas facile tous les jours, mais nous méritons de vivre et d'être heureux, mon frère. Et dans mon cas cela passe par ce que je peux partager avec toi. »

Bud prit quelques minutes pour assimiler les mots de son jumeau et surtout leur impact sur lui-même. Bien sûr qu'il s'en voulait du mal involontaire qu'il avait fait à Syd. Ou plutôt de pensées nées de sa jalousie. Et bien sûr qu'il enviait le Phoenix et Andromède d'avoir ce genre de relation fraternelle et fusionnelle. Mais pour la première fois, il accepta l'idée qu'il pouvait avoir cela aussi avec Syd. Les choses étaient différentes maintenant. Et si son frère pouvait lui pardonner, alors pourquoi ne pourrait-il pas se pardonner à lui-même ses erreurs ? Il ne pouvait faire que mieux. Le Tigre Blanc bougea pour faire face à la forêt et s'appuyer à son tour contre le bord de la muraille, aux côtés de son frère. Il n'avait plus à se cacher de toute manière. Il pouvait exister. Il en avait le droit. Tout comme il avait le droit d'avoir une famille, incarnée par Syd.

« Un jour je te montrais l'endroit où j'ai grandi et où je me suis entraîné. », déclara-t-il. Il n'était pas toujours doué avec les mots, mais il offrait une preuve de confiance à son jumeau.

« J'en serais enchanté. », répondit Syd avec un grand sourire. Apparemment, et ce malgré la séparation, ils étaient aptes à se comprendre avec peu de mots.


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