Chapitre 18
De leur côté, Améthyste et John poursuivent leur découverte du territoire. S'émerveillant de son sublime décor à chaque pas, ils ignorent qu'ils sont suivis par la jeune Pocahontas. Alors qu'ils arrivent aux abords d'une cascade et de son court d'eau, John décide de se poser un temps pour se rafraîchir. Au baissement de sa garde, Améthyste se tourne vers les arbres pour assurer leurs arrières.
Il fait confiance aux Indiens pour ne pas les attaquer sans véritables motifs, il se montre prudent concernant les animaux sauvages, qui pourraient prendre leur intrusion sur leur territoire comme une agression.
Son impossibilité de se transformer devant John, ne sachant pas s'il garderait son secret, lui complique davantage la tâche.
Et ne parlons pas de ma capacité à parler aux animaux! grimace-t-il. Je passerais pour un fou bon pour le bûcher ou une autre mort tout aussi douloureuse!
John entraperçoit Pocahontas dans le reflet du courant, sans reconnaître la forme d'une femme. Croyant qu'une attaque a lieu, il décide de retourner l'embuscade. Il parvint à se glisser derrière la cascade sans faire de bruit tout en s'armant.
Quand Améthyste se retourne, pour voir ce qui prend tant de temps à son ami, John a disparu.
-John? appelle-t-il.
Le bruit de la cascade couvrit son cri pour le capitaine.
-John!
Inquiet qu'il soit tombé à l'eau et qu'il ait été emporté par le courant sans qu'il ne se soit rendu compte de rien, Améthyste cache son arme dans un gros buisson, transforme ses jambes en queue de poisson et plonge.
Pocahontas, dissimulée, entendant le bruit de l'eau, craint que le beau capitaine ne soit tombé dans la rivière, sort de sa cachette. Elle s'engage sur les rochers devant la cascade, espérant qu'il soit parvenu à s'accrocher à l'un d'eux.
John la voit à travers la chute d'eau, qu'il traverse d'un bon, arquebuse au poing, prêt à tirer. Il découvre alors pleinement Pocahontas, à travers la brume de l'eau et est totalement ébloui. Aucun d'eux n'ose bouger. Se fixant. Se contemplant.
John est le premier à bouger. Il s'accroupit pour poser son arme et s'avancer vers la belle indienne. Celle-ci prend brusquement peur et s'enfuit à travers les bois, John à sa poursuite.
-Attend! Je t'en prie! l'interpelle-t-il alors qu'elle s'apprête à franchir une rivière.
Elle se fige.
-Non, ne t'en va pas. l'implore-t-il. Ne craint rien. Je ne te ferai aucun mal.
Il lui tend la main.
-Je t'en prie, il faut que tu reviennes.
Méfiante, Pocahontas lui répond dans sa langue.
✵Non, cela ne fonctionnera pas ainsi. Sans se comprendre, vous ne parviendrez pas à vous entendre✵ entend-elle Mère Nature.
Pocahontas n'en revient toujours pas qu'elle puisse enfin directement l'entendre.
-Tu ne comprends pas un mot de ce que je te raconte. sourit, amusé, John.
Elle comprend enfin ce que lui dit le bel étranger. Elle remercie Mère Nature pour ce présent fort utile.
-Ne crains rien. la rassure-t-il.
Incertaine, Pocahontas fixe la main qu'il lui tend. Elle sent son cœur battre la chamade, des papillons voletant dans son estomac, mais elle ignore si c'est le fait de faire quelque chose d'interdit, que personne n'a encore jamais fait ou autre chose.
✵Vas-y...✵ murmura encore Mère Nature à son oreille.
Elle redresse la tête vers ses yeux et son sourire rassurants, prenant finalement sa décision. Elle saisit la main, le laissant la ramener sur la terre ferme. Au contact, son cœur semble éclater de bonheur. Elle se sent bien.
-Quel est ton nom? lui demande-t-il.
-Pocahontas.
-Quoi? Qu'est-ce que tu as dit?
-Mon nom est Pocahontas.
-Moi, c'est John Smith. se présente John, heureux que son interlocutrice parle sa langue.
Améthyste, de son côté, est épuisé et apeuré. Il avait tout suivi et remonté tous les courts d'eau, il avait volé sur autant de zones qu'il pouvait et il n'avait toujours pas retrouvé John. Abattu, il retourne au camp, prêt à demander l'aide d'une escouade de recherche.
De plus, tous les animaux interrogés n'ont pu lui fournir de réponses satisfaisantes.
Alors qu'il perçoit de loin le bruit de ses camarades, un autre murmure capte son attention.
-Il y en a au moins trente de plus du côté de la crête.
-Ils sont donc plus d'une centaine.
Prenant la forme du seul animal qu'il ait croisé jusqu'à présent sur cette terre, il s'approche à petit pas des deux voix. Il surprend alors deux Indiens en train de surveiller ses camarades.
Il est prêt à faire un pas de plus quand il aperçoit une sorte de tâche de vin visible entre les omoplates d'un deux hommes, mais à demi dissimulée par ses cheveux. En reposant sa petite patte, il écrase une branche, dont le bruit fait immédiatement tourner la tête des deux Indiens vers lui, méfiants.
Ils soufflent de soulagement en découvrant un simple raton-laveur.
-Que fais-tu si proche de tout ce bruit, petit gars? Toi et les tiens êtes beaucoup plus craintifs, d'habitude.
-C'est peut-être encore un tout petit, curieux et courageux, qui n'a pas encore la notion du danger.
Trois ans plus tôt, Améthyste avait demandé à Vent de rendre le présent d'Aster à son propriétaire, devant la plupart du temps être torse nu pour effectuer différents travaux sous le soleil hawaïen. Il se refusait que l'un ou l'autre homme (ou pire Ratcliffe lui-même!) ne tente de lui arracher par la force, comme il n'a guère envie de se faire interroger sur sa provenance.
Sans le bijou à son cou, Améthyste est bien incapable de comprendre ce que les deux hommes disent. Ce qui n'est pas grave, étant totalement envoûté par les yeux et la beauté de l'homme à la tâche de vin. Il ne sait pas s'il l'a imaginé, mais il lui semble entendre le rire de Mère Nature. Sa contemplation et leur discussion sont interrompues par un aboiement strident: Percy, le chien de Radcliffe.
-Des sauvages! Aux armes, c'est une embuscade! Aux armes! Que tout le monde prenne une arquebuse!
Améthyste reprend ses esprits, s'empressant de se mettre à couvert, pour reprendre forme humaine et calmer le jeu avant que tout ne s'envenime. Malheureusement, il n'est pas assez rapide, tout va trop vite: les colons font feu sur des ennemis invisibles. Améthyste est sûr d'une chose, désormais: Il doit se montrer avant que les Indiens ne révèlent leur présence.
-Feu!
-Attendez! Arrêtez! Ce n'est que moi! crie-t-il.
Au même instant, il entend un des deux hommes, à proximité, haleter douloureusement. Il espère qu'aucun des deux n'a été touché, sinon pas gravement, et que sa voix a couvert son cri.
Il lève ses mains hors du buisson, dévoilant leur blancheur, avant de sortir sa tête. Il ne se redresse pleinement, confiant, que quand il entend les Indiens s'enfuir et les tirs cesser.
-Colombe? Mais vous ne pouvez pas vous manifester, comme tout le monde, plutôt que d'approcher en catimini et de déclencher une fausse alerte! le réprimande Radcliffe.
-Je me suis manifesté! proteste-t-il. C'est bien pour cela que votre chien a hurlé à la mort!
-Peu importe. Où est Smith?
-Nous avons été séparé, monsieur. En nous frayant un passage dans les branchages, nous avons dérangé un groupe d'étranges animaux, qui nous ont attaqué. Nous avons préféré prendre des chemins différents pour les égarer. Il devrait nous rejoindre sous peu, j'ai pris le chemin le plus direct. ment rapidement Améthyste.
-J'espère bien, car si ce n'est pas le cas, nous devrons envoyer une équipe à sa recherche.
-Cela ne sera pas nécessaire, je vous l'assure.
Pour toute réponse, Radcliffe lui adresse un reniflement méprisant, avant de se détourner. Renaud rejoignit Améthyste.
-Et où est vraiment John? Et ne me sert pas ton histoire, je reconnais ce regard, quand tu caches quelque chose.
En quatre ans, l'amitié unissant Renaud et Améthyste permet au premier de bien connaître le second. Est-ce du au fait qu'il soit le dernier fils d'une aussi grande famille que la sienne ? Possible, mais ça, Améthyste ne l'a jamais su, malgré ses nombreuses questions.
-Je n'en ai aucune idée. Je surveillais les bois pendant qu'il se rafraîchissait à un court d'eau et quand je me suis retourné, il n'y avait plus personne.
-Tu l'as cherché?
-Bien évidemment!
-Bon. Cela me fait mal de le dire, mais on va suivre ce qu'a décidé Radcliffe. John est un débrouillard. S'il n'est pas revenu demain matin, on ira à sa recherche.
Améthyste jette un dernier regard aux bois, repensant au bel Indien, espérant qu'il n'a pas été blessé par les tirs.
