Un chapitre cette semaine, mais certainement pas la semaine prochaine.

Parce que cette semaine, c'est l'Eurovision ! (Et qu'il y a des priorités dans la vie. Comme l'Eurovision)

D'ailleurs, voilà quelques conseils (non exhaustifs) de visionnage :

Si tu ne dois en voir qu'un : Cha cha cha de Kaarija (je préfère ne rien dévoiler de cette incroyable performance. Tu aimeras, tu n'aimeras pas, mais tu ne resteras pas indifférent, promis !)

Les prestations "mais qu'est-ce que je viens de voir ?" : Mama SC de let 3 (des punks croates cinquantenaires avec une chanson sur les tracteurs), Samo mi se Spava de Luke Black (tu aimes les mécha, l'électro planante et les gars qui chuchotent ? C'est pour toi [et c'est pour moi] - "Game Over Bitch")

Les plus belles ballades à voix de cette année : Watergun de Remo Forrer et Bridges d'Alika

Pour s'ambiancer : Carpe Diem de Joker Out (à la fin de la chanson, tu seras capable de chanter en slovène. En yaourt, certes, mais en yaourt slovène) et Unicorn de Noa Kirel (tu ne le sais pas encore, mais tu veux la voir danser)

Ceux qui ne sont pas en final et qui vont me manquer : Aija de Sudden Lights et Gladiator de Jann (3 3 3)

Et maintenant, moins d'Eurovision et plus de fanfiction !


Étalé sur son lit, Drago ressassait. Soudain, un « pop » provenant de son salon retentit, l'extirpant de ses pensées. Le son caractéristique de l'apparition d'un elfe de maison.

Il songea à se lever, avant de renoncer. Sombressence, enroulé sur son torse, n'aurait pas apprécié.

Et il n'en avait ni l'envie, ni la force. Alors, il resta immobile, le temps glissant doucement sur lui au rythme de sa respiration.

Mais l'intrus ne l'entendait pas de cette oreille. Derrière la porte, des pas s'agitaient.

– Tu peux entrer, Smooch, finit-il par dire d'un ton vaguement ennuyé.

L'elfe ouvrit la porte avec précaution, ne laissant passer que le haut de sa tête par l'entrebâillement.

– Maître, je suis désolé de vous déranger mais il y a un moldu en uniforme qui vous demande au portail principal. Et j'ai pour ordre général de ne pas me montrer devant des moldus...

– Un moldu ? s'étonna Drago. Pour moi ?

L'elfe hocha la tête avec frénésie.

– C'est ce que le moldu a dit à Smooch.

Le jeune homme fixa le plafond. Peut-être que s'il attendait que ça passe… Dans l'encadrement de la porte, Smooch le fixait, sa tête oscillant de manière étrange. Certainement parce qu'il devait être en train de se dandiner d'un pied sur l'autre.

Drago soupira en s'extrayant du lit, arrachant la chatte noire de sa robe. Celle-ci, manifestement en colère, feula de mécontentement en griffant le couvre-lit.

Un homme attendait effectivement à la grille devant un véhicule moldu d'un rouge pimpant, une main nonchalamment enfoncée dans sa poche. Par-dessus une chemise bleue, il portait une veste de la même couleur que le véhicule, avec un écusson en forme de couronne, et il semblait très intéressé par le manoir Malefoy. Il tordait la tête en tout sens afin d'en voir le plus possible malgré l'épaisse haie arborée. Drago tenta de ne pas s'offusquer face à ce manque flagrant de savoir-vivre.

L'individu en uniforme salua Drago avec un immense sourire joyeux.

– Bonjour ! Vous êtes monsieur Drago Malefoy ?

– Lui-même, répondit-il avec méfiance.

– J'ai du courrier pour vous. Normalement, je m'arrête pas pour donner un colis de cette taille en main propre, mais comme vous avez pas de boîte aux lettres… Je n'étais même pas complètement sûr que je me trouvais à la bonne adresse, vous qu'il n'y a pas de numéro sur votre maison et que c'est la première fois que j'ai quelque chose à votre nom. Et puis, c'était l'occasion ou jamais de jeter un coup d'œil à ce bâtiment. Il est magnifique ! Ça me ferait bien plaisir de rentrer pour le voir de plus près. Les collègues vont jamais me croire quand je vais leur dire que j'y ai livré du courrier !

Drago le fixait d'un regard noir, se demandant s'il allait finir par se taire.

– Si vous avez quelque chose à me donner, donnez-le-moi, qu'on en finisse.

– Euh… Oui, oui, bien sûr. Tenez.

À travers les barres de fer, il glissa un paquet enveloppé d'un papier marron et décoré de rectangles de mauvais goût. Dessus, il était en effet marqué « Drago Malefoy ». Ce dernier plissa les yeux et repartit rapidement en direction de sa chambre, ignorant superbement la dernière tentative de dialogue du moldu qui s'exclama dans son dos :

– Bonne journée, monsieur. Ça a été un plaisir de vous rencontrer !

Une fois à l'abri dans ses appartements, et après avoir ordonné à Smooch de ne pas parler de cet évènement à qui que ce soit, il arracha le papier qui recouvrait le paquet et découvrit un carnet très peu épais. Il en souleva la couverture et y découvrit un message écrit à son attention :

« Tu tiens entre tes mains notre nouveau moyen de communication. Le principe est simple. Chacun de nous a un Carnet. Quand j'écris sur le mien, le texte apparaît aussi sur le tien. Et réciproquement. Les deux premiers feuillets sont pour mon usage, les deux derniers pour toi. Les règles du jeu sont les suivantes. C'est moi qui écrit en premier. Moi qui te fais des demandes et te donne des ordres. Toi, tu ne l'utilises que pour me répondre. Et juste le strict nécessaire. Chaque mission accomplie te donnera le droit de venir me voir. Ce qui a été écrit disparaît automatiquement au bout de deux jours. Tu peux effacer tes propres mots, en les barrant d'un trait, mais tu ne peux pas effacer les miens. Et réciproquement. »

Drago se saisit d'une plume et se rendit à la dernière page pour inscrire de son écriture la plus soignée : « Luna, j'accuse bonne réception du colis que tu m'as envoyé. J'ai lu et compris tes consignes. Je reste dans l'attente de tes ordres. »

À l'idée que les mots qu'il venait d'inscrire étaient en train d'apparaître chez Luna, Drago se sentit un peu plus léger. Mais le sorcier se figea quand la voix de Smooch perça sa petite bulle de sa voix aiguë :

– Je crois que c'est la première fois que je vois ce genre sourire sur votre visage, maître. Ça fait me fait chaud au cœur.

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À l'autre bout de la ligne, Luna sourit.

Assise par terre, penchée sur un cahier à dessin et entourée de livres dont les images l'inspiraient, Luna esquissait la scénographie d'une prochaine cérémonie d'Hécate quand, en relevant un instant les yeux, elle avait aperçu les nouvelles écritures qui couvraient la dernière page de son Carnet Jumelé.

L'envoi de celui de Drago avait été une vraie aventure pour elle. Accompagnée de James, un ami moldu qu'elle avait rencontré à ses cours de poterie, elle était entrée pour la première fois dans un bureau de poste et avait été initiée aux arcanes complexes de l'affranchissement du courrier.

Elle se plut à imaginer la réaction Drago lors de la réception de ce courrier envoyé de manière si peu sorcière.

Une des craintes de Luna était que le colis ne parvienne pas à son destinataire. Qu'il soit perdu. Ou purement et simplement refusé par le destinataire.

Mais tout indiquait que ses craintes ne s'étaient pas réalisées.

Avait-il été surpris à en perdre ses mots ? Ou au contraire, étonné au point de se mettre à débiter des phrases sans queue ni tête ? Et si c'était un de ses parents qui avait réceptionné le courrier ?

Tous les scénarios que son imagination déroulait plaisaient à Luna. Elle espérait juste que Drago n'avait pas transformé l'agent de la poste en ver de terre ou quelque chose du même acabit.

Maintenant, il ne lui restait plus qu'à décider quelle épreuve elle allait tout d'abord imposer à Drago.

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Drago souleva la couverture du carnet, pour ne découvrir qu'une page vierge de tout message. Aussi pure et intacte que les huit autres fois où il l'avait regardée aujourd'hui. Cette fois, il ne soupira pas, même si son éclat d'espoir s'était mué en déception diffuse, et il rangea le cahier à la place qu'il lui avait attribuée. La prochaine fois, peut-être...

Drago conservait le cahier dans un tiroir de sa table de chevet, celui qui fermait à clé. La tentation était grande de le trimballer partout avec lui, mais il ne voulait pas attirer l'attention sur le cadeau de Luna et encore moins devoir expliquer ce que c'était ou d'où il provenait.

Mais ne pas l'avoir sous la main en permanence créait une autre crainte en lui, celle de louper un message ou de le découvrir trop tard. Le besoin de vérifier l'apparition ou non d'une inscription ne le quittait jamais. Il était parfois si pressant, si urgent, qu'il l'envahissait complètement, ne laissant pas de place pour quoi que ce soit d'autre dans son esprit.

Alors, il s'inventait mille excuses pour se rendre dans ses appartements, multipliant les aller-retours en tentant de ne pas paraître suspect.

Mais Luna semblait décidée à le faire patienter.

Pour le torturer ? Parce qu'elle l'avait oublié ? Parce qu'elle ne savait pas quelle tâche lui donner à faire ? Parce qu'elle s'occupait d'autres personnes et qu'elle n'avais pas de temps à lui consacrer ?

Chaque nouvelle interrogation chassait la précédente, sans jamais le laisser en paix.

Finalement, il s'imposa une routine. Il s'autorisait à regarder le carnet à son réveil et le soir, avant de se coucher. Luna lui avait indiqué que les messages restaient inscrits pendant deux jours. En ouvrant le cahier deux fois par jour, il n'y avait donc pas de raison qu'il manque la moindre information.

Pour tenter de domestiquer sa crainte, il s'interdit de se rendre dans sa chambre spécifiquement pour consulter le carnet. L'envie le démangeait parfois, mais il tint bon, ne se leurrant que rarement avec des excuses de piètre qualité.

De jour en jour, sa frénésie se calma et sa nouvelle routine devint une habitude.

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En prévision d'un week-end avec Ginny, Luna aménageait un peu son appartement. À dire vrai, il s'agissait plus de le déménager que de le ranger. Les bras chargés d'une lourde pile de livres, son regard se posa sur le carnet déposé sur le tabouret tournant qui lui servait de table de nuit. Il était fermé. Il l'était depuis plusieurs jours déjà.

Elle hésitait un peu sur la direction à prendre. Ou, plus exactement, elle savait ce qu'elle voulait demander à Drago, mais elle savait qu'il n'y aurait ensuite plus de retour en arrière possible pour lui.

Quand elle ouvrirait à nouveau le carnet pour y inscrire sa demande, elle rouvrirait en même temps un livre qu'elle avait fermé rapidement à la fin de la guerre, celui d'un passé noir.

Mais il était temps d'inspecter ces traces anciennes, voir si l'encre avait séché ou si elle avait continué à couler.

Lire aussi d'autres pages. Et avoir le point de vue d'autres lecteurs.

Luna déposa sa pile de livres sur la courtepointe arc-en-ciel jetée en travers de son lit et se saisit de la plume la plus proche.

Il était temps de se jeter à l'encre.

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Drago avait eu une longue journée de travail. Il était resté à la boutique avec Poring Cythère après l'heure de fermeture afin de recoudre et réenchanter une Cape d'Éclat. Un vêtement transmis de génération en génération depuis des temps immémoriaux, censé rendre radieuse la personne qui s'en drapait, traditionnellement portée par les mariées de la famille Hummering. Malheureusement, avec le temps, le manque d'entretien et les mites, son éclat s'était quelque peu terni et ses capacités magiques s'étaient élimées, au grand dam de la femme qui avait apporté la pièce au magasin et dont le mariage approchait à grands pas.

Le raccommodage s'était bien mieux passé que ce à quoi s'était attendu Drago, Anthéa ayant réussi à dénicher une bobine mêlant crin de licorne et cheveux de Vélane. Mais personne n'avait encore réussi à reconstituer l'antique sortilège qui avait conféré sa puissance à la cape.

« Au moins, la mariée pourrait avancer vers l'autel dans un vêtement dépourvu du moindre trou » se dit Drago en tentant de voir le bon côté des choses.

Malgré tout, la frustration découlant de l'échec partiel de la remise en état le minait. De retour chez lui, il s'autorisa un peu de repos avant le repas du soir.

Il se laissa tomber sur sa couverture épaisse, le nez planté dans son coussin et les bras largement étendus. Le bout de ses doigts effleura le bois de sa table de chevet. L'image du carnet s'imposa à son esprit. Grognant et soupirant contre lui-même, Drago s'assit au bord de son lit. Frustré pour frustré, il pouvait bien vérifier si Luna lui avait écrit.

Il souleva la couverture et ses yeux s'agrandirent.

Elle lui avait écrit.

« Drago, tu as vécu la guerre. Je l'ai vécu aussi. Et tous ceux qui t'entourent l'ont aussi vécu. Voilà ce que j'attends de toi : parle de la guerre avec quelqu'un avec qui tu n'en as jamais parlé. Avec quelqu'un dont tu ne sais pas comment il a vécu cette période. Ce qu'il a vu, fait et traversé.

Confronte-toi au vécu de quelqu'un d'autre. »


Je suis très contente de Smooch !

Depuis le début, je voulais inclure un elfe de maison. Mais je ne savais pas quel rôle lui donner. Alors, je me suis contentée pendant longtemps de ne pas inclure d'elfe de maison dans ce texte.

Et un matin, j'ai eu l'idée de Smooch. Tout était clair dans ma tête, de son caractère à son impact sur l'histoire.

Je me suis alors empressée de le faire entrer dans le manoir Malefoy !