Titre : Le fil rouge du Destin
Auteur : Lysanea
Disclaimer : aucun personnage ne m'appartient sauf Simon.
Pairing et personnages pour ce chapitre : Shion x Dokho, Saga x Aioros, Shura x Angelo, Aiolia, Aphrodite, Milo, présence de tous les Ors.
Rating : T – M en fin de chapitre
Note : Bonjour à tous ! Merci aux fidèles lecteurs et désolée pour le retard !
Un merci particulier à Mini-Chan. J'espère que ce chapitre te plaira. Un peu de tes chouchouuux comme tu dis, mais je t'en promets bien plus aux deux prochains chapitres, j'en appelle encore a ta patience. Merci à toi !
/!\ ATTENTION : LEMON en fin de chapitre. /!\
Si cela ne vous plaît pas, vous pourrez arrêter votre lecture, cette scène termine le chapitre.
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Bonne lecture à tous !
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Le Fil rouge du Destin
Chapitre Seize : Nous avons part à la destinée des autres, nous sommes responsable les uns des autres. Liés indissolublement pour le bien et le mal.
(Charlotte Savary)
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Sanctuaire, Palais du Grand Pope
Salle de Réception
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Au bout d'une heure, la Déesse Athéna se retira dans ses appartements.
Cela ne sonna pas la fin du banquet pour autant, au contraire, Elle enjoignit ses Chevaliers à poursuivre les festivités, même sans Elle, aussi longtemps qu'ils le souhaitaient dans la nuit.
Les appartements privés, ceux de la Princesse comme ceux du Grand Pope, étaient suffisamment loins et isolés pour ne pas être importunés par le bruit des réjouissances.
Ce fut Aiolia qu'Athéna désigna pour l'escorter, et Elle profita du court trajet pour lui parler de son attitude envers Saga.
Sans lui faire aucun reproche et sans aucune pression, Elle lui expliqua simplement qu'Elle n'était pas intervenue auparavant pour respecter son besoin et son droit à la contestation.
Avec douceur et sans être moralisatrice, Elle lui exprima son opinion Saga avait énormément souffert, plus que quiconque en ce monde, à l'exception de Shion.
Personne n'était capable de mesurer la douleur qui avait manqué de le détruire.
Ainsi, Elle aida le jeune Lion à réaliser cet état de fait et lui demanda alors de réfléchir : cela faisait plus d'un an et demi, maintenant, qu'il menait une véritable vendetta contre Saga. Le temps n'était-il pas venu d'enterrer la hache de guerre ?
Ou, au moins, de commencer à creuser le trou pour l'y placer ?
Qu'il cessa même simplement de la brandir à tout va constituerait un premier pas encourageant…
Sur cette dernière réflexion, la Déesse permit à son Chevalier de se retirer et de rejoindre ses compagnons, ce que fit Aiolia, songeur tout du long.
En arrivant dans la salle de réception, il avait pris sa décision.
D'une certaine façon, il n'avait pas le choix.
Saga serait bientôt son Grand Pope, il ne pourrait se permettre plus longtemps cette attitude.
Certes, il n'était pas obligé de se lier à lui.
Mais il lui devrait respect et obéissance.
Aiolia avait pensé avoir perdu son respect et son admiration pour lui à jamais.
Pourtant, il les avait ressenti, aujourd'hui, à nouveau.
Ils étaient déjà revenus le titiller, à quelques reprises, ces derniers mois.
Mais les mots de Sa Déesse avaient aussi fait mouche.
Non, il ne pouvait pas mesurer l'ampleur de la souffrance éprouvée par Saga.
Mais pour la première fois, il arrivait à en tenir pleinement compte, et à réaliser l'enfer qu'il avait dû subir.
Lui qui avait traité son frère d'idiot, pour lui avoir pardonné si aisément, réalisait enfin qu'il avait été puéril et immature, beaucoup trop pour comprendre la situation.
Il voulait montrer à son aîné qu'il était adulte et responsable, pourtant, il avait réagi et agi comme un gamin, tout ce temps.
Avec un soupir, Aiolia balaya l'espace du regard à la recherche de Saga.
Il s'arrêta un instant sur un groupe où la concentration de blonds était élevée, mais aucun d'eux n'était celui qu'il cherchait.
- Tout va bien ? l'interrogea Dokho en posant sa main sur son épaule.
- Oui, rien à signaler, la Princesse Athéna est dans ses appartements et ils sont bien gardés, répondit Aiolia en se tournant vers lui.
- Je le sais, idiot ! Je parlais de toi. Tu m'as l'air un peu perdu.
Décidément…
- Je cherche Saga.
- Ah ? Je dois m'en réjouir ou m'en inquiéter ?
- Vieux Maître…
- Aiolia, le coupa Dokho, soudain grave, en posant une main sur son épaule qu'il serra fermement, ne gâche pas la fête, s'il-te-plaît. C'est l'une des rares fois où Shion est réellement détendu et profite pleinement du moment, tu comprends ? Ne lui enlève pas ça.
- Soyez rassuré, Vieux Maître, je ne ferai jamais rien qui puisse vous nuire et je sais l'importance de cette journée et de cette soirée, pour vous. J'ai juste besoin de parler à Saga, il n'y aura pas un mot plus haut que l'autre. Si je ne peux me contenir, je me retirerais.
La Balance lui dédia un long regard, et ce qu'il lu de sincérité et de respect dans les yeux du jeune Lion fut suffisant pour le convaincre.
Il libéra l'épaule d'Aiolia de la pression de sa main et croisa les bras sur son torse.
- Saga est sorti prendre l'air sur la terrasse. Ton frère est avec lui.
- Merci, Vieux Maître.
Le voyant hésiter et à présent rassuré sur ses intentions, Dokho prit les devants.
- J'avais besoin d'Aioros, justement. Tu pourras lui dire de venir me voir ?
Aiolia leva un sourcil, pas dupe pour une drachme, puis secoua la tête avec un sourire.
- Je vous l'envoie.
- Merci bien !
- Merci à vous, Vieux Maître.
Aiolia se dirigea ensuite vers la terrasse et y entra en faisant volontairement résonner ses pas, pour ne pas surprendre le couple dans un moment intime.
Mais ses deux aînés, bien que très proches, se tenaient simplement côte à côte, Saga face à l'horizon et Aioros, dos à la balustrade.
Leurs deux visages se tournèrent vers lui à son arrivée.
- Grand frère, Dokho te cherche.
- Ah ? Il aurait pu m'appeler directement… s'étonna-t-il en tapotant sa tempe de son index.
- Je crois qu'il n'osait pas vous déranger.
- Contrairement à toi ? demanda le Sagittaire, sourcils froncés et poings sur les hanches.
Aiolia baissa les yeux, ne sachant pas vraiment quoi répondre à cette pique bien envoyée et parfaitement justifiée, vu sont attitude des derniers mois.
Saga posa une main sur le bras d'Aioros pour l'apaiser, ce qui fonctionna.
Il laissa échapper un léger soupir et se tourna vers lui.
- Tu m'excuses, je vais voir ce qui se passe directement ?
- Je t'en prie, répondit Saga. Je vais rester encore un peu ici.
- D'accord, alors à tout à l'heure, lui dit encore Aioros en embrassant rapidement sa tempe. Allons-y, ajouta-t-il en rejoignant son frère.
- Non, moi je… j'ai besoin d'air, moi aussi... je reste…
Aioros s'immobilisa, surpris.
Il fit aller son regard de son cadet à son compagnon, qui observait la scène sans bouger.
- ´Lia…
- Juste cinq minutes. S'il te plaît, Grand frère.
*Il n'est jamais venu de lui-même vers moi, c'est inespéré, 'Ros, laisse-le faire, lui transmis Saga en pensées. Il n'a pas l'air énervé, en plus, au contraire. C'est bon signe.
Malgré tout, je ne sais pas quelles sont ses intentions, je ne le perçois pas clairement.
Quoi qu'il ait à me dire, il vaut mieux que ça se passe ici, loin des autres. Ça va aller, aies confiance, mon amour.
- Bien, accepta-t-il de vive voix. J'espère que tu sais ce que tu fais, ´Lia.
Le cadet hocha la tête, et Aioros les quitta sur un dernier regard pour chacun d'eux.
Saga se replaça dos à l'horizon, cette fois, pour montrer qu'il était ouvert à toute discussion.
Il attendit patiemment qu'Aiolia se décide.
Celui-ci s'avança, tout en restant à distance, et observa le paysage qui s'offrait à sa vue.
Tout le Domaine sacré se déployait à leurs pieds, dans un subtil jeu d'ombres créé par les rayons argentés de la Lune, la lumière blanche des étoiles, si intense au-dessus d'eux, les flammes des torchères éparpillées un peu partout, l'ensemble animant et adoucissant la nuit d'encre.
Aiolia comprit alors le besoin qu'avait dû ressentir Saga de venir à cet endroit précis, ce soir-là.
- Tu réfléchis et tu te dis que tu ne mérites pas tout ce bonheur qui emplit ta vie, aujourd'hui, je suppose.
Il se mordit l'intérieur de la joue ce n'était vraiment pas la bonne approche !
Saga eut un petit sourire en coin qui rappelait fortement Kanon.
Mais il s'effaça bien vite au profit d'une expression plus grave, teintée de tristesse.
- Je devine que cela augmente ta frustration et ta colère à mon égard. Ce doit être vraiment difficile pour toi de devoir accepter de m'avoir pour Grand pope, comme cela a dû être éprouvant de ne pas intervenir, à l'annonce de Shion. Je te remercie d'avoir pris sur toi, Aiolia. Et je suis sincèrement désolé que tu aies à supporter cela.
Et il était sincère, en plus !
Aiolia serra les poings et les dents.
Il se souvint de ce que lui avait dit son frère, une fois : « Saga est un homme trop bon et trop pur pour l'ère qui l'a vu naître et le Destin qui lui a été tissé ».
- Je n'ai pas agi à contrecœur, je n'aurais pas fait cet affront à notre Déesse et à notre Grand Pope. J'étais sincère en acceptant la proposition de Shion. Il n'y a que toi pour penser que tu ne le mérites pas. Tant mieux, car nous avons ainsi l'assurance que tu feras tout ce qu'il faut pour t'en convaincre et de ce fait, tu ne failliras pas à la tâche honorable qui t'a été confié.
Sans rien ajouter de plus, il fit volte-face et quitta la terrasse.
Il en franchissait juste le seuil, lorsque les mots de Saga lui parvinrent.
- Merci, Aiolia.
Le Cinquième gardien se figea et serra les poings, une nouvelle fois.
La marque de ses ongles allait mettre du temps à partir, c'était certain.
Il repensa aux mots d'Athéna, à l'une de ses questions qui lui avait fait l'effet d'une gifle : avait-il seulement essayé de se mettre à la place de Saga, et s'imaginer Marine à la place de son frère ?
Cela paraissait évident, et pourtant non, il n'avait jamais essayé de voir les choses autrement.
Il avait toujours tout analysé selon son point de vue à lui, depuis sa position.
S'il avait pris le temps de penser aux autres et non pas systématiquement à sa propre personne, s'il avait pris la peine de sortir de sa position de martyr…
Personne ne lui avait jamais demandé de le faire, d'ailleurs.
Ni Saga, ni Aioros.
Ni même Shion, ou Dokho…
Peut-être Milo, à mots couverts.
Ils attendaient tous patiemment qu'il se rendit compte seul de son erreur, pour que cela ait un réel impact.
Quel idiot avait-il été !
Mais vraiment !
Alors non, à l'évidence, il ne pouvait pas se satisfaire de ce bref échange.
Mais comme c'était difficile de mettre son ego et sa fierté de côté, et de reconnaître ses torts !
Surtout pour un Lion…
Enfin, ils n'étaient pas tous pour lui.
Saga avait très mal géré sa première réconciliation avec Aioros.
Mais il l'avait reconnu.
Il en avait l'intelligence, la maturité, ou peut-être était-ce tout simplement une de ses qualités.
Peu importait, au demeurant.
Et à la lumière de certains éléments maintenant à sa portée, Aiolia pouvait admettre que sans justifier son attitude, ils pouvaient l'expliquer.
Après une longue inspiration, il fit demi-tour et revint sur ses pas.
Saga l'observa, alors qu'il revenait s'accouder à la balustrade, à bonne distance, toujours.
- Si un être maléfique m'avait possédé et fait tuer le Grand Pope et Marine, et m'avait fait lever la main sur la Princesse Athéna… j'aurais passé ma vie à essayer de mourir.
- Il ne m'a pas laissé faire.
- Je sais. Je pense alors que je serais devenu fou, et que cette folie aurait consumé le peu de conscience qu'il me restait, et au final, jusqu'à mon âme. Tu es incroyablement fort, Saga. Et j'ai enfin compris pourquoi tu l'étais. Tu n'as pas retenté de te donner la mort, durant toutes ces années qui ont suivi. Tu es resté et tu t'es battu pour nous protéger, nous, et le Sanctuaire, et le monde, chaque fois que c'était possible, à chaque petite victoire accordée où tu reprenais le dessus.
- Cela ne durait malheureusement jamais assez longtemps pour vous éviter le pire. Je n'étais pas fort, Aiolia, du moins, pas suffisamment. Tu as terriblement souffert par ma faute.
- Ce n'était pas toi.
C'était la première fois qu'Aiolia le reconnaissait et l'exprimait clairement.
- Je n'ai pas pu l'arrêter.
- Alors personne d'autre n'aurait pu non plus.
Le silence se fit, quelque peu tendu.
Saga était surpris par les mots d'Aiolia, par leur échange calme, même s'il avait l'impression que le Lion pouvait exploser à tout moment. C'était comme s'il regardait une cocotte minute sous pression, dont le bouton tournait lentement en sifflotant doucement, jusqu'au moment où il s'emballait et se mettait à siffler bruyamment jusqu'à l'ouverture et la libération.
Malgré tout, ses propos étaient suffisamment encourageants pour Saga, qui décida de s'engouffrer dans la petite porte qu'Aiolia avait ouverte dans sa forteresse, rétablissant la communication entre eux.
- Je ne peux pas me permettre de demander ton pardon, Aiolia, mais pour cette partie-là de la longue liste de griefs que tu as contre moi, puis-je espérer que tu acceptes de tourner la page ?
Le Lion le regarda pour la première fois dans les yeux.
- Tu te contenterais de cela ?
- S'il le faut, acquiesça le Gémeau. Ce serait déjà un premier pas. Je compte sur le temps pour guérir tes blessures et apaiser enfin ta souffrance.
- Que sais-tu d'elles ?
- Je n'ai aucune certitude à leurs sujets, évidemment et je ne prétendrai pas savoir avec exactitude ce que tu ressens et vis. Je sais seulement que tu aimes profondément ton frère, ta colère et ta rancœur sont tout à fait légitimes. J'ai blessé l'être le plus cher à tes yeux, c'est impardonnable.
- Grand frère t'a pardonné, lui.
- Je ne me l'explique que par sa pureté et sa bonté d'âme. Et bien sûr, l'amour inconditionnel et déraisonné qu'il me porte.
Les yeux de nouveau fixés sur l'horizon devant lui, Aiolia se mordit la lèvre.
- Ce doit être douloureux d'être aimé si fort, quand on pense être le pire être humain qui soit.
- Oui, répondit sobrement Saga.
- Si, après l'avoir mise à mort, Marine réapparaissait des années plus tard et m'accordait son pardon et son amour, je ne le supporterais sûrement pas. Je pense que simplement croiser son regard amoureux me déchirerait le cœur et l'âme. Et probablement que je serais terrorisé à l'idée de la blesser encore. A l'idée qu'elle gâche sa nouvelle vie en restant près de moi... surtout en ayant une si piètre opinion de moi-même et remettant même en cause mon droit à l'existence… Comment… comment as-tu fait pour surmonter cela ? demanda-t-il en serrant la rambarde à s'en blanchir les jointures des doigts.
Ou à pulvériser le marbre à la solidité légendaire.
Un petit rire bref et amer résonna.
- Je n'ai pas vraiment réussi, tu en conviendras.
- Certes, reconnut Aiolia en grimaçant.
Saga lui dédia un long regard, puis se décida.
Aiolia était enfin ouvert au dialogue, la porte qu'il avait ouverte ne s'était pas refermée, alors autant en profiter et pénétrer plus avant.
C'était enfin l'occasion d'avancer vers une réconciliation, peut-être.
Alors, l'aîné des Gémeaux accepta d'ouvrir à son tour une petite porte, menant directement à son cœur.
- J'ai craqué parce que ton frère me manquait trop et que mon amour pour lui me dépassait totalement. Il m'a été arraché, alors que je ne lui avais jamais dit que je l'aimais, avant même d'avoir osé lui voler un baiser, ou d'avoir simplement effleuré sa peau sans un prétexte quelconque. Cette nuit-là, lorsque nous nous sommes unis pour la première fois, c'était notre revanche sur l'existence et le Destin, et on s'est aimé si fort, que je m'en suis terriblement voulu. J'étais persuadé que j'allais encore gâcher sa vie et tout détruire de sa nouvelle chance. Je voulais vraiment qu'il passe à autre chose, peu m'importait ma souffrance, je la méritais. J'étais résolu à expier mes fautes de cette façon. J'ai cru sincèrement qu'il serait plus heureux loin de moi. Et puis, j'ai fini par ouvrir les yeux.
- Comment ?
- A force de ressasser les paroles d'Aioros, celles de mon frère, et celles d'Athéna, et de voir la souffrance d'Aioros. Je n'y étais pas indifférent, tu sais.
- Mais tu t'en fichais, c'est l'impression que tu donnais.
- Ce n'était pas le cas. Je la pensais simplement temporaire. Mais j'avoue avoir été quelque peu égocentrique. Car cette solution que je nous ai imposé à tous me convenait à moi, qui tenait tant à me punir. Mais j'ai fini par me poser la bonne question : qu'en était-il réellement d'Aioros ? J'ai alors accepté que j'étais le seul à pouvoir le rendre heureux. J'avais ce pouvoir. Tout comme il avait celui de me réconcilier avec mon passé. Quoi qu'il se passe, nous étions liés envers et contre tout. Je savais que je ne pourrais jamais l'oublier, car je n'ai jamais cessé de l'aimer, même en le croyant mort. Alors c'était évident qu'il voyait les choses de la même façon. Lui non plus ne pourrait jamais cesser de m'aimer, cet amour est inscrit dans nos âmes.
- Je vois.
- Notre séjour en Italie me l'a encore prouvé, poursuivit Saga avec un doux sourire presque nostalgique. Même amnésique, même en construisant une autre vie où il a été tellement heureux et aimé… il n'a jamais cessé d'attendre et d'espérer qu'on se retrouve. Car telle est notre Destinée, inscrite dans les étoiles.
Le silence se fit à nouveau, moins tendu, cette fois-ci.
- J'ai une dernière question, si tu permets.
Saga aurait bien fait une réflexion sur le fait qu'il soit si poli et disposé envers lui, mais il n'avait pas envie de se faire claque la porte tout juste ouverte au nez, alors il s'abstint.
- Je t'écoute.
Aiolia se tourna complètement vers son aîné.
- Quand tu as été libéré du Lémure, tu t'es donné la mort. Je comprends que le poids de tous les événements dont tu te sentais coupable était insupportable à porter. Mais nous, on avait besoin d'explications. On aurait voulu comprendre et panser nos plaies avec toi pour pouvoir te pardonner, être sûrs que ru n'y étais pour rien, avancer… Tu nous as laissé avec plein de questions et de morts sur les bras. C'était lâche, de ta part.
- Aiolia…
Le Lion leva la main entre eux pour l'interrompre.
- Je ne dis pas cela pour t'accuser ou te culpabiliser, mais pour expliquer la situation, à ce moment-là. Ce que tu as fait, cette attitude, cette lâcheté, cette décision, rien de tout cela ne te ressemble. Aujourd'hui que je te connais mieux et avec mon regard d'adulte, je peux l'affirmer. Alors pourquoi avoir fait ce choix terrible ?
Saga eut un petit sourire triste.
Sa main se posa naturellement sur son cœur, et Aiolia suivit naturellement son mouvement du regard ; l'ouverture de sa tunique laissait apercevoir la pointe de la flèche du Sagittaire symbolique tatoué sur sa peau.
- Je suis désolé pour cela, Aiolia. Athéna était bien protégée, je n'avais plus ma place auprès d'Elle. Et quand bien même, je n'aurais pas eu la volonté de vivre et de tenir ma place et mon rang, dans un monde où Aioros avait perdu les siens. Car plus que le pardon d'Athéna et le vôtre, je n'aurais pas supporté une vie sans Aioros, un monde où il n'existait plus. Je ne l'avais déjà que trop enduré. Cette existence n'aurait eu aucun sens, pour moi.
Aiolia fut tellement et si profondément touché par cette révélation et toute la charge émotionnelle que ses mots charriaient, que son cœur se serra dans sa poitrine presque douloureusement.
Pour la première fois, il prit l'entière mesure de l'amour que portait Saga à son frère.
En fait non, ce n'était qu'une infime part de celui-ci, réalisa-t-il tout aussi rapidement.
Le reste était au-delà de l'entendement humain.
Saga se détourna et s'accouda à la balustrade, les yeux perdus dans la nuit.
Il était plutôt pudique sur ses sentiments, alors cela n'avait pas été facile de se livrer ainsi et autant.
Seuls Athéna, Shion et Shura, ce dernier dans une certaine mesure uniquement, avaient eu droit a quelques-unes de ses confidences.
Il ne comptait pas Kanon, avec qui les mots étaient devenus de plus en plus inutiles, alors que leur lien gémellaire se restaurait.
Et l'ainé des Gémeaux n'aurait jamais pensé avoir ce genre d'échange si intime avec le Lion.
Mais Aiolia était en pleine prise de conscience, sûrement grâce à Athéna.
Alors c'était bien le moment de prendre un peu sur lui et de faire des efforts.
Sa relation future avec lui se jouait à cet instant précis, il en était persuadé.
- Je suis un idiot, n'est-ce pas ? demanda soudain Aiolia en soupirant.
Toute tension avait quitté son corps.
- Non. Tu es borné, impulsif, un tantinet justicier sur les bords, avec une forme de complexe du héros, mais idiot, je ne crois pas.
- Merci… grimaça-t-il, un peu heurté dans sa fierté par la liste de défauts établie par son aîné.
- Tu es aussi et surtout un formidable petit frère et un très grand Chevalier, Aiolia, parmi les plus exemplaires. Tu as perdu ton aîné très jeune, mais tu as su le maintenir en vie en suivant son chemin, ses valeurs et ses principes, en les transmettant aussi, envers et contre tout, serrant les dents et encaissant tout sans jamais varier de ta ligne de conduite.
- Je n'ai pas besoin que tu me dises ce genre de choses.
Il n'avait surtout pas besoin qu'on lui rappela ce qu'il avait traversé comme enfer pendant plus d'une décennie.
- Je sais, reconnut Saga en se tournant vers lui. Je veux seulement que tu saches que c'est parce que tu es quelqu'un de bien, que je tiens tellement à ce que nous nous entendions, tous les deux. Ce n'est pas uniquement pour ton frère ou parce que tu es son cadet, ni pour l'harmonie au sein du Domaine sacré. Ce serait un véritable honneur, pour moi, que tu m'accordes ton amitié. Pas ce soir, ni demain, mais à terme.
Aiolia soutint son regard un moment, en silence, puis il se détourna pour partir.
- Tu as regagné mon estime et mon respect. N'en demande pas trop non plus.
Sa fierté mal placée l'empêchait de dire le fond de sa pensée : que c'était lui qui était honoré par les mots de Saga, lui qui devrait ramper pour avoir l'amitié et la considération d'un si grand homme, un exemple pour tous.
Enfin, c'était injuste de dire que c'était uniquement dû à son orgueil.
Malgré tout ce que Saga pouvait être et représenter en tant que Chevalier, mentor et futur Grand Pope, Aiolia en voulait toujours à l'homme amoureux de son frère.
Beaucoup moins qu'avant, certes, mais il restait comme un élancement douloureux, semblable à celui des vieilles cicatrices se réveillant et tiraillant par temps humide.
- J'en suis déjà très heureux, répondit sincèrement Saga. Merci, Aiolia, ajouta-t-il, la reconnaissance audible dans sa voix.
Le Lion, qui s'avançait vers la sortie, s'immobilisa.
- Merci à toi, Saga des Gémeaux, murmura-il après un court silence, avant de quitter la terrasse.
À l'intérieur de la grande salle, les réjouissances se poursuivaient.
Dès son retour, Aiolia croisa son frère et Dokho ils se tenaient chacun de part et d'autre de la porte vitrée encadrée de lourds rideaux de velours rouge et broderies d'or.
Les trois hommes échangèrent un regard et Aiolia comprit qu'ils avaient suivi l'intégralité de son échange avec Saga.
Mais après un premier mouvement d'humeur, vite réprimé, il soupira.
Il ne pouvait pas leur en vouloir, il leur avait donné bien des raisons de se méfier et de s'inquiéter.
Cela ne remettait pas en cause la confiance qu'ils avaient en lui, cela soulignait simplement qu'ils le connaissaient bien.
Lui, sa fougue et son impulsivité…
Dokho ne voulait vraiment pas que le moindre incident ne gâchât la soirée, alors que Shion semblait vraiment en profiter pour la première fois depuis leur retour à la vie.
Aioros, quant à lui, tenait à garder un œil sur son frère pour pouvoir intervenir, s'il le sentait prêt à dépasser les bornes.
Aiolia pouvait être très blessant avec Saga, c'était souvent un sujet de tension et de dispute entre les deux frères.
- C'est qu'il grandit, le petit chaton ! s'amusa Dokho en ébouriffant les cheveux du Lion.
- Vieux Maitre ! protesta Aiolia en se dégageant.
Le plus âgé rit en s'éloignant avec un petit signe de la main.
Aioros posa la sienne sur l'épaule de son petit frère.
- Merci, 'Lia. Je suis vraiment fier de toi. Ce que tu viens se faire compte énormément pour moi, tu sais.
- Je sais et… je suis désolé, Grand frère, murmura-t-il. Tu avais raison, quand tu disais que je prétendais faire ça pour toi, mais que ça ne te rendait pas service et que tu n'en étais pas heureux. Ça me soulageait moi, et seulement moi. Pardon, j'étais stupide...
- L'important, c'est que tu as enfin compris la situation et que tu as pu intégrer la position et les sentiments de Saga dans l'équation. Je suis vraiment content que tu aies pu t'exprimer, également, et aller vers lui. Cela n'a pas dû être facile pour toi, j'en suis conscient.
Aiolia haussa les épaules.
- Je devais le faire. Pas forcément pour lui, mais au moins pour toi.
Le visage d'Aioros se fit légèrement plus dur.
- Tu as quand même été souvent injuste, avec Saga. Et parfois insultant. Il ne méritait pas autant d'animosité de ta part, surtout sur une si longue durée. Il t'a laissé faire et a tout encaissé sans répliquer, ni se plaindre, jugeant que tu en avais besoin. Il m'a même demandé d'être moins ferme avec toi, à son sujet et de te laisser le temps nécessaire.
- C'est bon, j'ai compris ! grimaça Aiolia en croisant les bras sur son torse. Je me sens assez mal comme ça, tu veux quoi de plus ? Que j'aille m'agenouiller devant lui et lui présenter mes plus plates excuses, c'est ça ?
- Non, sauf si tu en ressens l'envie ou le besoin. Mais tu vois, tu ramènes encore les choses à toi, ce que toi, tu ressens. Essaie de penser un peu aux autres, en dehors d'Athéna, le monde ne tourne pas autour de nous deux ou de Marine, tu sais.
- Je croyais l'avoir fait, ce soir…
- Oui, c'est un premier pas marquant, je t'en félicite et je me répète, je suis fier de toi, assura Aioros avec un doux sourire, à présent. Je ne m'attendais pas à ce que tu parles ainsi dès votre premier échange, ce fut une agréable surprise. Je te demande simplement de continuer sur ta lancée : réfléchis à la requête de Saga, s'il-te-plaît. Et fais-le aussi sérieusement et sincèrement qu'il te l'a présenté.
- D'accord.
- C'est très important pour lui, pour moi, pour nos relations futures, insista l'aîné. Si, au terme de ta réflexion, tu juges que non, tu ne veux pas lui accorder plus que ton respect et que ton estime, libre à toi. Je ne l'imposerai pas dans ta vie. Tu es d'accord ?
Aiolia soupira.
- Évidemment !
- Bien. Merci, Petit frère, conclut-il en appuyant son front contre le sien.
Il le relâcha ensuite, alors que Milo les rejoignait.
- Tout va bien ? demanda-t-il en entourant le cou d'Aiolia de son bras.
- Très bien, assura celui-ci en souriant à son meilleur ami. Je te raconterai plus tard. Qu'est-ce que tu bois, ça a une drôle de couleur…
Le Scorpion leva son verre d'un jaune verdâtre avec des reflets rose pâle..
- C'est vrai que ça a une salle gueule… mais c'est très bon ! C'est Angelo qui l'a fait, il a pris deux, trois bouteilles et les a mélangés, comme d'hab. Il a vraiment un don pour ça, il pourrait se reconvertir en barman ! Tiens, goûte !
Aiolia le repoussa en grimaçant, alors que Milo portait le verre à sa bouche.
- Ça ira, merci !
- Bah alors, il est où le fier et courageux Chevalier du Lion ? le taquina-t-il effrontément. Goûte, je te dis, tu le regretteras pas !
- Mais fous-moi la paix, où je te le fais avaler cul-sec et par les trous de nez !
- Ça suffit, vous allez en mettre partout ! les prévint Aioros, entre amusement et dépit.
Saga arriva sur ces entrefaites et haussa un sourcil devant la scène qui se déroulait sous ses yeux.
Comme les deux amis ne l'écoutaient pas, Aioros abandonna et prenant le bras de son Gémeau, il l'entraîna plus loin.
- Laissons-les à leurs chamailleries, lui dit-il, malgré tout amusé. Est-ce que ça va, toi ? demanda-t-il ensuite plus sérieusement. J'ai tout entendu, mais tu le sais déjà.
Avec un léger soupir, Saga posa sa tête sur l'épaule de son compagnon.
- Oui. Je suis soulagé que les choses s'arrangent avec Aiolia.
- Moi aussi, assura-t-il en appuyant sa tête contre la sienne. Il était plus que temps, tu as tant enduré.
- Ce n'était rien, vraiment. Mais c'est mieux ainsi, bien sûr. Je suis heureux, mon amour, ajouta-t-il après une courte pause. Nous avons une lourde tâche et de fortes responsabilités qui nous attendent, mais je me sens capable de tout affronter.
- Tu l'es.
- Parce que tu es à mes côtés, affirma le Gémeau en relevant la tête vers son Sagittaire qui lui sourit.
Leurs regards se verrouillèrent et il fut impossible pour eux de résister à l'attraction et à la tentation, alors ils s'autorisèrent un chaste baiser, légèrement appuyé mais rapide.
Pas suffisamment pour échapper au regard acéré d'un de leurs paris, cependant…
- La nuit de noces a déjà commencé pour certains, apparemment… les taquina Angelo, deux verres aux couleurs indéterminées dans les mains. Vous voulez un petit cocktail pour tenir la route ?
- Garde-le pour toi, t'en as plus besoin que nous, répondit Saga avec un sourire satisfait.
- Hey, t'insinues quoi, là ?
- Mais rien du tout.
- Ouais, j'ai très bien compris, tu me la feras pas avec ton air innocent ! On se fait un marathon de sexe quand tu veux !
- Depuis quand tu te permets de faire des avances à Saga ? s'offusqua Aphrodite en se tournant vers lui.
Il discutait avec Aldebaran et Shaka, mais avait quand même prêté une oreille à la conversation derrière lui. Dès qu'il entendait la voix de Saga, son attention était automatiquement focalisée sur lui.
Sans compter le fait qu'Angelo ne savait pas parler doucement et pendant les soirées c'était pire, il passait son temps à beugler.
- Mais j'ai pas dit ensemble ! protesta vivement ce dernier. Pourquoi tu comprends toujours tout de travers ?
- Peut-être parce que je traine trop avec le mec le plus tordu du Sanctuaire ?
- Je t'ai jamais forcé à le faire !
- Faut croire que t'as d'autres qualités assez intéressantes… répondit le Poissons en lui prenant un de ses verres des mains.
- Et comment ! assura Angelo avec un sourire satisfait.
Aphrodite lui adressa un sourire mauvais.
- Il faut chercher longtemps et la modestie n'en est clairement pas une…
- Mais c'est que tu mords fort, ce soir, un vrai piranha ! fit remarquer le Cancer avec un rictus. Ça faisait longtemps, tiens, c'était devenu plutôt rare de te voir comme ça ! Qu'est-ce qui peut bien te mettre dans cet…
- Angelo ! le coupa froidement Shura en les rejoignant.
- Quoi ? répondit-il vivement, surpris par le ton de son amant.
*Réfléchis à ce que tu dis et à qui t'écoute !*
Le Cancer regarda Aphrodite, puis Aioros et Saga, l'expression peinée de ses aînés… et il tilta.
- Cazzo di merda ! s'écria-t-il en se tapant le front du plat de sa main libre.
Sans un mot, Aphrodite lui rendit son verre en l'écrasant fortement sur son torse, l'éclaboussant allégrement au passage.
Mais Angelo n'en avait que faire.
- Je suis désolé, Beauté…
- T'es surtout vraiment trop con, siffla le Douzième Gardien avant de partir à grand pas.
- Attends !
- Laisse-le tranquille, l'arrêta Shura en prenant son poignet. Et toi aussi, Saga, ajouta-t-il en voyant le Gémeau prêt à le suivre, également. Je pense vraiment que vois êtes les deux dernières personnes au monde qu'il a envie de voir, pour le moment.
- Bah vas-y, toi, alors ! protesta Angelo. Faut pas qu'il reste tout seul !
- Il n'a pas besoin de moi, répondit le Capricorne.
Angelo, Saga et même Aioros suivirent son regard et virent avec soulagement Shaka et Mu emboîter le pas au Poissons blessé.
- C'est vrai qu'ils sont devenus très proche, ces trois-là, fit remarquer Aioros. Pas autant que vous ne l'êtes, cependant.
- C'est largement suffisant pour ce soir, assura Shura, toujours aussi confiant. Au moins pour rattraper tes conneries, ajouta-t-il en écrasant son coude dans les côtes d'Angelo.
- Je m'excuserai demain ! J'étais prêt à le faire, là, mais tu m'as dit de le laisser tranquille, je te rappelle !
- A raison.
- Oui, je sais bien… Il voudra rien entendre, pour l'instant, de toute façon ! J'ai vraiment pas fait gaffe… s'accabla encore Angelo en essuyant sommairement sa chemise trempée.
- Je n'imaginais pas qu'il souffrait encore autant, se désola Saga.
- Un amour à sens unique est toujours très douloureux, intervint Shion en s'invitant dans la discussion avec Dokho. Nous avons vu cela chez certains de nos camarades, lorsque nous étions jeunes.
- Vraiment ?
Les Chevaliers ouvrirent grandes leurs oreilles.
Ils adoraient entendre les histoires vécues par leurs aînés.
- Oui, Shura. Ton prédécesseur, El Cid du Capricorne, était très amoureux de don meilleur ami et précèdent Sagittaire, Sisyphe. Mais ce dernier n'avait qu'un seul amour, Notre Déesse.
- Dont Sasha, son incarnation de l'époque, était intimement liée à mon élève Tenma, le précédent Pégase, ajouta Dokho. Mais tu as omis de parler de ton propre intérêt pour El Cid, souligna-t-il en croisant les bras sur son torse.
Shion secoua la tête.
- Il n'était pas réel. C'était juste pour embrouiller ceux qui nous trouvaient trop proches, toi et moi, mais aussi pour te cacher mes sentiments profonds à ton égard.
- Mouais… concéda la Balance. T'étais vraiment un très bon acteur.
Le Grand Pope leva les yeux au plafond en soupirant.
- Bref, tout ceci était très compliqué, reprit-il, et nous avons vu nos amis souffrir en silence de cette situation. D'autant plus que nous ne pouvions pas afficher ouvertement nos sentiments.
- C'est pourquoi vous fermiez les yeux sur notre lien, à l'époque, comprit Saga.
- Je n'avais pas vraiment besoin de le faire, répondit Shion. De vous-même, vous vous êtes imposés une discipline stricte. Vous saviez quel était votre devoir et que ce genre de distraction n'était pas compatible.
- Nous n'étions quand même pas loin de craquer, révéla Aioros avec un petit rire contrit. Je ne sais pas combien de temps nous aurions tenu, encore.
- Si vous vous étiez confiés à moi, je ne l'aurais pas interdit. Mais je ne vous aurais pas encouragé non plus sur cette voie. Les temps s'obscurcissaient et la Guerre Sainte approchait, les signes se multipliaient. Je ne pouvais pas permettre que les Chevaliers les plus exemplaires se dispersent. Sans compter le fait que l'un de vous devait me succéder. Votre relation n'aurait pas pu perdurer dans ces conditions.
- J'imagine, reconnut Saga. Ce n'était ni le lieu, ni l'endroit pour vivre une histoire d'amour, quelle qu'elle soit.
- J'en connais deux qui, leur tout venu, ne se sont pas posés de questions sur l'autorisation du Pope très longtemps… fit remarquer Dokho.
Les autres n'avaient pas besoin de suivre la direction de son regard, ils savaient déjà qu'ils trouveraient Milo et Camus au bout.
- Le connaissant, notre intrépide Milo a du apporter les réponses suffisantes à Camus, avança Aioros.
Leur situation était différente de la nôtre, rappela Saga. Camus était isolé en Sibérie en charge d'Isaac, puis Hyoga. Milo était souvent en mission. Il lui était facile de faire un détour par l'isba. Loin du Sanctuaire, isolés de la civilisation, ils ne risquaient pas grand chose.
- Tu éludes le rôle que tu as joué dans tout ça, Saga, tu pêches encore une fois par humilité et modestie. Tu les as protégé du Lémure car celui-ci était complètement parano, la moindre réunion de Chevaliers qui n'était pas de son fait, il pouvait y voir un complet et une trahison. En détournant son attention d'eux, tu leur as évité le pire.
- Je suis heureux d'y être arrivé.
Aioros prit la main de Saga et la serra dans la sienne..
- Heureusement qu'il y ont ou avoir ces moments précieux, fit remarquer Dokho. Je pense que cela a beaucoup aidé Milo a surmonté la mort de Camus.
- Oui. Dans un monde où notre âme sœur nous a été enlevé, mais où nous laisser aller ne nous est pas permis, nous n'avons plus qu'à survivre avec les souvenirs et les regrets, murmura sombrement Saga. Les premiers empêchent souvent de sombrer et d'être détruits par les seconds, surtout l'orque ceux ci sont plus nombreux.
Sa main fut serrée avec plus de force et de tendresse, en réponse à sa propre pression.
- Et pour en revenir à vos compagnons de jadis, ont-ils pu rester amis, malgré ces différences de sentiments ? demanda Aioros pour changer de sujet.
- Bien sûr, répondit Dokho.
- De la même façon que Shura est resté très proche d'Angelo et d'Aphrodite, malgré leur relation, El Cid n'en a jamais voulu a Sisyphe, il était prêt à mourir pour lui autant que pour Athéna, précisa Shion.
Le vieux Maître hocha la tête et poursuivit.
- Tout comme Sisyphe se contentait de la relation privilégiée qu'il avait avec Sasha. Elle était très proche de lui, malgré tout, elle le voyait comme un grand frère. Lui était déchiré entre son affection pour Sasha et son amour pour Athéna.
- Il se sentait tellement coupable d'avoir arraché la petite à sa vie heureuse à l'orphelinat, de l'avoir séparé de Tenma et d'Alone pour la ramener au Sanctuaire... se souvint Shion. Cela a bien failli le tuer, d'ailleurs.
- Rhadamanthe nous en a parlé.
- Vraiment ? s'étonna le Grand Pope en se tournant vers Saga. À quelle occasion ?
- Nous parlions de Simon, expliqua Aioros. Cela n'a pas été simple d'aller le chercher et de le séparer de son meilleur ami Elrik, entre autres. Rhadamanthe a fait le lien avec mon prédécesseur.
- En effet, il doit y avoir une réminiscence au travers de l'armure du Sagittaire, qui renforce ton sentiment de culpabilité, devina Shion. Les armures gardent la mémoire des sentiments très forts, et Sagittarius est l'une des plus puissantes et autonomes d'entre elles. Tu en subis assurément les effets.
- C'est l'avis de Rhadamanthe, également.
- C'est assez évident, intervint Dokho. Parce qu'en soit, cela n'est pas si dramatique, comme situation, pour le jeune Simon. Le voyage entre l'Italie et la Grèce était plus compliqué à notre siècle que le voyage entre l'Autrice et la Grèce ne l'est, aujourd'hui. Tout comme les moyens de communication. Ils peuvent se revoir et s'appeler fréquemment.
- D'ailleurs, comment ça se passe avec lui, Angelo ? demanda Saga. Je ne l'ai pas trop vu, ces derniers jours.
Le Cancer se tourna vers son aîné.
Il avait suivi la conversation d'une oreille seulement, son esprit étant concentré sur la recherche du meilleur moyen pour se faire pardonner auprès d'Aphrodite.
Il détestait blesser son ami.
La question de Saga sur Simon le ramena à leur discussion.
- Le gamin ? Je l'ai laissé aux Enfers.
- Quoi ? résonnèrent quatre voix outrées.
Shura, lui, soupira en levant les yeux au plafond.
- Ça va, je plaisante ! On y est allé une fois, y a trois jours, ça l'a pas mal secoué. Il récupère chez moi.
- Tu ne nous en as pas parlé, fit remarquer Shion, mais d'un ton neutre et sans reproche.
- Vous étiez occupés, je voulais pas vous déranger ni attendre, c'était pile la bonne occasion pour descendre.
- Comment tu peux dire cela ? s'exclama Aioros, abasourdi. Il est arrivé depuis deux semaines, à peine ! C'est beaucoup trop tôt ! Tu aurais dû en attendre une autre !
- Vous voulez que j'en fasse un Chevalier ou une merde apeurée par son ombre ? s'emporta Angelo. Vous croyez que je faisais quoi, moi, à son âge ?
- 'Gelo… tenta Shura pour le calmer.
- Les époques et les enjeux sont différents, rappela Saga. Tu peux prendre ton temps, avec lui et y aller en douceur.
- Pas comme avec Mei, c'est ça ?
- Ce n'est pas ce que j'ai dit, se défendit calmement Saga. Je te rappelle seulement que rien ne presse.
- J'ai pas que ça à foutre ! S'il est pas capable de supporter ce voyage, c'est pas la peine que je perde mon temps avec lui !
- Tu l'abandonnerais ? C'est très risqué de le laisser seul avec ses capacités… s'inquiéta Aioros.
- S'il peut pas gérer, les âmes finiront par bouffer son cerveau ou l'envoyer aux Enfers. C'est la meilleure chose qui pourrait lui arriver !
- Angelo, calme-toi, tenta de l'apaiser Dokho à son tour.
En vain.
- Si vous êtes pas contents, vous avez qu'à vous en occuper tous seuls, du gamin ! J'étais pas d'accord pour jouer les pet-sitter, à la base, je vous avais prévenu que c'était pas une bonne idée de me le confier !
- C'est un enfant, pas un chien, le reprit Shura.
- Toi, n'en rajoute pas, c'est à cause de toi que je me suis laissé convaincre !
- J'espérais plus d'implication de ta part, répondit calmement le Capricorne, nullement impressionné par l'index accusateur qui semblait vouloir transpercer sa cage thoracique.
- Si tu t'attendais à ce qu'on joue au papa et à la maman avec lui, je comprends que tu sois déçu ! Je vous avais tous prévenus que ça me plaisait pas, vous m'avez pas écouté. Vous plaigniez pas maintenant que vous me l'avez foutu dans les pattes !
- Les débuts semblent compliqués, mais j'ai confiance en toi, affirma Saga, surprenant tout le monde.
Sauf Shion, qui eut un sourire satisfait.
Il s'était abstenu d'intervenir pour justement laisser Saga gérer la situation et surtout, Angelo.
Celui-ci ouvrit de grands yeux, puis éclata d'un rire sec.
C'était vraiment sournois de la part de Saga.
- Enfoiré, grimaça-t-il.
- Surveille ton langage devant le Grand Pope, le reprit Shura. Et Saga est l'un de nos futurs Grand Pope, également, apprends enfin à lui parler correctement.
- Ouais, désolé, Grand Pope, futur Grand pope, s'excusa-t-il en faisant une courbette maladroite et clairement moqueuse. De toute façon, c'est bon, j'ai eu ma dose. J'me casse, à demain.
- A demain, Angelo, répondit Saga, puis Shion.
Ils le saluèrent tous, mais le Cancer s'éloignait déjà.
- Je suis désolé et je vous prie de l'excuser, leur demanda Shura. Ne vous inquiétez pas pour Simon, Angelo joue la grosse brute sans cœur, mais il n'est pas comme ça, avec le petit. Il est très attentif à son bien-être.
- J'en suis certain, assura Saga.
- Je suis moins convaincu, ce n'est pas ce qu'il semble faire.
- Je comprends tes doutes, Aioros, mais tu peux me croire. Je vais te donner quelques exemples pour t'y aider, c'est normal d'en avoir besoin. Voyez-vous, quand Angelo sent que la journée a été difficile pour Simon, il le fait dormir chez lui, plutôt que de le renvoyer au dortoir des apprentis. Et ces nuits-là, il ne veut pas que je reste avec lui, c'est lui qui passe quelques heures chez moi, après que Simon se soit endormi. Mais Angelo regagne toujours ses appartements avant le matin, pour que Simon ne se réveille pas seul.
- Mais Simon est au courant que vous êtes un couple, tout comme il l'est pour Aioros et moi, fit remarquer Saga. Pourquoi cette précaution ?
- Oui et de même que pour vous, il l'a deviné seul. Mais Angelo ne veut pas prendre le risque qu'il surprenne un geste ou quoi que ce soit qui est naturel, entre nous, mais qui pourrait le choquer. Il fait vraiment attention à lui, je vous l'ai dit. Ces deux derniers jours, depuis leur visite aux Enfers, il a rarement quitté Simon. Les deux fois où il s'est absenté du banquet, ce soir, c'était pour aller s'occuper de lui, malgré le fait qu'il ait demandé à Marine de passer le voir régulièrement. Je vous assure que tout se passe bien, entre eux.
Il était rare d'entendre Shura autant parler.
Sauf quand il s'agissait de défendre Aphrodite, Saga et surtout, Angelo.
Ou qu'il fallait faire l'éloge d'Athéna.
- Bien que ses propos aient pu nous surprendre, nous avons toute confiance en Angelo, et en toi, Shura, répondit Shion. Je serai déjà intervenu, auquel cas. Nous te remercions pour toutes ces précisions.
Le Capricorne hocha la tête, se sentant un peu idiot.
Evidemment que Shion était au courant, il n'ignorait rien de ce qui se passait sur le Domaine sacré.
Alors le voyage d'Angelo et de Simon aux Enfers, il en avait eu connaissance certainement dès lors que le Cancer avait ouvert le portail, voire un peu avant.
- Je vous en prie, Votre Eminence. Merci pour votre confiance. Je vais le rejoindre, maintenant, si vous permettez. Encore félicitations à vous quatre, et bonne soirée.
Ils se saluèrent, puis le Capricorne retrouva son compagnon au milieu des marches menant au Douzième Temple.
Ils reprirent la descente sans un mot.
Ce ne fut qu'à l'intérieur de la Maison des Poissons qu'Angelo rompit le silence.
- Aphrodite n'est pas là.
- En effet. Mais il n'y a pas lieu de s'inquiéter, assura Shura.
- Il est plus de minuit, ronchonna Angelo.
- Ce n'est pas si tard.
Un silence, puis…
- Tu crois qu'ils couchent ensemble ?
- Qui ça ? demanda Shura, toujours d'un ton neutre au possible.
- Aphrodite, avec Shaka et Mu.
- Mais ça ne va pas ? Ils sont seulement amis. Il n'avait sûrement pas envie de rester seul, et il n'a pas voulu nous déranger. Et puis il t'en veut encore sûrement. Alors il doit être chez l'un ou l'autre. Je dirai plutôt Shaka que Mu, d'ailleurs.
- Ouais… peu importe, si ça peut l'aider à se sentir mieux.
- Exactement.
Le silence se réinstalla entre eux jusqu'à la Maison du Capricorne.
- Je peux rester un peu ?
- Depuis quand tu demandes ?
Angelo se frotta l'arrière du crâne avec un rictus au coin des lèvres.
- T'es pas fâché ? J'ai pas assuré, ce soir… Enfin, à la fin... J'ai dit de la merde, je t'ai aboyé dessus… Tu dois être déçu… Désolé…
Shura lui attrapa le bras et le plaqua durement contre une colonne de marbre, faisant résonner la pierre millénaire.
- En effet, ton comportement est discutable. Il nous faut donc chercher et comprendre ce qui a déclenché un tel mouvement d'humeur, de ta part. Je ne suis cependant pas contre l'idée d'une petite punition.
- Ce serait mérité…
Surtout si elle était du genre un peu coquine, Angelo était tout à fait prêt à se soumettre…
Et vu la manière dont Shura appuyait son bassin contre le sien, il n'était pas en train de s'emballer pour rien.
- Mais en même temps, poursuivit le Capricorne en mordillant la peau tendre de son cou, tu as été incroyable, pendant la cérémonie, en exauçant mon désir secret de voir notre union être bénie par Athéna. Donc, je tiens aussi à te montrer ma gratitude.
Angelo se mordit la lèvre, ses mains enserrant des poignées entières de mèches soyeuses de son tortionnaire.
Il trouvait toujours les pauvres centimètres carrés de peau où il était le plus sensible et le plus vulnérable, ceux qui, stimulés ainsi, pouvaient le transformer en poupée de chiffon entre les bras de Shura.
- Ça me va ! assura-t-il en se pressant contre lui. Les deux ! Tout ce que tu veux…
Shura se détacha et libéra Angelo, dardant sur lui un regard impérieux, intransigeant, dominateur, qui lui cingla les reins.
- Alors suis-moi, ordonna le Dixième gardien, de cette voix rauque et chaude capable de faire venir son compagnon en une fraction de seconde. A partir de maintenant, c'est moi qui décide.
Électrisé, Angelo passa sa langue sur ses lèvres, plus qu'affamé et définitivement à l'étroit dans son pantalon.
Il adorait voir Shura si autoritaire avec lui, il n'accepterait d'ailleurs jamais une telle domination d'un autre.
Cela promettait un échange brûlant et passionné, et Angelo était déjà prêt à en profiter jusqu'à la dernière seconde qu'il s'autoriserait, car il lui faudrait malheureusement l'écourter, il en était conscient.
En effet, plusieurs Maisons plus bas, dormait un petit garçon dont il n'avait pas voulu la charge, mais dont il se sentait pourtant déjà pleinement responsable.
.
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Un peu plus tard dans la nuit
Temple du Sagittaire
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En entrant dans la chambre d'Aioros, devenu la leur, depuis, Saga eut la surprise de voir que son compagnon n'était pas encore couché.
Il avait mis un peu plus de temps pour sécher ses cheveux, après leur douche commune, il pensait donc le trouver déjà sous les draps quand il en aurait fini.
Mais non, Aioros, vêtu d'un simple boxer bleu nuit, était debout devant la fenêtre.
Saga admira en silence ce dos nu aux muscles noueux et puissants qu'il aimait tant couvrir de baisers, notamment le signe symbolique du Sagittaire sur son omoplate gauche.
Une fraction de seconde, sa vue se brouilla, et il eut l'illusion d'une paire d'ailes immenses qui se déployait dans un bruissement soyeux, faisant rater un battement à son cœur.
Se reprenant, il secoua la tête et s'avança.
Aioros se tourna vers lui à son approche.
Le recto était aussi plaisant à regarder que le verso, mais Saga s'inquiéta plus de l'expression soucieuse sur son visage que de son torse parfaitement sculpté comme dans du marbre ancien, aussi marqué du signe des Gémeaux sur son cœur.
- Quelque chose ne va pas, amour ? demanda-t-il en posant sa main sur sa hanche. Pourquoi tu n'es pas encore au lit ?
- Je réfléchissais juste en regardant les étoiles. Elles brillent avec beaucoup d'intensité, cette nuit.
Le Sagittaire prenait souvent un temps pour observer le ciel, à la nuit tombée.
Parfois, ils partageaient ce moment à deux, d'autres, Saga comprenait qu'Aioros avait besoin de ce tête-à-tête avec le ciel nocturne et le lui accordait bien naturellement.
Pensant que c'était justement le cas, il lui sourit avec tendresse.
- Rejoins-moi quand tu veux, lui dit-il en allant déposer un baiser sur sa joue.
Mais alors qu'il se détournait pour gagner le lit, Aioros le retint par le poignet, sans un mot.
- Tu veux que je reste ? supposa le Gémeau en lui faisant face. Excuse-moi, j'ai cru que tu voulais être tranquille un petit moment.
- Ce n'est pas ça, pas cette fois. Je repensais à tout ce qui s'est passé, ce soir, et il y a quelque chose dont on doit parler. Je sais qu'il est tard, désolé.
Nullement inquiet, Saga lui prit la main et la noua à la sienne, les remontant ensemble jusqu'à ses lèvres pour y déposer un baiser d'encouragement.
- Je t'écoute, amour, dis-moi tout.
Aioros resserra ses doigts autour de ceux de Saga.
- Notre nomination, je suppose que cela répond définitivement à la question de l'adoption d'Elrik, se lança-t-il en tentant de cacher sa tristesse le plus possible.
Peine perdue, Saga la décela aisément.
Il lâcha sa main et glissa ses bras autour de sa taille, l'attirant contre lui.
Aioros passa ses bras autour de sa nuque et leurs torses nus s'épousèrent dans leurs courbes et leurs arrêtes, avec une perfection qui les faisant toujours vibrer, même encore après tous ces longs mois ensemble.
Saga savoura un instant la douceur et la chaleur de la peau aimée contre la sienne.
- Mon amour…
- Je comprends, le coupa le Sagittaire avec un sourire triste, mais sincère. Ne t'en fais pas, je vais bien.
- Tu as raison, cela règle la question. Aioros, poursuivit-il en cherchant son regard qu'il avait baissé, nous allons tout mettre en œuvre pour adopter Elrik dès que possible.
- Quoi ? s'exclama le Sagittaire en ouvrant grand les yeux.
Ce que Saga pouvait aimer ce vert intense pailleté d'or !
Il en oublierait presque de respirer, parfois.
- Tu m'as bien entendu, 'Ros. Le projet est lancé dès à présent.
- Mais, je ne comprends pas… avec toutes les responsabilités que nous allons avoir en tant que Grands Popes, tu auras encore plus envie et besoin de nos moments à deux, non ?
- Et bien, nous les aurons à trois !
- Mais…
Saga le fit taire d'une douce pression de ses lèvres sur les siennes, avant de s'écarter légèrement.
- Il est temps pour l'homme amoureux de grandir et d'accepter de nouvelles responsabilités. Notre relation et notre vie franchissent une nouvelle étape, avec cette nomination commune à la tête du Sanctuaire. Une page se tourne, c'est le moment aussi pour notre couple d'avancer et de passer un nouveau cap.
- Tu te sens prêt ? Je veux dire, je sais que tu l'es pour le Sanctuaire, c'est l'évidence-même. Par contre, pour notre relation…
- Je suis conscient que notre première conversation à ce sujet remonte à quelques semaines, seulement, je comprends ton questionnement, mais… oui, j'arrive à entrevoir ce futur plus proche que je n'arrivais à le concevoir, alors. J'y ai réfléchi, tu sais, je n'ai pas mis ça dans un coin et oublié.
- Je sais, assura le Sagittaire en passant ses doigts entre les mèches d'or avec tendresse, reconnaissant.
- Et je pense aussi que l'annonce de notre nomination et tout ce qui est arrivé, aujourd'hui, ont joué.
- Je partage ton avis et je te comprends. Moi aussi, je me sens… différent. Comme grandi, d'une certaine façon.
- C'est cela. Je ne suis pas complètement serein, je ne te le cacherai pas, mais je reste confiant, parce que tu es à mes côtés. J'ai encore quelques mois pour apaiser mes dernières appréhensions. Avec toi, si tu l'acceptes.
- Oui, bien sûr ! répondit Aioros avec un doux sourire. J'en ai aussi, même si elles sont de nature différente.
- Je me doute bien. Nous aurons aussi plusieurs mois pour les gérer et nous en débarrasser, plusieurs mois pour profiter de nous deux, avant qu'il ne devienne nous trois... Je parle comme si l'un de nous allait accoucher ! réalisa Saga avec un petit rire.
Aioros l'accompagna un court instant, avant de redevenir parfaitement sérieux.
Il posa son front contre celui de Saga, se mordit la lèvre, les yeux brillants, et prit une grande inspiration, qu'il relâcha doucement.
- Par Athéna, est-ce vraiment possible ? demanda-t-il en nouant ses mains autour de la nuque du Gémeau.
- Ce ne sera pas simple de gérer tous ces changements, mais nous allons tout faire pour y arriver. Et nous profiterons de la présence de Shion et de Dokho pour avoir les meilleurs conseils, avant leur départ. Et nous ne sommes pas seuls, nous sommes très bien entourés.
- Bien sûr… Mais…
Aioros recula son visage pour regarder son compagnon dans les yeux.
- Tu le veux vraiment, Saga, mon aimé ? Tu ne le fais pas juste pour moi ?
- C'est trop important, tu ne te contenterais jamais de cela. Pire, cela te blesserait.
- Je le reconnais.
Détachant une de ses mains de la taille d'Aioros, Saga la remonta pour caresser sa joue du revers de ses doigts pliés.
- Alors la réponse est oui. Oui, mon amour, je le veux.
Le sourire d'Aioros se fit éclatant et éblouit Saga, une seconde avant qu'il ne jeta ses bras autour de son cou et l'entraîna dans un baiser passionné, profond et intense.
Après quelques délicieuses secondes, ils se reculèrent légèrement, reprirent leur souffle, avant de sceller leurs lèvres une nouvelle fois, plus tendrement.
Ils s'étaient embrassés un nombre incalculable de fois, depuis quatre mois, leurs baisers étaient différents, tout en restant familiers.
Cette fois-ci, cependant, ils ressentirent une nette différence.
Il y avait quelque chose de bien plus fort entre eux, ils le percevaient déjà.
Les deux amants se détachèrent légèrement pour se regarder dans les yeux, y cherchant une confirmation dont ils n'avaient pourtant pas besoin.
Cependant, le regard d'Aioros demeurait interrogatif.
La réponse de Saga consista à reprendre ses lèvres pour un long baiser qui n'en finissait pas, jusqu'à ce qu'il se décida à l'interrompre. Il sourit à Aioros, les deux avaient le souffle court, puis posa son front contre son épaule nue.
Il appuya ensuite plus fermement son visage contre son cou et cette peau qu'il connaissait si bien.
Il inspira profondément, emplissant ses poumons de son odeur et noyant son cœur et son corps entier sous l'émotion et les sentiments que ça faisait naître en lui, comme à chaque fois.
Ses lèvres remontèrent en une lente procession de baisers papillons et de légères morsures, accompagnées de petits coups de langue sur les traces de ses dents, comme pour se faire pardonner, jusqu'à retrouver celles d'Aioros et les cueillir délicatement.
Les mains plongées dans les lourdes mèches d'or, Aioros appuya ce qui n'était d'abord qu'un simple effleurement, presque une timide caresse, malgré le désir qui électrifiait le peu d'espace entre eux et tout l'air environnant.
Saga inspira et sentit le souffle chaud d'Aioros, puis vint le chercher en approfondissant leur baiser, goûtant à nouveau le mentholé du dentifrice qu'ils partageaient, mais qui lui semblait bien plus appréciable et agréable dans ces moments-là.
Leurs corps se pressaient inévitablement l'un contre l'autre, leurs torses nus s'épuisant parfaitement, alors que le baiser langoureux se poursuivait.
Saga les fit doucement reculer jusqu'au lit où ils basculèrent, ce qui lui permit d'étendre la cible de ses attentions de son visage à ses épaules, son torse, son ventre durci par les muscles et contracté par le désir qui s'enflammait, avant de remonter vers son visage.
Et de recommencer.
Ses doigts suivaient ou précédaient ses lèvres, sa langue, ses dents et Aioros ne fut bientôt plus que soupirs et plaintes lascives, complètement soumis à la passion dévastatrice de son Gémeau.
Saga entendait et sentait le cœur d'Aioros qui cognait fort en réponse au sien.
Il y avait aussi leurs désirs, rendus déjà bien conséquents par leurs échanges, qui pulsaient en se frottant l'un contre l'autre au gré de leurs mouvements.
Les deux amoureux avaient terriblement envie l'un de l'autre et ce feu, parmi les plus puissants qu'ils aient jamais éprouvé pour l'autre, faisait bouillir le sang dans leurs veines, les rendant fébriles et avides.
Mais étrangement, lorsque tout s'accélérait à cause d'un élément qui les faisait particulièrement réagir et menaçait de les emporter, il y avait une sorte de force qui les amenait à ralentir pour savourer chaque seconde, chaque geste en en prenant pleinement conscience.
Ils réalisèrent ainsi que non, ils ne cherchaient pas à atteindre le plaisir, ce n'était pas la finalité de leur union, car ils le trouvaient déjà dans l'instant qu'ils vivaient ensemble, chaque seconde partagée.
Le plaisir ultime était précieux, mais ceux qui jalonnaient la route pour y parce bie l étaient tout autant.
Il y avait de ce fait autant d'envie que de besoin, dans leurs caresses, qu'ils alternaient entre urgence, frénésie et tendresse ou bien une lenteur traîtresse, qui mettaient les sens de leur amant à l'agonie.
La dualité du Gémeau se manifestait d'ailleurs pleinement dans leurs moments intimes : fougue et passion d'un côté, langueur et volupté de l'autre.
Mais ces deux aspects ne s'opposaient pas, ils se complétaient souvent pour rendre Aioros complètement fou.
Leurs mains se caressaient et c'était à la fois tendre, fougueux et passionné, alors qu'ils suivaient le rythme des mille baisers qu'ils échangeaient.
Chaque caresse, chaque regard, chaque effleurement, chaque contact partagés étaient une véritable déclaration, plus fort que tout ce qu'ils avaient connu, jusque-là.
Aioros eut un très court répit, lorsque Saga se releva pour ôter leurs sous-vêtements devenus bien trop gênants.
Ceci fait, le regard rivé au sien, le Gémeau se pencha vers lui, l'écrasant presque de son poids, de sa présence, mais l'enveloppant aussi et surtout de son parfum, de son odeur et de son désir brûlant pour lui qui lui coupait déjà le souffle.
C'était tellement intense !
Ils en vibraient tous deux d'émotion.
Les plus belles et plus précieuses choses dans ce monde ne pouvaient être simplement vu ou touché, elles devaient être ressenties pour réellement être appréhendées.
Les deux amants le réalisèrent pleinement lorsque leurs corps, délicieusement éprouvés par leurs longs préliminaires, roulèrent, enfin uniq, sur les draps.
Ils ne respiraient plus, il sentaient et surtout ressentaient tout de manière accrue, leurs sens comme soudain surdéveloppés.
Ils entendaient nettement les battements de leurs cœurs qui résonnaient de manière prononcée, au-delà du son étouffé qu'ils percevaient habituellement.
Ils écoutaient leurs respirations haletantes, leurs gémissements lascifs, ainsi que le bruit du glissement de leurs corps moites à certains endroits, l'impact brut et sourd de leur rencontre, à d'autres.
Ils ne se touchaient pas seulement, ils s'effleuraient, se frôlaient, se caressaient, se pressaient l'un contre l'autre, redécouvrant leurs courbes et leurs reliefs, s'attardant sur chaque creux et la moindre aspérité.
De ses lèvres ou de ses doigts s'il le pouvait, Saga touchait et redessinait parfois les traits fins du visage d'Aioros, sublimé par le plaisir qu'il lui offrait, alors qu'il s'accrochait tantôt aux draps, tantôt aux cuisses puissantes de son Gémeau qui le surplombait…
Ou plus haut, crochetant ses ongles dans le fessier musclé en mouvement contre lui, l'accompagnant alors qu'il lui faisait tellement de bien...
Les deux amants ne goûtaient pas simplement leurs peaux, ils en savouraient le sel de leur étreinte sur chaque centimètre, longuement, léchant ou aspirant avidement le grain si différent d'un endroit à l'autre, marquant l'épiderme avec toujours ce même mélange de tendresse et d'adoration, de fougue et d'avidité.
Ils n'embrassaient pas seulement leurs cicatrices, mais chargeaient chacun de leurs baisers d'excuses s'ils en étaient responsables, de tendresse s'ils partageaient le souvenir de leur naissance et à chaque fois, de respect et d'admiration pour le guerrier qui les portait fièrement et dont ils étaient si éperdument amoureux.
Ils se regardaient avec amour et désir, plongeaient dans les yeux de l'autre jusqu'à atteindre l'âme qu'ils partageaient, entièrement mise à nue et complètement offerte.
Et lorsque leurs regards n'étaient pas verrouillés l'un à l'autre, ou fermés par un plaisir trop fort, ils redessinaient chaque trait du visage de l'être aimé, s'attardant sur une lèvre mordillée sous l'intensité des émotions, et déjà marquée par les nombreux baisers affamés.
Chargés d'adoration et de passion, leurs yeux étaient rendus brillants et brûlants par le feu du désir qui couvait en eux et qui s'y reflétait allègrement, apportant des nuances inédites au vert et au bleu de leurs iris.
Quant à la parole… elle était inutile.
Les amants parlaient un langage ancestral qui n'avait pas besoin d'être verbalisé.
Les sons qu'émettaient Aioros et Saga étaient inarticulés, les deux hommes n'étaient que souffles et soupirs.
A l'exception peut-être de quelques-uns qui ressemblaient à leurs prénoms… mais qui n'étaient que tentatives vaines, un commencement dont la suite se perdait à jamais dans un cri parfois muet, parfois puissant mais bref, un balbutiement cueilli à même les lèvres, une note balayée par un souffle brûlant.
Leurs cosmos s'étreignaient autant que leurs corps, ils se caressaient, fusionnaient, se cherchaient, s'abreuvaient l'un à l'autre, l'un de l'autre, dans une danse spirituelle aussi belle que leur corps-à-corps n'était beau.
Saga plongeait dans le corps offert d'Aioros, si chaud et si accueillant, qui ondulait sous lui, contre lui, autour de lui, au même rythme que leurs cœurs qui résonnaient d'une voix unique, et de leurs souffles qui se perdaient, se cherchaient, se retrouvaient et se mêlaient inlassablement.
Aioros avait cette impression étrange de recevoir Saga plus loin qu'il n'avait jamais été en lui, et Saga lui-même avait la sensation de se perdre en Aioros encore plus profondément que durant leurs précédentes étreintes.
Et malgré cette intensité nouvelle déjà si forte, l'abandon, le plaisir, la dérive et les deux amants eux-mêmes continuaient de grimper les cieux.
Ils étaient emportés toujours plus loin, plus haut, alors que leur étreinte gagnait encore en puissance et en intensité, les coupant bientôt de la réalité.
Plus rien n'existait en dehors d'eux, de cet être unique qu'ils formaient, ainsi soudés l'un à l'autre par le corps, le cœur et l'âme.
Et même si, quelque part dans ce tourbillon demeurait un brin de lucidité qui les rendait conscients d'être à la limite de perdre totalement le contrôle, même si le désir et le plaisir les consumaient au point de suffoquer et d'aller voler à l'autre le souffle qui manquait à l'un, ils ne ralentissaient pas, bien au contraire.
Car ils ne craignaient rien : ils s'aimaient de tout leur être et rien de mal ne pouvait résulter de l'expression de cet amour, même s'ils en ébranlaient le Sanctuaire entier jusqu'à en faire se défendre la pierre millénaire.
Leurs pairs ne leur témoigneraient que de la compréhension, agrémentée certes de tendres moqueries, ils n'y couperaient pas, ils s'y attendaient.
Mais Saga et Aioros ne s'attardaient pas sur ces considérations qu'ils partageaient mentalement, il n'y avait vraiment qu'eux, à cet instant, et leurs sens exacerbés focalisés sur ce qu'ils vivaient de tellement puissant.
Ils n'éprouvaient pas plus de peur à être ainsi dévorés par la passion de ce moment présent.
Si leurs cœurs et leurs poumons explosaient, si leurs peaux continuaient de brûler au point de fondre, et qu'ils finissaient par en mourir, tant pis...
Pouvait-il y avoir plus belle mort, pour eux qui en avait déjà vécu deux ?
Non, il ne pouvait en exister de plus merveilleuse que celle qui venait nous cueillir dans les bras de l'être aimé, alors qu'on connaissait avec lui l'union la plus complète qui pût se faire entre deux êtres liés par le corps, le coeur et l'âme, depuis toujours.
Mais la fin de leur seconde existence n'était pas encore arrivée, il s'agissait seulement de celle de leur étreinte, qu'ils avaient senti approcher, inexorablement...
Leurs esprits toujours aussi connectés que leurs corps fusionnés, ils partagèrent alors cette même pensée : ils ne s'étaient jamais sentis plus vivant qu'à cet instant précis où la petite mort les emportait, dans une même vague d'une incroyable puissance.
A cet instant où tout explosa en eux, entre eux et autour d'eux, l'espace qui les entoura se remplit d'un millier d'étoiles, et l'onde se propagea plusieurs mètres à la ronde.
Une lumière éclatante mais éphémère, accompagnée d'une note de musique qui résonna dans les esprits de leurs voisins et s'attarda longtemps dans l'air.
Les deux amants traversèrent ce champs stellaire en retombant à travers les différents ciels où ils s'étaient envolés, jusqu'à retrouver la terre ferme, le moelleux du lit et la douceur des draps, mais aussi et surtout, la chaleur et le corps vibrant de l'autre contre le sien.
Balayés par ce flot d'émotion et de sentiments, cette jouissance qu'ils avaient à peine approché, au cours de leurs précédentes étreintes, alors qu'il leur avait semblé monter déjà si haut, à chacune d'elles, ils glissèrent bien vite dans un état de félicité absolue qui se répercuta sur leurs corps, bientôt pleinement détendus eux aussi.
Deux corps complètement dévastés, qui firent un effort ultime pour se repositionner plus confortablement, sans jamais se détacher.
Quatre jambes qui s'emmêlèrent avec difficulté, quatre bras qui s'enroulèrent partout où c'était possible, après avoir remonté les draps.
Deux regards qui s'ancrèrent l'un à l'autre pour que tout cessa de tanguer autour d'eux.
Cette étreinte avait eu un goût d'inédit surprenant, mais aussi et surtout, cette profondeur nouvelle, cette densité dans le ressenti, cette puissance dans les sensations et les émotions qu'ils n'avaient encore jamais expérimenté.
Ils venaient de se faire la plus belle déclaration d'amour et d'affirmer leur volonté de s'engager ensemble sur le même chemin de vie en se donnant complètement à l'autre, sans un mot, en silence.
Tout était parfaitement incroyable et merveilleux, depuis le premier baiser échangé après leur discussion jusqu'à cet instant.
- Je t'aime, murmurèrent-ils en même temps, dans un même soupir de bien-être, yeux dans les yeux, souffle contre souffle, cœur à cœur.
Et tout ce qui était contenu dans ces mots, qu'ils n'avaient pas besoin de prononcer, vibra entre eux et les enveloppa.
Le sourire de Saga s'élargit, un instant avant qu'il ne réduisît une dernière fois la distance la faible distance séparant leurs visages pour embrasser Aioros, avec une douceur infinie.
Le cœur battant plus fort à ce geste, le Sagittaire se décala légèrement pour se caler contre Saga, le nez dans son cou, enfin prêt à s'endormir.
Ce qui ne tarda pas à arriver, pour le Neuvième gardien autant que pour le Troisième, les deux hommes comblés d'un bonheur qu'ils n'avaient jamais vraiment osé espérer et qui, pourtant, désormais, était à eux.
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A suivre
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Merci d'avoir lu, j'espère que cela vous a plu.
Malgré le manque de retour, je vois aux stats que l'histoire reste suivie. J'en déduis qu'elle est un minimum appréciée, sinon vous ne continueriez pas à lire après autant de chapitres. Je ne marche pas au chantage, aussi, malgré ma déception de ne pouvoir échanger avec plus de personnes et le doute que fait naître le silence des lecteurs, je poursuivrai la publication et terminerai mon histoire, qui compte à ce jour 20 chapitres.
Merci pour le temps que vous me consacrez déjà, j'espère que votre lecture sera plaisante jusqu'au bout.
A dès que possible pour la suite, bonne continuation à vous.
Lysanea
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