Titre : Le fil rouge du Destin

Auteur : Lysanea

Disclaimer : aucun personnage ne m'appartient sauf Letizia et sa famille

Pairing et personnages pour ce chapitre : Shura x Angelo, Marine, Shaina, Letizia, mentions nombreuses des autres.

Rating : T

Note : Bonjour. Merci de venir découvrir ce nouveau chapitre, dans le prochain on retrouvera tout le monde ou presque.

Merci Mini-Chan, je suis contente de savoir que tu poursuis ta lecture et que tu aimes toujours. Et soulagée que ma vision du "nouvel" Angelo te plaise.

Bonne lecture !

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Le Fil rouge du Destin

Chapitre Vingt-et-un : Accepte ce qui est, laisse aller ce qui était, aie confiance en ce qui sera.
(Bouddha)

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Environs d'Athènes
Villa Nea Avgi
(Aube Nouvelle)
Cuisine du bâtiment principal commun
Samedi 16 septembre 1989

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- Tu n'as pas vraiment grandi avec eux, alors ?

Marine sourit à Letizia, assise face à elle de l'autre côté du bar couvert de plats et de divers aliments et accessoires.

- Je vivais dans une autre partie du Sanctuaire, mais nous étions souvent entraînés par nos aînés. Je ne les connaissais pas tous, ils ne se mêlaient pas vraiment à nous, à part nos tuteurs et professeurs.

- Tu es arrivée à quel âge, là-bas ?

- A six ans, comme la plupart d'entre nous. Aioros était présumé mort depuis trois ans, déjà. Je ne l'ai rencontré qu'il y a deux ans. Comme beaucoup d'autres de la même génération, d'ailleurs.

- Je croyais que vous étiez amis d'enfance...

- Des garçons, je ne connaissais vraiment qu'Aiolia, qui m'a entraîné et protégé, expliqua la belle rousse. Il m'a vraiment prise sous son aile. J'étais souvent harcelée à cause de mes origines.

- Vraiment ? Mais pourquoi ?

- Certains considéraient que nos cultures différaient trop pour qu'une asiatique puisse prétendre intégrer le Sanctuaire, tellement ancré dans les traditions grecques. Ce qui est idiot et injuste, d'autant plus que la Fondation Graad s'est liée au Sanctuaire, par la suite, en y envoyant plusieurs orphelins, or, son siège est à Tokyo et l'ancien Président était japonais.

- C'est complètement absurde, en effet. Je suis désolée d'apprendre que tu as eu une enfance difficile, Marine.

- Ce n'était pas simple, mais à force de travail, j'ai été reconnue et acceptée. L'aide d'Aiolia m'a aussi été précieuse. Il me comprenait, car il devait aussi, comme moi, prouver qu'il avait sa place et qu'il n'était pas que le frère du traître au Sanctuaire. Qu'il n'allait pas le trahir non plus. Cela nous a beaucoup rapproché.

- Ça se comprend.

- Mais même sans cela, je sais que je serai tombée amoureuse de lui, assura Marine. Il ne pouvait pas en être autrement.

Letizia sourit, tout en continuant de monter les brochettes apéritives, alternant entre dés de poivrons, ceux de concombres, cubes de fêta roulés dans l'origan, olives noires et tomates cerises, qui allaient être servies avec divers mezzes chauds et froids.

- Ils sont tous très gentils avec nous, mais je me demande quel genre d'hommes sont-ils, au quotidien, quand vous êtes entre vous ?

Marine interrompit son découpage de fromages et jeta un œil vers l'extérieur et le jardin, où les autres profitaient de la piscine après une journée de balades, de visites et/ou de courses.

- Ils ont vraiment chacun leur caractère. Si je devais les présenter en quelques mots, je dirais qu'Angelo est plutôt du genre « je vois, je veux, je prends ». Shura, lui, ce serait « je vois, je veux, j'y vais à fond pour l'avoir, mais seulement si j'y ai droit ». Saga, tout comme son jumeau Kanon, c'est « je vois, je veux, je vais faire en sorte de l'obtenir. »

Letizia était suspendue à ses lèvres, séduite par l'originalité de sa présentation.

- Intéressant ! Et Aioros ?

- Je suis sûre que tu le sais déjà. Il est plutôt « je vois, je veux…

- … mais je regarde autour de moi si quelqu'un le veut d'abord avant de me servir » ? proposa-t-elle.

- Exactement.

Les deux femmes partagèrent un rire, puis Marine reprit sa préparation de l'apéritif en découpant de nouveaux morceaux de fromage, du Kasseri, cette fois-ci.

- Et son frère est pareil ?

- Oh non, du tout, Aiolia, c'est plutôt le genre d'Angelo, mais en plus fier, plus « roi de la savane » : « je vois, je veux, mais je ne bouge pas d'un iota, je l'aurais de toute façon, j'y ai droit. » Tu sais, un peu du style « si Mahomet ne va pas à la montagne, c'est elle qui vient à lui » mais en plus extrême. « Je n'y vais pas, c'est à elle de venir et elle viendra. »

- Tu parles toujours de la montagne ? la taquina gentiment l'Italienne.

- Pas seulement, c'est vrai, reconnut la Japonaise. J'ai dû un peu provoquer les choses pour que ça avance entre nous. Mais il n'agit pas avec moi comme il le fait avec les autres. Il me met toujours en avant, tout comme son frère, mais avec les autres, c'est tout le contraire, c'est lui et nous d'abord.

- Je ne l'imaginais pas avec cette forme d'égocentrisme.

- Disons qu'il est plutôt très fier, surtout dans certaines situations, nuança Marine. Ça ne lui enlève pas sa générosité et son altruisme pour autant. Il se soucie des autres. En fait, ce n'est pas qu'il ne pense qu'à lui, il pense vraiment aux autres, mais il les fait passer après lui et après ceux qui lui sont les plus proches. Et ils se comptent sur les doigts d'une main, tu sais.

- Pourtant, il est très sociable, ça se voit ! Il est ce genre de personnes qui attire l'attention facilement, qui suscite l'envie de le connaître.

- Oui, c'est le cas, il s'entend bien avec tout le monde très facilement. Mais Aiolia garde une distance, malgré tout, peu de personnes sont considérées par lui comme ses proches. Je crois qu'il est l'un de ceux qui fait la plus ferme distinction entre ses amis et ses proches.

- D'accord, je comprends mieux. Il ressemble beaucoup à Aioros, je trouve, sauf sur cet aspect que tu décris. Ça fait au moins une différence notable !

- Ils ont cependant beaucoup de points communs. Tout comme son frère, Aiolia est d'une fidélité et d'une loyauté sans faille, d'un courage exemplaire et inspirant et d'une bonté d'âme exceptionnelle. Il reconnaît la valeur de chacun, il trouve et fait ressortir le meilleur, il encourage à aller de l'avant, il est juste, intègre et droit. C'est un modèle pour les plus jeunes, aujourd'hui, comme il le fut pour moi et comme c'était le cas de son frère, pour sa génération, autrefois.

La belle Italienne observa Marine avec un petit sourire en coin.

- Tu peux paraître froide, comme ça, mais cela se sent que tu es sensible et surtout, que tu aimes profondément ton compagnon.

La main du Chevalier d'Argent se resserra sur la manche de son couteau, alors que ses lèvres s'ourlaient d'un sourire d'une incroyable douceur.

- Cet homme est mon univers, tu sais. Il y a deux ans et demi, quand il est mort… enfin, quand je l'ai cru mort pendant des mois, j'hurlais toutes les nuits de toutes mes forces, à m'en éclater les mâchoires, à m'en briser les os et à m'en percer les tympans. Mais en vérité, aucun son ne sortait réellement de moi. Durant cette terrible période où je n'avais pas le choix que de me lever et survivre à son absence, j'ai aussi dû réapprendre à respirer à chaque seconde. Encore et encore et encore. Une inspiration, une expiration, l'une après l'autre. Je suffoquais toutes les nuits et tous les jours, à chaque instant. Le retrouver a été une véritable délivrance, pour moi. J'ai pris une goulée d'air aussi immense que toutes celles dont j'avais été privée en son absence. Parce qu'il est tout simplement mon oxygène.

- Tu le décris avec beaucoup de poésie et d'amour.

- C'est ce qu'il m'inspire. Et ce que le perdre ù'a fait ressentir.

- J'ai connu cela, moi aussi, quelques heures à peine, quand nous étions adolescents avec Sergio et qu'il a disparu en montagne. On m'avait soudain volé mon avenir et ma vie, rien n'avait plus de sens. J'avais 16 ans, comme toi, à l'époque dont tu me parles, et lui 19. Je n'ose imaginer ce que tu as dû endurer pendant toutes ces semaines.

- Dans notre travail, on nous prépare très tôt psychologiquement à mourir, puisque nous sommes amenés à risquer nos vies pour protéger ce qui doit l'être. On est aussi préparé à la mort de nos camarades, pour pouvoir garder son sang-froid et poursuivre nos missions, dont nos vies dépendent parfois de la réussite. Mais la perte de l'être aimé est plus difficile à gérer que de se retrouver face à sa propre mort, à mon sens.

- Je n'ai pas cette expérience-là. A part une chute mortelle en allant d'un village à l'autre, je n'ai jamais pris de réel risque dans ma vie ! Certains diront que mon four à chaleur extrême est dangereux, mais à moins de tomber dedans la tête la première…

- Je te ne le souhaite pas, au contraire, je prie que tu n'aies jamais à prendre aucun risque !

- Je te remercie ! Puisse le Seigneur t'entendre !

Marine acquiesça, avant de reprendre.

- Pourtant, Sergio et toi, vous vous êtes séparés tôt, si j'ai bien tout compris. C'était après cet événement ?

- L'année d'après, oui, répondit la plus âgée. J'ai menti à Sergio pour qu'il ne reste pas au village à cause de notre relation. Il avait gagné un concours de cuisine important et un grand chef français l'avait repéré, et lui offrait une place dans sa brigade, en formation. Je ne voulais pas qu'il gâche cette incroyable chance.

- Il n'a pas compris que tu faisais ça pour lui ?

- Si, bien sûr. Alors, je lui ai fait croire que je couchais avec un autre garçon depuis quelques temps. J'ai vraiment bien mis en scène le piège et il est tombé dedans. La fidélité, c'est sacré. Heureusement, tout le village était complice, on voulait tous que Sergio ait sa chance. Alors, il y a cru, tout l'y poussait et il est parti…

- Mais il a fini par apprendre la vérité.

- Oui, après plusieurs années, confirma Letizia. Seulement, quand il est revenu au village, j'étais avec Aioros. Il est donc reparti sans que nous ayons même pu parler en privé. On s'était à peine croisés.

- Mais tu l'aimais encore ?

La jeune femme sourit tendrement.

- Je n'ai jamais cessé de l'aimer. C'est mon âme-sœur. En italien, on parle même plutôt « d'anima gemella », d'âmes jumelles. J'ai eu des histoires sympas, mais Aioros est le seul qui m'ait rendu vraiment heureuse, parce que notre relation était authentique, sans mensonges. On savait tous les deux que notre cœur était pris. Mais on a essayé quand même. Seulement, quand Sergio est revenu la première fois, j'ai été prise de court. Et puis, il avait construit une vie ailleurs, c'était un grand chef reconnu, je ne voulais pas qu'il s'enferme au village et gâche tout ce talent et ce qu'il avait solidement bâti.

- C'est pourtant ce qu'il voulait, lui.

- Quand il a su que je n'étais plus avec Aioros, il a pris le temps de régler toutes ses affaires, d'assurer le devenir de ses restaurants et de ses partenariats, puis il est rentré au village. Que j'accepte ou non de vivre avec lui, il voulait être à mes côtés et pouvoir me voir tous les jours.

- C'est très beau. Tu ne pouvais que craquer, en effet.

- J'ai beaucoup de chance, j'en suis consciente, acquiesça-t-elle. Plusieurs de mes amies se sont mariées par dépit, parce que ce n'est pas très bien vu d'être célibataire, passé un certain âge. J'ai subi cette pression, moi aussi, mais comme j'ai perdu mes parents jeune et que j'avais le restaurant à gérer, on m'a comme qui dirait « excusé » et beaucoup plainte, surtout. Au village, tout le monde espérait nous voir mariés, Aioros et moi, mais il n'en a jamais été question.

- Vraiment ?

- Non. Enfin, moi, je n'aurais peut-être pas été totalement contre, on est d'accord, sourit-elle. On parle d'Aioros, si la perfection existait, elle pourrait aisément avoir son visage.

- C'est vrai ! reconnut Marine.

- Alors, ne pouvant être avec l'amour de ma vie, j'aurais au moins été heureuse avec quelqu'un auprès de qui je me sentais bien. Mais Aioros avait cette certitude absolue que quelqu'un l'attendait quelque part et qu'ils se retrouveraient.

- Oui, nous en avons un peu parlé, entre nous, de cette incroyable foi qu'il avait en ses retrouvailles avec Saga.

- C'était assez impressionnant à voir et à vivre, au quotidien. Il avait une foi quasi religieuse en leur Destin. Et la vie lui a donné raison. Aussi, nous n'étions pas dans le même état d'esprit, tous les deux. Finalement, tant mieux, Aioros a retrouvé Saga et moi, Sergio, et comme on dit, nous filons le parfait amour, avec le fil du Destin qui unit les âmes-sœurs.

- Oui ! approuva le Chevalier d'Argent. Je ne te connais pas vraiment, mais de ce que je sais d'Aioros et de ce que j'ai pu découvrir de toi, je pense pouvoir dire que tu le mérites.

- Je te remercie, Marine. Ta maturité me fascine, j'ai l'impression de parler avec une femme de ma génération ! Tu as l'âge de ma nièce, mais c'est réellement un bébé, en comparaison !

- C'est elle qui est dans la normalité, je pense. J'ai grandi bien trop vite, avec de lourdes responsabilités. Mais tu sais, depuis deux ans et l'arrestation de l'usurpateur qui nous dirigeait, on vit tous une nouvelle vie et on profite enfin de notre jeunesse. Je ne suis pas toujours si sérieuse.

- Mais c'est un choix, tu peux utiliser ta maturité ou décider d'être une gamine irresponsable, si tu le souhaites !

- C'est vrai.

- Je ne vous connais pas vraiment et je n'ai pas les détails de ce que vous avez traversé, ni de l'incident qui a conduit Aioros sur nos terres, amnésique, mais apparemment, tout ceci est derrière vous, aujourd'hui. J'en suis très heureuse.

- Et moi donc ! assura Marine en reposant son couteau.

- J'ai terminé les mini-brochettes ! annonça Letizia après un court silence. Enfin, je pense qu'il y en a assez.

- Largement ! Tu travailles à une vitesse impressionnante.

- L'habitude, sûrement, je ne fais même plus attention, répondit la professionnelle avec modestie. Tu veux que je fasse autre chose ?

- Non, c'est gentil, merci pour ton aide. C'est toi qui t'occupes du repas, en plus.

- Cela ne me dispense pas de préparer le reste avec toi.

- Tu m'as bien avancé, c'est très gentil. Il ne reste que les cuissons. Tu ne voulais pas aller te changer, d'ailleurs ?

- Si, mais rien ne presse…

- Vas-y, Letizia, je prends le relais, intervint Shaina en entrant dans la cuisine.

- Ça va ? demanda Marine, alerté par le cosmos vacillant de son amie, mélange de colère et de tristesse.

Elle avait mis ses lunettes de soleil, on ne lisait rien sur son visage, mais son sourire était forcé.

- Oui, juste une petite prise de tête avec Angelo. Il peut être vraiment pénible, parfois !

- Ce n'est pas trop grave ? s'inquiéta Letizia. Sans vouloir être indiscrète…

- Non, ne t'en fais pas, la rassura Shaina en s'installant sur un tabouret haut.

- Ils ont tous les deux un fort caractère, ne t'inquiète pas, ajouta Marine. Ce n'est ni la première dispute, ni la dernière. Je suis même étonnée qu'il n'y en ait pas eu, jusque-là… Mais vas-y, va te changer, si tu veux, c'est bientôt prêt.

- D'accord, merci !

Letizia gagna ses appartements et troqua sa petite robe de ville contre un pantalon de lin qui la protègerait un peu mieux des moustiques qui les assaillaient, le soir venu, et une tunique légère qui lui permettrait de cuisiner, le moment venu.

Elle en profita pour sortir son compagnon Sergio de sa sieste.

- Tu aurais dû me réveiller plus tôt, protesta-t-il en avisant l'heure.

- Tu avais besoin de dormir. Va prendre une douche et rejoins-nous en bas, il reste encore un peu de temps.

- Je fais vite, promit-il en gagnant la salle de bain.

Letizia lui prépara des affaires propres sur le lit et le laissa à sa toilette.

Lorsqu'elle repassa par le bâtiment principal, elle vit Marine et Shaina en grande discussion, alors elle décida de les laisser entre elles, et de retrouver plutôt le reste du groupe près de la piscine.

Notamment Angelo, seul sur un transat.

Elle l'appréciait vraiment beaucoup, c'était l'occasion de lui parler un peu plus longuement…

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Un peu plus tôt
Dans le jardin
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Sortant de la piscine, Angelo attrapa sa serviette pour s'essuyer sommairement, avant de s'avachir sur son transat.

En prenant une bière dans la glacière à côté, il remarqua les yeux de Shaina, allongée sur une chaise longue voisine, intensément braqués sur la piscine, plus précisément sur…

- Hey ! s'écria-t-il en donnant un coup de pied dans sa chaise.

- Toi, hey ! protesta-t-elle en le fusillant du regard. Qu'est-ce qui te prend ?

- Tu veux crever ? demanda-t-il avec un calme des plus alarmants.

- Je te demande pardon ?

- T'as un sacré culot de le reluquer comme ça devant moi.

Nullement impressionnée, malgré son ton menaçant et la teinte métallique de ses iris bleues, la jeune femme reporta son attention sur la piscine et plus particulièrement sur Shura, en effet.

Elle avait un très gros faible pour les bruns, c'était bien connu.
Même si un seul l'intéressait vraiment depuis bientôt trois ans.

A sa décharge, il était difficile de ne pas regarder le Chevalier du Capricorne, torse nu dans la piscine, qui offrait sa puissante et noueuse musculature à la vue de tous.

- On peut toucher avec les yeux, non ?

- Si tu veux les perdre vas-y, t'es sur la bonne voie, j'suis à deux doigts de te les arracher avec les ongles !

- Ça te manque tant que ça ?

Les yeux du Cancer se plissèrent dangereusement.

- Fais gaffe à ce que tu dis, la Vipère, répondit-il sans se démonter, cependant.

Était-elle courageuse, culottée, folle ou suicidaire, Angelo s'en foutait totalement, il ne lui ferait pas de cadeau, si elle continuait à le chercher.

- C'est marrant comme t'es beaucoup moins aimable, quand on est entre nous, fit-elle remarquer en se tournant complètement vers lui.

Il n'était plus Deathmask et elle n'était pas du genre à se laisser intimider, mais elle préférait quand même ne pas trop le provoquer, surtout s'agissant de Shura.

Elle voyait bien que son calme n'était qu'apparent et elle entendait clairement l'avertissement dans son ton.

Angelo reposa sa bière, dont il avait bu plus d'un tiers en une gorgée, et s'essuya la bouche tordue en un rictus mauvais.

Était-ce trop tard, avait-elle déjà été trop loin, Shaina avait-elle réveillé la bête ?

- Ce que je trouve marrant, moi, c'est ton attachement aux causes perdues. Tu vises toujours trop haut. Ça te suffit plus de soupirer après Pégase dans le vent ? Ça te plaît tant que ça d'être ignorée ?

- Vaffenculo ! siffla-t-elle en se levant rageusement pour partir, piquée au vif.

- T'inquiète, contrairement à toi, c'est pas un problème pour moi, ça ! répondit Angelo sur un petit rire sadique.

Shaina, qui s'était déjà éloignée, s'immobilisa un court instant, les poings serrés, avant de reprendre sa marche vers le bâtiment principal.

- Je me demande vraiment ce qu'il te trouve ! put encore entendre le Cancer.

- J'me pose la question tous les jours, murmura-t-il pour lui-même, cette fois-ci, en reprenant sa bière.

*Tout va bien ?* lui envoya Shura en pensées.

Il avait perçu les éclats de voix et les vibrations de cosmos, mais comme les autres, n'avait pas jugé bon d'intervenir.

Angelo et Shaina s'entendaient mieux, mais plus ils passaient de temps ensemble, et plus le risque d'un accrochage s'élevait proportionnellement aux minutes qui s'écoulaient.

*Nickel. Continue de barboter dans l'eau avec ton ballon, t'es trop sexy. Évite juste de me faire bander en public, ça foutrait mal notre Centaure que j'expose ma tente à six places, minimum.

Idiota ! Tu ne reviens pas, alors ?

Non, je suis très bien ici pour admirer le spectacle*, répondit-il en se réinstallant plus confortablement encore, un sourire gourmand aux lèvres.

*Comme tu veux. Mais arrête de me fixer comme ça.

Je te fais bander, à mon tour ?

Tu me déconcentres. Aiolia m'envoie de véritables boulets de canon, à se demander s'il m'a vraiment pardonné la mort de son frère. J'aimerais autant ne pas m'en prendre un dans la figure.

J'aimerais voir ça !

Je n'y tiens pas particulièrement.

Ça me donnerait l'occasion de le remettre à sa place. Ça fait longtemps que je l'ai pas embêté, le petit chaton !

Ça fait surtout longtemps qu'il n'en est plus un. Je te laisse, ´Gelo, et tiens-toi bien, tu as de la visite.

Hein, quoi, mais… ?*

- Je peux m'asseoir, Angelo ?

Le Cancer tourna la tête vers Letizia, debout derrière la chaise longue abandonnée par Shaina, et qui lui souriait gentiment.

- Vas-y, je t'en prie. Sers-toi, proposa-t-il en lui désignant la glacière à ses pieds.

- Merci, accepta-t-elle en choisissant une bouteille de jus de fruits, avant de s'asseoir. Je ne savais pas si je pouvais te déranger, j'ai croisé Shaina et apparemment, vous avez eu des mots… Je ne veux pas me mêler de ce qui ne me regarde pas…

- Pas de soucis. Elle a cru qu'elle pouvait guigner Shura sous mes yeux sans pression. Je lui ai juste rappeler comment ça fonctionne, dans la vraie vie.

Letizia sourit.

- C'est donc pour ça que tu regardais ton compagnon avec tellement d'intensité… T'es sûr que je ne te dérange pas, tu n'as pas à être poli avec moi, tu sais.

- C'est ok pour moi, t'inquiète pas. C'est pas à cause de la Vipère que je mate Shura, j'en profite parce qu'il est dans l'eau, c'est tout. Je peux pas le faire aussi ouvertement, d'habitude, même si on a une plage assez tranquille à côté de chez nous, et même aux thermes, c'est...

- Aux thermes ? le coupa-t-elle, sous la surprise.

Angelo eut un petit rire à cette réaction.

- Ouais, certains ont des piscines, nous on a des thermes, qu'est-ce tu veux !

- Votre organisation s'appelle « le Sanctuaire », j'ai entendu parler « d'arènes d'entraînement » et maintenant de « thermes »… Vous jouez à fond sur l'Antiquité ! fit-elle remarquer. Ce doit être vraiment très beau et impressionnant, si le décor suit.

- Ça l'est. Dommage qu'on ne puisse pas te faire visiter, je sais qu'Aioros aurait adoré.

- Oui, moi aussi, mais je comprends. Il m'a promis des photos, bientôt, il doit demander l'autorisation. Et je comprends aussi pourquoi tu profites de pouvoir regarder Shura librement, sans rien cacher de ce que tu ressens pour lui. Tu ne dois pas avoir beaucoup d'occasions de le faire. Vivre sur son lieu de travail, ce n'est pas aisé. Mais même à l'extérieur, un couple de même sexe n'est pas vraiment libre.

- Clairement. Là, on est vraiment bien. Vous êtes sympas avec ça, en plus. Vous auriez pu être gênés ou mal à l'aise. Même si on se tient correctement, on se comporte quand même comme des couples, surtout les deux chefs, là, un vrai petit couple marié en lune de miel éternelle, se moqua-t-il gentiment en désignant du menton Aioros et Saga dans la piscine, faisant rire Letizia. Et ça vous pose aucun problème.

- Je ne vois pas pourquoi ce serait le cas. L'amour est universel, il prend la forme que Dieu veut lui donner, il lie les êtres qu'Il a choisi d'unir, sans aucune règle discriminatoire.

- Certains disent que cet amour-là, c'est l'œuvre du diable, rappela sombrèrent Angelo.

La jeune femme secoua la tête négativement.

- Le Diable ne connaît rien à l'amour. Alors comment pourrait-il l'imiter pour le faire ressentir à ses prétendus disciples qu'il pervertirait ?

- Tu as une vision très intéressante, Letizia, remarqua le Cancer en terminant sa bière.

Il troqua sa bouteille vide contre une pleine, mais d'eau, cette fois-ci.

- J'ai perdu mes parents jeune, mais ils ont eu le temps de me donner une très bonne éducation. Catholique, oui, mais très ouverte et tolérante sur ce type de sujets, notamment, surtout ma mère. Un modèle que tous leurs enfants ont suivi.

- Je vois ça. Mais y a aussi ce que t'en as fait, de cette éducation. Ça compte.

- Oui, je le reconnais. Mais sans ma famille, je ne serai peut-être pas aussi tolérante, tu connais notre société bien traditionnelle et conservatrice. Et puis, l'arrivée d'Aioros aussi a changé beaucoup de choses, au village. Il nous a ouvert l'esprit, pas qu'à moi. C'est fou comme une seule personne peut bouleverser toute une vie, et même plusieurs. .

- A qui le dis-tu…

Letizia observa Angelo, qui finit par lâcher Shura du regard pour le poser sur elle, un sourcil se levant face à son expression espiègle.

- Je sais à qui je m'adresse, quand je dis cela. Shura est très important pour toi, et je pèse mes mots. Il t'a sauvé, n'est-ce pas ?

- Pourquoi tu dis ça ? éluda Angelo en reportant son regard sur son Capricorne.

Décidément, il avait bien du mal à regarder ailleurs, il était comme aimanté, ses yeux le cherchaient systématiquement.
Son cosmos lui-même se tendait vers le sien, lorsqu'ils n'étaient pas déjà entremêlés, comme bien souvent.

- Tu as ce truc dans les yeux quand tu le regardes, cette petite étincelle qui va au-delà de la reconnaissance et de la gratitude, c'est tellement plus que cela…

- Je crois que ça porte un nom bien connu, la taquina-t-il avec un petit rire.

Elle sourit, nullement vexée, au contraire.

- C'est une manifestation de l'amour que tu lui portes, bien sûr, mais c'est encore plus… absolu, voilà, c'est le terme que je cherchais.

Angelo observa un silence, les sourcils froncés, le regard braqué sur la chevalière de Shura qui ornait son annulaire droit, comme s'il menait une lutte intérieure.

Puis, après quelques longues secondes seulement, son visage se détendit.

- Il a fait plus que de me sauver, il m'a arraché à un monde de souffrances et de perdition pour m'ancrer dans une réalité de lumière et de rédemption, murmura-t-il. J'étais pas un type bien, tu sais, Letizia. J'ai fait des choses horribles, j'étais un monstre de cruauté, à peine humain, parfois. Shura aurait pu me laisser crever la gueule ouverte comme un chien dans un caniveau, j'le méritais mille fois et plus encore. Mais non. Il m'a pas lâché, jamais. Malgré tout ce que j'ai pu faire, il a toujours été là pour moi, il a lutté contre mes démons à ma place, en regardant leur chef droit dans les yeux et en lui disant « tu ne le prendras pas ». Et c'est exactement ce qu'il s'est passé, il m'a empêché de sombrer définitivement, envers et contre tout, à ses risques et périls et bon sang, ils étaient tellement énormes !

La sensation de ses ongles s'enfonçant dans la peau de son bras ramena Letizia à la réalité.
Elle avait été comme emportée par la voix grave d'Angelo, qui charriait tant d'amour et de détresse mêlés, au point de presque lui couper le souffle.

Elle prit une discrète inspiration et frotta la marque sur sa peau rougie, heureusement légère.

- Désolé, je voulais pas te mettre mal à l'aise ou t'effrayer, s'excusa le Cancer en percevant son trouble. C'est derrière, tout ça, t'as rien à craindre.

- Non, non, ne t'en fais pas, il n'y a aucun problème, le rassura-t-elle avec un sourire sincère. Et tu sais, malgré les traits durs de ton visage, j'ai bien du mal à croire que tu aies été quelqu'un de si mauvais.

- C'est pourtant la vérité.

- Je ne doute pas de ta sincérité. Je n'ai pas eu peur à cette révélation, Angelo. Je suis simplement très sensible aux émotions des gens, une véritable éponge, alors forcément, ça m'a touché, ce que tu as dit et la manière dont tu l'as dit. Mais ça va, maintenant. Et je comprends mieux pourquoi Shura est si important pour toi, conclut-elle sur le même ton bas.

Angelo l'observa et jugeant qu'il pouvait continuer, il ne changea pas de sujet et reprit leur discussion, le regard à nouveau posé sur Shura, alors qu'il faisait inconsciemment tourner sa chevalière autour de son doigt.

- Il est juste l'endroit où j'ai ma place. Le dernier visage que je veux voir le jour où je vais crever, et le premier quand j'me réveillerai après. Sauf que je serai sûrement aux Enfers et lui, bien plus haut. Alors, j'veux en profiter tant qu'on est encore au milieu tous les deux, parce que je sais pas pour combien de temps on sera séparé, après, avant notre prochain réincarnation et nos retrouvailles.

- Tu as bien raison, carpe diem, il faut profiter de chaque jour.

- Exactement.

- Mais dis-moi, cette bague que tu portes et que tu tritures, elle était au doigt de Shura, la première fois qu'on s'est rencontré, non ?

Angelo tourna son visage vers elle.

- Ouais, t'es très observatrice. C'est sa chevalière. Enfin, c'est la mienne, maintenant. Il en aura bientôt une autre, on l'a commandé mercredi, elle devrait être prête la semaine prochaine. Jeudi. Ah merde, désolé ! s'excusa-t-il en frottant ses joues vigoureusement.

- Qu'est-ce qu'il y a ? s'étonna sa jeune compatriote.

- Je pensais pas avoir l'air si con en racontant ce genre de choses ! Je me moque tout le temps des gens qui sourient bêtement en parlant de leurs partenaires et me v'là avec sûrement le même air idiot, alors que je peux pas m'empêcher de sourire en la regardant, expliqua-t-il en faisant encore tourner la chevalière autour de son doigt.

Ses yeux brillaient et il avait effectivement un sourire inhabituel aux lèvres. Elles, qui n'avaient longtemps su que dessiner des rictus amers ou cruels, avaient appris à s'adoucir pour lui donner une expression plus amène et engageante, et plus tendre quand il évoquait ou regardait Shura.

- Tu n'as pas l'air niais, je te rassure, je vois plus un homme très amoureux qu'un idiot. Ça te va plutôt bien.

- Ah, merci... Mais justement, c'est pas censé se voir ! Donc, parlons d'autre chose, si tu veux bien, j'ai une réputation à tenir !

Letizia rit à cette demande, qu'elle accepta cependant.

- Aucun problème. Je vais donc revenir sur ce que tu me disais, avant que je ne te parle de ta bague, j'ai une question. Mais avant, je tiens à souligner que c'est très courageux et admirable de ta part de porter cette bague fièrement à ce doigt-là, sachant qu'on l'identifie de plus en plus souvent à une marque d'engagement homosexuel.

- J'aurais préféré que ce soit le majeur pour bien montrer à quel point je les emmerde tous, ces intolérants de mes deux ! grimaça-t-il, mais en se gardant bien de faire le geste pour ne pas insulter Letizia, même indirectement. Ça se remarque pas souvent, parce d'après ce que m'a dit Saga, beaucoup de couples mariés portent leurs alliances à la main droite, en Grèce. C'est une vieille tradition qui se perd, mais y a de tout. Mais je sais que ça a parfois suscité des réactions, quand on était à Athènes avec Shura et qu'on était un peu trop proches. Moi, ça m'a clairement fait jubiler ! Rien que de penser que j'ai pourri la journée de certains me rend heureux d'être en vie !

- Je te comprends, ils m'insupportent aussi au plus au point. Je respecte l'opinion et les croyances de chacun, mais ceux d'entre eux qui insultent ou se comportent mal, je les méprise profondément. J'espère que les mœurs évolueront suffisamment pour qu'un jour, tout le monde puisse se sentir libre d'aimer qui bon lui semble en pleine lumière et en toute légalité.

- On y viendra peut-être pas de notre vivant, mais les choses avancent, faut y croire. Je suis persuadé que dans une prochaine vie, Shura et moi, on pourra se marier et on le fera.

- Ça rejoint ce que je voulais te demander, tout à l'heure : tu crois en la réincarnation, alors ?

Le Chevalier ramené par deux fois du Royaume souterrain se mordit la joue pour ne pas rire, et s'accorda un moment pour réfléchir et ne pas gaffer.

- Quand tu ressens ce que je ressens avec Shura, que j'ai ressenti dès le début, cette espèce de reconnaissance, ce sentiment d'appartenance, de familiarité… t'es forcé de te poser les questions au fil du temps. Jusqu'à ce que ça devienne une évidence et une certitude que tu as déjà rencontré la personne avant même ta naissance. Les corps sont nouveaux, mais les âmes se connaissaient déjà, elles n'ont fait que se chercher et se retrouver.

- Je vois. C'est beau, comme tu le présentes.

- Pour moi, c'est surtout logique.

Letizia hocha la tête et but une gorgée de sa boisson, avant de reprendre le fil de la discussion.

- Je me souviens d'une chose que Saga m'a dit, quand il est venu chez nous au village et qui m'avait marqué. Je l'interrogeais sur les raisons qui l'avaient amené, après plus d'un an, à enfin accepter Aioros et ses sentiments pour lui. Il m'a expliqué qu'il avait fini par arrêter de se demander s'il avait le droit de l'aimer pour simplement l'aimer, sans plus de questionnements. Il a ajouté qu'en cela, il avait aussi pris exemple sur l'un de ses amis, plus jeune que lui mais pour le coup, plus sage et lucide. C'est la première fois que j'entendais parler de toi, Angelo.

- Ah ! ricana nerveusement le Cancer, étonnement touché par cette révélation. C'est vrai qu'on avait parlé de tout ça, tous les deux, et j'avais pas vraiment l'impression de l'aider. Je ne faisais qu'énoncer des évidences.

- Pour toi, qui les avais acceptés, mais pour lui, aveuglé par la culpabilité, elles n'étaient pas encore à sa portée.

- Je suis content si j'ai pu l'aider à ouvrir les yeux, moi aussi, on s'y est tous un peu mis, d'ailleurs. On va dire que c'est un renvoi d'ascenseur, on lui doit beaucoup. Même si j'aurais jamais cru lui servir d'exemple, un jour ! Je crois que c'est la meilleure de l'année, celle-là, s'amusa-t-il encore en buvant un coup d'eau.

- C'est la preuve que les gens et les situations peuvent évoluer pour le mieux. C'est une très bonne chose.

- J'irai pas dire le contraire ! assura Angelo, son regard accrochant celui de Shura durant le court instant où celui-ci se tourna vers lui.

Avant qu'il ne se recentra sur l'énième boulet de canon envoyé par Aiolia, toujours aussi en forme.

Les deux Italiens ne dirent plus rien un moment, Letizia buvant et Angelo observant son compagnon qui s'amusait vraiment, le tout dans un silence confortable.

- Quand ils sont venus nous chercher à l'aéroport, reprit Letizia après cette petite pause, Aioros et Saga nous ont parlé des personnes qui seraient avec nous le premier soir, notamment. Saga m'a dit que tu pouvais apparaître tel un ours mal léché, mais que cela cachait un cœur tendre et une grande sensibilité. Je trouve qu'il t'a très bien décrit !

- J'suis très bien léché ! répliqua Angelo du tac-au-tac, avant de réaliser ce qu'il venait de dire face à l'expression stupéfaite de Letizia. Désolé, c'était pas dans ce sens ! s'excusa-t-il immédiatement en riant. J'me permettrai pas devant une jeune femme si respectable. C'est juste que… rhaaa, mais qu'est-ce qu'il en sait, le bougre ? maugréa-t-il en maudissant intérieurement Saga de l'avoir mis dans cette situation. Je parle pas comme ça avec les autres, pourtant, d'où il a vu que je fais sensible ?

- Vraiment ?

- J'te jure ! On est tous plus ou moins proche, forcément à vivre ensemble depuis tant d'années, mais je suis pas du genre à me confier aux gens, à dire ce que je ressens ! J'dis plutôt ce que je pense, tu vois…

- Oui, j'ai le même à la maison, sourit-elle. Enfin, pas exactement. Mon Sergio fanfaronne en public, mais dès que ça touche à l'intime, il ne dit rien ! Heureusement que c'est aussi mon meilleur ami, nous avons grandi ensemble malgré nos trois ans d'écart. Ainsi, se confier est quelque chose de naturel que l'on fait depuis qu'on est enfant, malgré notre douloureuse et longue séparation.

- Pareil avec Shura. A lui, et notre meilleur ami, je peux causer, à Marine aussi, mais aux autres… non, vraiment, c'est pas mon truc !

- Et que me vaut ce privilège, alors ? s'enquit la belle brune avec curiosité.

- C'est parce que tu viens de l'extérieur, sûrement. Et d'Italie, donc on parle en italien, les autres comprendront pas, même s'ils nous entendent. Enfin, à part Aioros. Ça joue peut-être dans le fait que je me sente à l'aise pour parler de ce genre de trucs persos avec toi. En plus de ce que tu dégages, évidemment.

- Tant mieux, j'en suis honorée et je te remercie pour tes mots.

- C'est sincère. Y a un truc chez toi qui me met de suite à l'aise et je dirais même, en confiance. C'est franchement pas banal. T'es pas banale, comme gonzesse, Madame Del Favero, assura-t-il en lui souriant.

- Arrête, je vais rougir ! Je n'ai absolument rien d'exceptionnel, à par ma cuisine, peut-être ! Tu me le diras après le repas de ce soir.

- Détrompe-toi, y a bien plus, j'en suis la preuve. Sérieusement, je suis un véritable animal sauvage, à la base, t'as pas idée ! J'te connaissais pas, y a quelques jours et pourtant, je te cause de trucs que j'ai jamais dit à personne. C'est pas mon genre, ça, je te le répète, tout le monde te le confirmera.

- Est-ce que ça te dérange ? On peut arrêter de parler de ça, si tu veux… proposa-t-elle sérieusement.

Angelo secoua la tête de droite à gauche.

- Non, c'est sympa, quelque part. Je te l'ai dit, je parle pas comme ça aux autres. C'est pas si mal, en fait. J'aime bien nos échanges.

- Moi aussi. Mais je m'interroge sur un point.

- Lequel ?

- Si tu as toujours regardé Shura comme tu le fais, aujourd'hui et en ce moment-même, je m'étonne que personne ne l'ait vu et surtout, que vous ne vous soyez pas rendu compte plus tôt de l'amour qui vous liait, tous les deux.

- Je le regardais pas pareil, je pouvais pas. Déjà, parce que c'était interdit, les relations entre nous. Et puis, de toute façon, j'avais des ombres dans les yeux, auparavant, les ténèbres assombrissaient mon âme. Elles ne laissaient rien passer.

- Mais en dehors de toute interdiction, tu devais aussi, de toi-même, ne rien laisser paraître… je me trompe ? Si tu étais si mauvais que tu me l'as décrit plus tôt…

Angelo hocha la tête.

- Fallait que je le protège de moi. Il me laissait pas sombrer davantage, mais j'étais déjà bien bas. Fallait pas que je l'entraîne. Et puis, de quel droit je l'aurais aimé, hein ? Je méritais déjà pas son amitié, alors plus… Même encore aujourd'hui, j'ai parfois encore un petit pincement à ce sujet, j'me dis qu'il mérite mieux que moi… mais je peux pas le laisser partir, plutôt crever ! Et surtout, il le veut pas, lui non plus, alors bon…

- C'est le principal. Je ne sais pas ce que tu as subis pour en arriver à te qualifier toi-même de monstre comme tu l'as fait, reprit-elle après un court silence, mais je me sens vraiment désolée pour toi, Angelo.

Le Cancer ricana.

- Tu penses que j'ai forcément été traumatisé ? Y a des gens mauvais par nature, pourtant.

- Tu ne serais pas là aujourd'hui, si tu en faisais partie, fit-elle judicieusement remarquer.

- Vrai, reconnut-il. Mais te sens pas désolée, c'est du passé, tout ça. J'ai été sauvé et pardonné, contre toute attente. J'ai décidé d'en profiter, je te l'ai dit.

- Tu as bien raison. Si le pardon t'a été accordé ainsi qu'une nouvelle chance, c'est que tu le mérites.

- J'en suis pas certain, comme je te l'ai aussi dit… Mais je vais pas manquer de respect à ceux qui croient en moi, à ceux qui ont eu suffisamment de confiance et d'amour pour me ramener.

- Te ramener d'où, de l'Enfer ? plaisanta-t-elle à moitié.

- Exactement.

Évidemment, Letizia n'avait aucune idée et n'en aurait jamais aucune d'à quel point sa métaphore était en fait une réalité pour Angelo.

Mais elle sentait néanmoins tout le poids du passé douloureux dans les propos de son compatriote, appuyé encore par ce simple « Exactement » et elle ne pouvait que l'assimiler à la notion d'Enfer, image populaire des épreuves et événements les plus terribles traversés.

- Il en faut du courage pour se relever et changer. Alors j'insiste, tu penses peut-être que tu ne le méritais pas, mais tu as gagné cela, depuis, j'en suis sûre.

- Merci. Mais je le dois à Shura, ça aussi. Parce qu'il m'a pas juste ramené et laissé au bord du chemin me débrouiller avec ma nouvelle vie et mes nouvelles résolutions, et ma culpabilité, non. Je trouvais pas ma place, et il m'a rappelé que je lui appartenais et que donc, j'en aurais toujours une, à ses côtés. Et que parce qu'il sera toujours là, je pouvais avancer. Ce que je vaux, qui je suis, je l'ai découvert grâce à lui et encore maintenant, et jour après jour. Je sais que tout va bien se passer, parce que la meilleure part de moi, en fait, c'est lui.

- Tu es incroyablement romantique, Angelo, c'est fou ce que les apparences sont trompeuses ! s'exclama Letizia, touchée en plein cœur. Tes mots me bouleversent !

Angelo haussa les épaules, un peu gêné par ses propos.

- Je dis juste ce que je pense et ce que je ressens.

- Mais tu le fais de manière très poétique et touchante.

- C'est mon sang italien, que veux-tu ? On sait parler d'amour, par chez nous !

- C'est bien vrai. Pas aussi bien que les Français, mais…

Cette réflexion fit grimacer le Cancer.

- A ce qui parait, ouais, mais quand je pense à Camus, je me dis qu'on a vraiment rien à leur envier de ce côté-là ! Bon, il l'est qu'à moitié, je pense que son handicap relationnel vient plutôt de son côté russe. 'Fait tellement froid dans ce coin, comment t'veux ressentir la moindre chose et l'exprimer ?

- Camus, c'est le compagnon de Milo, c'est ça ? demanda Letizia.

- T'as retenu ça ? s'étonna Angelo. Attends, je parie qu'il a pas arrêté de parler de lui de toute la soirée !

- C'est ça ! sourit-elle. En même temps, c'était hier soir, cela ne date pas de trop longtemps. Il est vrai qu'on a parlé de beaucoup de choses, avec Milo, mais même quand il m'a donné et expliqué sa recette de moussaka, il a évoqué son compagnon Camus.

- Désolé, ça devait être bien chiant !

- Oh ! Non, pas du tout, au contraire, le rassura-t-elle. J'ai trouvé que c'était plutôt adorable. Il est très amoureux ! Ils sont ensemble depuis longtemps, à ce que j'ai compris, alors c'est vraiment beau que tout soit encore si fort, entre eux.

- Ouais… c'est juste qu'avant, ils étaient obligés de se cacher, et c'était vraiment difficile pour Milo de devoir étouffer à ce point ses sentiments. Et puis surtout, il a passé un moment terrible à croire que Camus était mort. Alors depuis qu'ils se sont retrouvés, il le lâche plus, même si ça fait déjà deux ans.

- C'était pendant la rébellion dont vous m'avez un peu tous parlé indirectement ?

- Ouais, et c'est marrant qu'on l'ait fait, au passage, c'est plutôt un sujet qu'on garde pour nous. C'est encore toi qui as provoqué ça.

- Je ne fais rien de spécial, pourtant, se défendit-elle en souriant.

- Pas besoin. Mais bref, c'est bien ça, la fameuse rébellion, la Bataille du Sanctuaire, peu importe le nom qu'on lui donne chacun de notre côté et sous quel nom te l'a raconté Aioros en premier lieu. On est plusieurs à avoir disparu, à ce moment-là, on était mort pour les autres. Milo en a sacrément bavé, à ce que je sais.

- Marine aussi. Elle m'en a parlé, pas plus tard que tout à l'heure.

- Oui, pour elle aussi., ça a été rudement dur.

Inutile de préciser qu'il ne s'agissait pas de la même bataille…

- Ça peut se comprendre.

- Totalement. Shura et moi, on a la chance d'avoir disparu ensemble. Je crois que si j'étais resté et pas lui, j'aurais pu raser la moitié de la planète. J'exagère à peine.

- En bon Italien, se moqua-t-elle gentiment.

Après tout, ils étaient bien connus pour leur propension à l'exagération.
Si les figures de styles avaient eu une nationalité, l'hyperbole aurait été italienne, à n'en point douter.

Angelo rit à cette remarque.

- En tous cas, ce que je peux voir, moi, c'est que vous êtes vraiment proches, tous, amis ou partenaires de vie. Et même si tu dis que tu te confies peu aux autres, il semble cependant qu'ils te connaissent plus que bien. Surtout Saga. Il vous porte à tous une attention toute particulière. C'est très subtilement différent de la bienveillance solaire qu'il a en commun avec Aioros et qu'ils vous témoignent au quotidien. Je l'ai vu durant ces quelques moments passés en votre compagnie, même s'ils étaient courts et peu nombreux.

Angelo jeta un œil au Gémeau, accoudé avec Aioros au bord extérieur de la piscine qui donnait sur la mer.

Shura avait d'autant plus la pression pour rattraper les lancers de ballons d'Aiolia, car il devait faire barrage pour éviter que leurs deux aînés soient touchés.
Ils étaient à bonne distance, la piscine étant très longue, mais Shura n'avait pas exagéré, Aiolia envoyait de véritables boulets de canon.

Le Capricorne s'était donné pour mission de protéger Saga et le bon moment de détente complice qu'il partageait avec Aioros.
Autant dire que depuis 15 minutes, il n'y avait eu aucune faille à son mur, tous les tirs du Lion avaient été bloqués.

Les remous qu'ils provoquaient ne dérangeaient pas les deux amants, qui suivaient leur affrontement par quelques regards. Tout en discutant et admirant aussi, parfois, la vue spectaculaire qui se déployait devant eux.

- Saga a toujours su cerner les gens, c'est son truc, expliqua Angelo. Il est notre guide, et c'est comme ça depuis qu'on est tout gamin. Lui et Aioros aussi, quand il était encore là.

- Des guides ? releva Letizia.

- Ouais. Ils veillaient sur nous, protecteurs, inspirants, bienveillants et justes. Aioros nous paraissait seulement plus accessible que Saga, qui avait une sorte d'aura, comme s'il était un être supérieur. Pour Shura et d'autres, il était l'égal d'un Dieu.

- A ce point ?

- Vraiment. Aioros n'était pas en reste, mais sa lumière était douce, éblouissante, mais pas aveuglante comme pouvait l'être l'aura de Saga. Ça ne nous empêchait pas de faire des conneries pour autant… Ah ! désolé, ce que je dis doit n'avoir aucun sens pour toi ! s'excusa-t-il en se frottant l'arrière du crâne nerveusement.

Il se demandait ce qui pouvait bien lui passer par la tête pour jacasser comme une pie de la sorte.

Enfin, il connaissait une partie de la réponse, il se sentait vraiment bien avec Letizia, sa parole se libérait naturellement. Mais fort heureusement, il contrôlait parfaitement ce qu'il faisait, il savait qu'il ne dirait rien de compromettant pour le Sanctuaire.

N'empêche que cela ne lui ressemblait pas.
Ce qui ne lui déplaisait pas, au fond, cependant.

C'était juste très étrange.

- Ça ne me dérange pas, au contraire ! Et je comprends ce que tu me décris, à ma petite échelle. Les deux sont solaires, c'est incontestable. Mais il est vrai que Saga dégage quelque chose d'unique. Vous êtes tous impressionnants, bien que différents, même si cela s'atténue, en parlant avec vous. Mais Saga, c'est vraiment autre chose. Aioros n'est pas loin derrière, certes, et je pensais que je le voyais ainsi parce que je n'étais pas très objective, il compte tellement pour moi. Mais en fait, c'est un avis partagé par tous ses proches.

- Clairement.

- Ça se voit que vous les admirez beaucoup et que vous avez beaucoup de respect pour eux. Ça vient donc de votre enfance et de ce qu'ils ont toujours représenté pour vous…

Angelo acquiesça.

- Ils étaient nos deux lumières dans cette vie tellement dure, qui aurait été encore plus merdique sans eux...

- Shura et Aiolia parlent aussi d'eux de cette façon. Cela me fait penser à une phrase d'un auteur que j'aime beaucoup, Alexandre de Palmos, qui dit à peu près ceci, à propos du signe du Sagittaire : « c'est une lumière qui brille dans les ténèbres et que les ténèbres ne peuvent saisir, une étoile filante, une flèche qui indique la direction à suivre, comme un éclair déchire la nuit ». Je trouve que cela colle bien à Aioros !

- Comme un gant !

- En plus, c'est son signe astrologique et il l'a même tatoué sur sa peau. Mais d'après vos propos, Saga correspond aussi à cette description.

- Tout à fait. Et il l'a aussi gravé dans la peau, ce Neuvième signe du zodiaque.

- C'est vrai. D'ailleurs, vous avez un truc avec l'astrologie, non ?

- L'astronomie, plutôt, grimaça-t-il. Pourquoi ?

- Vous portez tous votre signe zodiacal en tatouage, c'est marrant. Et celui de votre partenaire aussi. Enfin non, pas Aiolia, il n'a « que » le Lion, le Sagittaire de son frère et un très bel aigle. Et une chouette, sur la nuque.

Angelo gloussa en imaginant Aiolia porter le signe des Poissons, signe astrologique de Marine, sur n'importe quelle partie de son corps. Cette vision était de loin la plus absurde à laquelle il n'avait jamais pensé de sa vie.

- L'aigle, c'est l'animal totem de Marine, renseigna-t-il Letizia.

- Oh ! Moi qui n'osais pas lui demander, de peur de l'embarrasser !

- Y a pas grand-chose qui l'embarrasse, le Chaton, n'hésite pas, la prochaine fois.

C'était un peu mesquin de sa part, sachant qu'Aiolia pouvait faire une montagne d'une souris, parfois, à cause de sa fougue et de son impulsivité.

- Je note ! le remercia la jeune femme. Au passage, toi aussi, tu as des tatouages particuliers, et très réussis. Certains sont aussi des signes astrologiques, y a les représentations figuratives qui sont facilement reconnaissables, mais certains sont des symboles plus difficiles à attribuer.

- Ce sont des constellations, avant tout. Le signe symbolique du Cancer, sur le poignet gauche, le Capricorne figuratif mi-chèvre, mi-poisson, sur la cuisse gauche et le Capricorne symbolique et astral sur le cœur, énuméra-t-il en les désignant. Et la chouette, sur la nuque.

- Deux capricornes, donc.

Angelo posa sa main sur sa cuisse à moitié couverte par son short.

- Le premier que j'ai fait, c'est le figuratif, ça représente un peu mes deux meilleurs amis, Shura et Aphrodite.

- Aphrodite ? C'est un surnom ?

- Non, c'est le nom qu'il a choisi en arrivant en Grèce. Il vient de Suède, à la base.

- C'est assez surprenant, surtout pour un homme, fit-elle judicieusement remarquer.

- Pas quand on le connaît ! s'amusa Angelo. Je peux pas trop t'en dire par respect pour lui, il aime pas qu'on évoque son enfance, mais son nom de naissance était proche de celui de Freya, le pendant scandinave d'Aphrodite. Ça lui correspondait parce qu'il était très beau dès la naissance. Une beauté androgyne parfaite, froide et inaccessible et qui inspire l'amour et le désir, à ce qu'il en dit avec une grande humilité, comme tu peux le constater…

- En effet ! s'en amusa-t-elle. Et qui est donc du signe des Poissons, si je comprends bien ta logique de tatouages…

- C'est ça. Comme il était un peu vexé de pas avoir son tatouage propre, j'ai aussi fait un 12, ajouta-t-il en montrant le chiffre romain stylisé au creux de ses reins nus. Ça l'a un peu calmé.

- Juste un peu ? s'étonna sa jeune interlocutrice. C'est quand même une marque indélébile !

Angelo eut un petit rire.

- Le truc, c'est que c'est aussi le jour de naissance de Shura, il est du 12 janvier… Aphrodite a vite compris que ça m'arrangeait. Pour quelqu'un d'aussi imbu de lui-même, c'est dur de pas être au centre de tout.

- Je vois. Surtout que vous étiez ensemble, si je me souviens bien.

- Oui. Mais c'est passé quand même, parce que nous trois, on est vraiment lié depuis tout gosses. Et Aphrodite a toujours su pour Shura et moi, il était lui-même amoureux de quelqu'un d'un d'autre.

- Je vois… Et le tatouage que tu as dans le dos, c'est lié à vous trois, également ?

- Ah, celui-là… grimaça Angelo en se redressant pour se tourner à-demi.

. Il y a une épée, une rose et un crâne, trois éléments, comme vous…

- T'as raison. L'épée, c'est Shura, la droiture, expliqua-t-il. La rose, c'est Aphrodite, la Beauté parée d'épines empoisonnées. Et le crâne, c'est moi, la Mort. C'est plutôt gai, hein ? conclut-il amèrement.

- Tu ne l'aimes pas beaucoup, on dirait.

- J'en étais fier, avant. Mais c'est une vision du passé dont j'aurais aimé me débarrasser. Sauf que je peux pas ! Je voulais le cramer en bonne et due forme, mais Shura me l'a formellement interdit.

- Et heureusement ! s'exclama-t-elle. Il existe d'autres méthodes, tu sais. Sergio a un ami qui le fait, je lui ai déjà envoyé une ou deux personnes. Il vit en Ecosse, à Edimbourg, donc si un jour tu veux y faire un tour et joindre l'utile à l'agréable, on peut te laisser ses coordonnées.

- Tu m'intéresses, là. Il fait ça bien ?

- Si j'ai bien tout compris, il les réarrange, il ne les enlève pas. Tu auras un autre tatouage à la place.

- Ecoute, je garde ça dans un coin de ma tête. L'Ecosse ne faisait pas vraiment partie de ma liste de pays à visiter, mais allons bon, puisque j'ai une raison d'y aller…

- Edimbourg est une charmante ville, surtout la partie ancienne, fit valoir Letizia. Je n'y ai passé que deux jours, mais j'ai beaucoup aimé. Sergio y a ouvert un restaurant qu'il a dirigé pendant deux ans.

- Je suis un méditerranéen, moi, les villes du Nord froides et humides, c'est pas mon truc, rappela Angelo.

- Tu pourrais être surpris ! Moi, je l'ai été.

- J'en parlerai à Shura. Merci, en tous cas.

- Je t'en prie. Je te donnerai ses coordonnées, et celles du restaurant de Sergio, qui est dirigé par l'un de ses associés, aujourd'hui. Il vous recevra avec plaisir, il est très sympathique et accueillant, et il adore Sergio.

- Tu me vends vraiment bien ton truc, là.

- Je te donne juste toutes les informations qui te seront utiles, se défendit-elle.

- Je sais bien, et je te remercie, encore une fois.

- Avec plaisir.

Letizia sembla réfléchir un moment, alors qu'Angelo se réinstallait confortablement dans son transat.

- Si Shura a le même tatouage que toi, j'imagine que votre ami l'a aussi, en plus du tien, peut-être ?

- Exact, confirma Angelo. Il a le Capricorne, le Cancer et de magnifiques roses assemblées dans une très belle composition.

- Les roses, encore une fois.

- Ouais. C'est son truc, les roses. Je sais pas si tu le verras, mais si c'est le cas, tu comprendras, je suppose. T'as dit avoir été impressionné par la beauté solaire de Saga, à votre première rencontre, je pense que tu devras être bien assise, si tu te retrouves face à Aphrodite, un jour.

- C'est à ce point ?

- Et plus encore. Je le connais par cœur, j'ai parfois un peu tendance à l'oublier. Mais dès que je me retrouve avec lui dans un endroit qu'on ne fréquente pas habituellement et que je vois comme les gens sont saisis à sa vue, je me rappelle que c'est vraiment pas banal, quelqu'un d'aussi envoûtant. C'est juste que pour moi, il est bien plus que ça.

- Vous êtes très proches, à ce que j'ai pu comprendre.

- Je dirai pas comme des frères, vu qu'on a couché ensemble, mais oui, nos liens sont puissants. Aphrodite m'a aussi énormément aidé, avec Shura, quand tout est parti en vrille, surtout à la disparition d'Aioros. Alors, je suis content que Saga et lui se soient retrouvés, reprit-il vite pour couper court au sujet « Aphrodite » dont il avait déjà bien trop parlé. Et qu'ils aient été nommés à la tête de notre organisation ensemble, c'était vraiment le meilleur scénario possible. Ils sont faits pour cela, c'est tellement évident ! Désolé, du coup, parce que ça veut dire qu'Aioros reviendra jamais chez vous.

- Oh ! Tu sais, je me suis faite à l'idée, depuis leur passage, au printemps dernier, sourit Letizia en tournant son regard vers le couple en question. Dès qu'ils sont apparus dans mon champ de vision, j'ai su. Et en les écoutant ensuite parler de leur vie ici, avec vous tous, j'ai compris que nous ne pourrions même pas essayer de convaincre Saga pour qu'ils s'installent tous les deux à Corniglia. C'était évident. Et je le vois encore plus, aujourd'hui. Vous appartenez à cette terre. Elle est sacrée, pour vous, et à ma petite échelle, je perçois le lien puissant qui vous unit à elle.

Au-delà de son don d'empathie, Letizia était vraiment très intuitive, songea Angelo.
C'était vraiment une personne particulière, il n'exagérait pas en disant qu'elle n'était pas banale.

Dans une autre vie, une autre ère, elle aurait pu être Chevalier…
Ou servir un autre Dieu.

Il envisagea de poser la question à Kanon, afin qu'il interrogeât à son tour son Dragon des Enfers.
Angelo, tout comme Aphrodite, préférait ne pas avoir à faire à Rhadamanthe directement.

L'âme de Letizia n'était sûrement pas une « simple âme », elle portait quelque chose qui lui rendait accessible d'autres niveaux de conscience.
Et qui lui permettait de sentir les connections invisibles qui reliaient les Chevaliers entre eux, mais aussi à leur Déesse.

Car bien évidemment, ils étaient liés à cette terre sacrée, car cette terre, ce Sanctuaire, c'était Athéna, pour eux.

Cependant, il ne prit pas la peine de tenter une réponse, car Sergio et Ernesto les rejoignaient, l'un depuis ses appartements et l'autre, depuis le sentier menant à la plage.

Du coup, les baigneurs sortirent aussi de l'eau et tout le monde s'installa sur les fauteuils ou les transats qu'ils regroupèrent en petit salon.

Marine fut la dernière à prendre place, elle avait préparé un grand plateau apéritif avec Letizia puis Shaina, qui l'avait rejointe après son altercation avec Angelo.

Elle ignora d'ailleurs superbement ce dernier, ce qui le fit rire plus qu'autre chose.

Assis à côté de Shura, épaule contre épaule et sa main sur sa cuisse, peau à peau, rien ne pouvait espérer sérieusement l'atteindre.

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A suivre

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Merci d'avoir lu ce nouveau chapitre.
A dès que possible pour la suite, j'aimerais terminer cette histoire au plus tôt et les derniers chapitres sont déjà bien avancés en écriture.

Quels que soient les retours et malgré les absences de retour et de soutien, je remercie d'autant plus les rares qui DM ou reviews, je conclurais cette fic, par égard et respect pour elles et pour moi-même !

Bonne continuation

Lysa