Titre : Le Fil rouge du Destin
Auteur
: Lysanea
Disclaimer : aucun personnage ne m'appartient
Pairing et personnages pour ce chapitre : Saga x Aioros, Shura x Angelo, Aphrodite, Kanon x Rhadamanthe, Aiolia, Kiki.
Rating : T

Note :
Bonjour à vous ! Merci d'être présents pour découvrir la suite.

Fealina07 : Coucou ! Contente de te revoir, merci d'être là ! J'espère que tu vas définitivement mieux, sans fatigue persistante ! Merci pour tes mots, ça m'a vraiment fait plaisir que tu aies tant apprécié le chapitre précédent. J'avoue que moi aussi, la scène entre Angelo et Shura est celle que j'ai préféré. Et dire que ce couple n'était même pas prévu au départ ! Mais au fil de l'écriture, je me suis attachée à eux. Je suis soulagée qu'il plaise aussi aux lectrices ! Merci encore ! Prends soin de toi !

Mini-Chan : Sawubona ! Je ne sais pas si cela me servira un jour d'apprendre ça, mais on ne sait jamais, merci à toi ! Merci surtout pour ton comm' et ta fidélité, ton enthousiasme. Je suis soulagée quand je lis que tu as apprécié les passages avec tes chouchoux ! C'est un peu grâce à toi, tu sais, je n'avais pas prévu d'écrire autant sur eux, mais comme tu les aimes beaucoup et tu me soutiens au moins tout autant, j'ai voulu les développer un peu, et je suis tombée amoureuse ! J'aimais déjà ce couple chez d'autres autrices, mais je me suis laissée embarquée, ils m'inspirent beaucoup ! Merci à toi. J'espère que tu profites toujours autant de ta formation, des animaux merveilleux d'Afrique du Sud et que ce n'est pas trop difficile. Prends soin de toi !

Bonne lecture à tous.

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Le Fil rouge du Destin

Chapitre Trente-trois : Profitez de ce que la vie vous offre, ne perdez pas votre temps sur ce qu'elle vous refuse.

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Sanctuaire, Maison du Sagittaire
Mercredi 20 septembre 1989

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- Je crois que j'en ai encore trop fait… constata Aioros en déposant l'énorme marmite de pâtes au centre de la table.

Il avait préparé le déjeuner au départ pour Saga et lui, mais s'était vite rendu compte qu'il y en avait beaucoup trop, alors qu'ils partaient l'après-midi même pour la suite de leurs congés.

Ils avaient donc proposé à Angelo et Shura de se joindre à eux, ce qui avait été accepté dès que le mot « pâtes » avait été prononcé.

Connaissant l'appétit d'Angelo, surtout en matière de « pasta », Aioros avait donc relancé une cuisson car pour le coup, si cela avait été trop pour deux, cela était devenu insuffisant pour quatre… et demi.

D'autant plus que Saga avait également invité Aphrodite.

C'était l'occasion de leur parler à tous les trois, pour leur rappeler qu'en tant qu'ainés, en leur absence, ils devaient veiller sur les autres et soutenir Kanon, qui endossait aussi cette charge, ainsi bien sûr que Shion et Dokho auprès d'Athéna.

Mais les deux Chevaliers du passé, bien que déterminés à faire leur travail jusqu'au bout et à la dernière seconde, avaient tout de même déjà un pied sur leur voilier qui devait les conduire autour du monde pour le voyage de leur vie. Le départ était prévu pour novembre, juste après l'anniversaire de Dokho. Il y avait encore beaucoup à faire, et Saga comme Aioros comptaient sur la trinité sacrée des Chevaliers d'Or pour assurer en leur absence.

Ils se retrouvaient donc tous les cinq attablés autour d'une énorme marmite des fameuses penne al pesto d'Aioros.

Ce, au grand bonheur d'Angelo, qui, penché sur le plat fumant et merveilleusement odorant, avait les yeux brillants comme un enfant le matin de Noël devant les cadeaux au pied du sapin.

- Y en aura jamais trop ! assura d'ailleurs celui-ci avec un grand sourire. J'peux me servir comme je veux ?

- Bien sûr, ne te gêne surtout pas ! Comme je viens de le dire, j'ai vu très large.

- Faut pas me l'dire deux fois !

Après avoir d'abord rempli l'assiette de Shura, Angelo se servit effectivement une énorme quantité pour lui, au moins deux parts et demie.
Il s'était quand même assuré qu'il en restait pour tout le monde, il n'était pas rustre a ce point… même s'qu'il proclamait souvent qu'il tuerait pour les pasta d'Aioros.

- Tu vas vraiment manger tout ça, Angelo, sérieusement ? Tu sais que ce n'est pas obligé, si c'est pour éviter le gaspillage, je peux t'en mettre de côté pour…

- Angie n'a pas ce genre de considération, Aioros, le coupa Aphrodite avec un petit rire. Il a juste faim. Et il adore tes pennes au pesto, à raison.

- Je sais, mais t'as un sacré appétit, ce matin, quand même ! Pourtant, on a tous bien mangé, hier soir, y a quasiment aucun reste ! A peine de quoi faire le repas des Bronzes, ce midi, à ce que j'ai cru comprendre.

- Tu connais la formule, au lendemain d'une soirée bien arrosée, c'est quoi le meilleur plan ? rappela Angelo entre deux coups de fourchette. Facciamo

- Facciamo una spaghettata per assorbire tutto l'alcool! compléta Aioros avec un petit sourire.

- Esattamente !

- Dopo vi verrà l'abbiocco. (Tu risques de t'assoupir.)

- Scialla ! (T'inquiète) Beauté, repasse le parmesan, j'en ai pas mis assez !

- Tiens... Dis, tu me casses les noix quand je confonds les spaghettis et les linguines, et quand Aioros parle de spaghettis alors que ce sont des pennes dans ton assiette, tu ne dis rien ! fit-il remarquer avec une petite moue boudeuse.

- Il a jamais été question de spaghettis ! Parle pas de ce que tu connais pas, Beauté !

- Explique, alors ! J'ai bien entendu « spaghettis », ou quelque chose y ressemblant, je suis pas fou ?

- Les spaghettata, c'est pour quand on se sert une énorme assiette de pâtes, peu importe lesquelles.

- C'est un terme générique qui désigne vraiment ce fait-là et pas un autre, observé le plus souvent après avoir bu beaucoup d'alcool, précisa Aioros. Facciamo una spaghettata per assorbire tutto l'alcool! veut dire « mangeons une grande assiette de pâtes pour absorber tout l'alcool ! ».

- Oh ! Je vois. C'est vrai que ce n'est pas la première fois que tu le dis, Angie, se souvînt le Douzième gardien. Et c'est pour ça qu'après une soirée bien arrosée, tu veux toujours manger des pâtes ! C'est carrément comme une tradition italienne !

Le Cancer ne répondit que par un grognement, car il était trop occupé à manger - dévorer - ses pennes.

- Angelo n'est jamais bourré, mais c'est tout comme. C'est aussi ton cas, Aioros, les pâtes à toute heure ? demanda Shura.

- Oui, répondit le Sagittaire avec un petit sourire. Au grand dam de Saga, ce peut-être au milieu de la nuit ou le matin au petit-déjeuner !

- Vous vous prenez souvent des cuites ? s'interrogea Aphrodite. Vous avez l'air tellement sérieux, comme ça…

- Cela nous arrive quand même, confirma Saga. Enfin, pas de cuites, on ne franchit pas la limite, inutile de se rendre malade.

- Ça ne se remarque pas le lendemain, en tous cas, assura Shura. La preuve aujourd'hui, alors qu'on a tous pas mal bu, hier, pour le coup.

- C'est clair, vous êtes toujours frais et dispos, comme si vous vous étiez couchés à 21h après une petite tisane.

- Mais vous croyez qu'on a quel âge ? s'amusa Aioros.

*S'ils savaient ce qu'on a fait hier après leur départ…

J'espère qu'ils ne le sauront jamais, amour ! On va déjà devoir gérer la confession des glaçons que j'ai faite.

Ils auront oublié à notre retour, 'Ros.

Pour une fois, c'est toi le plus optimiste des deux. *
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- Ce n'est pas une question d'âge, mais de responsabilités et de charges qui pèsent sur vos épaules, était en train de répondre Shura.

- Tu as tout dit, mon Shu, approuva Aphrodite. Vous gérez tellement de choses, on s'imagine que le soir, quand vous vous retrouvez, vous êtes trop fatigués pour vous attarder et prendre du bon temps. Enfin au lit, j'imagine que ça va toujours, vu ce qu'on a appris hier, notamment sur l'usage particulier que tu peux faire des glaçons, Saga…

Entendre Aphrodite dire ce genre de choses n'était pas exceptionnel.

Mais que le sujet de ses taquineries grivoises soit Saga et Aioros, ne ressentir aucune douleur dans sa voix, le voir les regarder dans les yeux sans fuir leur regard, ça, c'était inédit.

Et un réel soulagement.

Cela remit même Angelo dans la conversation.
Il échangea un regard entendu avec Shura en lui souriant.

Mais son sourire s'effaça quand il se tourna vers Aphrodite.

- Hey, on parle pas de cul devant un plat de pâtes, Beauté !

- Quoi, elles sont trop prudes, tes pasta, faudrait surtout pas les choquer et qu'elles rougissent comme si elles étaient à la tomate ? se moqua le Douzième gardien avec un petit rire.

Et qui fit aussi bien rire les autres.

- C'est la règle, c'est tout, grommela le Quatrième.

- De toute façon, il n'y a rien pas à s'étendre sur le sujet, tout va très bien de ce côté-là, en effet, trancha Saga en échangeant un regard complice avec Aioros. Et de tous les autres, aussi.

- C'est vrai, ajouta Aioros. On a beau être fatigué, on a aussi besoin de se détendre, de se retrouver, de s'amuser. Car même quand nous sommes ensemble la journée au travail, nous ne profitons pas pleinement l'un de l'autre.

- C'est bien que vous puissiez le faire, se réjouit Shura.

- En plus, si vous arrivez à convaincre Mister Freeze du Verseau, ça pourrait être encore meilleur !

- Oh oui, c'est vrai, tu as raison, Angie ! rit Aphrodite. J'avais presque oublié ce détail !

Aioros soupira discrètement.
Cette histoire allait vraiment les poursuivre longtemps !

Lorsqu'il avait donné sa réponse à Aldébaran sur ce qu'il préférait que Saga lui fît et qu'il avait évoqué certains jeux avec des glaçons, Milo avait approuvé sa réponse d'un enthousiaste et vigoureux « Oh ! oui, je te comprends, surtout ceux en forme de cône avec une double… », avant de s'interrompre brusquement.

Absolument tous les regards s'étaient tournés vers lui.
Enfin, sauf celui de Camus, qui avait levé les yeux au plafond.

Et les regards s'étaient d'ailleurs ensuite reportés sur le Saint de glace.

Le Onzième gardien était déjà devenu le véritable frigo américain du Sanctuaire en distribuant des « glaçons apéro » à la demande, ces fameux petits cubes de glace idéaux car comme ils ne fondaient jamais, ils gardaient les boissons froides sans que l'eau ne vînt les diluer en devenant liquide.

Il était presque certain, au vu de l'intérêt qui brillait dans le regard de certains de ses camarades, qu'il n'allait pas tarder à recevoir des commandes de leur part pour un autre usage de ses glaçons.

En confirmation de ses pensées, la voix au ton lubrique d'Angelo s'était élevée…

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Flashback
A un moment au cours de la nuit passée…

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- Je crois qu'on vient de découvrir une nouvelle fonction à notre frigo américain ! Vous nous avez caché ça, les filous !

- Oh oui ! s'enthousiasma Aphrodite à son tour en battant des mains. Après les « Glaçons apéro », les « glaçons sextoyss » !

- Étant donné qu'il ne faut jamais mettre de la glace en contact direct avec la peau de manière prolongé au risque de brûlure, analysa Shura, l'intérêt de ces glaçons ne réside donc pas dans le fait qu'ils ne fondent pas, mais dans la forme et la taille qui peut leur être donné.

- Ça peut tout de me aussi être en lien avec la température. Ils fondent peut-être moins vite… compléta Kanon, alors que Milo semblait vouloir s'enfoncer sous terre sous le regard glacial de Camus qui ne le lâchait pas.

- Nous devrions réfréner nos ardeurs, aussi intéressantes que soient les perspectives offertes par le pouvoir de Camus, intervint Saga.

Les regards à la fois choqués et amusés se tournèrent vers l'aîné des Gémeaux.

- Il a raison, si nous l'ennuyons trop, il risquerait de fermer boutique, ce serait… dommage, ajouta Aioros, s'attirant le même genre de regards.

- Je peux revenir, c'est bon ? demanda soudain Aiolia du fond de la pièce mais sans se déboucher les oreilles, attirant l'attention sur lui.

Kanon lui fit un signe et il rejoignit le groupe, fronçant les sourcils en découvrant les mimes de ses camarades ou divers sentiments se lisaient, entre amusement, choc et réflexion profonde.

Il regarda Milo qui avait l'air tout penaud, Camus un poil irrite, son grand frère et Saga qui avaient un petit sourire en coin, certains qui leur jetaient des coups d'œil mi gêné, mi étonné, Aiolia ne savait pas trop.

Mais il se félicita de sa décision, ça tout cela lui confirmait qu'il ne voulait vraiment pas savoir la réponse qu'avait pu donner Aioros, il valait clairement mieux ne pas connaître la nature de sa confession intime.

- En fait, intervint Aldébaran, même si y'a réponse était très intéressante et je t'en remercie, ma question était plutôt « Qu'est-ce que Saga aime te faire comme cuisine ? »

Des exclamations, des sifflements et des rires accueillirent les propos d'Aldebaran auxquels personne ne croyaient…

- On peut passer à autre chose ? grimaça Aiolia.

- T'as vraiment loupé un truc intéressant, lui dit Aphrodite.

- Je ne veux absolument rien savoir ! Grand frère, tu veux bien tourner la bouteille qu'on puisse enfin clore le sujet ?

- Bien sûr, 'Lia. Mais je te prie de m'excuse d'avance, car je pense que cela va ressortir à un moment ou à un autre…

- Ça, c'est clair ! assura Angelo. Même avec toute la volonté du monde, c'est trop énorme pour que ça remote pas à tes oreilles.

- Oui, bon, et bien, merci de l'avertissement, mais ce ne se fera pas ce soir, je vous remercie de tenir vos langues.

- Allons détends toi, tu veux boire un coup ? proposa Aphrodite en lui tendant une bouteille en verre. Si c'est pas assez frais, tu pourras mettre des glaçons… dans ta bière hein !

Il termina sa phrase dans un éclat de rire, suivit d'Angelo, Kanon et Aldébaran.
Tout comme Shura, Saga ne put retenir un gloussement alors qu'Aioros toussotait dans son poing.

Mu et Shaka souriaient franchement, tandis que Camus lançait une salve de stalactites des yeux à la cantonade.
Milo, quant à lui, jeta des poignées entières de pistaches et d'amandes sur Aphrodite.

Tout ceci sous le regard perplexe du Lion.
Là c'était certain, il ne voulait vraiment pas savoir.

- Grand frère, je t'en supplie, par Athéna, tourne cette foutue bouteille où je rentre dormir !

Aioros s'exécuta avec un air sérieux absolument pas crédible.

Fin du flashback
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- Peu importe de quelle façon, nous espérons que ce sera toujours le cas, que vous pourrez toujours avoir ces moments, une fois Grands popes.

- Avec ou sans glaçons, ajouta Aphrodite en ricanant. Désolé, j'arrête !

Saga ne releva pas.

- Cela le sera, grâce à vous trois en grande partie, Shura, répondit-il plutôt au Dixième gardien. Vous êtres les aînés, après nous, on compte sur vous pour veiller sur les autres.

- Bien évidemment, assura le Capricorne.

- Shura nous le dit et nous le répète depuis l'annonce de Shion, leur apprit Aphrodite. « Quand Saga et Aioros seront Popes, ce sera à nous de veiller sur les autres. Notre devoir est d'avoir la proximité qu'ils ne pourront plus avoir ! Nous ne devons pas les décevoir ! », imita-t-il très fidèlement son aîné en brandissant sa fourchette avec autorité.

- T'oublies : « Rien ne doit les distraire et perturber leur travail », mima Angelo de manière encore plus fidèle. Ou encore : « Ils ne doivent pas être dérangés par de petits problèmes qui pourront être réglés sans eux, si nous sommes suffisamment attentionnés. »

- Attentifs, je crois que c'était attentifs, le bon terme, le corrigea Aphrodite.

- C'est pareil.

- C'est bon, vous avez fini de vous moquer ? demanda placidement Shura entre deux gorgées d'eau.

- C'est pas méchant, mon Shu, on veut juste rassurer Saga et Aioros. Avec toi à notre tête, aucun risque qu'on prenne les choses à la légère.

- Vous l'avez dit, hier, pendant le jeu d'Action ou Vérité, vous vous en voulez autant que moi de ne pas avoir été à la hauteur avec les plus jeunes, dans notre précédente vie. Nous n'avons pas d'autre choix pour nous racheter que de l'être, dans celle-ci, les excuses ne suffisent pas.

- Oui, on le sait ben…

- Merci beaucoup, Shura, mais ne te mets pas trop de pression, surtout.

- Ce n'est pas le cas, Saga, rassure-toi. Quand la tâche est un devoir et que le devoir est un honneur, il ne peut y avoir de pression.

- Amen… gloussa Aphrodite sans pouvoir s'en empêcher.

Et s'attirant un regard noir du Capricorne, qui le fit replonger dans son assiette.

- Tu sais bien que c'est juste son caractère, Saga, quand t'es impliqué, intervint Angelo, pas aussi amusé que le Douzième gardien, pour le coup. Il se met immédiatement en mode Mister Right. Je crois que te décevoir serait la pire chose qu'il pourrait lui arriver, hein, il mio Shurizo ?

- Après te perdre, perdre Athéna ou Aphrodite, certainement.

Cette réponse cloua le bec du Cancer, qui se retrouva bouche bée, sans voix, saisi par l'émotion.
Non seulement il ne s'y était absolument pas attendu, mais en plus, il passait avant Saga et Athéna, dans cette réponse.

Et Shura ne laissait jamais rien au hasard, ce n'était pas plus anodin qu'irréfléchi.
Sa mâchoire se décrocha à cette réalisation.

Shura, qui avait continué à manger comme si de rien n'était, finit par se tourner vers lui et lui referma la bouche d'un doigt posé sous son menton...
… avant de reprendre tranquillement son repas.

- Nous avons confiance en vous, reprit Saga, que cette scène avait fait sourire avec tendresse.

- Comme tout le monde, d'ailleurs, précisa le Sagittaire tout aussi souriant. Les prochaines semaines où nous seront en congés vous permettront de vous mettre en situation. Nous comptons sur vous pour épauler Kanon, qui lui-même soutiendra Shion, Dokho et Notre Déesse.

- Nous ne vous décevrons pas, promit Aphrodite.

- Y a-t-il des sujets en particulier sur lesquels vous souhaitez que nous soyons plus vigilants ? demanda Shura.

- Nous voulions faire le point avec vous sur les entraînements. Shura, tu as amorcé celui de Shiryu cet été, tout va bien, apparemment.

- Oui, et je le poursuivis. Angelo y participe parfois, quand il ne s'occupe pas de Simon ou alors avec lui, c'est déjà arrivé.

- Angie intervient aussi parfois quand j'entraîne Shun, en alternance ou avec Shaka, précisa Aphrodite.

- J'sais que ça ne m'a pas été demandé spécifiquement, mais j'ai besoin de me dépenser et c'est quand j'ai rien d'autre à faire…

- Il n'y a aucun problème, Angelo, au contraire, nous te remercions, assura Saga. De telles initiatives sont bienvenues.

- Nos cadets ont à apprendre de chacun de nous, ajouta Aioros. Même si certains semblent prédestinés à la succession précise de l'un d'entre nous, s'ils peuvent élargir leurs horizons et leurs connaissances, voire leurs techniques, ils n'en seront que meilleurs.

- Tant mieux, alors ! Marine s'occupe de Seiya, mais avec Shaina et Chiara, je pense que c'est suffisant, même si je reste à disposition.

- Il apprécierait peut-être qu'il y ait un autre homme avec lui, non ? demanda Aphrodite. Même s'il a l'habitude de s'entraîner avec Marine, si elles s'y mettent à trois, ce peut être intimidant pour lui.

- Je ne l'abandonne pas, assura Aioros. Je ne serai pas aussi disponible qu'il le faudrait, mais je ferai en sorte d'avoir au moins une session d'entraînement avec lui un week-end sur deux, dans un premier temps. Et en attendant, Jabu s'entraîne avec lui, il en a fait la demande. Il est conscient qu'il ne pourra jamais rattraper Seiya, mais cela le poussera à se dépasser, il sera tiré vers le haut. Ce n'est pas plus mal.

- C'est aussi le cas de Ichi, Aphrodite, intervint Saga. Nous te remercions encore d'avoir bien voulu le prendre sous ton aile.

Le Douzième gardien reposa sa fourchette.

- J'ai accepté de m'occuper de lui, mais si vous espérez que j'en ferai mon successeur à la garde de la Maison des Poissons, vous allez être déçus.

- C'est déjà très gentil de ta part de le prendre en charge de temps en temps.

- C'est parce qu'il est moche que tu voulais pas ? demanda Angelo avec un sourire narquois. C´est pas sympa, ´Dite !

- Ce n´est pas ça… Enfin, pas que ça. Néanmoins, et je suis désolé si cela vous parait superficiel, c'est une tradition séculaire : les Chevaliers des Poissons ont tous toujours été les plus beaux de leur ère respective. On ne peut pas vraiment dire cela d'Ichi. Mais ce n´est pas la seule raison qui me fait dire qu'il ne pourra pas me succéder.

- Pourtant, Ichi a été envoyé en Finlande pour récupérer l'Armure de l'Hydre, vos environnements d'entraînement sont proches. Sans compter le fait qu'il manipule aussi le poison, et il est né sous le signe des Poissons.

- Peut-être, mon Shu, et c'est ce qui m'a fait accepter de l'entraîner. Mais cela ne fera pas de lui le futur Poissons pour autant, c'est un peu faible. Pisces ne réagit pas à sa présence, même si elle ne le rejette pas non plus. Mu me dit qu'il ne sent pas de lien particulier pour le moment. Nous verrons bien, avec le temps et ce que j'arriverai à faire de lui !

- Je ne sais pas si tu pourras le rendre plus beau, mais peut-être déjà, moins antipathique, suggéra Saga. Car tu as raison, la Beauté ne fait pas tout, mais la séduction est une arme, chez les Poissons.

- Si t'arrives déjà à lui couper les cheveux, t'auras bien avancé, ricana Angelo.

- Il se fait littéralement dévorer par son poison, il va surtout falloir que je lui apprenne à gérer ça, répliqua Aphrodite. Ensuite, je m'occuperai de sa peau, qui en a le plus souffert, en commençant par le réconcilier avec le soleil. Chaque fois que je le vois raser les murs ou se planquer derrière une colonne, j'ai envie de le frapper !

- C'est un bon plan, approuva Saga. Enfin, pas de le frapper, mais tout le reste. Merci encore d'avoir accepté de le prendre en charge.

- C'est toi qui lui as demandé, intervint Angelo, il allait pas refuser ! Il vous a fait patienter pour la forme, c'est tout. Se faire brouter les roses par son petit mouton n'y change rien, il te refusera jamais quoi que ce soit, Saga !

- Je te signale que « il » est là, d'une, et de deux, tu ne m'as pas repris, il n'y a pas cinq minutes, parce que je faisais une allusion au sexe devant ton sacro-saint plat de pâtes, alors que tu viens de le faire encore plus vulgairement et explicitement que moi ?

Angelo désigna son assiette rutilante ou plus aucune trace de nourriture ne demeurait.

- J'ai déjà fini, Beauté !

- Alors tiens, prends un peu de briam pour faire passer l'amas de pâtes qui doit être en train de se reconstituer dans ton estomac !

- T'inquiète pas pour moi, va ! rit le Cancer, tout en se servant quand même une bonne cuillère de légumes.

Shura lui coupa quelques dès de fêta qu'il lui mis par-dessus, car c'était de cette façon qu'Angelo préférait déguster la ratatouille grecque.
Il le remercia en souriant.

- Nous voulions aussi vous parler de Ikki. Vous n'êtes pas spécialement proches de lui, comme peuvent l'être Kanon ou Shaka…

- Surtout maintenant ! l'interrompit le Cancer sans pouvoir s'en empêcher. Désolé, Saga, s'excusa-t-il, alors que Shura le fusillant de son regard assassin. Donc, il se passe quoi, avec Higlander ?

- Qui ?

- On a vu un film au ciné y a deux ou trois jours, Highlander, expliqua Shura. C'est l'histoire d'un homme des Highlands qui est immortel et qui se bat, depuis des siècles, contre d'autres immortels.

- En vrai, ils sont pas vraiment immortels, mais la seule manière de les tuer, c'est la décapitation ! développa Angelo avec enthousiasme. Celui qui arrive à couper la tête de l'autre récupère ses pouvoirs. A la fin, il ne doit en rester qu'un, et le dernier immortel vivant pourra recevoir le Prix, c'est-à-dire plein de connaissances et la capacité d'asservir les humains.

- C'est gai, dis-donc, j'ai bien fait de refuser l'invitation, j'étais clairement mieux à la maison, devant ma télé, avec ma comédie dramatique.

- Mais quel rapport avec notre discussion ? demanda Saga, perplexe.

- Le héros écossais, Connor MacLeod, est surnommé Highlander. C'est un immortel depuis le 16e siècle.

- Comme le Phœnix. Comme Ikki, donc… termina Angelo, avec un air qui criait « logique ! ».

- D'accord, accepta Saga sans relever.

- Et donc, il lui arrive quoi ?

- Vous le connaissez suffisamment pour l'avoir cerné, répondit Aioros. C'est un courant d'air, il est insaisissable. L'Armure du Lion l'a reconnu et il l'a déjà porté, mais il ne veut pas entendre parler de succession éventuelle.

- Le Phœnix est un Chevalier résolument libre, et son Armure est vraiment spéciale, fit remarquer Aphrodite. Nous en avons déjà parlé avec Mu et Shaka.

- Parce qu'elle peut se régénérer seule ?

- Oui, mais pas uniquement, mon Shu. Elle fait partie de ces Armures créées par le Peuple de Mu dont eux-mêmes ne saisissaient pas toutes les capacités. Sa conscience est très éveillée. Ikki est le premier à avoir pu la revêtir depuis sa création. Mu nous a dit une fois que c'est comme si elle l'avait attendu toute son existence. Leur lien est très fort, je dirai même, n'ayons pas peur des mots, indéfectible.

- En effet, concéda l'aîné des Gémeaux. Et on le comprend.

- Mais je sais qu'il a certifié à Shaka que si Athéna le lui demandait, si Elle était en danger et qu'Aiolia n'était plus là, pour une raison ou une autre, il serait prêt à assurer la protection de la Maison du Lion. Avec son armure ou celle du Lion, il n'a pas précisé…

- Oui, Aphrodite, il nous l'a dit, ainsi bien sûr qu'à Athéna et à Shion. Mais nous pensions qu'il serait bon de réussir à le convaincre de prendre cette fonction, un jour, en dehors même de ce scénario.

- Si vous comptez sur Shaka pour se faire, c'est peine perdue. Il n'essaiera même pas, il respecte sa liberté par-dessus tout. Entre nous, je crois que c'est même cela qui l'a fait tomber définitivement amoureux de lui.

- Nous le respectons tous, assura Saga. Nous n'avons pas l'intention de lui forcer la main, ni de le harceler, bien évidemment. C'est déjà une très bonne chose qu'il ait pris cet engagement d'assurer la garde de la Maison du Lion, au besoin.

- Surtout qu'il n'a pas toujours été si catégorique, dans son positionnement lors des batailles, rappela Aphrodite.

- Il a plutôt eu tendance à analyser d'abord et décider ensuite, ajouta Shura.

- Mais il a une raison de prendre plus fermement position, aujourd'hui, et elle se trouve dans le Sixième temple. Il est bien coincé dans la main de Bouddha pour un petit moment, notre Phoenix.

- C'est vrai, compléta Shura. Si garder la Maison du Lion peut empêcher nos ennemis d'arriver jusqu'à celle de la Vierge, il la défendra corps et âme.

- Vous avez tous les deux raison, Angelo, Shura. Mais quoi qu'il en soit, si vous pouvez tâter le terrain de temps à autre, notamment par l'intermédiaire de Shun et de Shiryu, de qui vous êtes plus proches, ce serait bien.

Les trois cadets acquiescèrent.

- Merci à vous. Sachez aussi qu'il n'y aura pas grand monde ici, cette fin de semaine, les avertit Saga. Outre Aioros et moi, Milo et Camus ont demandé quelques jours pour aller en Sibérie, ils partent demain.

- C'est de raconter leur histoire qui leur a donné envie de se remarier ? demanda Aphrodite, taquin.

- Cela doit être lié, puisque ce n'était pas prévu. Enfin, si, Camus devait y aller pour régler l'inscription de Hyoga au lycée et son installation là-bas, mais le voyage était prévu la semaine prochaine. Ils ont changé leur plan, ils y passeront quelques jours tous les deux, puis Hyoga les rejoindra ce week-end et Milo rentrera ensuite, après une journée tous les trois.

- Je vois… Hyoga est donc vraiment décidé à vivre là-bas.

- Oui, Shura, au moins pour la prochaine année.

- C'est peut-être mieux pour lui, au vu de ses sentiments pour Shun, reconnut le Douzième gardien. Cela ne lui fera pas de mal de prendre ses distances.

- Shiryu m'a dit que la ville où Hyoga allait s'installer n'est pas très loin de la frontière avec la Chine.

- Oui, confirma Aioros. Vladivostok est une ville portuaire donnant sur la Mer du Japon, où Seiya, Shun et les autres ont déjà repris le lycée. Alors certes, Tokyo est de l'autre côté, mais ce n'est pas un problème pour eux. Ils restent assez proches, géographiquement parlant. Et ils commencent chacun, à leur rythme, à développer leur communication télépathique.

- Je ne vois pas pourquoi ils s'éparpillent de cette façon. Le lycée de la Fondation Graad est très bien, ils pourraient tous y étudier ensemble, se désola le Douzième gardien. Ils n'auraient pas de problème à arriver dix jours après la rentrée ou à devoir manquer des journées et avoir à l'expliquer, quand ils viennent ici, comme en ce moment. Je sais que cela attriste Shun qu'ils ne restent pas tous ensemble. Il s'était habitué à avoir Ikki avec lui, ces deux dernières années, mais depuis qu'il a fini le lycée en juillet, c'est redevenu un véritable courant d'air.

- Ils seront peut-être obligés de vivre ensemble, à l'avenir, s'ils nous succèdent ici, rappela Saga. C'est peut-être une bonne chose qu'ils vivent chacun leur vie de leur côté, avant cette échéance. Vivre une vie d'adolescents tout ce qu'il y a de plus ordinaire, alors qu'eux-mêmes sont extraordinaires et ont accompli des exploits.

- Et cela, avant même d'envisager notre succession, car le simple fait de s'entraîner dur nécessitera qu'ils passent beaucoup de temps au Sanctuaire, bientôt, dès le lycée terminé.

- C'est vrai, reconnut Shura. En plus, si Ikki vient s'installer chez Shaka…

- Oh là, mon ami, doucement ! le coupa Saga avec un petit rire. Ils n'en sont pas là du tout, en tous cas, Ikki en est loin. Et le connaissant, cela m'étonnerait fort qu'il s'installe ici. Malgré tout l'amour qu'il a pour Shaka, évidemment, ce serait presque contre-nature. Il est résolument libre, et cela l'amène à être constamment en mouvement.

- Peut-être pas dans l'immédiat, mais on ne sait jamais comment évoluera leur relation, fit encore valoir le Capricorne. L'amour peut transformer les gens, nous avons suffisamment d'exemples, ici-même.

- Je te l'accorde.

- Ce qui est certain, intervint Angelo, c'est qu'ils se sont déjà barrés, et ensemble. Je sens pas leur présence.

- Non, en effet, confirma Aioros. Eux aussi vont être absents quelques jours, ils sont à Jamir.

- Sérieusement ? Y a quand même meilleure ambiance pour une lune de miel ! T'aurais pas pu lui donner tes bons plans, Beauté, t'as sillonné le monde pour arroser l'persil avec ton petit mouton, ces derniers mois… Ma ahi !

Aphrodite avait frappé Angelo sans ménagement, ce qui le fit rire plus qu'autre chose.
Mais il perdit son sourire en croisant le regard noir de Shura, encore une fois.

- Va vraiment falloir que t'apprennes à parler autrement devant Saga et Aioros, 'Ge. Cette vulgarité sera encore moins tolérée quand ils seront Popes, c'est inacceptable.

- C'était pas vulgaire, j'ai pas dit « brouter le rosier » cette fois ! se défendit-il sans succès. Bon ok, désolé… s'excusa-t-il en regardant tour à tour Saga et Aioros. Je vais faire attention, promis, Shurizo. Tu m'fais un joli sourire ?

Au contraire, Shura lui tira la langue.

- Hey, et c'est autorisé, ça ?

- Je préfère voir la langue de Shura qu'entendre les obscénités que peut produire la tienne ! assura Aphrodite.

- Nous sommes plutôt d'accord, intervint Saga, et Aioros hocha la tête en signe d'assentiment.

- Va bene…

- 'Ge…

- C'est noté ! promit-il. Et donc, y aura d'autres absents, ces prochains jours ? D'autres lunes de miel ?

- Non, pas ce genre de départ, mais la Princesse Athéna retourne à Tokyo dès demain.

- Donc, les Bronzes aussi.

- Oui, pour le lycée, confirma Aioros. Deux jours d'absence, au Japon, ce n'est pas rien, apparemment, même s'ils n'auront aucun mal à rattraper les cours. C'est plutôt l'image que cela renvoie.

- Raison de plus pour eux de rejoindre la Fondation ! Nous devrions être plus convaincants.

- Non, Aphrodite, répliqua Saga. Nous les avons chacun conseillé, comme les grands frères et les mentors que nous sommes, à leurs yeux. Notre rôle s'arrête-là. Ils sont assez matures pour prendre leurs décisions seuls, sans influence de notre part. Ils le font déjà depuis un moment, en vérité.

- Même Seiya, le plus impulsif des cinq, a grandement mûri, cette dernière année, fit remarquer Aioros. Il reste téméraire, mais il est aussi devenu beaucoup plus réfléchi.

- Oui, vous avez raison, concéda Aphrodite.

Ils abordèrent ensuite quelques autres points de détails, tout en terminant le déjeuner.

- Pour conclure un repas bien copieux, que diriez-vous d'un affogato ? proposa Aioros en se levant. On a un restant de glace maison au congélateur.

- Ma certo ! accepta Angelo avec enthousiasme. Dites, j'ai fait un truc ou quoi, je suis gâté aujourd'hui ! ajouta-t-il en se laissant aller en arrière dans sa chaise, son bras sur le dossier de celle de Shura à sa gauche, sa main tapotant son ventre bien rempli.

- Il n'y avait absolument rien de prémédité, assura Aioros en gagnant la cuisine ouverte, restant à portée de voix.

- Ceci étant dit, tu as fait de gros efforts, hier, en te confiant sur ton passé, intervint Saga.

Angelo grimaça.

- J'suis pas certain que tout l'monde ait apprécié le p'tit plongeon funeste dans le temps.

- Je pense qu'au contraire, ils en avaient besoin, à divers degrés. Cela leur a permis de comprendre certaines choses. Même s'ils n'en ont pas eu besoin pour te pardonner et t'accepter, connaître la vérité, une grande partie, du moins, va les aider à répondre à certaines de leurs interrogations.

- Et sûrement aussi que cela vous rapprochera encore, ajouta Aioros en revenant vers eux avec un plateau bien rempli.

Saga l'aida à préparer les fameux affogato, en disposant les boules de glace à la vanille dans les ramequins. Aioros versa ensuite un espresso bien chaud dans chacun d'eux, avant de saupoudrer de noisettes concassées.

- Mu a déjà fait un pas significatif vers toi, rappela Aphrodite, après les premières cuillères dégustées en silence. C'est bien la preuve que tu as bien fait de te confier ainsi, même si ce n'était pas forcément agréable.

- C'est en grande partie grâce à toi qu'il l'a fait, Beauté. Mais c'est bien, je suis content, évidemment, faut qu'on puisse partager des moments ensemble et que t'aies pas à choisir entre le voir ou nous voir.

- J'aimerais éviter autant que faire se peut, oui.

- Et d'une manière générale, poursuivit le Cancer, je suis soulagé de pas avoir plombé l'ambiance. Le jeu est bien reparti après, y a pas eu de malaise persistant. Et puis, mon Shurizo avait la parole et le regard suffisamment dissuasifs pour que personne n'insiste et me titille de trop…

Il passa tendrement sa main sur la nuque de Shura et l'y laissa finalement, continuant de la caresser sans cesser de déguster son dessert.

- C'est vrai que tu es vraiment toujours très impressionnant, mon Shu, quand tu es en mode Cerbère ! s'exclama Aphrodite.

- Ce n'est pas que moi. Tu as aussi su réagir comme il le fallait, 'Gelo, sans t'énerver ou être agressif, mais en réussissant à faire comprendre calmement ton état d'esprit et tes dispositions.

- Shura a raison. Donc, tu mérites amplement ce repas ! conclut Aioros.

- Grazzie mille.

- Prego !

- Y a pas a dire, c'est vraiment sexy, l'italien, même juste deux mots très courts peuvent donner des frissons, soupira Aphrodite en regardant ses deux aînés tour à tour.

Et deux soupirs lui répondirent, l'amenant à porter son regard vers ses deux autres aînés.
Face à leurs mines déconfites et identiques, il rit de bon cœur.

- Je n'imaginais pas que c'était si dramatique !

- En privé, c'est parfait, mais en public… répondit Saga.

- Je comprends, assura le Douzième gardien. Si ça nous fait de l'effet, à nous, je n'ose imaginer ce qu'il en est pour vous ! Je ne sais pas si je dois vous plaindre ou vous envier.

- Nous envier, affirma Shura. Car malgré l'effet que cela a sur nous et la difficulté qui peut en résulter de garder un semblant de contrôle et de concentration en public, nous adorons cela.

- En effet, confirma Saga en souriant à Aioros. Je ne changerai cela pour rien au monde.

- Dites, j'ai laissé ma moitié pour venir déjeuner avec vous, mais ce n'était pas pour jouer la cinquième roue du carrosse, d'accord ? rappela Aphrodite en voyant les deux couples échanger des regards sans équivoque.

- Pardonne-nous, Aphrodite, s'excusa Saga. C'est dommage que Mu n'ait pas pu se joindre à nous.

- Il était attendu par Kiki et Seiya pour déjeuner, je n'ai pas trop compris où. Je crois que je n'écoutais pas trop, à ce moment-là… expliqua-t-il avec un petit rire. Parfois, j'ai dû mal à rester… concentré sur ce qu'il me dit, quand il est en train de s'habiller ou de se déshabiller, par exemple…

- On a compris l'idée, assura Shura, qui ne voulait pas spécialement avoir plus de détails.

Aphrodite le poussa du coude.

- Nous avons perturbé tes plans, désolé, s'excusa Saga.

- Tu as dit que c'était important, donc je suis venu. Si ça avait été juste pour le plaisir de ma compagnie, même si je vous adore et qu'on ne va pas se voir pendant plus de 15 jours, j'aurais décliné poliment.

- Et j'en suis bien content, assura Saga, effectivement ravi de ne plus être le premier choix et la priorité d'Aphrodite. Merci à toi.

- Je t'en prie !

- Bien, parlons d'autre chose. Angelo, où en es-tu des portraits des Chevaliers pour la Grande galerie du Treizième ? Tu penses que tu auras fini ceux de la génération passée avant le départ de Shion et de Dokho ?

- S'ils partent toujours début novembre, oui, je pense bien. Il me reste trois portraits, les derniers dans l'ordre du zodiaque. Je bloque un peu sur El Cid du Capricorne, grimaça-t-il en reprenant un peu de café. Quelle que soit la manière dont je regarde les croquis de Manigoldo, je lui trouve trop de ressemblance avec Shura. Ça me perturbe vraiment, parce que j'ai toujours le visage de Shura à l'esprit, donc ça fait comme une superposition, et je sais plus qui je dessine. Mais au final, c'est toujours plus Shura qu'El Cid. J'ai rempli un carnet de dessin complet, rien n'y fait, pour le moment.

- Tu ne peins plus directement sur la toile ? s'étonna Aphrodite.

- Pas pour El Cid, justement. J'avais anticipé la difficulté, donc j'ai d'abord essayé juste un croquis, un petit portrait, un crayonné vite fait. Mais quoi je fasse, on dirait juste Shura, peut-être légèrement plus vieux…

- El Cid avait 26 ans, à sa mort, révéla Aioros. Je l'ai vu à travers les souvenirs de Sisyphe imprégnés dans Sagittarius. Et je comprends la difficulté, en effet, Angelo. On dirait deux frères, c'est assez troublant, en vérité. El Cid a peut-être seulement les cheveux plus longs, ils tombaient bas sur sa nuque, mais c'est tout.

- Tu ne serais pas un de ses descendants ? interrogea Saga.

- Je ne sais pas, répondit Shura en haussant élégamment les épaules. J'avoue ne m'être jamais vraiment intéressé à mon histoire familiale ou à mes ancêtres, au-delà de mes parents. Je suis né dans un village du Val d'Aran, en Catalogne, où une partie de ma famille s'est installée pendant la guerre civile, pour se rapprocher de la frontière française, au cas où. Avant cela, la famille de mon père et celle de ma mère étaient toutes les deux établies plus au Sud de la Catalogne depuis des générations.

- Je n'ai rien, dans les souvenirs de Sisyphe, qui se rapporte aux origines d'El Cid, mais je pourrais refaire une connexion avec Sagittarius, on ne sait jamais. Cela pourrait effectivement expliquer cette incroyable ressemblance. Tu en penses quoi, Shura ? Cela ne t'as jamais interpellé ?

- Jusqu'à ce que je tombe sur le carnet de croquis du prédécesseur d'Angelo, il y a plusieurs semaines, je n'avais aucune idée de ma ressemblance avec El Cid.

Cette révélation surpris les quatre autres hommes.

- Capri ne t'a jamais transmis d'images ?

- Je n'ai pas voulu, Saga.

- Mais pourquoi ?

- Monsieur était trop complexé, répondit Angelo pour lui.

- C'est-à-dire ? demanda Saga, très étonné.

Shura recula contre le dossier de sa chaise et croisa les bras.

- El Cid tenait un journal, comme plusieurs autres de ses camarades. Je l'ai lu avant même de recevoir mon Armure. Ne me demandez pas comment j'y ai eu accès, soyez juste conscient que je n'ai pas toujours respecté toutes les règles du Sanctuaire, surtout avant de recevoir Capri.

- Les principales, c'était déjà beaucoup. Et cela n'a jamais eu de conséquences.

- J'ai toujours fait en sorte qu'il n'y en ait pas pour les autres, mais seulement pour moi, si je ne pouvais les éviter, Aioros, en effet.

- Qu'est-ce qu'il y avait dans ce journal qui a bien pu te complexer ? le relança Aphrodite. Tu t'es toujours beaucoup comparé à lui, mais sans jamais tellement t'expliquer...

- El Cid ne s'est jamais vanté de quoi que ce soit, c'était un homme très humble. Mais tout respirait la droiture, la loyauté et l'héroïsme, dans son récit pourtant très succinct. Il allait toujours à l'essentiel, sans fioritures.

- Comme toi.

- Oui, en effet, Saga, reconnut le Capricorne. J'étais impressionné par l'homme que je découvrais, et j'en ai fait mon modèle. Seulement, quand j'ai eu mon Armure, j'ai demandé à Capri de bloquer la transmission de souvenirs, et Shion l'y a aidé, avec son pouvoir de contrôle des Armures. Je ne voulais pas le voir, pas tant que je n'avais pas réussi au moins à l'égaler. Je craignais qu'en le voyant vivant, face à moi, dans toute sa grandeur, je ne me sente incapable de rivaliser avec lui, un jour. Et je suis mort sans avoir pu réellement déterminer si cela avait été le cas. Enfin, lorsque Shiryu m'a ouvert les yeux et que je me suis rendu compte que je m'étais fourvoyé, j'ai eu ma réponse. Je me suis séparé se Capri sans avoir jamais eu accès aux souvenirs de mon glorieux prédécesseur, mort en héros et en protégeant les Bronzes et Athéna. Et en donnant son caractère sacré à Excalibur par le sang des Dieux des rêves. Et depuis notre retour, je n'y ai plus vraiment pensé. Capri ayant gardé cette volonté de ma part comme consigne pendant des années, elle n'a plus jamais abordé le sujet. Enfin, jusqu'à ce qu'Angelo ait été chargé des portraits de la Galerie et qu'il me montre les croquis de Manigoldo. J'ai alors demandé à Capri la transmission complète de l'héritage des Capricorne sans rien omettre. Mais il n'y avait rien sur les origines d'El Cid, je ne crois pas qu'il soit retourné chez lui avec Capri, après en avoir hérité.

Un silence d'intense réflexion suivit l'aveu de Shura.

- Notre ressemblance n'est pas exagérée, reprit le Capricorne, c'est vrai, on pourrait nous croire de la même famille. Cela dit, je ne comprends pas ton blocage, ´Gelo. Il y a quand même des différences notoires, entre nous, et pas seulement la longueur des cheveux.

- Évidemment et je les vois mieux que n'importe qui ! C'est juste que je te vois partout et tout le temps, alors quand je commence à le dessiner, lui, à un moment donné, c'est ton visage que j'ai en tête et envie de dessiner aussi, sûrement. Tu m'inspires plus que n'importe qui… Mais ne vous inquiétez pas, j'me laisse un peu de temps, je continue sur les autres, Dégel du Verseau et Albafica des Poissons, je reviendrai sur El Cid ensuite. Je vais gérer.

- Nous ne sommes pas inquiets, juste impatients.

À cet instant précis en effet, ils semblaient tous plus émus que soumis à une quelconque inquiétude.
Les explications très terre-à-terre d'Angelo étaient pourtant très touchantes, respirant l'amour qu'il portait à son Capricorne qui ne quittait jamais son esprit.

- Quand tu feras le portrait d'Albafica, tu veilleras bien à ce qu'on remarque immédiatement que des deux, c'est moi le plus beau. Je compte sur toi, Angie.

- Inutile de le préciser, Beauté, c'est évident ! sourit le Quatrième gardien à son meilleur ami.

- D'ailleurs à ce sujet, Aphrodite, j'ai entendu dire qu'Angelo avait fait un magnifique portrait de toi, intervint Saga. Est-ce qu'on pourra le voir, un jour ?

- Tu aurais pu le voir il y a bien longtemps, si tu avais accepté de venir dans ma chambre… répondit-il, taquin.

Mais ni Saga, ni Aioros, ne le prit mal.
Au contraire, ils lui sourirent.

- Ce n'est pas trop tard, même si ce sera pour des raisons différentes... si ?

- Bien sûr que non. Vous venez quand vous voulez, tous les deux, vous êtes les bienvenus ! Venez même déjeuner ou dîner à la maison, ce serait parfait ! Je ferai des gâteaux de la princesse (1).

- Celui qui est vert avec une rose sur le dessus ? demanda Aioros. Et que tu avais fait pour l'anniversaire de Saga et Kanon ?

- Oui ! J'ai cru comprendre que tu les avais bien aimés, Saga.

- J'en ai dévoré une dizaine à moi seul, en effet. C'est un pur délice !

- On y aura droit, nous aussi ? demanda Angelo. On les adore tout autant, et t'en fais pas souvent !

- Ça dépend, on verra le jour J. D'ailleurs, c'est toi qui leur as dit pour le portrait ?

- Per niente !

- Ce n'est pas moi non plus, assura Shura, alors qu'Aphrodite se tournait vers lui.

- C'est Mu, révéla Saga.

- Ce ne pouvait être que lui, ce sont les trois seuls à l'avoir vu… Ah non, il y a Shun, aussi.

- Qu'est-ce qu'il foutait dans ta chambre ?

- On a dormi ensemble, une ou deux fois, après une soirée à la maison. Quoi, Angie ? C'est comme un petit frère, pour moi, où est le problème ? Nous aussi, on a souvent partagé nos lits !

- Mais il est jeune…

- Et alors, j'ai pas couché avec lui ! Mon lit est un Queen size, je te rappelle, on dormait à l'aise tous les trois dedans, avant. On aurait pu facilement mettre Aldébaran entre Shun et moi !

Cette image fit rire tout le monde par son absurdité, y compris Aphrodite.

- Bref, pourquoi Mu t'a parlé de ce portrait, Saga ? Ce n'était pas un secret, mais cela m'intrigue.

- Lorsque l'idée de réaliser la Galerie des Chevaliers a été avancée, Mu était présent. Comme il a beaucoup travaillé sur les Archives, il était à même de nous dire si nous avions assez de matière pour faire tous les portraits. Il nous a alors parlé du carnet de croquis de Manigoldo du Cancer, où de nombreux dessins des Chevaliers de la précédente ère étaient figurés. Nous pensions trouver un peintre à Rodario pour la Galerie, mais Mu nous a suggéré de te proposer de t'occuper de la réalisation des tableaux, Angelo, car tu étais aussi doué que ton prédécesseur. Ce qui nous a étonné, car nous ne t'avons jamais vu dessiner ou exprimer un quelconque talent artistique…

- Euh… si, intervint Aphrodite, seulement, il avait des goûts douteux et assez… morbides.

- Évidemment que je ne fais pas référence à cela, répondit Saga. Je n'avais également pas le souvenir que tu étais le peintre derrière l'immense portrait du Lémure en Pope. Quoi qu'il en soit, Mu nous a assuré que tu avais énormément de talent et que tu serais parfait pour cette tâche.

- Il a dit ça ? s'étonna le Cancer.

- Oui, mot pour mot. Il a ajouté qu'il te suffirait d'avoir quelques termes pour décrire les personnes et tu serais capable de les faire ressentir dans ton tableau. Il avait l'air si impressionné et convaincu que nous l'avons cru sur parole.

- C'est vrai qu'il avait été très marqué, la première fois qu'il a vu mon portrait, se souvint Aphrodite. Je ne l'avais encore jamais vu avec une telle expression.

- Comme nous tous, 'Di. Qui ne le serait pas ? Ce tableau est une gifle en pleine figure. Ta beauté et le talent d'Angelo ne pouvaient pas produire un autre effet.

Saga et Aioros se regardèrent, puis se tournèrent vers Aphrodite, une expression envieuse et impatiente sans équivoque sur le visage.

- D'accord, on peut y aller maintenant, un rapide aller-retour, si vous avez le temps.

- Allez-y tous les trois, on reste débarrasser et ranger, leur dit Shura. Ça vous en fera gagner. Et c'est la moindre des choses pour nous avoir invités.

- Vous n'êtes pas obligés, nous le ferons en revenant, nous avons le temps, encore.

- Vous occupez pas de nous, insista Angelo, on gère.

Saga et Aioros finirent par accepter et après les avoir remerciés, ils s'en allèrent avec Aphrodite.

Ils gagnèrent rapidement le Douzième temple, les appartements de son gardien qu'ils connaissaient et la chambre, où aucun des deux n'était jamais entré.

Décorée avec beaucoup de goût et de subtilité, plusieurs éléments auraient pu retenir leur attention : le magnifique poêle à bois et fonte, le sublime lit à baldaquin sculpté à motifs de fleurs et de végétaux, aux rideaux de velours d'un vert profond, style 19e siècle britannique ou français, tout comme la commode et la grande armoire qui occupait tout un pan de mur.

Mais c'était inévitablement l'objet même de leur visite qui capta immédiatement leurs regards et les saisirent, leur coupant presque le souffle.

Une gifle, oui, Shura n'avait pas exagéré.

Mesurant facilement entre 1,60 et 1,80 mètres de hauteur, le tableau était accroché au-dessus de la commode, face à la fenêtre qui devait l'éclairer une bonne partie de la journée, vue l'orientation de la pièce.

Aphrodite y était bien évidemment le sujet principal.

Son corps élancé semblait surgir d'un buisson de ronces, celles-ci entourant d'ailleurs le beau Chevalier, jusqu'au cadre du tableau, rejoignant celles qui y étaient sculptées dans un trompe-l'œil parfait.

La peinture et la réalité du bois se mêlaient dans une illusion troublante.

Aphrodite, au centre de la composition, apparaissait de prime abord comme entravé par le buisson épineux, dont les lianes s'enroulaient autour de ses poignets et le bas de son corps nu, opportunément dissimulé, et mut par un élan libérateur qui le faisait se tendre vers l'avant.

Mais en réalité, les ronces et les roses accompagnaient cet élan et ne cherchaient pas à le maintenir captif.
Il n'était pas prisonnier, mais enlacé presque amoureusement.

Sa longue chevelure flottant au vent ne s'était pas accrochée aux épines, Aphrodite les portait comme des bijoux ou une couronne.
Une couronne d'épines, comme la Sainte couronne vénérée par les Chrétiens, dont les soldats romains coiffèrent le Christ pour se moquer de sa prétendue royauté.

Quand Aioros le lui fit remarquer, Aphrodite leur expliqua qu'Angelo n'avait pas fait cela innocemment et que c'était totalement voulu. De la même façon que lors de cet épisode de la Passion du Christ, le Cancer avait mis une couronne pour se moquer de celui qui se prétendait Chevalier d'Athéna, mais qui n'avait, à cette époque, qu'un seul Dieu et Maître en la personne de Saga.

Angelo se l'était permis car il était dans le même cas.
Et Aphrodite avait adoré autant le tableau que sa symbolique.

- Mu y voit plutôt la représentation anthropomorphique de créatures mythiques de certains folklores, leur dit encore le Douzième gardien. Il m'a parlé par exemple du Qilin chinois, qui mêle le lion, le cerf et d'autres animaux encore. La magnifique crinière du lion serait devenue mon abondante chevelure aux ondulations soyeuses, et les ronces qui la parcourent rappelleraient les bois du cerf ornant le front de la chimère.

- C'est un peu difficile de faire le lien sans connaître la créature de comparaison, fit remarquer Saga, très ému.

- Au final, le pourquoi du comment et le sens de cette toile importent peu. Elle est tout simplement magnifique. Et âs seulement parce que je le suis.

- Le mot est faible, assura Aioros. C'est fabuleux, et les détails sont incroyables de précision. Ton regard est baissé, mais le bleu de tes yeux qu'il laisse tout se même filtrer est le même que les tiens, leur lumière est intense et mélancolique. Les ronces et les roses semblent si réelles qu'on a l'impression qu'on pourrait s'y blesser. Quel talent, cet Angelo !

- Et quel cachotier ! ajouta Saga. Les esquisses qu'on a vu jusqu'à présent nous permettaient déjà de dire qu'il était doué, et quelque part, le souvenir que j'ai du portrait du Lémure aussi, tellement saisissant et terrifiant…

- Oh oui, il faisait sursauter toutes les personnes qui entraient dans la salle du Trône, la première fois, se souvint Aphrodite en grimaçant.

- Il était très réaliste. Mais là… c'est encore un autre niveau.

- Ça promet, s'enthousiasma Aioros, la galerie va être magnifique !

- C'est certain, confirma Aphrodite.

Saga et Aioros n'arrivaient pas à détacher leurs yeux du tableau.
Ils n'en revenaient toujours pas qu'Angelo ait pu dissimuler un tel talent.

Il fallait reconnaître que la décoration de son Temple avait souvent été de très mauvais goût.
Enfin, le hall de la Maison du Cancer, au temps de la garde sanguinaire et sadique de Deathmask.

Aioros ne l'avait jamais vu, mais il en avait longuement entendu parler.

Aujourd'hui, les appartements d'Angelo étaient parmi les mieux agencés du Sanctuaire.
En toute simplicité, certes, mais avec beaucoup de goût et d'harmonie.

C'était naturel et instinctif, chez lui, il ne voyait pas cela comme une passion ou un loisir, il n'était pas spécialement féru de décoration d'intérieur.

C'était assez surprenant, en soi.

Ils en dévissèrent encore sur le chemin du retour vers la Maison du Sagittaire, et les deux aînés firent part de leur réflexion à Angelo, l'artiste insoupçonné du Sanctuaire, qu'ils félicitèrent aussi et surtout, bien évidemment.

Les cinq hommes échangèrent encore un très court moment, car même s'ils étaient bien, là, à discuter, les trois invités devaient laisser leurs aînés se préparer à leur départ pour le Canada, allant eux-mêmes vaquer à leurs propres occupations, car l'après-midi était déjà bien avancée.

Saga avait raccompagné Aphrodite et Shura vers la sortie côté Dixième temple, alors qu'Aioros avait escorté Angelo côté descente vers le Huitième et suivants, discutant de Simon avec lui.

Mais si Shura était bien remonté chez lui, Aphrodite, lui, était resté discuter encore un peu avec Saga.

Peut-être dû au fait que la relation d'Aphrodite et de Mu était à présent officialisée, les deux hommes avaient tous les deux sentis qu'ils avaient besoin de ce moment privé.

Ils s'étaient donc assis à même les premières marches - ou dernières selon le sens de circulation - du Grand escalier - surplombant les huit premiers Temples, même s'ils ne voyaient vraiment que les trois premiers, juste en dessous du Neuvième, et une bonne partie du Domaine sacré.

Après la grosse journée et soirée de festivités de la veille, aujourd'hui était un jour de repos pour tout le monde ou presque, il n'y avait pas grand monde qui circulait.

- Je n'ai plus mal, Saga, vraiment, était en train de dire Aphrodite. Penser à toi, te regarder, vous voir ensemble et si amoureux, Aioros et toi, ce n'est plus douloureux, aujourd'hui. Je vous comprends, même.

- Je peux le sentir, en effet, et j'en suis tellement heureux, si tu savais ! Tu ne méritais pas une telle souffrance. Je voulais être là pour toi, pour la diminuer, mais je ne savais pas comment t'aider.

- Tu ne pouvais rien faire de plus, tu n'as rien à te reprocher. Tout venait de moi. Je t'aimais tellement, Saga… Je crevais littéralement d'amour pour toi, ça brûlait chaque cellule de mon être, je me consumais dans une souffrance atroce et infinie, c'est vrai. Quand tu étais possédé, je souffrais, car il n'était pas toi, tu n'étais pas lui, cette illusion était terrible… se souvint Aphrodite en serrant les poings sur ses cuisses. Je voulais tellement que ce soit toi… Et à notre retour… Tu étais tel que je t'avais toujours connu et je ne t'en aimé que plus encore. Je suis retombé amoureux de toi à la seconde où j'ai posé mes yeux sur toi, à l'infirmerie, malgré la confusion du moment, la présence d'Athéna que je n'avais jamais vu, encore, Son cosmos si puissant, doux et chaleureux… Mais il n'y avait qu'Aioros, que tu te l'autorisais ou non. Il imprégnait chaque cellule de ton être…

- Je suis…

- Non, ne sois pas désolé, tu me l'as déjà dit, et je me répète, tu n'as pas à l'être, le coupa-t-il en lui souriant. C'était comme ça et j'ai accepté cet amour à sens unique autant que la douleur qu'il gênerait. Comme l'envers et l'endroit d'une même pièce, l'un n'allant pas dans l'autre. Angelo et Shura me disaient que seule la rencontre avec la véritable personne qui m'était destinée pourrait me délivrer de cet amour insensé. Mais je n'avais jamais imaginé possible d'aimer quelqu'un d'autre comme je t'aimais, c'était inconcevable pour moi. Cette personne ne pouvait exister, et notre première vie m'a donné raison.

- Mais cette seconde chance t'a donné le temps et l'occasion qu'il te manquait pour la trouver.

- En effet, et c'est un véritable miracle !

- Tant mieux. Qu'Athéna soit louée.

- Et grâce lui soit rendue, ajouta Aphrodite, reconnaissant envers sa Déesse. Tu sais ce qu'Elle nous a dit, à Mu et moi, hier soir ?

- Je vous ai vu discuter, en effet, et j'imagine qu'Elle vous a félicité et s'est réjouie pour vous.

- Oui ! Et Elle a ajouté ces mots que je n'oublierai jamais, je pense : Quand deux personnes tombent si profondément amoureuses l'une de l'autre dans une réalité hors du Temps et échappant à toute prévision, le Destin lui-même retient son souffle.

- Je comprends que cela t'ait touché. Tu m'avais dit, une fois, que tu savais que Mu et toi n'étiez relié par aucun fil rouge, que vos âmes étaient inconnues et avaient presque même été ennemies. Cela a dû te rassurer d'entendre notre Déesse prononcer ces mots.

- C'est vrai, Elle a visé juste, comme toujours. Nous avons déjà résolu, Mu et moi, de tisser notre propre Destin et pourquoi pas, de nous aimer si fort que nos âmes auraient envie de se retrouver, après notre mort.

- C'est un très beau projet de vie ! Je vous souhaite de le réussir, mais je n'ai aucun doute à ce sujet. Je peux déjà dire que ton bonheur actuel est aussi fort que ne l'était ta souffrance passée.

- Merci, Saga. Et je pense aussi que je suis aussi heureux aujourd'hui que je n'étais triste, hier. Mais tu sais, d'une certaine façon, parce que je suis un peu tordu, sûrement, j'aimais cette douleur, j'aimais cette blessure, car elles étaient toi, et tu faisais ainsi partie de moi. Angelo a l'habitude de dire que Shura est la meilleure part de lui-même. Sur le même schéma, je peux aussi dire que tu as été la part la plus triste de moi-même, celle qui ne m'a jamais appartenu. Et là, où, aujourd'hui, Mu est devenu la meilleure partie de moi.

- C'est ce que je pouvais espérer de mieux.

- Cette fois, tu es vraiment débarrassé de moi et de mon amour encombrant !

Saga sourit, se souvenant parfaitement de la discussion à laquelle Aphrodite faisait référence.

- Tout comme la première fois où tu m'as fait cette réflexion, et toutes les fois où on en l'a évoqué, je t'affirme à nouveau que ce n'était absolument pas ce que j'avais en tête. Ton amour pour moi ne m'as jamais posé d'autre souci que la souffrance que cela t'occasionnait.

- Il était quand même encombrant… J'ai essayé de te séduire dès notre retour. Quelle plaie !

- Tu n'étais pas sérieux, tu étais encore enfermé dans ton rôle de mauvais garçon.

- Qu'en sais-tu, si je n'étais pas sérieux ? minauda-t-il avec une moue séductrice.

- Lorsque Aioros est parti plusieurs mois, alors que je craignais de l'avoir perdu définitivement et que tu m'as si souvent soutenu, tu n'as jamais cherché à en profiter. Jamais. Tu aurais pu essayer de m'embrasser, insister pour dormir avec moi et tenter quelque chose, me faire boire pour lever mes verrous, c'est exactement ce qu'aurait fait une mauvaise personne. Mais non, pas toi. Toi, Aphrodite, tu as été extrêmement respectueux. Cela n'a pas été facile pour toi d'être si près de moi, je l'ai bien senti. Et pourtant, tu as continué à m'apporter ton soutien.

Aphrodite secoua la tête avec un petit sourire triste.

- Ta détresse était plus douloureuse et pesante que la mienne. Se sentir impuissant à soutenir quelqu'un qu'on aime si fort, c'est difficile. Et frustrant, aussi. Tu dépérissais par manque d'amour comme une plante sans eau ou sans soleil, moi, je t'aimais à en crever, mais je n'étais pas ton soleil et mon amour ne servait à rien.

- Tu m'as énormément soutenu. Que ce soit ton amour ou ton amitié, aucun des deux n'a été inutile.

- Tant mieux. Sais-tu ce que je redoutais le plus, Saga, depuis notre retour ? demanda-t-il après un court silence.

- Dis-moi.

- De n'avoir aucune place dans ta vie, et pire, que tu me détestes ou me méprises. C'est peut-être aussi cela qui m'a retenu. Je savais déjà que tu ne m'aimerais jamais, j'ai très vite compris que tu ne me céderais pas non plus. Alors franchement, le jeu n'en valait pas la chandelle. A trop en vouloir, j'aurais tout perdu.

- Tu avais dit la même chose pour Mu.

- Oui, mais au final, j'avais raison d'en vouloir plus, puisqu'il était prêt à m'en donner plus. Cela fait toute la différence.

- En effet. Pourquoi craignais-tu tant que je te méprise ?

Aphrodite étendit ses jambes devant lui à travers les marches de l'escalier.

- Tu me poses sérieusement la question ? Alors que j'ai profité si longtemps de ta possession pour… coucher avec toi… enfin, ton corps… Tu aurais pu me détester et me mépriser pour cela.

- Cela ne m'est même pas venu à l'esprit.

- Je sais, j'ai bien vu, quand tu es venu me parler au terme de ton chemin de croix à travers les Maisons. Mais je me disais qu'un jour, peut-être, tu réaliserais pleinement et tu serais alors dégoûté.

- J'ai réalisé, crois-moi, et je ne le suis pas. Je ne le serai jamais. Tu comptes beaucoup pour moi, Aphrodite.

La Douzième gardien tourna son visage vers son aîné en souriant, sa joue posée sur ses genoux qu'il avait ramené contre son torse.

- Tu t'autorises enfin à me le dire.

- Cela n'aurait fait que te blesser de l'entendre, avant. Tu n'étais pas en état d'accueillir ce genre de sentiments, alors. J'ose croire que c'est différent, aujourd'hui. Me serais-je trompé ?

- Comme si c'était possible ! s'amusa Aphrodite en se redressant. Tu es toujours dans la justesse, Saga, encore maintenant. Je l'entends et je peux l'apprécier à sa juste valeur. Merci d'avoir tant pris soin de moi, d'avoir tout fait pour me rendre tout moins douloureux, pour…

La voix d'Aphrodite se brisa.

- Viens, lui dit-il en lui ouvrant les bras.

- Je vais bien, réussit-il à peine à articuler.

Saga ne réitéra pas sa proposition.

Ils étaient assez proches pour qu'il ait simplement à refermer ses bras autour de lui, mais il ne voulait rien lui imposer.
Il demeura simplement les bras ouverts à le regarder avec une telle intensité dans la douceur, que le cadet craqua.

Il s'y réfugia et savoura longuement l'étreinte de son aîné.
Saga lui caressait tendrement les cheveux, le gardant contre lui sans manifester de gêne, de lassitude ou d'envie d'être ailleurs.

- Si tu ne me repousses pas, je vais rester là des années, tu sais ? le taquina Aphrodite sans bouger.

- Tant que tu le souhaites, on peut rester comme ça, cela ne me dérange pas. Quelqu'un finira par venir nous trouver, de toute façon.

Le Douzième gardien gloussa.

- Je ne sais pas qui nous trouvera en premier, mais certains risquent de faire une drôle de tête… Rien que pour ça, je crois que je vais rester.

- Vraiment rien que pour ça ?

- Hey ! C'est pas du jeu !

Saga ne répondit rien, se contentant de sourire, les yeux clos, sa main passant et repassant toujours dans les cheveux de son cadet.
Celui-ci leva les yeux vers lui et l'observa un moment en silence, n'ayant jamais eu cette occasion de le faire.

Le Lémure avait beau posséder son corps, sa nature-même d'entité maléfique en avait déformé les traits de son visage, le rendant dur, sec.
Ils avaient à présent retrouvé leur douceur, malgré la mâchoire anguleuse et les légères marques des épreuves traversées.

Tout comme ses yeux, que Saga avait rouvert en se sentant si attentivement observé.
Ceux du Lémure avaient abrité un brasier rougeoyant digne du Phlégéthon aux Enfers, un même feu liquide y tournoyait sans cesse.

Dorénavant, ils avaient retrouvé leur couleur de ciel d'été grec, chaud, lumineux, au bleu si pur qu'il devait être de la même couleur que celui d'Elysion.

Un regard profond et sans âge, si doux et bienveillant...
Un regard de Grand pope.

- Si quelqu'un arrive à cet instant précis, je crois que cela pourrait prêter à confusion, fit remarquer Saga avec un doux sourire.

Aphrodite le lui rendit et s'écarta lentement.

- Même si Aioros ou Mu arrivaient, il n'y aurait aucun problème. Tout le monde peut percevoir l'écho de mon cosmos et de mon cœur et ils vibrent tous deux d'une profonde et sincère admiration pour toi. Je suis heureux d'être revenu à la vie pour te voir siéger comme Grand Pope et être sous tes ordres. J'ai l'impression que notre vie actuelle, bien qu'illusoire et non inscrite dans l'Histoire, est celle qui aurait dû être, celle qu'on aurait dû vivre. Celle qu'on méritait. Même Angelo et moi.

- Je te rejoins là-dessus.

Un pop familier brisa la solennité du moment, qui s'accompagna bien vite de salutations joyeuses.

- Saga, Aphrodite, bonjour ! s'exclama Kiki qui venait d'apparaître devant eux, au milieu de l'escalier.

- Bonjour, Kiki, lui répondirent-ils en se levant. Que fais-tu ici, tout va bien ? demanda Saga.

- Oui, très bien, je viens te chercher, Aphrodite ! expliqua-t-il en attrapant les deux mains du Douzième gardien. Maître Mu va m'emmener à la fête foraine avec Simon et Sadya, et comme Simon a demandé que son Maître Angelo vienne aussi, Maître Mu voulait que tu nous accompagnes pour pas être seul avec lui ! Enfin, il l'a pas dit, mais j'ai compris tout seul ! Tu veux bien, dis ? Ce serait trop chouette ! Maître Mu serait trop content et moi aussi ! En plus, t'as pas fait le pique-nique avec nous ! C'était trop bon !

- C'est de ma faute, s'excusa Saga.

- Oh ! C'est pas grave, je savais que c'était important ! Mais tu dois venir maintenant, Aphrodite ! Je veux manger des nuages en sucre avec toi ! Maître Mu a dit que tu pourrais faire des formes de fleurs avec et même des animaux. Tu veux bien, dis ?

- Ce serait avec plaisir, Kiki, je n'ai rien de prévu, répondit Aphrodite en libérant une main pour lui frotter la tête avec tendresse. Et cela fait des années que je n'ai pas mangé de nuages en sucre, ajouta-t-il en mimant ensuite silencieusement les mots barbe-à-papa pour Saga qui haussait un sourcil, intrigué. Le départ est à quelle heure ?

- C'est pour maintenant !

- D'accord, mais je dois repasser chez moi, avant.

- Oui, je sais, tu dois prendre de l'argent pour les manèges et le goûter !

- Oh ! me voilà devenu banquier ! s'amusa le Douzième garden en échangeant un regard amusé avec Saga.

- La dernière fois quand on a été à Athènes, tu n'étais pas content parce que Maitre Mu a tout payé et tu lui as dit que ce serait toi la prochaine fois ! C'est maintenant la prochaine fois !

- Quelle mémoire ! Très bien, dans ce cas.

- Alors c'est bon, on peut y aller, je t'emmène chez toi, Aphrodite ! Allez, dis au revoir ! exigea le futur Bélier impatient en sautillant.

- C'est bon, une minute ! s'amusa-t-il encore avant de se tourner vers le Gémeau, tout aussi amusé par la scène. Saga, merci encore pour tout. Je pense que vous serez déjà partis, à notre retour…

- Certainement.

- Alors dans ce cas, je vous souhaite de très bonnes vacances, lui dit-il alors qu'ils se prenaient dans les bras. Profitez bien, surtout, et oubliez-nous !

- On fera au mieux. Merci, Aphrodite. On compte sur vous, et surtout, prends soin de toi.

- Promis.

- Kiki, amusez-vous bien et écoutez bien ce qu'on vous dit, ajouta-t-il en lui pinçant gentiment le nez.

- Promis, Saga ! répondit-il après s'être reculé en riant. Bonnes vacances !

- À bientôt !

Aphrodite eut à peine le temps de répondre que Kiki le téléporta déjà chez lui.

Saga sourit encore et rentra retrouver Aioros.
Le Sagittaire était dans sa chambre, enfin, leur chambre et terminait de boucler son sac.

Saga se colla à son dos et l''enlaça, sa joue contre sa nuque qu'il embrassa au passage.

- Vous étiez mignons, lui dit Aioros en posant ses mains sur ses bras enserrant sa taille. Je ne parle pas de Kiki, mais d'Aphrodite et toi.

- Tu nous as vu ?

- Je vous ai senti. J'ai failli être jaloux.

- Tu n'es pas sérieux, demanda Saga en relevant la tête.

- Aucunement, confirma Aioros en se retournant dans ses bras pour lui offrir son magnifique sourire confiant. Un énorme poids s'est enlevé de ta poitrine, j'en suis plus qu'heureux, mon amour.

- Moi aussi. Et c'est arrivé au meilleur moment.

- Exactement.

Aioros le serra fort contre lui plusieurs minutes pleines de tendresse.

- Je resterai bien ainsi des heures durant, mon amour, mais j'ai encore des petites choses à rassembler avant le départ, soupira le Gémeau avec dépit. .

Ils se détachèrent mais gardèrent leurs mains liées.

- Vas-y, moi, j'ai fini avec mes affaires. Je vais m'occuper des papiers et des derniers détails.

- Parfait, merci.

Aioros l'embrassa, avant de gagner le salon.

Une heure plus tard, Aioros terminait ce qu'il avait à faire et retrouvait Saga, toujours dans leur chambre.

- Mon aimé, j'ai un service à te demander.

Saga lui fit face avec un sourire d'encouragement.

- Je t'écoute.

- Tu sais que je suis un peu inquiet à propos d'Aiolia.

- Oui, sur le fait qu'il est obnubilé par la question du Destin de Marine, s'il n'était pas revenu à la vie.

- Il y pensait souvent, mais là, il est complètement en boucle sur ça, depuis un moment. On était occupé avec nos amis Italiens, mais j'ai souvent eu l'occasion de parler avec lui, malgré tout, et je n'ai pas aimé l'impression qu'il m'a laissé. Même hier, durant la fête.

- Qu'est-ce que je peux faire pour t'aider, amour ? demanda Saga en lui prenant les mains avec sollicitude.

- Il pense que Marine aurait été plus heureuse sans lui, mais elle a fait son choix. Tu étais, toi aussi, bloqué sur la même idée, avec moi. C'est ironique, en un sens, car il t'avait lui-même fait un sermon sur ce sujet. Et aujourd'hui, c'est lui qui est aveugle. Si tu lui parlais, avec ton expérience, il verrait peut-être les choses différemment.

- Je ferai de mon mieux, 'Ros. Mais cela devra attendre notre retour.

- Peut-être pas, répliqua-t-il en consultant sa montre. Kanon et ´Lia nous accompagnent à l'aéroport… Nous sommes prêts, donc il reste un peu de temps pour un café, tu ne penses pas ?

- Oui, Aiolia est peut-être déjà disponible.

- Je pensais aussi à Kanon, en fait. Et Rhadamanthe. Tu crois qu'ils accepteraient de lui parler ?

- Kanon, certainement, mais Rhadamanthe…

- Je suis conscient que c'est beaucoup demandé, mais c'est important, il pourra sûrement l'entendre.

- Qu'attends-tu d'eux, amour ?

Aioros haussa les épaules.

- Je ne sais pas trop… Rhadamanthe a peut-être des informations supplémentaires qui pourraient rassurer ´Lia.

- Tu sais qu'il lui en veut encore énormément, ainsi qu'à Mu et Milo, même s'il a fait des efforts. Il acceptera de parler avec lui, pour Kanon, mais je ne peux pas garantir qu'il fera tout pour qu'Aiolia se sente mieux…

- Mais ça vaut le coup d'essayer, non ?

- Bien sûr. Je voulais juste te préparer à l'éventualité que ça ne serve à rien.

- J'en suis conscient.

- Mais comme je te le disais tout à l'heure, Aiolia et Kanon sont peut-être déjà disponibles, mais Rhadamanthe, cela me paraît difficile de le faire venir comme cela, à la dernière minute. Je vais voir avec Kanon.

- Quant à moi, je vais demander à ´Lia de passer, qu'il puisse déjà au moins parler avec toi.

Sans se séparer mais restant dans les bras l'un de l'autre, front contre front, les deux aînés contactèrent leurs cadets.

Kanon répondit immédiatement à son frère, avant de le faire patienter, le temps de joindre son Juge et de l'inviter.

Le fort peu probable devint finalement possible, et vingt minutes plus tard, les cinq hommes se retrouvaient dans le salon du Sagittaire, autour d'un café.

Rhadamanthe ne montrait pas un très grand enthousiasme à être là, mais comme toujours, pour Kanon, il prenait sur lui.
Seulement, il avait très peu de temps devant lui, il ne s'accordait normalement aucune pause dans ses journées de travail. Il ne le faisait qu'à la demande de Kanon.

Et ce jour-là était en plus celui du retour de Perséphone, l'épouse d'Hadès, et les Enfers étaient en ébullition et en plein préparatifs d'une grande réception en l'honneur de leur Reine.

Aussi, avec le million de choses qui l'attendait, Rhadamanthe ne prit-il ni gants, ni pincettes, et confronta directement Aiolia à peine la tasse de thé posée devant lui.

- Si je comprends bien, Lion, tu as des problèmes de conscience, par rapport à ta compagne.

Aioros faillit recracher sa gorgée de café, alors que Kanon levait les yeux au plafond.

*En plus de trois millénaires, tu n'as jamais appris la subtilité ?

Tu m'as demandé de venir pour cela, et je n'ai guère assez de temps pour en user.*

- Pardon, mais… cela sort d'où ? demanda Aiolia, avant de se tourner vers son grand frère. Tu leur as parlé ?

- J'étais inquiet, ne m'en veux pas, 'Lia.

- C'est personnel, quand même…

- Ce qui est fait est fait, trancha Rhadamanthe, toujours assez sèchement. Si tu as des questions, je suis prêt à les écouter et à y répondre, si cela m'est possible.

- D'accord… Je te remercie…

Le Juge balaya ses remerciements d'un revers de la main.

Aiolia se mordit la lèvre, puis se lança.

- Est-ce que tu peux me dire combien Marine aurait eu d'enfants ? Serait-elle restée avec cet homme qu'elle devait rencontrer toute sa vie ? Aurait-elle été heureuse et épanouie ?

Le Juge retint un soupir.

- Je ne peux voir l'avenir, Kanon a déjà dû te l'expliquer.

- Mais tu peux obtenir des réponses autrement.

- Certes, lorsqu'il y a encore quelque chose à voir.

- Comment cela ?

Rhadamanthe reposa sa tasse de thé, après avoir but une gorgée brûlante.

- L'avenir est une petite fenêtre qui s'ouvre au moment de faire nos choix, pour tracer la route vers lui. Mais elle se referme dès lors que nos décisions et nos choix nous dirigent vers cette possibilité plutôt qu'une autre. Car d'ici à ce qu'il advienne, tout peut encore arriver, du fait même qu'une vie humaine est faite d'une succession de choix et de décisions.

- En d'autres termes, cet avenir n'existe plus ? reformula Saga.

- Non. A l'instant même où Marine de l'Aigle y a renoncé, il a disparu.

Aiolia serra les poings et les mâchoires.

- C'est tellement injuste !

- C'est son choix, lui rappela doucement Kanon.

- Ce n'est pas le mien, contra le Lion.

Kanon échangea un regard avec Rhadamanthe.

- Si la question de revenir à la vie t'avait été posée, aurais-tu refusé ? questionna très patiemment le Juge.

- Sachant le sacrifice que cela demanderait à Marine ? Évidemment ! Je ne suis pas si égoïste...

- Au contraire, Lion, tu aurais été égoïste et lâche.

Aiolia bondit sur sa chaise

- Comment ?

- ´Lia… le calma Aioros en posant une main sur son bras.

- Rhad'… intervint aussi Kanon en posant sa main sur la cuisse de son amant, avant de se tourner vers son cadet. Aiolia, en faisant ce choix, tu commettrais la même erreur que Saga envers Aioros.

- C'est-à-dire ? demanda le Lion, rassit mais à peine calmé.

- Tu prétends que tu l'aurais fait par amour pour ta compagne, mais en réalité, tu ne tiens pas compte de ses désirs, expliqua Rhadamanthe. Tu considères qu'avoir une vie de famille était le meilleur choix possible pour elle. Ce n'est pas ce qu'elle pensait, ni ce qu'elle désirait.

- Elle n'est pas objective !

- Pas plus que toi, Lion. Mais cela n'a pas d'importance, car ce choix de vie n'impose pas de l'être. Il demande une réflexion mûre, une introspection réfléchie, ce dont s'est parfaitement montrée capable Marine de l'Aigle. De la même façon que Saga a jugé seul qu'Aioros serait plus heureux sans lui, tu as décidé seul, en nom et place de ta compagne, qu'elle aurait été mieux sans toi.

- Mais c'est une évidence ! Mon frère et Saga sont deux hommes, les enjeux sont différents ! protesta Aiolia. Quelle femme pourrait renoncer à être mère volontairement ? Mon retour à la vie l'a poussé à faire ce choix terrible !

- Son amour pour toi lui a fait prendre cette décision, 'Lia, intervint Aioros. C'est ainsi qu'elle a voulu vivre. Quelle femme voudrait renoncer à être mère, te demandes-tu ? Celle pour qui retrouver l'homme de sa vie est plus important que tout, au monde. Et elle s'appelle Marine.

- Si je n'étais pas revenu...

- Mais tu es revenu, et comme vient de te le rappeler ton frère, c'est ce qu'elle désirait le plus au monde, l'interrompit Saga. Avoir cette vie, ces années avec toi. C'est là, la clé de son bonheur et c'est toi qui la détiens. Comme je possède celle du bonheur de ton frère. J'ai gâché un temps précieux en ne le réalisant pas suffisamment tôt, ne fais pas la même erreur que moi.

- Il n'y a pas que moi dans l'équation… Je veux dire, cela n'impacte pas que Marine et moi.

- Précise ta pensée, lui demanda Aioros.

- Et bien… Et s elle devait avoir un enfant, une fille ou un garçon brillant, qui allait faire quelque chose qui allait changer le monde ? Découvrir un traitement pour une maladie ou devenir un grand médecin, un chercheur, ou que sais-je, encore ?

- Et bien quelqu'un d'autre le fera, répondit Rhadamanthe.

- Comment cela ?

- Il y a de cela deux cents ans, à la fin du XVIIIe siècle, alors qu'il n'était encore qu'un enfant, Napoléon Bonaparte, futur Empereur des Français, a failli mourir noyé sous la glace. Ses amis et lui avaient le choix entre un chemin sûr, mais plus long, et un raccourci à travers le lac gelé. Il est le seul à avoir choisi le premier et à avoir ainsi survécu. Si cela n'avait pas été le cas, l'Histoire de la France, de l'Europe et du monde aurait-elle été différente ? La Louisiane aurait-elle été vendue aux Etats-Unis ? La Banque de France, la Bourse de Paris et le Code pénal français auraient-ils été créés ? En d'autres termes, un autre Napoléon aurait-il vu le jour quelque part, car l'Histoire doit suivre son cours, peu importe qui l'écrit ?

- Tu veux dire par-là que des événements doivent avoir lieu, peu importe qui les initie ?

Rhadamanthe se tourna complètement vers Kanon.

- Pour que l'Humanité évolue, certains faits doivent se produire. D'une façon oui d'une autre. Si chaque être a son Destin, l'Humanité également. Le reste n'est que détails.

- Je commence à comprendre un peu comment cela fonctionne, et Rhadamanthe t'a bien expliqué que la vie humaine était une succession de choix et de décisions, Aiolia, reprit le cadet des Gémeaux après une courte pause de réflexion commune. L'avenir se construit pas à pas à partir d'eux. Des fenêtres s'ouvrent et se referment en permanence, des possibilités se créent et d'autres s'effacent alors même que nous parlons. Si tu n'étais pas revenu à la vie, Marine aurait rencontré un autre homme et fondé une famille, malgré son cœur brisé.

- Et elle aurait vécu sans jamais pouvoir se départir de cette impression de manque, comme si elle n'était pas complète, parce qu'il lui aurait manqué l'essentiel, toi. Pour avoir vécu ainsi durant plus de trois mille ans, je peux t'assurer que cela n'ai rein de plaisant. L'espoir et la certitude que j'avais de retrouver Kanon, un jour, n'aurait pas été donné à Marine de l'Aigle. Je ne souhaite à personne de vivre ainsi.

- Par la grâce des Dieux, tu es revenu et cet avenir a disparu, poursuivit Kanon, après un long regard à son Juge. Quand, à ton tour, tu disparaîtras, nul ne sait ce qu'il adviendra de Marine et de son Destin. Elle ne serait pas la première à avoir une seconde vie après 40 ans, ne soit pas si prompt à la condamner.

- Mais avoir des enfants, à cet âge-là ?

- C'est plus risqué, mais non moins possible, assura Aioros. J'en ai connu, en Italie, qui avait encore leur quatrième ou cinquième enfant au-delà de 35 ans. Et puis Marine est Chevalier d'Argent, son cosmos est puissant, son corps aussi.

- Alors, il reste une chance pour elle ? Vraiment ?

- Si avoir des enfants sera son projet, peut-être. Ou elle peut tout aussi bien se présenter à l'un de nos Tribunaux demain.

- Pardon ? s'horrifia Aiolia qui avait pourtant retrouver un semblant de sourire.

- Rhad' ! protesta Kanon en tapant du plat de la main sur la table.

Le Juge retint un soupir.

- Ce que je veux dire, c'est que tout peut arriver. Mais surtout, en ce qui concerne ta question sur l'après toi, tu n'as pas à te préoccuper d'un avenir où tu ne figureras pas, Lion. Assume et gères le fait que Marine de l'Aigle t'aime suffisamment pour avoir renoncer à cet autre destin, rends-toi digne de cet amour et de cette vie qui t'a été rendue envers et contre toutes les lois qui régissent l'Univers. Apprends de tes aînés que tu as pourtant si lourdement jugé.

- Rhad', doucement, intervint Kanon pour la énième fois.

Il n'y allait vraiment pas de mainmorte avec Aiolia.

- Laisse, Kanon, il a raison, le coupa celui-ci.

- Je ne crois pas que tu aies besoin d'une leçon de morale pour autant, argüa tout de même le cadet des Gémeaux. D'autant plus que tu as ouvert les yeux et que tu t'es excusé.

- Il faut croire que tout n'a pas été assimilé, renchérit Rhadamanthe. Auquel cas, nous n'aurions pas cette conversation.

- Il n'a pas tort, appuya Aioros. Même si les choses pourraient être dites sur un autre ton…

Il en avait voulu à Aiolia pour le traitement qu'il avait réservé à Saga, mais tout était pardonné, dorénavant, aussi, il tenait à défendre son petit frère qui se faisait quelque peu malmener – jugé ? – par le terrible Second Juge des Enfers.

- J'ai encore beaucoup à apprendre, soupira Aiolia. Mais j'ai la chance de vous avoir. Merci. Mes remerciements te sont aussi adressés, Rhadamanthe. Tu ne m'apprécies pas, mais tu as tout de même répondu à mes questions et donné de précieux conseils.

- Je l'ai fait pour Kanon et…

- Comme tout ce que tu fais, oui, je le sais parfaitement.

Le regard du Juge se durcit.
Il détestait être interrompu.

- Tu allais dire autre chose, pardonne-moi… s'excusa Aiolia.

- Je l'ai fait pour Kanon, reprit donc Rhadamanthe, et parce que d'après le schéma traditionnel sur lequel repose les sociétés humaines, par le jeu des alliances, nous appartenons à la même famille. Cela ne m'enchante pas en ce qui te concerne, Aiolia, je n'ai jamais caché les sentiments négatifs que tu m'inspires. Mais de la même façon que je t'enjoins à apprendre de tes aînés, j'apprends moi-même à votre contact. Malgré les différents qui vous opposaient, les rancunes et l'inimitié qui régnaient et pouvaient diviser la Chevalerie d'Athéna, vous avez tous su faire un pas vers l'autre et avez su vous pardonner et avancer ensemble.

Aioros et Saga étaient quelque peu surpris par ce discours, Aiolia, sous le choc d'avoir entendu son prénom dans la bouche du Juge pour la première fois de ses deux vies, et Kanon…

Kanon souriait avec fierté et tendresse mêlées.

- Dois-je appeler Milo pour lui annoncer la bonne nouvelle ?

Rhadamanthe lui adressa un regard que personne ne put déchiffrer.

- A chaque jour suffit sa peine.

- Autrement dit « n'en demande pas trop » … traduisit Kanon. Je te taquine, je n'avais pas vraiment l'intention de l'appeler, rassure-toi. Et puis, c'est presque l'heure de vous déposer à l'aéroport, Saga, Aioros.

- Oui ! confirma Saga en souriant, alors que tous se levaient.

- J'aimerais vous dire une dernière chose, avant de retourner aux Enfers, annonça Rhadamanthe, attirant tous les regards vers lui. Dans le cadre de votre résurrection miraculeuse et sans précédent, une réalité parallèle a été créée, dans laquelle vous évoluez et interagissez avec le cours normal du Temps. Mais elle ne s'inscrit nulle part dans l'Histoire, si ce n'est dans celle, secrète, du Sanctuaire et de la Chevalerie d'Athéna. Ce que l'on remarque, pour la plupart d'entre vous, c'est que ce que vous appelez Destin fait référence à celui que vous aviez et qui n'a pu s'accomplir totalement. Ou ce qu'il aurait pu être. Le seul qui avait été tissé pour vous. Vous n'en avez pas un nouveau avec cette nouvelle vie. En d'autres termes, votre Destin présent n'est en réalité qu'un peu de passé en retard, une poursuite ou une redirection de celui-ci qui disparaîtra avec vous.

- Mais ce qu'on aura vécu et partagé demeurera, n'est-ce pas ?

- Ceux qui sont étrangers à votre monde ne garderont pas de souvenirs après le mois d'avril 1987.

- Comment ? s'étrangla presque le Sagittaire à l'entente de ces mots terribles. Mais Letizia, Sergio, Ernesto et tous les moments qu'on a passé ensemble…

- J'ai bien précisé « extérieur à votre monde », Aioros.

- Mais ils ne savaient rien de nous ! Comment pourraient-ils lui appartenir ?

- Et comment pourrait-il en être autrement ? La vie que votre amie porte en elle est imprégnée du cosmos de plusieurs puissantes Déesses, dont la Maîtresse de l'Olympe.

- Elle… Letizia est enceinte ?

- Mais c'est une formidable nouvelle ! s'enthousiasma Saga en prenant la main d'Aioros.

- C'est certain, Rhad' ? demanda Kanon, plus prudent.

- Tu m'as dit que les consignes avaient été suivies à la lettre. Le processus ne peut échouer, lorsque c'est Héra Elle-même qui en est à l'origine.

- On devrait peut-être attendre confirmation, avant de se réjouir…

Rhadamanthe tourna un regard assassin vers Aiolia qui venait de s'exprimer.

- Est-ce que tu mets ma parole en doute ou le pouvoir de la plus grande Déesse de l'Olympe ?

- Je ne me permettrai pas, assura le Lion, livide. Je te prie de m'excuser, je…

- Je retourne aux Enfers, le coupa sèchement le Juge, à bout de patience. Merci pour le thé. Saga, Aioros, bon séjour à vous. Et n'oubliez pas de limiter les interactions avec le reste du monde.

- Tu peux compter sur nous. Merci d'être venu.

Rhadamanthe serra la main des deux aînés, hocha sèchement la tête face à Aiolia, sans parvenir à cacher une certaine forme de mépris ou de dédain dans son regard, puis embrassa Kanon et disparut dans le portail.

- Kanon, je suis vraiment désolé…

- Ne t'en fais pas, il aura oublié d'ici quelques minutes. La prochaine fois que tu le verras, tu pourras t'excuser à nouveau et lui expliquer ce que tu voulais dire. Enfin, peut-être qu'il vaudra mieux ne rien ajouter. Tu verras bien à ce moment-là, je te dirai.

- D'accord.

- On y va, vous êtes prêts ? demanda ensuite le cadet en regardant son frère et son beau-frère.

- Les sacs sont dans l'entrée, indiqua Saga. On a nos papiers sur nous. Tout est bon !

- 'Lia, tu nous accompagnes toujours ou tu préfères aller retrouver Marine ?

- Je viens avec vous. Il vaut mieux attendre ce soir pour la voir, j'ai beaucoup de choses dans la tête. Et elle a elle-même ses occupations.

- D'accord, c'est plus raisonnable, en effet, approuva Aioros. Allons-y.

- N'empêche, vous auriez pu être au Canada en une fraction de seconde, pourquoi vous infliger un vol aussi long et toute la paperasserie ? Vous en avez pour plus de 9h rien que pour le vol !

- Ça fait partie de l'aventure, Kanon ! Autant vivre pleinement notre vie comme le commun des mortels, même si nous n'y appartenons plus, aujourd'hui encore moins qu'hier.

- Il y a quand même d'autres choses de plus amusant à faire, Saga...

- J'aime bien l'avion, contrairement à toi, Kanon, rappela l'aîné. Et Aioros est habitué.

- Nous prendrons le raccourci des Gémeaux pour aller en Égypte, pour gagner du temps.

- Le « raccourci des Gémeaux » ? releva Kanon avec un petit rictus. On dirait une attraction de parc à thèmes !

- C'est mignon, je trouve, sourit Saga en posant sa main dans le creux des reins d'Aioros.

- Ce n'est pas censé l'être… Donc évite de le dire en public, s'il-te-plaît. Surtout devant Milo et Angelo !

Aioros le promit en gloussant, ce qui ne le rendait pas très crédible, mais Kanon n'insista pas et ouvrit la marche en soupirant.

En sortant du Temple, ils découvrirent que presque tout le monde s'était réuni sur le parvis pour dire aurevoir à Saga et Aioros et leur souhaiter bonnes vacances. La plupart les escorta même jusqu'à l'entrée du Domaine sacré où les attendait la voiture … et la Princesse Athéna, qui, Elle aussi, voulait les saluer encore.

Car bien évidemment, ils étaient montés d'eux-mêmes lui dire au revoir directement au Palais, dans la matinée, ainsi qu'à Shion et Dokho.

Le regard et le sourire du Vieux Maitre les avaient d'ailleurs interpellés : voulait-Il dire qu'il savait, et donc Shion aussi, ce qu'ils avaient fait sur le parvis du Treizième, juste avant de rentrer, la nuit précédente ? Ou bien agissait-il ainsi en imaginant ce qu'ils allaient pouvoir faire et comment ils allaient occuper leurs vacances, seuls au bout du monde, hors de portée de cosmos ?

Les deux possibilités avaient rendu les deux Chevaliers un peu nerveux et ils ne s'étaient donc pas trop attardés auprès d'eux.

Mais alors qu'ils s'installaient dans la voiture, Saga et Aioros eurent encore droit au même sourire taquin et même, à un clin d'œil de Dokho, qui, fort heureusement, s'abstînt se tout commentaire.

Après que la voiture eut quitté le chemin menant au Domaine, invisible aux mortels, et rejoint la route principale, Saga et Aioros, a l'arrière de la voiture, échangèrent un regard qui déclencha un rire nerveux.

Bien sûr qu'ils savaient.
Shion savait toujours tout, c'était ainsi depuis leur enfance.

Mais les deux fautifs n'éprouvaient aucune culpabilité.

Les deux cadets leur jetèrent un œil, l'un par le rétroviseur intérieur et l'autre, en se tournant vers eux, mais ne firent aucun commentaire.

Ils mirent cela sur le compte de la fatigue et du soulagement et c'était effectivement aussi un peu le cas.

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A suivre...

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Notes :

1. Gâteau de la princesse : Le prinsesstårta (« gâteau de princesse ») est un gâteau suédois traditionnel, composé de couches successives de génoise, de confiture de framboise, d'une sorte de crème pâtissière vanillée et de crème fouettée, enveloppé d'une fine couverture de pâte d'amandes. Cette dernière est généralement verte, parfois rose, légèrement saupoudrée de sucre glace, souvent surmontée d'une rose en pâte d'amandes rouge. La recette originale apparut dans les années 1930, dans le livre de cuisine Prinsessornas kokbok (Livre de cuisine des princesses), publié par la professeure Jenny Åkerström, qui enseignait à Östermalm. Parmi ses élèves figurèrent les princesses Märtha, Astrid et Margaretha (filles du prince Carl de Suède).Ce gâteau était initialement appelé grön tårta (« gâteau vert »), mais fut renommé prinsesstårta (« gâteau de princesse ») en l'honneur des princesses supposées avoir un penchant particulier pour cette spécialité. En 2004 a été instaurée la semaine du Prinsesstarta, les dernières semaines de septembre, par les associations de boulangers et pâtissiers suédois. E, dehors de la Suède, ce gâteau est servi dans la plupart des restaurants de la chaîne Ikea.

Le film Highlander est sorti en 1986 à l'international, mais en Grèce, à cette époque, certains films arrivaient bien plus tard dans les cinémas. Trois ans, ça peut paraître beaucoup, c'était peut-être moins, mais j'avais envie de parler d'Highlander que je venais de revoir ! Pardonnez-moi ce petit caprice.

Pour info, pour le portrait d'Aphrodite, je me suis inspirée du manga Versailles no bara, connu sous le nom de La Rose de Versailles, et encore plus connu grâce à son excellente adaptation animée Lady Oscar. C'est un peu vieux, certes, mais c'est vraiment une pépite. Dans le générique / opening, on voit Oscar enroulée dans les ronces et les roses. Cette image est magnifique et m'a marqué depuis mon enfance. Je l'ai toujours assimilé à Aphrodite, sûrement à cause des roses, de leur incroyable beauté, de leur magnifique chevelure blonde légèrement ondulée. Si vous ne connaissez pas Lady Oscar, et que vous avez du temps et de la curiosité, recherchez des images sur Google, ou le générique sur Youtube / dailymotion, le début et la fin précisément, je suis sûre que vous me comprendrez ! Et je ne saurais trop vous conseiller cet animé, si vous le trouvez quelque part.

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Merci d'avoir lu ce long chapitre, j'espère que vous l'aurez apprécié.
Au menu du suivant un Dragon et son Etoile !

A dimanche prochain !

Bonne continuation et prenez soin de vous.
Lysanea

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