"Tu sais ce que c'est, leur pouvoir secret? Ils ne se battent que pour la dignité des faibles."

- César à Arthur dans la série française Kaamelott.

Avec beaucoup de joie, Jade vivait les premières semaines de sa drôle de carrière. Elle prit plus que rapidement ses marques. Ce manoir avait beau être grand, la disposition des pièces était d'une logique implacable. Elle se sentait comme dans une très grande et haute maison. Certes, prendre ce poste en arrivant en plein milieu de l'année n'était pas chose aisée mais ses confrères étaient toujours disposés à lui donner un coup de baguette.

D'abord, il y avait Thorgal. C'était le professeur des soins aux créatures magiques. Il apprenait aux enfants l'amour des grosses bêtes baveuses. Thorgal était jeune homme blond fraîchement diplômé de Poudlard.

Elle avait ensuite fait la connaissance de Grinpo, un gobelin toujours vêtu d'habits haute couture. Lui, il enseignait les bases élémentaires en Arithmancie

ainsi que la gestion de l'argent magique. Pour finir, Mussie apprenait aux élèves à se servir d'une plume et d'un pinceau dans des fins artistiques. Elle devait avoir le même âge que le professeur des soins aux créatures magiques.

Jouer avec les mots semblait être son point fort.

Qu'importent les racines des élèves : moldus, cracmol et sorciers recevaient le même enseignement. La magie n'était présente dans aucun cours, ce qui était de toute façon bien normal étant donné leurs jeunes âges. En effet, dans le monde magique, il était interdit d'apprendre les bases de la sorcellerie avant onze ans. Dans les familles de sorciers traditionnelles, les jeunes se devaient d'attendre cet âge avant d'intégrer une école de sorcellerie.

Il n'était pas questions de marquer une différence entre chacun. Les pensionnaires avaient besoin de repères et pas d'un enseignement qui les divise. D'autant plus les moldus ne pouvaient plus revenir dans le monde non-magique. Et pour cause, ces derniers avaient grandi tant bien que mal dans le monde magique, autrefois au service des mangemorts.

Leur lancer un sortilège d'oubliette aurait été un manque de considération par rapport à leurs vécus, en plus de mettre leurs vies en l'air. Ils ont été les témoins directs des atrocités dont étaient capables ces mages noirs.

Certains sorciers disaient ceci : " les enfants moldu ont mérité leur place dans le monde le moins ennuyeux des deux "

Moins ennuyeux oui, moins dangereux, non.

Ce soir, Jade s'occupait du souper qui terminait à sa fin. Les elfes avaient mis les petits plats dans les grands, jamais elle n'avait aussi bien mangé. Les boîtes de conserve et les soupes en poudre ne lui manquaient nullement.

Son rôle auprès des enfants absorbait toute son attention, sa vocation n'était plus à remettre en question.

Elle prenait déjà des initiatives au sein du Phénix : dorénavant, tous les enfants devaient refaire leurs lits et rassembler la vaisselle sur les tables. Elle en avait sa claque que ce sois aux elfes de maisons de le faire à leur place. Mais c'était sans compter sur certains caprices. Certains ne pouvaient pas se faire à l'idée que les elfes méritaient le respect.

- Vous n'avez pas de la bouse de dragon à la place du cerveau quand même? Demanda-t-elle aux garçons sur le ton de la plaisanterie. Réajuster une nappe et frotter ses miettes n'a rien de sorcier. Vous faites simplement preuve de mauvaise volonté.

- Mais m'dame, rétorqua Thilio d'un air provocateur, on ne va quand même pas voler le travail des elfes de maisons, ça ferait baisser leurs salaires... Ah, mais attendez, ils n'en ont pas de toute manière !

En entendant sa dernière phrase, la salle à manger résonna de rires moqueurs. Tous les pensionnaires partageaient une vision esclavagiste de l'elfe de maison.

Comment vraiment leurs en vouloir alors que toutes leurs vies, on leurs avait inculqué que ces petits êtres n'étaient que vermine... Ce n'était qu'un manque d'éducation mélanger à des croyances populaires.

Toutefois, il fallait bien admettre que ce gamin était le plus têtu du groupe. Le concerné entraînait souvent ses amis dans des bêtises dangereuses. La semaine dernière, ils avaient risqué leur vies à aller provoquer les hypogriphes de Thorgal. Sans l'intervention de Noma, une petite fille qui connaissait très bien ces créatures magiques, seul Merlin sait combien de doigts ou d'orteils ils auraient perdus. Ce jour-là, toute la troupe était rentrée tête baissée, tremblent encore de peur. Ils étaient peu fier de leurs méfaits. Alors que Jade pensait qu'une frousse pareil calmerait leurs ardeurs, elle s'était visiblement trompée.

- Puisque c'est comme ainsi, vous allez me récurer les toilettes pendant un mois chacun à votre tour, ordonna la jeune éducatrice. Cette punition vous permettra d'apprendre une notion importante : se mettre à la place d'un autre. Vous allez voir ce que c'est que de travailler comme un elfe.

Bien que son autorité en ait frustré certain, son sens de l'humour et ces moments passés à leurs lires des histoires au coin du feu avaient apaisé les cœurs. Chaque soir, après avoir vérifié que les dortoirs étaient propres et rangés, elle se mettait à leurs lire Les comptes de Beedle le Barde. Pour le moment, ils en étaient à la première histoire "Le sorciers et la marmite sauteuse".

Elle était si occupée que le drôle d'accueil que le professeur Rogue lui avait réservé lui était sortie de la tête. D'ailleurs, il quittait souvent le Phénix pendant plusieurs jours, mais nulle ne savait où il allait. Et lorsqu'il était présent, leurs rapports se limitaient à de simples bonjours, au revoir, ou à des échanges strictement professionnels. Il arrivait parfois qu'ils se retrouvent tous les deux dans la salle des professeurs pour des tâches administratives. Il s'y écoulait alors des longues heures durant lesquelles il ne décrochait pas le moindre mot. Le professeur Rogue n'avait pas besoin de discussions, seule l'efficacité et la fluidité du travail comptait. Son personnel ne l'intéressait pas outre mesure.

Lorsqu'il la croisait dans les couloirs, l'homme aux yeux noir l'observait de haut en bas avec un air ironique, comme si elle était habillée comme un troll.

Par le biais de ses collègues, elle s'était rendu compte qu'elle n'était pas la seule à être détestée par le directeur. Ils avaient tous le droit à leur lots de remarques blessantes et sarcastiques sur leurs façons d'enseigner, sans compter les menaces de renvoi sous n'importe quel prétexte. Selon Thorgal, qui l'avait eu comme professeur des potions à Poudlard, il aimait par-dessus tout abuser de son pouvoir durant ses cours. Ces révélations avaient abasourdi la jeune femme.

- Comment un homme qui déteste les jeunes a-t-il bien eût l'idée de diriger un orphelinat ? Avait-elle demandé à Thorgal lors d'une pause dans la salle des professeurs.

- Rogue est misanthrope : ce n'est pas forcément une question d'âge, il n'aime juste pas le genre humain.

Depuis lors, elle savait que son comportement n'avait rien de très personnel, bien qu'il lui était encore bien difficile d'accepter cette injustice.

Un soir de demi-lune, alors que le Phénix s'endormait, Jade fit la rencontre de Nertila. C'était une dame d'une cinquantaine d'années qu'elle n'avait jamais vue auparavant : Elle travaillait comme veilleuse de nuit. Sa coupe au carré blanche et ses vêtements ne laissant passer un seul centimètre de sa peau lui donnaient un air triste et sévère à la fois. Finalement, elle se révéla comme une personne très souriante à l'oreille attentive. Les deux femmes se croisaient chaque soir pour la relève. Quand Jade allait dormir, Nertila commençait son service.

Tissant une nouvelle amitié avec les semaines passantes, Nertila lui raconta toutes ses anecdotes du Phénix. On aurait dit qu'elle y travaillait depuis plusieurs années tant qu'il avait l'air de s'en passer des choses ici. Les manoirs étaient toujours propices aux souvenirs inoubliables. Certaines anecdotes étaient drôles, d'autres touchantes.

Mais le plus hilarant n'en restait pas moins les bêtises de Firestrom, le fantôme du manoir. Ce spectre prenait malin plaisir à changer les tableaux de leurs places initiales. Un jour, le concerné avait placé le tableau d'un groupe de cornemuse dans la salle de repos et une duchesse très pimpante dans les toilettes des garçons. Rien de très grave, se dirait-on. Mais un jour,

il avait descendu aux cuisines le tableau d'une dame très méchante aux opinions conservatrices. Elle n'avait cessé de crier sur les elfes " Allez! Plus vite! Mais enfin dépêchez-vous bandes de laiderons!"

Lorsque Rogue s'en était aperçu, il s'était mis dans une colère tellement noire que Firestrom s'était caché dans une armoire à balais durant plusieurs jours.

Avec toutes ses péripéties, le mois de juillet fût vite arrivé, tout comme les vacances scolaires. À présent, il ne restait que Nertila et Jade au Phénix. Les professeurs étaient partis voir leurs familles. Quant à Severus Rogue, le plus redoutable des directeurs, il venait quand bon lui semblait. Il ne prenait même pas le temps d'accorder quelques minutes aux enfants qui commençaient à se sentir particulièrement seuls en cette période creuse.

Pourtant, la jeune éducatrice avait fait de son mieux pour essayer de placer tous les pensionnaires en famille d'accueil pour les vacances. Malgré ses efforts, seuls cinq d'entre eux étaient partis.

Molly et Arthur Weasley, un charmant couple de sorciers les accueillaient avec grand plaisir. Ils disaient que leur maison paraissait si vide depuis le départ de leurs six enfants. Au moins, pour la première fois, chacun avait sa chambre. Mais hormis eux,

personne ne voulait devenir la deuxième maison de ces enfants. Les gens agissaient comme s'ils venaient de Neptune ou trouvaient des excuses bidons...Ils restaient donc presque tous ici, à l'orphelinat du Phénix. En l'absence de cours durant la journée, la jeune femme organisait des activées manuelles comme la poterie, le jardinage ou la peinture. Étant presque seule à gérer ces quarante-cinq pensionnaires, les journées se valaient parfois très épuisantes.

Heureusement, après des jours de recherches, Nertila et elle s'étaient faites aider par un bénévole à la retraite. Le directeur avait heureusement saisi l'urgence de la situation. Ce vieil homme au chapeau de paille avait travaillé toute sa vie au ministère de la magie dans le département des mystères. Il comptait profiter de son temps libre à des choses plus légères de la vie