NDA 09/08/23 : Bonsoir à tous, j'espère avoir encore des lecteurs malgré le léger retard, et surtout, la petitesse de ces chapitres. Promis, les suivants seront plus longs, on va vraiment rentrer dans l'histoire, là, je vous offrais des tranches de vie de chaque point de vue.

Je vous souhaite à tous une excellente lecture, et n'hésitez pas à dire ce que vous en pensez, ça fait toujours plaisir!


9

Dimanche 4 Novembre 1944

Il n'avait jamais aimé l'infirmerie. C'était un endroit malaisant. L'ensemble des murs carrelés étaient blancs, et les grandes vitres derrière les lits laissaient filtrer les lueurs du jours et de la nuit, projetant des ombres effrayantes sur les murs. La première fois qu'il y était venu, et la seule avant ce soir, c'était durant sa troisième année. Plus précisément, il était venu le soir de la rentrée, parce qu'il n'avait pas encore récupéré sa baguette auprès du directeur adjoint, et que son dos était infecté des coups de ceinture d'Ecbert, l'homme de main de Madame Cole.

L'infirmier, un petit homme replet, du nom de Bobby Jones, était cependant un ancien médicomage plutôt réputé. Et la raison de sa présence à Poudlard ne tenait qu'à l'attentat dans lequel il avait été pris, peu avant sa propre naissance, au ministère de la magie. Ainsi, traînant une jambe boiteuse, il était rapidement épuisé par les nombreuses opérations de sainte mangouste.

Tom observa le guérisseur lancer un nouveau sort de diagnostic sur sa compagne d'infortune, en présence de Magdalena Black, le professeur d'étude des runes et Silvanus Brûlopot, le directeur de Poufsouffle. Tom avait nullifié leur sort de confinement pour pouvoir écouter ce qu'ils allaient dire de la jeune fille qui s'était jetée dans le vide pour lui éviter la mort. Non pas qu'il soit inquiet, non, mais il était intrigué. Qu'une fille qui pratique au moins un informulé, soit capable de l'envouter sans qu'il ne comprenne comment pendant plus d'un mois et lui sauve la vie, mette autant de temps à guérir pour trois côtes cassées et un pneumothorax.

Ça n'avait rien de logique.

Ceci dit, il avait quatre disques lombaires de broyés, ainsi qu'un bras en miette et plusieurs fractures du bassin. Mais il tenait bon, et surtout, il était conscient. Alors que dans le cas d'Evelyn Snow, c'était à peine si elle restait éveillée une heure par jour. À moins qu'elle ne fasse semblant ? C'était tout aussi possible, vu l'énergumène.

« Alors ? » Demanda le directeur de Poufsouffle. Magdalena Black lui siffla de se taire.

« Une fois encore, il semblerait que les soins opérés sur cette élève, et le pouss'os ne soit pas suffisant pour réparer ses côtes… »

« Quelle plaie… » Gronda Mme Black, avec son air macabre. « Utiliser des runes inconnues sur soi est une imbécilité prodigieuse, mais je ne pensais pas qu'une élève en dernière année dans cette école en soit capable. »

Un léger sourire moqueur se dessina sur les lèvres de Tom, avant qu'il ne se rembrunisse. Etait-ce vraiment des runes inconnues, pour Evelyn Snow ? Après tout, elle cachait bien son jeu. Mais pour le professeur Black, il semblait que c'était évident. Du moins, elle-même ne connaissait pas les runes en question et leur usage.

Tom essaya de se réinstaller plus confortablement dans le lit médicalisé, regrettant la chaleur de sa couette dans la chambre solitaire de préfet, et surtout, le calme alloué à cette dernière. Une douleur aigüe le fit se raidir, bien que son visage ne montre rien, et il parvint à trouver une position agréable. Il allait devoir attendre la nuit pour lui parler. Si elle retrouvait conscience, bien sûr. Mais c'était ce qui s'était produit la nuit précédente. Elle avait ouvert les yeux. Hélas, en tentant de se lever, elle avait hurlé de douleur et s'était vautrée au sol.

Le Serpentard avait apprécié de savoir que son ensorceleuse souffrait. Mais son bonheur avait été de courte durée, puisqu'une fois rendormie à coup de potion, elle ne pouvait évidemment plus parler. Et il s'était retrouvé seul avec ses interrogations. Ce qui l'agaçait particulièrement. Déjà trois jours qu'il attendait ici, dans cet endroit infect, à ne pouvoir exercer son influence sur les autres élèves, ni briller en classe. On l'avait même privé de sa baguette pour éviter qu'il ne s'épuise à jeter des sorts.

Et ça, il n'avait pas apprécié.

Souffrant en silence, il attendit que les professeurs et l'infirmier laissent le champ libre, pour se relever. D'abord, lentement, puis, d'un coup sec, pour enrailler la douleur au plus vite. Tout son corps se raidit, et il serra les dents, attendant que la pointe aiguë s'en aille, pour finalement poser les jambes au sol. Il n'enfila même pas les pantoufles, profitant de la montée du froid pour endormir la douleur.

Tom fit alors quelques pas tremblants jusqu'au lit d'en face, contemplant sa comparse et harceleuse. C'était vrai. Evelyn Snow semblait belle. Là, endormie, ses cheveux noirs de Jai en corolle. Son teint si pâle, que c'en était douloureux. Et ses lèvres rougies des nombreuses morsures qu'elle s'était infligée. Une seconde fut suffisante pour lui rappeler tous les rêves érotiques qui la mettait en scène. Il frissonna d'horreur.

Il fallait se ressaisir. Sa main se posa à la base du cou de la jeune femme, prêt à la maintenir couchée sur le lit, ou l'étrangler, au choix. Tom approcha son visage et murmura d'une voix très basse.

« Je sais que tu es réveillée, Snow. » Les frissons qui naquirent sur ses bras nus furent ignorés. Et pourtant, dans sa tête, l'ensorceleuse savait ce que ça signifiait. Aussi, elle ouvrit les yeux, croisant les orbes ténébreux avec les siennes.

« Même si je ne l'étais pas, tu m'aurais réveillée. » La voix rauque et blessée fit grandir le sourire victorieux du futur mage noir.

« Toi et moi avons des choses à nous dire, je crois. »

« Un merci aurait suffi. Tom. » la pression sur son buste se fit plus intense, alors qu'il approchait encore un peu.

« Je ne joue pas, Snow. Pas cette fois. Tu t'es peut-être cru au-dessus de moi parce que tes stupides rêves ont fonctionnés, mais ce temps-là est terminé. » Il s'approcha encore, assez pour que ses lèvres frôlent l'oreille de la sorcière, dont les battements cardiaques augmentèrent. « Tu vas me le payer, Snow. Très cher. » Et la main sur son buste remonta le long de sa gorge, bloquant son souffle.

« Tom… Tu… »

« Je ? Tu n'arrives déjà plus à parler… Laisse moi le faire à ta place. Tu as été une belle distraction, je le reconnais. Tu es douée… Je ne sais d'ailleurs toujours pas comment tu as réussi à m'ensorceler chaque jour sans que je ne le voie… Mais tu vas mourir ici, et tout le monde pensera que c'est parce que tu m'auras sauvé la vie au péril de la tienne. » Il eut un rire froid, glaçant, mais non dénué de charme. « Bien sûr, si tu t'expliques, je pourrais peut-être reconsidérer l'idée de te garder vivante. Comme un jouet… »

Mais au lieu de pleurer comme il s'attendait à ce qu'elle le fasse, un sourire conquérant prit place sur la bouche d'Evelyn.

« Tom… Ô Tom… Tu… es… Si naïf…» Il sentit un contact froid sur sa propre main, et baissa les yeux. Là. La main gelée de Snow tenait la sienne, sans pour autant la repousser. Et il comprit. Ses yeux s'écarquillèrent d'horreur et Tom s'éjecta du lit de la sorcière, fixant sa main avec dégout. Il voulut l'essuyer sur son pantalon, mais il savait.

Tom savait que c'était trop tard.

« Tu as osé ! Tu ne peux pas… Tu… Je vais te tuer, je me fiche de savoir comment ! » Et il attrapa un coussin, prêt à l'étouffer, mais le regard azuréen de la sorcière le figea sur place. Il n'y avait aucune crainte. Seulement cette suffisance qui le rendait à la fois admiratif et hors de lui.

« Je te le déconseille… Tom… » La voix, bien enraillée alors qu'elle reprend une respiration normale, frottant sa gorge, a beau être fragile, elle n'en est pas moins confiante. Et ça le dégoute. « Vois-tu… S'il m'arrive quoi que ce soit, tu tomberas avec moi. »

« Pardon ? » Et pour la première fois, ce ne fut pas de la colère qui se dessina sur son visage d'ange. C'était de la stupéfaction.

« Si je tombe. Si on me pousse, si jamais tu me fais le moindre mal, ou si quelqu'un s'en prend à moi… Le monde entier saura que tu es l'héritier, et que tu as lâché ton serpent sur Myrtle Warren en 5e année. »

Celui qui plus tard, se ferait appeler Voldemort, resta figé. Personne dans cette école ne savait pour lui. Et encore moins ce que la chambre cachait. Pour la première fois depuis longtemps, Tom eu peur. Peur de ce que cette fille était capable de faire. Non. Elle ne pouvait pas. Il ignorait comment elle pouvait être au courant, mais il était purement et simplement impossible que Snow ait les preuves de ses méfaits.

« Tu mens ! »

« Je sais que tu ne me crois pas. Mais Tom, mes souvenirs seront livrés à qui de droit dans toute l'Europe, et tu tomberas… » Il frémit.

« Tu ne le feras pas. »

« À vrai dire, si. Tu as activé toi-même cet enchantement. Ma protection ultime contre toi… » Elle eut un léger sourire, mais séducteur cette fois. « Lorsque tu m'as touché, que tu as posé ta main sur moi, tu as activé les runes que ces imbéciles ont été incapable d'effacer. »

Le contact ! C'était par le contact qu'elle arrivait toujours à ses fins. Il s'éjecta d'elle, fixant sa main souillée et déglutit. Evelyn Snow l'avait piégé une fois encore.

« Maintenant, je vais te dire ce qu'il va se passer. » Elle inspira longuement, avant de se redresser en position assise dans le lit. « Lorsque nous sortiront de l'infirmerie, tu viendras me trouver à la table de Poufsouffle devant tout le monde, et tu me remercieras de t'avoir sauvé. »

Tom se rapprocha du lit médicalisé, prêt à élever la voix, mais la petite main pâle de la jeune femme se leva, lui faisant signe de s'arrêter.

« Ensuite, tu t'excuseras de m'avoir éconduit il y a deux ans, et ce devra être sincère… » Ah, il avait le motif de la vengeance qu'il subissait, désormais. L'égo de cette fille était pire que celui des Malfoys.

« Bien. » Serrant les poings, le brun n'appréciait cependant pas du tout la tournure des choses.

« Je n'ai pas terminé, Tom… » Il éructa, ravala sa hargne, avant de redresser la tête pour offrir un visage placide et figé.

« Et que devrais-je faire, ensuite, Snow ? » S'il lui envoyait le basilic maintenant, il en serait débarrassé. Tant pis s'il ratait ses ASPIC avec la fermeture de l'école. Il pourrait toujours trouver le moyen de les passer en candidat libre

« Me conquérir. Quelle question ! »

« TU ! » De nouveau, il la tuait du regard, et les éclats carmin dansaient dans ses yeux.

Evelyn Snow l'avait battu. Dans un lit, blessé et sans baguette. Cette fille l'avait piégé. Elle l'avait vaincu. Le privant de sommeil depuis déjà deux mois, hantant ses rêves en lui faisant imaginer des choses terriblement indécentes. Et maintenant, s'il lui arrivait quoi que ce soit, il serait dénoncé aux autorités. Il savait déjà que Dumbledore cherchait à le faire accuser. Il ne pouvait pas gérer ça. Il ne le voulait pas.

Et pourtant, c'était déjà trop tard.

« Fais de beaux rêves… mon amour~ »

Tom n'en pouvait plus. Il se sentait éreinté, blessé, abusé… Il avait l'impression d'être de retour à l'orphelinat, de n'avoir aucune valeur. D'être un perdant. Et lorsque dans ses songes, la silhouette d'Evelyn se pencha sur lui pour l'embrasser, il pleura. Silencieusement, sans un mot, sans un gémissement. Il devait ramasser les éclats de sa dignité brisée. Et pourtant, elle l'étreignait avec tendresse.

Tom ignorait que cette nuit-là, aucun maléfice n'était à l'œuvre.