Bonjour Bonjour :D

Et bonne année bien-sûr ! J'espère que vous avez passé de belles fêtes de fin d'année et que 2024 vous apportera joie et bonheur.
Pour bien la démarrer, on s'est dit qu'un petit chapitre vous ferait plaisir. Souvenez vous, on laissait nos deux randonneurs dans leur campement dans une ambiance propice au rapprochement. On vous laisse découvrir la suite de leur aventure.

Bonne lecture !

Shadow: C'est sûr chacun son truc. J'ai mis un peu de mon enfance dans cette partie de pêche, mais il y a longtemps que je n'y suis pas allée. Contente que le dernier chapitre t'ait plu :)

K-FicModo: Avec plaisir ! Merci à toi pour ton retour ;)


Aomine dort d'un sommeil lourd et réparateur, l'effort physique fourni dans la journée et le sac de nœud émotionnel qu'il a traîné jusqu'en haut de cette montagne aidant. Au petit matin, c'est le chant des premiers oiseaux qui le tire de sa léthargie. Cependant il n'ouvre pas les yeux immédiatement. Il a besoin de temps pour émerger, comprendre où il est, à qui sont ce corps étendu près de lui et ce bras entourant sa hanche. Doucement, sa mémoire lui transmet les images de la veille. L'effet ne se fait pas attendre et son cœur change de rythme. Il n'ose toujours pas bouger, ni ouvrir les yeux. Il profite encore de la pénombre précédant l'aube et de l'étreinte détendue de Kagami pour revisiter son rêve qui se dissipe déjà. Il croit se souvenir d'une baignade au clair de lune et cette sensation étrange que laisse parfois un mauvais pressentiment. Peut-être le début d'un cauchemar... il ne s'en souvient pas.

Finalement, lorsqu'il perçoit le changement dans le souffle de son compagnon, il s'étire autant que son sac de couchage le lui permet et ouvre un œil.

Kagami sent le brun s'agiter et il commence à émerger doucement. Malgré la fatigue, il a peu dormi cette nuit, les pensées bourdonnant et tournoyant dans son esprit. Il a refait tout le film de sa relation avec Aomine depuis le jour où ils se sont rencontrés, réécrit des conversations dans sa tête, avant de commencer à anticiper celles à venir. Il a visité toutes sortes de scénarios, est passé au travers de toutes sortes d'émotions, et ce matin il se sent lourd et engourdi de sommeil, mais l'esprit plus clair. Il se tourne sur le dos et étouffe un bâillement tout en marmonnant :

« Hm... Morning... »

Aomine se redresse et entreprend de s'habiller. Il est encore trop tôt pour lui, mais il devine que le soleil n'est pas encore levé. Il frissonne en s'extirpant de son sac de couchage et enfile une couche supplémentaire de vêtement. Tout à sa tâche il demande à son voisin :

« Bien dormi ?

— Yeah... Et toi ? Pas eu froid ? »

Un bras passé sous sa tête, Kagami observe Aomine, toujours ensommeillé et perdu dans ses rêveries nocturnes, puis il finit par détourner le regard en s'apercevant qu'il le fixe. Il s'assoit et cherche ses vêtements pour s'habiller à son tour.

« Nan, tu tiens chaud... réplique le brun avec un sourire en coin avant de poursuivre enjoué : Je vais rallumer le feu pour faire le café. Te rendors pas, tu veux pas louper ça... »

Puis, il défait la fermeture de leur refuge et se hisse au dehors en laissant planner le mystère. Dans le matin frais et gris il s'étire entièrement. Il grimace en sentant ses muscles protester sous sa peau frissonnante. Il fait quelques mouvements pour se réchauffer puis s'accroupit devant le foyer où quelques braises rougeoient toujours. Avec des gestes habitués il fait bouillir de l'eau dans une petite casserole qu'il verse ensuite dans sa cafetière italienne. D'une simple pression, le breuvage est fin prêt. Le gris se délave doucement au-dessus de lui, témoignant de l'arrivée imminente de l'astre solaire.

Kagami repousse son sac de couchage et finit de s'habiller, passant une main dans ses cheveux en bataille dans une vaine tentative pour y apporter un peu d'ordre. Puis, il enfile ses chaussures et s'extrait finalement de la tente, inspirant l'air frais et boisé qui se mêle aux effluves de fumée et au parfum corsé du café. Il se rapproche du feu et pose une main sur la nuque d'Aomine.

« Hm... Il sent bon ce café. »

Pile à temps, songe Aomine. Décidément de bonne humeur, il se redresse pour lui offrir un sourire. Sa cafetière et deux tasses dans une main, l'autre vient chercher les doigts de Kagami. En les entremêlant dans les siens il murmure :

« Viens... je t'avais promis un spectacle. »

Il le guide vers le rocher où ils ont pêché la veille, qui se trouve être juste en face du mont Fuji, derrière lequel se cache encore la star du show. Leurs pas crissent sur les cailloux humides du bord du lac, dérangeant la douce mélodie de la nature qui s'éveille.

Kagami suit le brun, serrant doucement sa main dans la sienne, enchanté par cette promenade matinale. Son regard dérive sur le lac parfaitement immobile à cette heure. Il n'y a pas un souffle de vent et la surface reflète le ciel avec une telle précision que c'en est troublant.

« C'est magnifique... » murmure-t-il.

Aomine suis son regard un instant et acquiesce. Un véritable miroir. Puis ils s'installent sur le promontoire naturel qui fera office de tribune ce matin. Lorsqu'il voit Kagami secoué d'un frisson, il lui tend une tasse pleine de café chaud et se place derrière lui, ses cuisses de part et d'autre de ses hanches.

« T'as pas trop froid ça va ? »

Kagami frémit, surpris par son geste. Aomine sait toujours l'étonner quand il se montre attentionné. Il ferme les yeux un bref instant et souffle doucement, s'appuyant un peu contre le brun. Il pose une main sur son genou et le caresse doucement.

« No thanks... I'm good... »

Son regard se perd sur le paysage splendide, la lumière qui augmente et inonde le lac, perçant peu à peu à travers les brumes qui flottent sur le mont Fuji. Il souffle sur son café et en avale une gorgée, avec l'impression finalement de s'être rendormi et de faire un très beau rêve.

Les caresses de Kagami lui envoient de petites décharges électriques chaque fois qu'il frôle l'intérieur de son genou. C'est agréable et ça a le mérite de réveiller son corps, à présent en alerte, guettant le moindre contact. Le parfum encore chaud de sommeil de Kagami et son corps pesant contre le sien le détournent presque de ce qu'il attendait. Il sirote son café et profite de l'instant. Du silence, leur proximité nouvelle et enivrante, des couleurs roses qui habillent à présent le ciel et offrent une toute autre ambiance au lieu. Aomine savoure ce moment de quiétude loin de tout, laissant même ses pensées au placard, il les laisse flotter et dériver dans son esprit sans s'y attarder.

Tout est si paisible, lumineux, pur. Kagami se sent léger, toujours envahi par ce sentiment d'irréalité, d'autant plus lorsque le soleil surgit finalement de son écrin de brume et baigne le lac de lumière. Il prend la main du brun et la porte doucement à ses lèvres. Il embrasse sa peau halée, remontant vers son poignet tandis que son regard s'égare sur un lever de soleil tel qu'il n'en a jamais vu.

Aomine se fige, autant d'émotion que de surprise. Les baisers de Kagami le font frissonner. Tout d'abord, il reste immobile. Mais le spectacle enchanteur a ce pouvoir mystique de lui donner confiance, de lui rappeler que si certaines choses comme la course du soleil sont immuables, d'autres sont faites pour changer, évoluer. Aujourd'hui il se sent prêt à tout. Certainement un des effets secondaires de l'ascension. C'est le genre d'exercice qui vous fait pousser des ailes... Alors il se laisse guider par la tendresse de Kagami et y répond sans hésiter. Il vient déposer une pluie de baisers papillons dans sa nuque jusque sous son oreille avant de caler son menton dans le creux de son cou. En cet instant, il ne voudrait être nulle part ailleurs, et il se dit que c'est peut-être le plus beau levé de soleil qu'il a pu admirer de sa vie... Comme si la présence de Kagami rendait tout plus lumineux, plus chatoyant et plus intense.

Kagami a refermé les yeux pendant que les lèvres du brun se posaient avec légèreté sur sa peau, créant des sensations trop intenses pour un simple effleurement, et il se laisse enivrer, jusqu'à ce que finalement il rouvre les yeux pour se replonger dans la contemplation de l'aube. Il se sent bien, complet, comme si quelque chose au fond de lui s'était finalement apaisé. Sa nervosité latente s'évanouit et un calme profond descend en lui, à l'image de ce paysage empli de sérénité. Il boit son café à petites gorgées, il est juste assez corsé et amer, parfumé, puissant.

Ils restent silencieux un moment, s'offrant encore quelques baisers et caresses distraites en admirant le ciel changer de couleur progressivement, passant du rose au violet à l'indigo. Ce n'est que lorsqu'il prend sa teinte bleue et que les rayons du soleil les atteignent, levant l'ombre dans laquelle ils ont trouvé refuge qu'il ose briser le silence. Sans bouger ni lâcher le tigre il soupire :

« Et Kagami... si on redescendait jamais d'ici, ce serait grave ? »

Le rouge rit doucement à ces mots et repose sa tasse de café vide sur la pierre, se sentant légèrement engourdi par l'euphorie et sa nuit trop courte.

« Eh ben... Je suppose qu'il faudrait juste se cacher des hélicoptères et des battues envoyées par nos amis pour nous retrouver... »

Aomine fait la moue et grogne de mécontentement. Il n'avait pas pensé à cette éventualité. Il voit d'ici Satsuki et Alex mener les recherches, ses collègues à leur suite.

« T'as raison... et puis, on n'a pas pris de ballon de basket...

— Ouais, et j'ai pas envie de manger du poisson grillé pour tout repas jusqu'à la fin de mes jours. Donc je propose qu'à la place, on revienne ici régulièrement. Ça paraît moins risqué.

— Ok, deal. Ici c'est mon refuge, mais puisqu'il te plait, je veux bien partager. »

Une part de Aomine aimerait vraiment rester ici. Parce qu'il se sent seul au monde, libre et au-dessus de tout ce qui l'inquiète et obscurcit son jugement aux pieds des montagnes. Il se sent plus proche de Kagami ici, chaque kilomètre gravi leur a permis d'enlever une brique du mur dressé entre eux. Il espère ne pas le voir se reconstruire sur le chemin retour. Alors il grave en lui ces sensations, la joie et la plénitude qu'il éprouve à le tenir simplement contre lui, sans plus avoir peur de le blesser avec des gestes déplacés. Son côté plus raisonnable a conscience qu'il va falloir repartir, et il est aussi curieux de voir comment vont évoluer les choses entre eux, sans cette barrière invisible. La perspective suffit à lui tirer un sourire, qu'il vient coller dans le cou chaud de Kagami.

Le rouge frissonne en sentant son souffle glisser sur sa peau. Il sait que cet endroit est important pour Aomine et ça lui fait plaisir qu'il l'y accueille sans réticence. Il prend encore quelques instants pour s'imprégner de la vue superbe, et comme le soleil monte dans le ciel, il se secoue un peu de sa léthargie.

« Hm... Peut-être qu'on devrait songer à manger un truc et à démonter le camp ! »

Déconfit rien qu'à l'idée, Aomine se laisse tomber en arrière, les bras en croix. C'est vrai qu'il commence à avoir faim, mais pour rien au monde il ne l'avouera, préférant de loin son cinéma dramatique. Si sa carrière de flic de choc s'avère foutue, il pourra toujours tenter acteur...

« Ahrg, pourquoi tu gâches tout ! »

Kagami se tourne en l'entendant se laisser tomber en arrière, et l'observe en haussant les sourcils. Il décide de tester la méthode "enfants" qu'il met au point pour se préparer aux inévitables futurs gamins que fera Tatsuya et qui le prendront pour leur oncle :

« Tu peux rester là si tu veux. Mais t'auras pas à manger. C'est comme tu veux. »

Aomine ouvre un œil en sentant l'ombre de Kagami obstruer la lumière du soleil sur son visage. Ce dernier s'étire et s'apprête à l'abandonner à son sort, sans aucun remords. Il fait mine de s'en ficher en croisant les mains sous sa nuque, mais avant que le tigre ne soit plus à portée de voix il lance :

« Ça dépend... on mange quoi ?

— J'ai fait des muffins » rétorque Kagami par-dessus son épaule, sans s'arrêter de marcher.

À ce mot, son estomac gargouille. Il se redresse tel un clown dans sa boîte et descend souplement de son perchoir. En quelques foulées il rattrape Kagami. Tandis qu'il le dépasse de grandes enjambées pressées, c'est avec toute la mauvaise foi du monde et un sourire de sale gosse qu'il le nargue :

« Bah allez dépêche, je t'attends, moi. »

Kagami lève les yeux au ciel, mais au fond il est amusé par le comportement du brun, qui lui semble d'humeur particulièrement joyeuse ce matin. Il prend son temps pour rejoindre le campement, il ralentit même le pas pour exaspérer Aomine, puis commence à fouiller dans son sac avec une minutie exagérée.

Pris à son propre jeu, Aomine fulmine. Il a envie de souffler avec exagération mais ça ferait trop plaisir au roublard Kagami qui a décidément le don de lui couper l'herbe sous le pied. Alors en attendant que son rival en mesquinerie retrouve leur petit déjeuner, il leur refait du café.

Kagami rit sous cape en notant l'agacement du brun, et sort finalement ses muffins soigneusement emballés dans du papier et placés dans une boîte hermétique. Malgré ses précautions, ils ne seront pas tout frais et il espère qu'ils seront quand même bons. Il ouvre la boîte et la pose près du feu.

« Le petit-déjeuner est servi ! Y en a aux myrtilles, d'autres à la framboise », annonce-t-il.

Aomine lève des yeux méfiant sur lui, cherchant l'arnaque. Sous ses airs de mec serviable, ce n'est pas la première fois qu'il devine un Kagami joueur. Et malgré sa déconvenue, comme toujours, il apprécie son répondant. Au sourire encourageant de son compagnon, il attrape un gâteau au hasard en échange d'un mug de café.

« C'est toi qui les as faits ? » demande-t-il en ôtant le petit papier avec précaution.

Kagami sourit en hochant la tête.

« Bien sûr. À part si je suis très malade, j'achète jamais ce genre de trucs, je les fais toujours moi-même ! »

Il boit une gorgée de café et attrape un muffin à son tour, mordant dedans à belles dents. La pâtisserie est encore moelleuse et il en est plutôt satisfait.

Aomine l'imite. À la tâche de couleur bleu qu'il aperçoit dans la génoise, il devine qu'il a pioché myrtille. C'est bon, moelleux et sucré. Il adresse un compliment à Kagami tout en piochant un second muffin. Petit déjeuner en pleine nature a quelque chose d'un peu incongru. Ça lui rappelle même s'il a encore du mal à y croire, qu'ils ont dormi ensemble cette nuit. En y pensant il sourit, content d'avoir partagé ce moment d'intimité avec lui. En dehors de Satsuki, il n'a jamais dormi avec personne. Enfin... dans le seul but de dormir évidemment. Peut-être Kise une fois... mais ils étaient trop déchirés pour s'en soucier ou s'en formaliser.

Kagami aussi repense à cette nuit, et plus généralement à la façon dont ils se sont rapprochés. Il se demande soudain si maintenant, Aomine le considère comme son "petit ami". Probablement pas... Il n'y a sans doute même pas pensé encore. Alors que lui est sur le point de lui déclarer sa flamme à chaque moment de tendresse. Mais il sait qu'il doit être patient... Et il a le sentiment qu'il vaut mieux ne pas poser de questions sur leur relation pour l'instant. Il vaut mieux profiter à 100 % de ce week-end et voir comment les choses évoluent entre eux... Tout ça est encore très neuf, après tout.

Il termine son muffin et en reprend un aussitôt. Ça fait du bien de regagner un peu d'énergie, et ils vont en avoir besoin, car la descente n'est pas forcément plus aisée que l'ascension. Cette pensée le ramène à l'onsen et tout à coup il est frappé d'une révélation : l'onsen, on y va nu, non ? Chose qui lui avait échappée la première fois qu'il en avait visité un, et qu'il avait de nouveau oubliée jusqu'à maintenant – aux USA ce genre de choses n'existe pas. Un vent de panique se lève en lui. Aller dans l'eau, nu, avec Aomine ? Ça risque d'être chaud... dans tous les sens du terme...

Aomine remarque l'air ... inquiet ? Il ne sait dire, de Kagami. Il a la tête de quelqu'un qui se rappelle d'avoir oublié d'éteindre le gaz avant de partir. Ça l'amuse un peu de voir ses sourcils hors du commun se rapprocher, creusant sa ride du lion comme lorsqu'il est concentré sur une partie difficile. Il se demande vaguement à quoi il peut bien penser... Il hésite à demander, mais sa curiosité et son flair de policier – déformation professionnelle – l'incitent à creuser.

« Hé... ça va ? »

Kagami relève la tête en le regardant sans comprendre, puis sourit en se frottant l'arrière du crâne, un peu gêné.

« Yeah, yeah... T'en fais pas. Alors tu préfères quoi ? À la myrtille ou à la framboise ? » demande-t-il vite pour détourner l'attention du brun.

L'empressement à changer de sujet est limpide. Le tigre essaie de noyer le poisson. Aomine n'est pas dupe mais il laisse couler. Cependant, il garde en mémoire que leur difficulté à parler leur ont causé du tort avant de parvenir à s'ouvrir l'un à l'autre. Ce n'est peut-être rien de grave, mais il se note d'être attentif.

« Une question existentielle de bon matin ? T'es dur ! ricane-t-il. Mais s'il faut choisir, framboise.

— Hm... Ouais, je suis d'accord avec toi. Des fois j'en fais au citron aussi... Mais là j'en avais pas. »

Il sourit, soulagé qu'Aomine ne le presse pas davantage de questions, et entame vite un nouveau muffin. La boîte remplie de gâteaux ne va pas faire long feu...

Aomine termine son second café dans le calme, rassasié. Il profite de ces derniers instants où il est un peu chez lui, avant de devoir lever le camp et rendre son bout de terrain à la montagne. Il s'imprègne de la vision paisible du lac dans son écrin de sommets et seulement lorsqu'il s'est assez gorgé de la magie des lieux, il s'active à ranger. Il profite de sa corvée vaisselle pour faire un brin de toilette au bord de l'eau. Lorsqu'il revient, il verse le contenu de sa casserole sur le foyer pour éteindre les dernières braises. Prudent, il étale les cendres et les recouvre de terre avant de s'atteler au démontage de la tente que Kagami a déjà pris soin de vider.

Quand ils ont terminé de tout ranger, ils renfilent leurs sacs à dos et prennent la direction du retour. On est en milieu de matinée et un beau soleil éclaire leur route. Kagami avance à un bon rythme, peu enclin à traîner des pieds, même pour profiter de la balade.

Le brun s'étonne un peu d'entendre Kagami si proche derrière lui. Pourtant, il lui a dit qu'ils n'étaient pas pressés. Amusé par son enthousiasme et parce qu'il n'a pas envie d'accélérer le rythme il s'arrête pour lui faire face.

« Tu veux passer devant ? propose-t-il en souriant.

— Ok... Tu me dis si je me plante de route ! »

Kagami sourit et le dépasse, reprenant son allure rapide et profitant de cette marche pour se délester un peu de la fébrilité qui l'a envahi à l'idée d'aller à l'onsen ce soir. Cette nervosité lui donne plein d'énergie malgré le manque de sommeil, et il pressent que cette nuit il va dormir comme une masse. Tant mieux, car si jamais il voit Aomine à poil, il va lui falloir être bien assommé pour espérer trouver le sommeil. Il secoue la tête, atterré par ses propres pensées, et tâche plutôt de se concentrer sur la beauté des paysages.

Aomine secoue la tête en le voyant partir comme une flèche. Il sent bien que Kagami n'est pas d'humeur à flâner, alors il le laisse prendre de l'avance. Prenant garde à toujours le garder en visuel, auquel cas il accélère. La descente n'a pas de bifurcation, donc pas de souci éventuel d'orientation. En revanche, certains passages seront raides, notamment les portions du sentier à découvert, à flanc de falaise. En attendant de tomber sur ces difficultés, il s'autorise un rythme plus lent, redécouvrant les paysages, toiles de fond de ses souvenirs. Si la veille il se sentait encore triste, aujourd'hui il se sent plus léger. Il sait alors qu'il a déposé un peu de son fardeau et une part de son chagrin en haut de la montagne. Une idée qui lui plait et le soulage. Après tout, il est aussi venu pour ça. Alors il profite de sa presque solitude pour faire le tour de sa mémoire sans avoir peur qu'elle le blesse. C'est une victoire en soit qui le rend heureux. Son avenir a beau être des plus incertains depuis longtemps, pour une fois, son passé ne fait plus si mal. Et il s'en réjouit.

Kagami finit par se sentir un peu seul et se retourne pour apercevoir Aomine assez loin derrière lui. Du coup, il décide de faire une petite pause et s'assoit sur un rocher en sortant sa gourde, la marche lui a donné soif. Il boit de longues goulées puis s'essuie les lèvres, le regard dérivant sur les montagnes qui se déploient paresseusement, offrant leurs flancs boisés au soleil chaud. Il inspire l'air pur et minéral, et tend l'oreille pour s'imprégner du silence profond qui règne ici. C'est vrai que ça ne donne pas envie de redescendre...

Aomine trouve Kagami perdu dans une contemplation qu'il ne comprend que trop bien. Mais cette fois, ce n'est pas le panorama qui gonfle sa poitrine. C'est vrai qu'il s'était déjà fait la réflexion, mais il ne s'est jamais vraiment autorisé à le penser à voix haute, en pleine conscience. Assis là, le regard perdu dans le vague entouré de son aura pleine d'assurance, il le trouve particulièrement beau. Et puisque ses pas le guident vers lui avant même qu'il l'ait décidé, il peut se risquer à dire qu'il est même carrément attirant. Son avenir est peut-être aussi flou qu'un tableau d'impressionniste, mais en cet instant il est sûr d'une chose. Il ne veut pas que Kagami sorte du cadre. Il est là dans son élément, dans son univers et il ne se voit plus revenir en arrière. Sans un mot et sans y réfléchir, il vient glisser une main dans ses mèches indisciplinées et lui sourit tendrement, vraiment heureux qu'il soit là. Il a la folle pensée, l'espoir secret peut-être que son père l'aurait apprécié, lui et sa fougue, sa détermination sans faille et sa façon de repousser ses limites.

Kagami frémit délicieusement en sentant cette main se glisser dans ses cheveux, et en croisant son regard, son cœur fond au sourire qu'il lui adresse. Il s'attarde sur ses lèvres, et ne pouvant résister à leur attrait, il pose une main sur la nuque du brun pour l'attirer à lui et l'embrasse.

Il sourit de plus belle contre ses lèvres. Lui qui parlait de sa fougue justement... Il lui rend son baiser en se calant face à lui, entre ses genoux. Ce contact est grisant, l'affole et le rassure à la fois. Contrairement aux autres qu'ils ont échangés, il n'est plus sur la réserve. Il joue de sa langue et l'enroule sensuellement autour de sa jumelle, savourant les sensations exquises qui lui picotent l'épiderme et lui retournent le ventre. Kagami est beau, et il embrasse comme il n'a jamais été embrassé. Avec une passion évidente, contagieuse, dévorante.

Le tigre ressent comme un changement dans le comportement du brun, la façon dont il répond à son baiser plus sauvage et franche. Ça lui fait tourner la tête et il prolonge le baiser, satisfaisant une faim profonde, qui reste toujours insatiable mais qu'il peut apaiser un peu au contact de ses lèvres. Ça fait bien longtemps qu'il n'a embrassé personne de cette façon, amoureusement, savourant chaque instant et déclenchant une myriade de sensations frissonnant sous son épiderme. Finalement il se recule un peu, légèrement haletant, et regarde Aomine les yeux brillants, un sourire relevant le coin de ses lèvres :

« Alors... Toujours accro ? »

Son air satisfait et son ton presque arrogant lui arrache un rictus narquois. Il se garde bien de lui confirmer par les mots mais ne peut pas mentir, ni résister à cette bouche. Alors il attrape sa lèvre inférieure entre ses dents et la tire doucement. Il la mordille pour le punir d'avoir raison et rétorque sur le même ton joueur :

« Pas plus que toi Baka... »

Kagami le fixe avec un sourire qui s'adoucit, se faisant plus tendre.

« Guilty », lâche-t-il en revenant happer ses lèvres entre les siennes.

Le rouge a envie de s'enivrer de ses baisers avant de repartir, de faire durer ce moment encore un peu. Il a toujours ce sentiment d'irréalité qui l'enveloppe, et comment faire autrement quand c'est un rêve qui se réalise ? Il espère juste que ce rêve ne se dissipera pas une fois arrivés en bas...

En vérité, il a un peu prêché le faux pour avoir le vrai et il aime la réponse de Kagami. Alors qu'hier il hésitait encore à l'embrasser, accepter son attirance et son envie de le toucher, aujourd'hui il a du mal à le lâcher. Peut-être parce qu'Aomine pressent qu'ici c'est plus facile, donc il embrasse Kagami autant que son envie d'être physiquement proche de lui, il lâche prise et goute encore ses lèvres. Lorsqu'il quitte sa bouche, il garde quand même sa main dans ses cheveux, laissant ses doigts jouer sur sa nuque.

Kagami le contemple un moment, comme s'il voulait photographier ses traits dans sa mémoire, et finalement s'écarte doucement.

« On ferait mieux de repartir. Sinon on va rester là jusqu'au soir, et passer la nuit sur des rochers ça m'a pas l'air idéal !

— T'as raison... » souffle-t-il presque à regret.

Quand ils reprennent la route, Aomine reste derrière lui mais se cale cette fois sur son allure, décidément pas prêt à le revoir s'éloigner. Il avait seulement besoin de ce moment seul avec lui-même pour se recentrer.

Une heure plus tard, Kagami trouve que son petit-déjeuner commence à remonter à longtemps, comme en témoigne son estomac qui gargouille. Il se tourne vers le brun et lui lance par-dessus son épaule :

« T'as faim ? On s'arrête pour manger ? »

Aomine sourit. Évidemment que Kagami a faim.

« Ouais si tu veux. Un peu plus bas y a un spot sympa avec une cascade, tu pourras pas la louper. »

Il ne s'y arrête jamais d'habitude, avec son père ils partaient plus tôt et terminaient la randonnée avant l'heure du déjeuner. Mais ça changera, ça pourrait même devenir leur spot à eux... Se dit il en se projetant déjà sur leurs prochaines fois.

Kagami reprend son chemin en quête de cette fameuse cascade, et dès qu'il entend le bruit de l'eau, il accélère le pas, impatient de découvrir la vue... et de se poser pour manger. Il descend encore une pente raide, et d'un coup se retrouve face à la chute d'eau. Il s'arrête aussitôt, un sourire se peint sur ses lèvres tandis qu'il lâche un "Wow" étouffé.

Quelques instants après, Aomine atterrit à ses côtés. C'est vrai qu'elle n'est pas immense mais impressionnante. Cette eau qui bouillonne, c'est la nature dans toute sa force. Il laisse Kagami à sa contemplation tandis qu'il cherche un endroit pas trop humide et assez confortable pour s'installer.

Pendant ce temps, Kagami marche droit vers la cascade qui rebondit sur les rochers en formant un petit ruisseau. Il s'agenouille au bord de l'eau et s'en asperge le visage, soupirant de plaisir à la sensation de fraîcheur sur sa peau échauffée par le soleil. Il se redresse en secouant sa crinière humide, rasséréné.

Le brun s'aperçoit qu'il le fixe seulement quand il croise son sourire moqueur. Il se sent rougir légèrement mais ne détourne pas les yeux pour autant. Il le soupçonne presque d'avoir fait exprès de jouer les mannequins. Ou alors il est vraiment plus atteint qu'il ne le pensait... Cette éventualité le laisse un peu hébété. Réaliser que Kagami lui plait ne suffisait donc pas ? C'est comme si cette révélation n'était en fait qu'un verrou débloqué quelque part au fond de son esprit, et maintenant que la porte est entrouverte, il découvre l'ampleur de la pièce et tout ce qu'elle contient. Ça a quelque chose d'intimidant et de très déroutant aussi, de se rendre compte à quel point on peut se tromper sur soit même. Avec quelle facilité on est capable de se mentir, de se voiler la face sur des vérités qui paraissent pourtant toutes simples à son contact.

Kagami observe Aomine, qui lui semble réellement troublé. Le brun a commencé à réaliser qu'il était attiré par lui, c'est certain, mais au fond de lui il se demande toujours jusqu'à quel point... Cependant, même si ça l'inquiète en toile de fond, il veut lui laisser le temps de se découvrir, de le découvrir. Et puis... il y a une part de lui qui aime beaucoup le voir troublé par des gestes anodins de sa part. C'est... réconfortant. Ça lui assure qu'il ne fait pas fausse route, qu'Aomine ne va pas se réveiller un matin en ne voulant plus jamais entendre parler de lui.

Il se relève et rejoint le brun, ouvrant son sac pour sortir les sandwichs qu'il lui reste. Il sourit et constate :

« C'est un endroit génial... Idéal pour un pique-nique. »

Perdu dans ses réflexions philosophiques, Aomine met un temps de latence à comprendre que Kagami s'est adressé à lui. Il sort de sa rêverie en secouant la tête, prenant conscience qu'il était parti un peu loin.

« Hum ? Oh ici ? Oui c'est pas mal. C'est la première fois que je m'y arrête pour manger.

— C'est vrai ? » Cette information semble faire plaisir à Kagami, qui s'assoit dans l'herbe et lui tend un sandwich. « Y a quand même quelques 'premières fois' pour toi sur ce trajet bien connu, alors », ajoute Kagami.

Ce dernier se rend compte comme cette déclaration peut sembler suggestive et rougit en riant un peu, mais ne se corrige pas. Laisser turbiner un peu Aomine n'est pas une mauvaise chose non plus.

Ce dernier comprend le sous-entendu et il baisse les yeux sur sa pitance avec un sourire embarrassé. Il ne peut pas vraiment le contredire... Et en fait à bien y réfléchir, même en dehors de ce sentier il a eu quelques premières fois avec Kagami. Et il se doute qu'il y en aura d'autres, non en fait, il l'espère. Parce que tout ce qu'il découvre, ce qu'ils partagent pour l'instant lui plait. Malgré les doutes et les incertitudes, ça lui plait beaucoup.

« Ouais... quelques-unes », admet-il finalement en haussant les épaules.

Kagami sourit et mord dans son sandwich à belles dents. Il aurait été meilleur fait ce matin, mais c'est quand même plutôt bon, et surtout ça satisfait son appétit dévorant après cette matinée de marche à bon pas.

« Ahhh... Ça fait trop de bien ! » s'exclame-t-il avant d'engloutir une nouvelle bouchée.

Aomine approuve en dévorant son repas. C'est vrai qu'il avait faim lui aussi.

« Merci d'avoir gérer les repas... dit il entre deux bouchées.

— On s'est partagés le travail : t'avais le matos et l'expérience, moi je me suis occupé de la nourriture ! Faut dire que c'est mon rayon », ajoute-t-il avec un clin d'œil.

Le brun sourit et sa pensée franchit spontanément la frontière de ses lèvres sans qu'il n'ait le temps de la retenir.

« On fait une bonne équipe ! »

Kagami relève les yeux à ces mots, et son visage s'éclaire d'un sourire joyeux.

« Yeah... C'est vrai. Un vrai duo d'aventuriers ! Et cette aventure-là n'est sans doute que la première ! »

Rassuré par la réaction enthousiaste de Kagami, l'image d'eux en tête d'affiche d'un film sur un duo d'explorateurs intrépides lui revient. Il ricane et s'autorise même à renchérir :

« Tu crois qu'on devrait investir dans la panoplie complète ? Au cas où on rencontre des alligators dans la prochaine ?

— Ça paraît une bonne idée ! On n'est jamais assez bien préparés à une aventure ! »

Le rouge rigole en les imaginant en costumes d'aventuriers à vivre des histoires trépidantes dans les lieux les plus insolites. L'idée est plutôt séduisante... Il a envie d'essayer plein de choses avec Aomine. Chaque fois qu'ils sont ensemble, l'harmonie se crée et tout ce qu'ils vivent ensemble prend une saveur particulière. Chaque moment est spécial... et précieux.

À leurs bêtises qui ont des allures de projets, il sent la gêne s'estomper. Avec tous ses changements, il a tendance à oublier ce qui a fait tilt dès le départ entre eux. Ils ont de nombreux points communs, s'entendent bien, se comprennent. Ils sont amis avant tout et ça fait du bien de s'en rappeler en riant ensemble de leurs aventures hypothétiques.

« Complètement ! ... Je crois qu'il me faut des jumelles... réalise-t-il en se prenant au jeu.

— Ouais... Indispensable pour observer d'éventuels diplodocus. Parce qu'on est d'accord... Y a vraiment une île paumée quelque part dans l'océan avec des dinosaures dessus, pas vrai ?!

— Évidemment ! On pourrait même devenir les premiers à la découvrir ! Ou alors, on commence par la cité d'El Dorado ?!

— Ah ouais, c'est tentant aussi... Probablement moins difficile à trouver que l'île des dinosaures, ça pourrait nous faire une bonne première expérience ! On remontera l'Amazone en pirogue et tout... »

Kagami se prend à rêver à cette fantaisie, il se la représente étrangement bien. Il prend ça pour un bon signe... même si c'est un rêve, c'est agréable de se projeter ainsi. Avec Aomine pendant longtemps, malgré leur amitié il n'a pas su sur quel pied danser... Mais à présent, ça devient plus facile de refaire confiance, de s'ouvrir, de rêver et plaisanter. Et c'est... plus libérateur qu'il ne l'aurait cru. Aujourd'hui, il se sent léger, très léger, et ça fait un bien fou.

Aomine se laisse embarquer dans cette aventure imaginaire, se voyant déjà trouver la légendaire cité d'or en résolvant des énigmes et remportant des épreuves en tout genre. Il aime entendre le rire de Kagami et encore plus en être la cause. Alors il poursuit ses imitations douteuses et se surprend à rire aux commentaires bancals de son compagnon. Il ne sait pas si c'est l'environnement sauvage dans lequel ils évoluent depuis deux jours qui fait déborder leurs imaginations mais il passe un super moment, s'inscrivant dans la lignée des précédents.

Avec tout ça, il s'attendrait presque à trouver un vélociraptor au détour de la forêt qui leur reste à traverser, ou peut-être même qu'un tricératops va venir s'abreuver à la cascade...

« Ça fait envie ! Mais on devrait finir celle-ci avant tu crois pas ?

— Ouais, t'as raison. Celle-là, c'est déjà pas mal ! Je la trouve géniale. »

Kagami range les reliefs de leur repas et s'étend dans l'herbe, entraînant Aomine avec lui. Il soupire de contentement, perdant son regard dans le ciel où s'effilent quelques longs nuages vaporeux. Le soleil réchauffe doucement leurs ventres repus, et le temps paraît comme suspendu. Kagami s'emplit les yeux de ce bleu vibrant de lumière. Contre son épaule, il sent celle d'Aomine, et il attrape sa main et la serre doucement.

Une sensation qu'il commence à bien connaître empli sa poitrine où son cœur s'emballe au contact de Kagami. Il y a toujours une fraction de seconde de réticence, ou plutôt d'hésitation avant de se rappeler que c'est ok. Non seulement c'est normal, mais il a tous les droits d'aimer ça. C'est juste... jamais auparavant dans sa vie il ne l'avait envisagé, ou considéré comme possible. Il apprend doucement, s'habitue petit à petit, essaie d'y trouver une forme de légitimité. Comme si le fait de s'être considéré hétéro toute son existence faisait de lui une fraude, un imposteur dans ces moments de bonheur simple. Il chasse cette pensée négative en entrelaçant leurs doigts pour se raccrocher à sa seule certitude, se prouver que tout est bien réel et a la place d'exister.

Kagami se sent presque somnolent après ce déjeuner, tandis qu'ils paressent dans l'herbe les yeux perdus dans le ciel, mais une autre part de lui a envie de reprendre la route et de découvrir ce que le sentier leur réserve cette après-midi. Sans compter qu'une certaine fébrilité l'habite toujours à l'idée de ce qui l'attend ou non ce soir... Et c'est difficile de ne pas y penser. Finalement, il se redresse et regarde le brun :

« On repart ? »

Il était bien lui étendu là... Il sait qu'ils sont bientôt arrivés et il n'est pas encore prêt à laisser la sérénité de la montagne derrière lui. Pourtant il se laisse convaincre par l'énergie de Kagami et la lueur de curiosité qui anime son regard. Il lui offre un sourire en coin et hoche la tête doucement avant de ne plus avoir de courage du tout.

Kagami se hisse sur ses pieds et tend la main pour aider Aomine à se relever. Il retourne à la rivière pour se rafraîchir avant de remettre son sac à dos. Puis, il contemple le sentier qui descend en serpentant, scrutant les paysages distants comme pour discerner leur destination. Il rejoint le brun et pose une main sur son épaule tandis qu'il demande :

« À ton avis, on en a pour combien de temps pour redescendre ?

— Ça dépend... à quelle allure speedy ? le taquine Aomine en ajustant son sac à dos.

— Hm... » Kagami réfléchit, sourcils froncés, puis reprend : « Ouais, à vitesse max, combien de temps ? Pas que je compte forcément garder le rythme mais... juste pour avoir une idée !

— Hum.. trois quarts d'heure j'dirais, peut-être moins. Si non d'ici il reste grand max une heure trente de marche. »

— Oh, déjà ! »

Kagami regarde à nouveau le chemin qui s'étale sous le soleil, pris d'une certaine anxiété en songeant à finir si vite cette belle parenthèse... Le cœur battant, il réfléchit à toute vitesse. Il sait déjà ce qu'il a envie de demander, mais il n'ose pas. Il se rabroue intérieurement pour ses tergiversations inutiles et redresse le menton avant de déclarer :

« Si ça te tente... J'ai bien envie de prolonger un peu le séjour en s'arrêtant à l'onsen. »

Il a dit ça d'un ton qu'il juge suffisamment dégagé, mais intérieurement les émotions se bousculent, frôlant la panique tandis qu'il attend la réponse du brun.

Ce dernier lève le regard vers lui, content à la perspective de repousser encore un peu le retour à la réalité. Il refoule sa bouffée d'angoisse lorsqu'il réalise qu'ils vont partager une autre nuit, les couches de sac de couchage en moins entre eux. Aomine décide qu'il avisera à ce moment-là. Et puis, ce n'est pas comme si l'idée lui déplaisait... Alors il énumère d'autres arguments, comme pour s'empêcher de se défiler.

« Ouais ? Tu verras il est cool, ça nous évitera un peu les courbatures, et puis on y mange super bien. »

Ces mots rassurent Kagami aussitôt. Il craignait de pousser un peu sa chance... mais il a la nette impression qu'Aomine a autant envie que lui de prolonger encore un peu l'aventure. Soudainement plus détendu, il demande :

« Ah ouais ? T'y es allé souvent, alors ?

— Assez pour y avoir mes entrées... » dit-il en jouant des sourcils, se voulant mystérieux.

Kagami lâche un petit rire à sa mimique.

« Really ? On te donne la meilleure suite, et tout ?! Dîner à volonté ?

— Ça dépend si elle est libre mais ... ouais ce genre de choses », admet-il tout fier avant d'expliquer: « Les proprios me connaissent depuis un bail, et je leur ai apporté quelques clients depuis que je recommande leur établissement. Je m'arrête toujours dire bonjour, même quand j'y dors pas. »

Il omet de préciser que son père a longtemps fait de même, et qu'il les considère un peu comme de la famille éloignée, celle qu'on voit uniquement lors des grandes réunions. Des grands oncles et tantes peut-être. Ou les gentils voisins de vos grands-parents. Le genre de personnes qui connaitraient tout de votre vie, alors que vous savez si peu d'eux, juste leur nom et leur bienveillance.

Kagami écarquille les yeux, l'air impressionné.

« Ah ouais ! Super classe ! Raison de plus pour s'arrêter, alors. Ils t'en voudraient sûrement si tu passais pas au moins dire bonjour ! »

Il affiche un grand sourire, d'une certaine manière, savoir que cet endroit est déjà familier pour Aomine le rassure. Parce qu'ainsi, le brun sera en territoire connu et en contrôle. Alors... Kagami a moins peur de l'intimider... avec sa tendresse pour lui, avec son désir. Il relève la tête tandis qu'ils s'engagent dans une descente assez raide et lance :

« Du coup, peu importe si on arrive en avance. Ça a l'air d'un endroit vraiment sympa où se poser. »

Aomine reste attentif à leurs pas lorsque le terrain devient plus accidenté. Il reste proche de Kagami, assez pour le garder à portée, mais pas trop pour ne pas se faire entraîner dans une éventuelle chute. Concentré sur le chemin le plus sûr, il répond vaguement :

« Yep, c'est presque aussi bien que là-haut. »

Ils retombent dans le silence tandis qu'ils descendent le chemin irrégulier semé de gros rochers et de cailloux un peu traîtres. Kagami se concentre sur sa foulée et sur ses appuis. Ses cuisses commencent à chauffer sous l'effort, la descente n'a absolument rien de plus aisé que la montée, ça fait travailler plus durement les jambes pour retenir son propre poids. Concentré, Kagami ne voit pas le temps passer, et c'est seulement arrivé en lieu plus sûr qu'il ralentit le pas et relève la tête pour observer les alentours. Le paysage a changé, devenant plus hospitalier en regagnant des altitudes plus basses, mais le cadre est toujours aussi majestueux.

Il a hâte que le sentier termine cette boucle. Juste après, il y a une petite surprise dont il n'a pas parlé au tigre. Aomine a une pointe d'appréhension, se demandant si Kagami a le vertige... Si tel est le cas, traverser le grand pont suspendu au-dessus de la rivière risque d'être... Intéressant. Cela dit, ce n'est pas comme s'ils avaient le choix. Si ce n'est rebrousser chemin, jusqu'à leur point de départ. Après cette épreuve ils ne seront vraiment plus très loin de l'onsen, niché dans un creux de verdure un peu plus bas.

Quand le pont se dévoile au détour d'un virage, Kagami marque un temps d'arrêt. Il n'est pas sujet au vertige, mais il porte une confiance très modérée à cette structure qui lui paraît un peu trop usée à son goût. Il attend qu'Aomine arrive à sa hauteur et lui demande :

« C'est safe de passer là ? »

Aomine savoure son air dubitatif et pose une main sur son épaule. D'humeur taquine il souffle :

« Et bin alors ? J'croyais que t'étais un vrai aventurier moi ... »

Puis autant pour le rassurer que le narguer il s'avance sur la première planche qui grince sous son poids. Il regarde loin devant et teste chaque planche avant d'y poser son pied, comme son père le lui a enseigné. Après quelques pas, il regarde par-dessus son épaule.

« Tu vois, c'est solide. Attend que je sois au bout pour avancer, et fais-le à ton rythme », conseille-t-il, encourageant.

Kagami hoche la tête nerveusement. L'aventure, d'accord, mais sombrer dans un ravin de plusieurs centaines de mètres n'a rien de très tentant. Il observe prudemment la progression du brun, se crispant sans en prendre conscience chaque fois qu'il pose le pied sur une nouvelle planche, s'attendant à tout moment à entendre un craquement funeste. Mais Aomine parvient sain et sauf au bout, et il s'engage à son tour en tâchant de reproduire son parcours à l'identique, définitivement pas confiant. Il évite de trop regarder en bas et avance sans se laisser le temps d'hésiter.

Aomine voit bien que son compagnon est tendu. Lui non plus n'était pas serein la première fois. Et il est toujours sur le qui-vive. Parce que même s'il y a de l'eau en dessous, elle est assez loin et pas encore assez profonde pour les empêcher de se blesser en cas de chute. Alors il met ses mains en porte-voix et l'encourage.

« Pose le pied avant de lâcher la corde et avance... Voilà comme ça c'est super, tu t'en sors bien Kagami, t'es à la moitié. »

Guidé par les encouragements du brun, Kagami traverse le pont sans encombres, mais c'est avec un certain soulagement qu'il pose le pied sur la terre ferme.

« Wow... J'avoue, c'était plutôt impressionnant », constate-t-il en se retournant pour contempler le pont qui oscille encore légèrement après leur passage.

Aomine sourit d'une oreille à l'autre, fier de son compagnon. Il a beau savoir qu'il est téméraire et du genre à aimer l'adrénaline, il ne savait pas comment il s'en sortirait sur cette épreuve. Encore une fois Kagami l'impressionne par sa volonté et sa force de caractère, sa détermination. Lorsque ce dernier se retourne pour lui faire face, il se laisse emporter par son élan d'admiration et pose une furtif baiser sur ses lèvres en récompense.

« Carrément. Ça me fout les frissons à chaque fois... »

Kagami rougit à ce baiser et à l'expression fière dans les yeux du brun, comme s'il venait d'accomplir un exploit. Mais c'est vrai que ce n'était pas non plus une partie de plaisir.

« Yeah... Ça aussi tu le faisais quand t'étais gamin ?! »

Le brun lui adresse un sourire mystérieux mais ne répond pas tout de suite. Il boit un peu d'eau puis reprend la route lorsqu'il consent à cracher le morceau.

« Officiellement oui. Officieusement... la première fois je suis resté bloqué au milieu, mon père a dû venir me chercher. J'avais treize ans quand j'ai réussi tout seul. Ça m'a pris des plombes mais je l'ai fait », explique-t-il le regard perdu dans le vague.

Les souvenirs lui reviennent tellement nettement. La frustration, la colère d'avoir été vaincu par un pont. Son père rassurant. Puis l'angoisse, et la fierté d'avoir réussi se reflétant sur le visage de son paternel. Une expression aussi rare que précieuse que cette randonnée lui a donnée quelques occasions de décrocher. Plus jouissif que n'importe quelle médaille...

Kagami laisse un rire lui échapper, mais ça n'a rien de moqueur. Il lance un nouveau regard derrière lui vers le pont suspendu, un frisson traversant son échine.

« Tu m'étonnes... Gamin je suis pas certain que j'aurais même posé un pied là-dessus ! » Il reporte son attention sur le brun et son sourire se fait plus tendre. « Mais ça m'étonne pas que tu aies fini par surmonter ta peur. T'es plutôt du genre obstiné. »

Le compliment lui fait plaisir. Aomine coule un regard vers lui avec un sourire en coin. Si au travail ses collègues le savent, dans sa vie privée il est plutôt reconnu par ses proches pour sa flemmardite aigue. Que Kagami arrive à voir cette part de lui fait manquer un battement à son palpitant.

« Ouais... un peu. Disons que je suis plus efficace sous pression. Je suis du genre à mieux voir le mur quand je suis devant... admet-il en ricanant. On ne se refait pas ! »

Kagami hoche la tête avec un sourire entendu.

« Yeah... En un sens je suis pareil. Enfin, je suis du genre prudent et à venir préparé, mais... Au pied, du mur, j'ai toujours la sensation que je trouve mon plein potentiel. Et c'est toujours assez grisant... »

Aomine se retourne et marche à reculons pour lui faire face, son regard brillant d'intérêt braqué sur Kagami. Ça il l'a remarqué dans son jeu. Du coup ça ne l'étonne pas vraiment d'apprendre que ce trait de caractère déborde dans les autres aspects de sa vie. Même si son complice a l'air tout de même bien mieux organisé que lui au quotidien.

« Carrément... quand ton instinct prend le dessus et que tout devient clair et se goupille parfaitement. Comme si les issues se dévoilaient juste avant le crash. C'est comme tu dis... grisant. » Puis il se remet dans le bon sens pour s'éviter une chute débile et poursuit. « Satsuki a jamais compris pourquoi je m'infligeai toujours plus de stress que nécessaire. Mais je l'ai jamais vu comme ça, elle le mur elle le voit à mille kilomètres alors elle comprend pas... »

Kagami suit le brun qui reprend un bon rythme le long du dénivelé, surveillant où il met les pieds, réfléchissant à ses propos.

« Ouais... J'imagine qu'on a différentes manières de fonctionner. Et de toute façon... Cette façon de réagir à l'instinct, sur le moment... Y en a besoin dans mon métier, sans doute dans le tien aussi, et... dans le basket. Parce que y a des tas de situations auxquelles on peut pas se préparer quoi qu'il arrive. »

Une partie du chemin devant eux est recouvert de gravats plutôt glissants. Arrivé en contre bas il surveille la descente de Kagami, prêt à l'aider. C'est seulement quand ce dernier atterrit sans encombres à ses côtés qu'il confirme sa réflexion.

« C'est sûr que savoir réagir dans l'instant, même sous le choc c'est primordiale. D'ailleurs ça fait partie des tests pour entrer dans les forces spéciales. Ceux qui se figent, c'est dehors. J'imagine que c'est ce qui fait de toi un super joueur... et un bon basketteur », dit-il faussement détaché.

Kagami est content qu'Aomine soit tourné dans l'autre sens, de sorte qu'il ne voit pas le sourire heureux et satisfait qui se peint sur ses lèvres. Il sait qu'Aomine modère volontairement ses mots, et qu'il le trouve un peu plus que "bon" au basket.

« Thanks... Après... On a tous nos faiblesses. Par exemple... » Il hésite un peu et poursuit : « Même si ça paraît con... J'ai une terreur incontrôlable des chiens. J'en vois un, je perds tous mes moyens. Heureusement que je voulais pas devenir vétérinaire. »

Rien qu'en évoquant sa phobie, un frisson d'horreur lui hérisse l'épiderme.

Aomine marque un temps d'arrêt, surpris par la confession. Il n'aurait jamais pensé que Kagami puisse avoir aussi peur des chiens. Pourtant l'entendre se mettre à nu de la sorte lui ôte toute envie de le taquiner, même gentiment sur le sujet. Il comprend aussi un peu mieux pourquoi il était si tendu le jour où ils ont joué sur son terrain. Le souvenir d'avoir évoqué la chienne de son collègue lui revient... Kagami faisait la même tête que maintenant quand il y pense.

Pour le détourner de ses pensées, il lui donne un petit coup d'épaule et lui chuchote sur le ton de la confidence :

« C'est pas plus con que moi... Au moins t'as peur d'un truc qui existe. »

Kagami relève la tête et sourit :

« Ah bon ? T'as peur de quoi ? Des fantômes ? »

Aomine affiche une moue de dégout incontrôlable, peu fier de l'admettre. Surtout que ça a l'air d'amuser Kagami un peu trop franchement.

« Les esprits, l'occulte, les poupées et les visages figés. C'est pas pour moi. Faut pas déconner avec ces trucs-là », marmonne-t-il dans sa barbe plus pour se convaincre lui-même que son voisin.

Kagami a presque envie de dire qu'on ne sait pas, que ça existe peut-être, mais il ne voudrait pas plonger le brun dans la terreur pour le restant de la journée.

« Hm, je vois... Du coup, tu regardes pas de films d'horreur ? demande-t-il, curieux.

— C'est à cause de l'un d'eux figures toi, alors j'évite. Mais comme j'avais pas envie que mes potes se foutent de moi, j'ai dû en regarder quelques-uns. J'te jure, faire semblant de dormir aux soirées d'halloween c'est devenu ma spécialité ! »

Kagami éclate de rire à cette confession :

« Really ?! Ils savent pas que t'aimes pas ça ? » Il secoue la tête, incrédule. « Bon... Au moins, je sais ce qu'il faut pas mettre dans le programme de nos soirées films ou ciné !

— Non ! Et t'as pas intérêt de leur dire, c'est top secret ! » le menace-t-il en mimant une serrure sur ses lèvres. « Ils ont même jamais pigé pourquoi je détestais Toy Story. Remarque, j'aurais peut-être pu l'apprécier si je l'avais vu avant Chucky ... » conclut-il en réprimant un frisson d'effroi.

Kagami ne peut s'empêcher de sourire, mais il ne dit rien. Après tout, ce genre de chose n'est pas rationnel.

« J'avais pas l'intention de le dire. Je suis pas vraiment du genre commère », ajoute-t-il avec un petit rire.

Aomine le regarde un instant, suspicieux, puis en le jugeant honnête il demande plus détendu :

« Et toi c'est venu comment ? T'as été attaqué ou un truc du genre ?

— Ouais... Je devais avoir six ou sept ans... Dans mon esprit c'était un chien énorme... J'ai été mordu, rien de très grave mais j'ai eu la trouille de ma vie, et depuis je vois tous les chiens comme ça... Même les petits... Dès que j'entends un aboiement je suis en mode adrénaline. »

Le brun écoute l'histoire, se sentant désolé pour le jeune Kagami. Lui il adore les chiens... et il a un peu de mal à concevoir qu'on puisse les trouver diabolique. Mais il comprend. Ce genre de chose, ça ne se calcule pas. D'autant plus si c'est lié à un traumatisme, ce qui a l'air d'être le cas.

« Merde... le cerveau c'est puissant. Pas toujours logique mais si le tien a enregistré que c'était une menace, difficile d'aller contre, suppose-t-il. Et les chiens dans les films, ça va ? Ou faut les retirer aussi de nos programmes ciné ? »

Kagami rigole :

« Nan... Dans les films ça me dérange pas. Heureusement parce que bon, y a beaucoup de chiens dans les films. Dans la vie réelle aussi tu vas me dire », remarque-t-il avec un frisson.

Cette fois il rit avec lui. C'est vrai que ça ne doit pas être facile à vivre si on a peur de croiser un canidé à chaque coin de rue.

« Les parcs ça doit être l'enfer pour toi !

— C'est pour ça que j'y passe seulement en courant ! J'y fais que du jogging, jamais de promenade. Des fois je fais des sacrés détours juste pour éviter un chien sur mon parcours. On va dire que ça m'entretient. »

Cette fois il éclate de rire, imaginant très bien la scène. Kagami a décidément l'art de trouver le positif dans toutes sortes de situations. C'est aussi un truc qu'il aime chez lui. Il ne se laisse jamais abattre, préférant voir le verre à moitié plein.

Partager ainsi leurs peurs lui donne le sentiment d'être plus proche de lui. Même si leur randonnée arrive bientôt à son terme, il est définitivement heureux du petit bout de chemin qu'ils ont parcouru. Ils apprennent encore à se connaître, et ce moment confession lui prouve qu'il y a des tas de choses qu'il ne sait pas encore et qui lui reste à découvrir. Aomine se surprend à le désirer si fort, ça dépasse la curiosité naturelle, celle qu'on éprouve en rencontrant une nouvelle personne. Il veut tout savoir, tout apprendre de Kagami, et il est impatient. Mais en attendant, il note ce que son compagnon a bien voulu lui dévoiler dans son registre mental, content de pouvoir remplir une nouvelle page.

Ils avancent à une foulée régulière alors que le soleil se déplace dans le ciel, sa lumière change peu à peu à mesure que l'après-midi progresse, se faisant plus douce et allongeant peu à peu les ombres. Kagami se perd dans la contemplation du paysage, bien assez vaste pour contenir toutes ses pensées qui dérivent sans véritable enchaînement logique. Il apprécie l'atmosphère sereine qui enveloppe les lieux, et le silence confortable qui règne désormais entre le brun et lui.

Ça y est, ils y sont. Il n'a pas vu le temps passé cette après-midi et il est déjà nostalgique de ce qu'ils laissent derrière eux. Il jette un regard par-dessus son épaule pour apercevoir le sommet de Fuji qui se cache dans la brume. Au croisement avec le sentier qui s'enfonce dans un bosquet Aomine s'arrête. Il indique d'un signe du menton le petit panneau de bois indiquant "Onsen". Une façon silencieuse de s'assurer que c'est toujours ce que veut Kagami.

Kagami suit son regard et instantanément son rythme cardiaque s'accélère. Bien sûr, il savait que c'était leur destination, mais la perspective s'était un peu éloignée tandis qu'ils marchaient dans le calme de la nature. C'est certain, il en a toujours envie, même s'il appréhende aussi le degré d'intimité dans lequel ils vont se retrouver.

Il hoche la tête à l'intention d'Aomine et le suit le long du sentier forestier, se concentrant sur son environnement pour éviter de paniquer bêtement à l'idée de cette soirée. De toute façon, il n'a aucune envie de rejoindre la gare et de rentrer chez lui.

Lorsqu'il est en vue de l'arche indiquant l'entrée de l'établissement, Aomine est happé par les souvenirs de toutes ces fois où il l'a franchi. Cette dernière étape était toujours synonyme de détente et propice à revenir à la réalité en douceur après avoir erré seul en pleine nature. Aujourd'hui, franchir le seuil de ce qu'il voit comme un refuge avec quelqu'un d'autre que son père le rend nerveux. C'est bête de n'y penser que maintenant, mais comment va-t-il présenter Kagami ? Un ami ? Il pourrait pour simplifier les choses mais... ne risque-t-il pas de le blesser sachant au fond de lui qu'ils sont plus que ça ? À l'instar de leur première nuit en tente, il a préféré occulter ce moment, se focalisant sur l'instant présent. Mais comme il l'a expliqué à Kagami, maintenant qu'il est devant le mur, il n'a d'autre choix que de le voir. Incertain, il déglutit en poussant le petit portail, réfléchissant à toute vitesse.

Inconscient de son trouble, Kagami examine l'auberge, tout en bois dans une architecture traditionnelle, et trouve aussitôt l'endroit charmant. Ça semble plutôt petit, presque familial. Il espère qu'ils seront au calme ici, sans trop de visiteurs pour les déranger... Il est de nouveau un peu fébrile et s'incite intérieurement au calme. Une chose après l'autre. Et puis, Aomine connaît l'endroit. Il n'a qu'à suivre le guide.