Si Stiles devait être honnête, il était clair qu'il regrettait d'avoir exposé sa faiblesse à son espèce d'ancien rival. En fait, il regrettait de l'avoir appelé tout court. Il s'était déjà écoulé quelques minutes depuis qu'il avait raccroché et… C'était tout. Rien n'avait bougé, rien n'avait changé, seule la douleur s'était accrue et même si l'hyperactif était allongé, il avait la tête qui tournait. Dire qu'il était à deux doigts de s'évanouir était un euphémisme. Parce que si ça continuait comme ça, il allait très clairement perdre connaissance… Sur son canapé. Autant dire que c'était un peu nul et quitte à s'évanouir, autant le faire dans une situation un peu différente, histoire de rendre la chose moins pathétique. Puis, comment dire : sombrer dans l'inconscience en solo, c'était légèrement dangereux. Non seulement Stiles ne savait pas ce qui lui arrivait, mais en plus… Peut-être qu'un truc était en train de l'emporter de manière foudroyante ! Une appendicite ? Non, la douleur est trop étendue, pas simplement localisée. Une septicémie ? Je prierais à mon imagination de bien vouloir faire ses valises, réussit-il à penser. Déjà qu'il se sentait mal, autant ne pas ajouter l'angoisse à la douleur… Nouvelle vague. Stiles se mit la tête dans le coussin qui étouffa une partie de ses gémissements. Une fois que le calme revint – dans une certaine mesure seulement –, l'hyperactif se retrouva complètement essoufflé à ne pas savoir quoi faire à part serrer le coussin de ses doigts tremblants. Le jeune homme suait à grosses gouttes et ne voyait pas comment il pourrait se sortir de cette situation. Il tenta à nouveau de se redresser : la douleur le cloua au canapé dans un petit cri pitoyable. Le souffle court, il tenta néanmoins de réfléchir. A la rigueur, il pouvait tenter de se traîner jusqu'à son armoire à pharmacie, à défaut de pouvoir se lever…

Stiles pesta contre lui-même. Déjà qu'il ne pouvait pas fêter Halloween… Voilà qu'il se retrouvait incapable de faire quoi que ce soit, pas même travailler pour sa meute ! Alors effectivement, l'activité en question n'avait rien de tentant ni réjouissant, mais bon… C'était toujours mieux que se tordre de douleur sur un canapé qu'il était en train de tâcher sans sen rendre compte. A vrai dire, il avait si mal qu'il ne se rendait pas compte de la chaleur qui irradiait à un certain endroit… C'était tel qu'il ne sentait pas grand-chose mis à part cette douleur lancinante qui finit par lui donner une nausée claire. Là aussi, il se retrouva embêté : s'il devait finir par vomir, où pourrait-il aller ? Le mieux qu'il pourrait faire serait de se pencher sur le côté et de viser le sol… Ce qui était toujours mieux que de souiller le canapé ou en tout cas, plus qu'il ne l'était déjà.

En fait, Stiles se retrouva assez rapidement au bord de l'inconscience. Epuisé, le souffle court, il ne serrait presque plus le coussin sur lequel sa tête reposait à moitié. Toujours sur le ventre, il était incapable de bouger, incapable de se retourner. Et il avait mal. Encore. Toujours. Son corps affaibli par cet épisode plus que désagréable commença à trembler et Stiles se sentit si diminué qu'il n'eut d'autre choix que de fermer les yeux.

Des bruits qu'il fut incapable d'identifier titillèrent son ouïe humaine un peu étouffée par il ne savait quoi. Peut-être par cette faiblesse accrue qui tendait à le faire lentement basculer vers l'inconscience. Stiles n'allait pas réfléchir, pas chercher la raison de cet étouffement étrange. Il allait mal, trop pour analyser ce qui l'entourait. Après de trop longues minutes passées à agoniser aussi bizarrement, il n'en était pas capable.

Puis, une voix. Peu audible. Son nom de famille, répété à de multiples reprises. Bien que faible, Stiles restait encore lucide. Alors il lutta, se battit contre cet épuisement forcé et rouvrit les yeux comme il le put. Dire qu'il y voyait serait un euphémisme. L'hyperactif aperçut simplement une silhouette. Grande. Deux yeux clairs. Incapable de décider de leur couleur, Stiles se retrouva incapable de les associer à quelqu'un qu'il connaissait. Au même moment, la douleur disparut d'un seul coup tandis qu'on le retournait – c'était l'impression qu'il avait. Au lieu de le galvaniser, ce geste acheva de l'épuiser. Cette fois, il referma les yeux pour de bon et l'inconscience l'emmena loin, très loin, sans qu'il puisse résister d'une quelconque manière. Stiles avait déjà entendu parler de ce phénomène, de l'immense fatigue que déclenchait une prise de douleur sur un humain, mais jamais il ne l'avait expérimentée jusqu'alors.

Parce que jamais de sa vie il n'avait demandé de l'aide avant ce soir.

xxx

L'émergence de l'hyperactif fut loin d'être douce et agréable, comme tous ces matins où il se réveillait, tous ces week-end où il y allait à son rythme, sans être pressé par le temps, à devoir se dépêcher d'aller en cours… Même ça, c'était plus agréable que ce qu'il eut à subir cette fois-ci ! Une lourdeur assommante, des courbatures, le spectre d'une douleur qui l'avait mis K.O. Encore un peu dans les vapes, Stiles ne perçut pas grand-chose autour de lui. Il y avait des bruits, légers, des voix aussi, mais c'était trop… Trop flou. L'hyperactif bougea un peu et grimaça à cause d'une douleur qui irradiait tout le long de son dos. Comparé à ce qu'il avait vécu un peu plus tôt, elle était bien moindre. Celle-ci résultait plus de la… Dureté de ce qui lui servait de matelas et Stiles avait d'ailleurs l'impression désagréable de se trouver sur une table. Bien qu'il ait l'habitude de s'endormir plus ou moins n'importe où et n'importe comment, dormir sur une table… Il ne l'avait jamais faite, celle-là. Être farfelu ne signifiait pas faire sans arrêt les choses selon l'échelle de la démesure. Stiles pouvait se contenter de peu, mais il aimait tout de même bénéficier d'un minimum de confort. Au moins, sa tête semblait reposer sur quelque chose… D'à peu près mou. Ce n'était pas du luxe et ne ressemblait pas réellement à un oreiller, mais c'était suffisant pour lui éviter une douleur supplémentaire.

D'ailleurs, au fur et à mesure que son corps se réveillait, Stiles se rendait compte qu'il avait un peu froid et parfois, un peu chaud. Les sueurs froides ? Il les sentait et c'était foutrement désagréable. Il n'aimait pas ça. De manière plus générale, il se sentait péguer et il avait toujours détesté ça. Comme s'il avait tant sué qu'il en était sale et poisseux. Eh, mais d'ailleurs… Pourquoi ? Les yeux toujours fermés, Stiles fronça les sourcils. Conscient malgré le fait qu'il était encore un peu dans les vapes, il se demanda s'il n'était pas temps pour lui qu'il cesse de se tourner les pouces et qu'il essaie de se « réveiller » un peu plus, de se lever, aussi. Pour l'instant, il n'avait pas mal au ventre, ce qui était bon signe. Peut-être pouvait-il essayer de se lever ? Commencer par ouvrir les yeux serait déjà un bon début… Mais il n'en avait pas envie. Cette espèce de lourdeur qui semblait l'écraser ne le motivait pas le moins du monde.

Et puis les voix commencèrent à se faire plus fortes, plus insistantes. Si Stiles pensa à l'idée d'essayer de se rendormir, ladite idée disparut en quelques secondes. Rien n'allait, rien ne l'aidait. Entre son dos, les sensations désagréables au niveau de son ventre, ces voix, cette dureté, ses sueurs froides, sa température qui semblait faire les montagnes russes… Alors, fut un moment où il fit de gros efforts et finit par ouvrir les yeux. Par chance, la lumière tamisée de l'endroit lui permit de ne pas finir aveugle et donc, de le faire persister dans l'optique de rester éveillé.

Bien qu'encore un peu floue, ce que lui montra sa vue fut loin de le rassurer. Des éclats métalliques. Des instruments médicaux. D'énormes lampes – par chance – éteintes. L'odeur commune aux services dédiés à la santé lui piqua le nez et accéléra le rythme de son palpitant. Puis, doucement, il reconnut les murs en brique, la décoration sobre, des radios de… Pattes, un petit panier dans un coin… Le cabinet de Deaton ? L'hyperactif fronça les sourcils, comprenant alors qu'il se trouvait sur la table d'examen du vétérinaire. La confusion le gagna. Aux dernières nouvelles, il n'était pas un animal… Stiles tenta alors de se redresser et cette fois, il réussit. Pour l'instant, il n'avait pas mal, alors autant en profiter… Même s'il avait l'impression que son ventre était atrocement lourd.

La porte de la pièce s'ouvrit alors brusquement et l'hyperactif releva ses yeux fatigués et perdu vers… Jackson ? Le regard bleu océanique se posa sur lui. Un regard glacial.

- Toi, grogna le kanima.

- Moi, répéta Stiles, perplexe.

Pourquoi sa voix était-elle si rauque ? A croire qu'il était resté un moment inconscient et… Malgré sa fatigue immense, il fit le lien entre ses derniers souvenirs – la prise de douleur, cette peau qui avait touché la sienne – et la présence de Jackson. Alors il était venu chez lui ? L'avait trouvé ? Aussitôt, la honte l'envahit, mais l'hyperactif ne se laissa pas complètement démonter. Pour l'instant, il allait à peu près bien, donc… Il se redressa davantage jusqu'à s'assoir complètement, prêt à poser toutes les questions qui lui passaient par la tête, mais…

- Espèce de grand malade, y a que toi pour nous faire une peur pareille ! Ragea le blond. Qu'est-ce que t'as encore foutu ?!

- Du riz, je crois, réfléchit sérieusement l'hyperactif.

- Arrête de te foutre de ma gueule, Stilinski !

Jackson poussa un grand soupir d'agacement et se passa une main dans les cheveux. Face à lui et toujours assis sur sa table d'examen, le châtain le fixa, on ne peut plus perplexe. Pourquoi s'énervait-il à ce point ? Ce n'était pas sa faute s'il s'était littéralement effondré… En étant allongé. Stiles se fustigea sur cette façon pathétique qu'il avait eu de juste… S'évanouir, au final. La sensation était d'ailleurs réellement peu agréable, et l'humain aimerait éviter de réitérer la chose à l'avenir…

Le regard glacial tant il était empli de colère se posa à nouveau sur lui.

- T'as intérêt à me dire ce qu'il s'est passé ou je te jure que je vais faire de ta vie un enfer, le menaça le kanima.

- Je peux savoir pourquoi tu m'engueules depuis tout à l'heure, au juste ? Lui demanda calmement l'hyperactif. Et laisse-moi te dire que déjà, s'évanouir c'est pas dingue, alors se faire engueuler au réveil…

L'hyperactif se frotta les yeux. Même s'il n'était pas près de se rendormir, il fallait avouer qu'il était vraiment, vraiment, vraiment fatigué.

Face à lui, Jackson eut l'air encore plus exaspéré qu'auparavant :

- Je t'engueule parce que j'aimerais que tu arrêtes de faire l'idiot et que tu me dises ce que tu as encore fait comme connerie !

Toutefois, il avait légèrement baissé le volume, ce que la tête et les oreilles de Stiles apprécièrent. Non parce que le bourdonnement que sa voix occasionnait était franchement désagréable…

- Ben à part manger, pas grand-chose et si tu me crois pas c'est que t'es un sale con. Ecoute mon cœur, je suis sûr que tu vas kiffer entendre ce qu'il a à te dire, soupira l'hyperactif.

Par là, il s'adressait à ses facultés lupines. Que voulait-il qu'il lui dise ? Certes, l'insulter n'était pas la meilleure des choses à faire, d'autant plus que Jackson avait vraisemblablement répondu à son appel au secours, mais… Il n'avait qu'à pas le gronder au réveil. C'était fichtrement désagréable. Et pourtant, pour faire taire ce sportif arrogant qu'il regrettait déjà d'avoir appelé , il se sentit obligé de lui expliquer ce qui lui était arrivé :

- Tu veux tout savoir ? Eh bien vas-y ! Je me suis fait à manger, j'ai graille comme un porc et j'ai eu super mal au bide. Voilà, fin de l'histoire. T'es content ? Désolé, y a rien de croustillant, rien que tu pourrais utiliser pour me faire de réels reproches. Je vois pas pourquoi, d'ailleurs, parce que merde, j'ai rien fait et j'ai jamais demandé à avoir aussi mal ! Sérieusement, j'ai jamais ressenti un truc pareil, c'était putain de violent. Et si j'avais pu bouger pour m'enfiler un tas de médocs, crois-moi, j'aurais jamais essayé de t'appeler ! Mais je… Merde, j'avais trop mal, Whittemore ! J'ai tout tenté avant de t'appeler, tout ! Alors je suis désolé que personne n'ait répondu avant toi, mais c'est pas ma faute si tes potes loups-garous savent pas rester à proximité de leur téléphone. Alors maintenant tu m'excuseras, mais je vais bouder hein.

Très sérieux dans cette idée, il croisa les bras sur son torse. Si Whittemore pensait qu'il était normal de le gronder comme un enfant au réveil, eh bien, il allait faire l'enfant ! Pas de problème, il était doué pour ça.

- Vous deux, on se calme.

Si Stiles vit Alan Deaton débarquer dans la pièce avec un air inquiet collé au visage, cela ne le fit pas changer d'humeur. Il boudait. Ainsi, il détourna les yeux avec l'intention claire de montrer son mécontentement. De son côté, Jackson fit de même.

- Puisque vous tenez à faire les enfants, je vais traduire vos attitudes respectives dans le but de pouvoir engager le dialogue de manière convenable, commença le vétérinaire. Stiles, Jackson s'inquiète pour toi.

Stiles leva les yeux au ciel. Whittemore, inquiet à son sujet ? Meh. La bonne blague.

- Et Jackson, Stiles te remercie.

Jamais de la vie. Du moins, pas tant que le kanima lui parlerait ainsi.

- Bien, maintenant, nous avons à discuter, continua Deaton. Et je veux que vous soyiez coopératifs, tous les deux.