Hello, hello

Pour les quelques personnes qui passeront par ici : bienvenue !

Je vais essayer d'être brève : ceci est un projet légèrement absurde, né dans mon cerveau suite au lancement d'une roue du destin infernale, et qui depuis ne veut pas quitter les méandres de mes neurones. Donc autant l'écrire. Une manière pour moi de concilier mon amour des personnages secondaires, de la grandiloquence ridicule de Lockhart et surtout des conseils modes et beauté !

J'espère que vous apprécierez donc cette courte histoire entre Rita Skeeter et Gilderoy Lockhart (si le projet ne déborde pas trop du cadre prévu, on sera à une quinzaine de petits chapitres je pense).

J'ai un tout petit peu d'avance dans l'écriture mais, si vous me connaissez ne vous faites pas d'illusions, le rythme de publication sera aléatoire.

Le contexte se comprendra vite je pense.

Bonne lecture !


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Chapitre 1 : Ce fut comme une apparition

L'Education Sentimentale, Gustave Flaubert

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Rita Skeeter ruminait sa colère. Elle n'avait que ça à faire depuis plus d'un an.

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L'inaction ne lui réussissait pas.

Dans son appartement, autrefois propre et soigneusement ordonné, les vêtements sales s'amassait sur le sol et les meubles. Les placards étaient remplis de sucreries, de plats industriels moldus et de mites contre lesquelles elle ne prenait plus la peine de lutter. La vaisselle sale ne s'accumulait plus dans son évier, car elle ne prenait même plus la peine de sortir des assiettes pour manger. Seules les tasses de café s'entassaient et attiraient des mouches qui s'en allaient ensuite mourir plus loin et leurs cadavres, couverts de poussières, jonchaient le sol.

Tout dans son logement criait colère et résignation.

Quand on la regardait elle, c'était encore pire. Elle avait toujours consacré un soin excessif à son apparence. L'ancienne Rita n'aurait jamais consenti à sortir de chez elle sans s'être maquillée avec application et sans avoir les ongles impeccablement manucurés. Elle avait dépensé des sommes folles dans les soins capillaires les plus extravagants et les plus prometteurs. Pas un jour ne s'était écoulé sans qu'elle ne réalise consciencieusement le rituel précis et rigoureux lui permettant d'obtenir ses fameuses boucles blondes, brillantes, parfaitement tire-bouchonnées et dont pas le moindre cheveux n'osait s'échapper pour former un frisottis insolent et disgracieux.

Voilà maintenant bien plus de six mois qu'elle n'avait pas sorti son fond de teint ou son fard à paupière, il se passait même parfois plusieurs jours sans qu'elle n'applique la moindre crème hydratante ou anti-ride sur son visage. Autant de temps où ses soins reconstituants miraculeux enrichis en huile de jojoba n'avaient jamais quitté le placard de la salle de bain.

L'argent n'était pas le problème. Un quart de siècle comme polémiste à succès à La Gazette du Sorcier lui avait laissé de confortables économies et les ventes de ses quelques livres lui apportaient un revenu assez régulier, à peu près constant.

Vraiment Rita n'était pas ruinée, elle avait de quoi s'acheter tous les produits de beauté qu'elle n'utilisait plus et tout le temps nécessaire pour les utiliser. Elle avait simplement perdu la motivation. Elle se fichait désormais de l'aspect qu'elle renvoyait, et tant pis si ses rides et ses cernes se dévoilaient, qu'importait que ses précieuses boucles soient ternes, indisciplinées, ou même pire, aplaties. À quoi bon ?

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C'était comme pour ses lunettes. Ses fameuses lunettes, tout aussi célèbres que sa plume incisive. Elle les avait achetées à ses débuts, un cadeau qu'elle s'était fait avec son premier salaire de journaliste, remplaçant le modèle ringard et impersonnel qui avait accompagné ses études. Ses lunettes adorées, elle les avaient méticuleusement soignées pendant toutes ces années, les martelant chaque matin d'une multitude de sorts de protection puis tout autant de nettoyage le soir. Plus de vingt ans sans que la moindre égratignure ne parvienne à atteindre ce symbole éclatant de sa réussite.

Un an et demi sans travailler et voilà qu'elles étaient complètement écaillées, la branche droite légèrement tordue et le verre gauche entaché de plusieurs rayures qu'elle avait faites en essuyant avec des torchons la trace de ses doigts sales. Pourtant elle aurait pu continuer. Cela ne prenait que quelques minutes le matin de jeter les sortilèges anti-chute, anti-rayure, anti-pluie… Ce n'était que quelques secondes qu'elle pouvait largement se permettre d'utiliser.

Le temps… Elle n'avait plus que cela à dépenser de toute façon.

Mais elle ne prenait plus le temps de jeter ces sorts depuis longtemps. Elle n'en avait ni l'envie, ni l'énergie.

A quoi bon après tout ?

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Rita ne cuisinait plus, ne faisait plus le ménage, ne prenait plus soin d'elle, ne sortait plus, ne voyait plus personne, n'écrivait plus la moindre ligne.

Elle ruminait sa colère, parce que, réellement, elle n'avait plus que ça à faire.

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Elle se réveillait tôt le matin.

Une fois sortie du lit, elle commençait toujours par boire d'un coup un café très court. Elle fouillait ses placards à la recherche d'un assortiment de gâteaux secs et se préparait un deuxième café bien plus long mais bien plus noir que le précédent. Elle s'installait avec ce petit déjeuner sur son balcon et restait là, bien plus d'une heure, quel que soit le temps, observant le lever du soleil.

Parfois elle arrivait à s'abuser elle-même. Elle se disait qu'elle en était heureuse, que c'était une chance, qu'elle n'avait jamais le temps de profiter de la beauté de la nature avant… A l'époque où sa première heure éveillée se déroulait devant son miroir, à perfectionner le reflet qu'il lui renvoyait à grands coups de fard à joue.

La vérité était que Rita s'était toujours moquée de la beauté d'un lever de soleil. Aujourd'hui tout autant qu'hier. Mais aujourd'hui elle n'avait que ça à faire.

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Une fois le soleil bien haut dans le ciel, annonciateur d'un nouveau jour de déchéance, elle se décidait à enfiler un manteau par-dessus son pyjama, gardait ses charentaises aux pieds et elle sortait faire un tour de la rue, sans se soucier de l'image pathétique qu'elle renvoyait. Elle passait par un parc, dans lequel elle ne s'attardait jamais pour renifler des fleurs, croisait le chemin de mères emmenant leur progéniture à l'école, s'arrêtait devant quelques devantures de magasin, vêtements, bricolage, pêche… peu importait que les choses vendues ne l'intéressent pas, elle avait le temps de regarder, pourquoi s'en priver ? Sa promenade la faisait dépasser un supermarché dans lequel elle se rendait certains jours, lorsqu'elle avait besoin de reprendre des nouilles instantanées saveur canard ou de la vodka.

Cette promenade l'occupait une heure, une heure et demi si elle en profitait pour faire quelques courses. Lorsqu'elle revenait dans son appartement, les hiboux lui livrant son courrier étaient déjà passés et une belle pile faite des principaux journaux du monde sorcier trônait sur sa table basse, seul endroit du logement qui restait impeccablement rangé.

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Elle ne se jetait jamais dessus. Bien au contraire. Elle ignorait pendant plusieurs heures cette pile indésirable, mais dont elle n'arrivait pas à se passer, implacable réminiscence de tout ce qu'elle avait été et de tout ce qu'elle avait perdu.

Son déni commençait d'abord par se servir un nouveau café, bien noir et bien serré qu'elle buvait d'une traite. Et là seulement elle allait s'habiller. Parfois elle prenait une douche, pas si souvent.

Elle mangeait ensuite. Un plat souvent bien gras, qu'elle dévorait à même le carton d'emballage, vautrée dans son canapé, en regardant la télévision, invention moldue qu'elle avait découverte par hasard mais dont elle raffolait. Elle naviguait entre les chaînes, évitant habilement les informations et autres journaux télévisés pour ne regarder que des feuilletons qu'elle suivait avec assiduité. Elle n'avait jamais eu le temps de regarder la télévision avant, maintenant elle avait du mal à imaginer pire que rater un épisode des Feux de l'Amour.

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Ensuite venait le temps du quatrième café, aromatisé d'une grande lampée de vodka. Elle regrettait l'époque où cette boisson lui brûlait l'œsophage. Et là seulement elle trouvait le courage de regarder en face la pile la jugeant depuis sa table basse. Comme pour mieux la narguer, La Gazette du Sorcier était toujours la première de la pile, exhibant outrageusement ses grands titres et les noms de ses journalistes. Betty Braithawaite, Henri Bowen, Connor Hicks, mais jamais Rita Skeeter. Elle lisait les articles à grands renforts de cris et de commentaires désobligeants pour ses anciens collègues. Telle phrase aurait due être beaucoup plus incisive, cruelle, tel article était bien trop objectif, pas assez à charge, telle histoire manquait d'allusions scandaleuses et de suppositions infondées mais croustillantes. L'année dernière tous les articles traitant Dumbledore et Potter de fous l'avaient légèrement divertie, mais depuis que Scrimgeour était à la tête du Ministère et qu'il avait rendu sa liberté d'écriture à La Gazette, elle était devenue un torchon fade et sans fondement, emblème d'un journalisme d'investigation sans risque, destiné à distraire et informer la ménagère de moins de cinquante ans, mais sans jamais la choquer ou la bousculer. Attaques de Mangemorts, guerre, concert de Célestina annulé, prix de la plus belle citrouille d'Halloween, mais jamais rumeur de liaisons entre Rufus Scrimgeour et Bathilda Tourdesac, plus aucun article sur les machinations de Dumbledore…

Les ventes s'en étaient faites ressentir d'ailleurs. Après les révélations du mois de juin dernier, le public avait perdu sa confiance en ce journal sacré, le Chicaneur avait gagné en popularité, ainsi que quelques autres journaux indépendants, tout comme Sorcière Hebdo qui se faisait un devoir de distraire la population avec toujours plus de conseils beauté ou de dégnomage de jardin. La Gazette, elle, avait perdu beaucoup d'abonnés. Elle n'était pas au bord de la ruine, loin de là, mais Barnabas Cuffe son directeur, avait tout de même dû effectuer des coupes budgétaires radicales. Le café était désormais servi sans sucre et lui-même avait dû vendre son immense statue en marbre qui trônait à l'entrée des locaux du journal et deux de ses plumes de collection ayant appartenu à des sorciers célèbres. D'après les nouvelles que Bozo lui envoyait régulièrement, il était maintenant perpétuellement d'humeur exécrable. Il harcelait d'ailleurs Rita de lettres, la suppliant de revenir à La Gazette, la flattant longuement en affirmant que le journal avait perdu toute sa saveur sans ses articles polémiques et que seul son retour pourrait faire à nouveau bondir les ventes.

Enfin, ce n'était pas vraiment de la flatterie. C'était vrai. Elle était une journaliste exceptionnelle et de talent.

Était.

Avant qu'on ne la condamne au silence.

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C'était son activité suivante de la journée. Après avoir méticuleusement épluché les actualités et s'être longuement lamentée sur son triste sort, elle cristallisait sa colère sur la responsable de sa terrible déchéance. Elle se servait un grand verre de whisy pur feu, se plaçait au milieu de son salon et lançait pas moins d'une douzaine de fléchettes sur une photo d'Hermione Granger qu'elle avait accroché sur un mur.

Elle ne ratait jamais sa cible.

Elle s'occupait aussi régulièrement en dessinant sur le visage faussement innocent de l'adolescente. Elle l'avait ainsi affublée d'un ravissant monosourcil, de dents noires, de plusieurs boutons et de poils dans les oreilles. Elle avait également consciencieusement découpé des bouts du Chicaneur afin d'écrire des lettres de menace, qu'elle n'avait jamais osé lui envoyer, par crainte de la vengeance si elle découvrait l'auteur des lettres. Elle se contentait de les afficher sous la photo. Elle en était à une quinzaine.

Elle s'accordait des petits interludes de concours d'insultes et, parfois même, montrait son postérieur à la photo outragée.

Cela l'occupait une bonne heure environ.

Ainsi défoulée, elle sortait un pot de glace qu'elle agrémentait d'un peu de scotch et retournait investir son canapé. Elle enchaînait alors des épisodes du Docteur Globule avant de suivre avec intérêt les rebondissements des enquêtes d'Hercule Poirot. Elle allait ensuite se blottir dans son lit où elle engloutissait une pizza. Elle se roulait en boule sous des tonnes de couvertures, espérant peut-être disparaître ainsi. Le scotch l'aidait à s'endormir sans difficultés.

La cloche de l'horloge sonnait à peine huit heures du soir.

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Ainsi passait les jours, les semaines, le temps, uniquement rythmé par les poubelles s'accumulant dans son appartement et les aventures de Jill Foster Abbott et Katherine Chancellor sur le petit écran. Aucun changement n'était visible dans son existence exceptés ses cheveux blancs qui se multipliaient et les kilos qui lentement s'accumulaient.

Aucun changement jusqu'à ce lundi 21 octobre.

Elle revenait de son tour matinal. Elle avait décidé de tenter de la nouveauté et avait acheté des nouilles saveur crevettes qu'elle avait hâte de goûter. Son courrier était posé sur la table basse et elle l'ignora comme d'habitude. Elle avait de l'eau à faire bouillir, des nouilles à déguster ! Le monde pouvait bien s'effondrer, ça ne lui importait pas vraiment, pas avant 15 heures et son café à la vodka.

Elle prépara son plat avant de rejoindre son canapé, les épisodes d'aujourd'hui promettaient d'être passionnant, Jill et Kay devaient s'affronter au tribunal et elle espérait fortement que Katherine gagnerait. En passant à côté de la table basse, son regard fut attiré par la première enveloppe de la pile. Lorsque Bozo ou Barnabas lui écrivaient, ils glissaient toujours leurs lettres dans l'exemplaire du jour de La Gazette. Personne d'autres n'écrivait à Rita, ou alors très rarement. Suffisamment en tout cas pour que ce courrier mérite son attention. S'installant précautionneusement sous un plaid, elle prit le temps de déposer son bol de nouilles, d'allumer la télé, de boire une longue gorgée d'Earl Grey - car il fallait bien varier les boissons de temps en temps - et se décida finalement à décacheter la lettre.

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L'expéditrice était une certaine Shannon Blake, dont le nom lui était très vaguement familier, car elle avait l'honneur d'être dans le conseil d'administration de Poudlard depuis plusieurs années. Suite à l'arrestation de Lucius Malefoy l'été dernier, elle en était devenue la présidente. Son fils était élève à Poudlard en troisième année à Poufsouffle et lui avait envoyé une lettre des plus inquiétantes. Apparemment une élève avait subi un grave accident, dont il ne connaissait pas la nature si ce n'est que de la magie était en jeu. La victime aurait été envoyé à Sainte-Mangouste dans un état très inquiétant. L'incident datait de la semaine dernière et elle ne serait toujours pas revenue en cours. Son fils n'avait pas su lui dire le nom de l'élève en question, il savait simplement qu'il s'agissait d'une fille de Gryffondor des dernières années et que Potter était présent au moment de l'accident.

Rita faillit en échapper son bol de nouille et concentrée dans sa lecture ne remarqua même pas qu'à l'écran le juge prononçait son verdict et que Kay se décomposait pendant que Jill jubilait. Elle éclata de rire qui devint rapidement un fou rire nerveux. Une fille à Gryffondor, des dernières années, proche de Potter… C'était sûrement cette sale peste, cette punaise mesquine de Granger. Quelques larmes de soulagement lui échappèrent. La justice existait, le karma était bien réel ! Enfin, la foudre divine avait frappé son horrible bourreau, rétablissant la justice de ce monde.

La fin de la lettre était d'une banalité affligeante, dégoulinante d'inquiétude et de bon sentiments maternels. Mrs Blake s'inquiétait évidemment pour la sécurité de son fils et de tous les enfants de Poudlard. L'école avait déjà été dans de nombreux scandales, Dumbledore paraissait extrêmement fatigué lors de ses dernières apparitions publiques, bla bla bla, il fallait enquêter pour protéger les élèves, toujours plus de bla bla, rien de tout cela n'était bien nouveau. Depuis qu'elle était une journaliste célèbre, elle recevait chaque année des dizaines de lettres de parents inquiets pour la sécurité de leurs enfants à Poudlard. Cette école était vraiment l'endroit le moins sûr de Grande-Bretagne…

Non vraiment les derniers paragraphes étaient complètement inutiles. Mais tout de même, Rita était prête à commander un portrait grandeur nature en huile sur bois de cette Shannon Blake pour lui montrer toute la reconnaissance qu'elle éprouvait envers elle et sa merveilleuse nouvelle.

Granger mourante à Sainte-Mangouste.

C'était le plus beau jour de sa vie ! Et pourtant elle avait déjà eu une interview exclusive de Célestina Moldubec, où cette dernière lui avait demandé un autographe car elle était sa journaliste préférée.

Mais réellement, rien ne pourrait jamais égaler ce bonheur qu'elle éprouvait maintenant à imaginer l'horrible adolescente agonisante dans un lit d'hôpital. Et, si son maître chanteur était condamnée au silence, qu'est-ce qui l'empêchait elle, Rita, de retrouver sa plume et sa voix ? Tel le stupide phénix de cet abruti de Dumbledore, elle allait renaître de ses cendres, plus belle, plus grande et plus forte que jamais.

Elle se devait de fêter cet évènement ! Il méritait bien qu'elle se permette des folies, elle se leva de son canapé et se prépara un nouveau bol de nouilles saveur crevettes qu'elle aromatisa d'une grande louche de whisky.

Et puis rapidement tout devint noir.

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Elle ouvrit difficilement les yeux. Son crâne, terriblement lourd, lui paraissait être transpercé de part en part. La lumière, bien trop vive pour ses pauvres rétines, l'attaquait sans retenue. Sa bouche était complètement asséchée et sa langue pâteuse collait son palais. Son dos la lançait terriblement. Pas étonnant : elle était allongée sur son canapé, la télécommande en travers des lombaires. Elle était entourée de cadavres de bouteilles d'alcool divers et variés, mais de degré jamais inférieur à 20. Un carton de pizza traînait sur le sol ainsi que plusieurs paquets de bonbons vides.

Elle n'avait pas la moindre idée de ce qui s'était passé la veille pour qu'elle se mette dans un état pareil.

Un brouillard épais pesait sur ses pensées, mais le souvenir d'un grand bonheur se démarquait.

Elle attrapa péniblement sa baguette puis éprouva encore plus de difficultés pour lancer des sorts d'hydratation. Elle attendit quelques minutes et lorsqu'enfin sa tête ne lui parut plus peser une tonne, elle se leva pour se faire un café. Au deuxième, elle se rappela enfin la raison de son euphorie de la veille.

Hermione Grange pourrissait à Sainte-Mangouste.

Les dizaines de poupées vaudous éparpillées dans son appartement s'étaient enfin montrées efficaces.

Brutalement, lui revint également la conséquence de ce retour du karma et la réalisation la força à s'asseoir. Elle était à nouveau libre. Libre de fouiner à nouveau, d'écrire sur les sujets de son choix et d'offrir à nouveau au monde entier ses articles génialissimes. Libérée de tout chantage, sa plume retrouvait son indépendance. Le monde allait redevenir un endroit bien meilleur.

Mais par où commencer ?

Une centaine d'idées fusèrent dans son cerveau, tous les reportages qu'elle avait eu envie de réaliser ces dernières années, toutes les carrières qu'elle avait rêvé de détruire. L'étendue des possibles l'étourdissait, l'enivrait.

Et en même temps, ne valait-il pas mieux commencer par vérifier la véracité de l'information délivrée par Shannon Blake ? Cette idée la révulsait, mais elle ne pouvait se permettre le moindre risque, elle ne pouvait écarter la possibilité que cette élève ne soit pas Granger, ou que son état ne soit pas aussi inquiétant que Shannon le craignait.

Et même si - Merlin soit loué - tout était vrai, elle ne pouvait résister au plaisir de contempler de ses propres yeux la misère de son bourreau, d'aller la narguer sur son lit de mort, ce qui lui permettrait également d'écrire un article brillant sur la déchéance de la petite sorcière surdouée, insupportable prodige de sa génération ingrate.

Article qui deviendrait la pierre de base de sa renaissance, qui serait étudié plus tard comme une pépite d'écriture et de journalisme.

C'était décidé, aujourd'hui, elle allait se rendre à Sainte-Mangouste pour enquêter.

Reprenant rapidement ses vieux réflexes, elle parcourut son appartement, rassemblant ses carnets et sa précieuse plume à papote. Elle prit un nouveau café pour réveiller un peu plus son esprit, un grand verre d'eau, saisit son sac et se prépara à sortir.

Juste avant de franchir la porte, elle croisa son reflet dans un miroir.

Ses cheveux ternes s'échappaient de partout en boucles indisciplinées et disgracieuses, ses traits étaient tirés, son teint pâles et derrière les verres salis et rayés de ses lunettes, on devinait ses yeux cernés et las. Mais aujourd'hui, ils avaient retrouvé un peu de leur ferveur d'antan.

Sa silhouette n'était pas mieux que son visage. Malgré les kilos pris pendant l'année, son corps flottait dans des vêtements sales, démodés et mal taillés.

L'aspect général était parfaitement pathétique mais elle ne s'en soucia même pas en se voyant ainsi. Elle allait à Sainte-Mangouste pour enquêter, contempler de ses propres yeux la chute et l'agonie de son bourreau. Uniquement pour cela. Sous sa forme de scarabée, elle ne croiserait personne.

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Onze heures venait de sonner à l'horloge lorsqu'elle sortit dans la rue. Une légère brume recouvrait de coton les rues de Londres, mais même l'humidité et le froid s'infiltrant dans ses charentaises ne parvinrent à doucher son impatience. Pressant le pas, elle attrapa rapidement un bus moldu, ne remarquant pas les regards méprisants que les passagers lui jetèrent. Elle vivait dans un tel isolement depuis plus d'un an que les autres ne l'atteignaient plus, elle était dans une bulle, perdue dans un monde qu'elle seule peuplait, uniquement concentrée sur son but : atteindre Sainte-Mangouste et rire au nez d'Hermione Granger.

Après un trajet horriblement long, lorsqu'enfin elle se trouva devant la vitrine délabrée, son cœur s'accéléra soudain. Son destin se jouait là.

Et si ce n'était pas Granger ?

Et si son état n'était pas si grave ?

Si elle n'était pas mourante, mais simplement défigurée ?

Et si, en rentrant chez elle, rien n'avait changé ? Supporterait-elle d'être à nouveau condamnée au silence et à l'exil ? Ce soir, arriverait-elle à se contenter d'un épisode de Docteur Globule, maintenant qu'elle s'était reprise à espérer ? Combien de temps tiendrait-elle ainsi ?

Soudainement, pour la première fois depuis six mois, elle réalisa qu'un passant la regardait, et elle se sentit gênée, honteuse, vulnérable à la lumière du jour. Elle se faufila jusqu'à une ruelle déserte, où elle se transforma avec soulagement. Tout était tellement plus simple, plus léger et plus libre sous cette forme, avec quelle facilité elle s'envola jusqu'à l'imposant bâtiment de Sainte Mangouste ! Portée par le vent, elle fit rapidement le tour de l'édifice et repéra une fenêtre providentiellement entrouverte au deuxième étage. Elle avait trouvé sa porte d'entrée ! Elle fila à pleine vitesse jusqu'à l'interstice et se heurta à un mur.

La violence du choc la sonna, et elle se posa in-extremis sur un rebord de fenêtre, reprenant doucement ses esprits. Était-elle allée tellement vite qu'elle avait dévié de sa trajectoire ?

Plus prudente, elle s'envola à nouveau et s'approcha lentement de l'ouverture prête à se glisser. Un choc tout aussi violent l'envoya valser. Jurant intérieurement, elle rejoignit la ruelle sombre où elle reprit forme humaine.

Maudit hôpital ! Il était entouré des mêmes sortilèges de protection que le Ministère, elle ne pourrait pas y pénétrer sous sa forme d'Animagus, ni se transformer dans le bâtiment. Il lui faudrait enquêter à l'ancienne, à visage découvert.

La partie se compliquait, mais tout n'était pas perdu ! Ce serait seulement plus long. Elle allait devoir se faufiler, se trouver un allié dans la place, qui l'aiderait à atteindre son objectif.

Elle n'était pas sûre de l'endroit où se trouvait l'adolescente, mais si ses souvenirs de Sainte-Mangouste étaient bons et si Mrs Blake n'avait pas exagéré la gravité des dommages, le service de pathologie des sortilèges était le plus probable.

Oubliant son aspect déplorable, elle entra avec assurance dans le bâtiment, ne s'arrêta pas à l'accueil - où le risque était trop grand qu'on la reconnaisse et, comme si elle connaissait parfaitement le chemin, elle fila directement jusqu'à l'ascenseur, heureusement vide.

Sans hésitation, elle appuya sur le bouton du quatrième étage.

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Plongée dans ses pensées, elle releva distraitement la tête lorsqu'elle arriva à destination. Tout en boucles dorés et en sourire rayonnant, il se tenait dans l'encadrure dans la porte, comme s'il l'attendait.

Leurs yeux se rencontrèrent.

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La semaine prochaine dans les Feux de l'amour : Jill apprend qu'elle a été adoptée est en fait la fille de Katherine. Billy et Mackensie, sont donc cousins et annulent leur mariage.

Et sinon, dans le prochain chapitre il y aura un peu plus de Gilderoy.

N'hésitez pas à me donner votre avis sur l'huile de jojoba en soin capillaire.

Des bisous