Bonjour à vous,

Ravies de vous retrouver en ce dimanche :) Les choses vont quelque peu avancer (et se corser) dans ce chapitre ! Bonne lecture !

Stella : Hm... Ton vœu pour le basket va peut-être être exaucé dans ce chapitre :) Quant au rythme de parution, on fera de notre mieux, pour l'instant ça fonctionne bien ;) On espère que tu aimeras ce chapitre !


KAGAMI

Ils ont dîné un katsudon à la demande de Levi. Il est en train de faire la vaisselle, son petit ami toujours devant la télévision échange des messages avec il ne sait qui.

Quand l'heure de rejoindre le bar approche, Levi se glisse dans son dos enlaçant sa taille. Ces petits actes de tendresse lui plaisent toujours et ce sont ces courts moments qui lui manquent le plus quand il ne voit pas Levi. Ses lèvres se posent sur sa nuque.

« T'as bientôt fini ? Ils vont nous attendre…

— Ouais j'ai fini.

— Cool ! »

Levi se détache de lui et se dirige vers l'entrée. Il le rattrape et l'arrête pour lui réclamer un baiser que son petit ami amusé lui offre volontiers. Ils enfilent leurs chaussures et il passe un sweat par dessus son vieux débardeur Korn un peu lâche mais qu'il adore. Il ne fait pas froid, et il fera sûrement trop chaud au bar, mais la fatigue et la cuite de la veille le rendent un peu frileux.

Ils rejoignent le bar en discutant tranquillement, peu de temps après Aomine et Lola. Il lui semble que Levi a quelque chose à dire mais noie le poisson. Et c'est au moment de pousser la porte du bar qu'il lâche quelques mots en lui souriant.

« Au fait, demain pas de surf. J'vais aller voir d'autres potes demain soir du coup, tu pourras pas rester. »

Il sent comme une pierre tomber au fond de son estomac. C'est une manière subtile de lui faire comprendre qu'il n'est pas le bienvenu. Il le sait déjà. Il sait qu'il ne peut pas débarquer chez Levi quand il veut, sans le prévenir à l'avance. En vivant à l'autre bout du pays, il avait pu se mentir en se disant que planifier permettait à Levi de pouvoir être à cent pourcent disponible pour lui quand il venait à Los Angeles. Maintenant, qu'il est là, il n'y a plus d'excuses. Levi n'a pas envie de le voir tous les jours squatter ou du moins pas « quand il veut ».

Il n'a juste plus envie d'entrer dans ce bar. Il a juste envie de fuir et de se barrer. Mais il le suit dans le bâtiment. Levi repère aussitôt les filles et Aomine.

« Va t'installer je vais nous chercher à boire. »

Il ne proteste pas. Il essaie de cacher la tempête qui couve en lui, l'envie de hurler, d'attraper Levi par le col et lui dire qu'il l'aime et qu'il n'en peut plus d'avoir l'impression d'être juste un jouet. Il est fatigué il n'aurait vraiment pas dû venir. Il s'approche de la table où leurs amis sont installés.

« Yo. Tu m'fais une place Rachel ? »

La jeune femme se décale et il retire son sweat avant de s'asseoir à côté d'elle en bout de banquette.

AOMINE

Il sourit en voyant arriver Kagami, mais constate de suite qu'il n'a pas l'air dans son assiette. Il n'aime pas cette moue entre tristesse, contrariété et déception qui crispe ses traits. Il préfère tellement le voir sourire. Il sirote son mojito en l'observant à la dérobée, déjà à la recherche d'une solution pour effacer cette expression de son visage. Finalement, il demande sans s'embarrasser de formalités, et en japonais parce que c'est ce qui lui vient naturellement avec lui :

« Tu fais quoi demain après-midi ?

— Rien de prévu », répond Kagami dans la même langue et en hochant la tête en direction de Levi pour le remercier vaguement pour la bière qu'il pose devant lui.

Aomine lui sourit.

« Tu veux faire un basket comme au bon vieux temps, juste toi et moi ? J'suis curieux de me rendre compte de ton niveau par moi-même. Quelque chose me dit que je vais avoir des surprises...

— Oh yes ! Carrément que je veux ! À quelle heure ? », la perspective d'un basket contre lui rend instantanément le sourire à Kagami.

Aomine est soulagé de sa réponse. Et il a obtenu ce qu'il voulait : plus de moue triste, mais un beau sourire enthousiaste.

« Disons 14h ? demande-t-il, emballé à son tour. Demain matin, j'vais nager... Enfin, essayer, quoi. Et après, j'vais te mettre une branlée comme t'en as jamais connue dans toute ta carrière !

— Pas moyen ! Je vais te battre Aomine et tu vas bien sentir passer la pilule que je vais te mettre !, rigole l'ancien basketteur des Knicks.

— Hey ?! Qu'est-ce qui te fait rire ? C'est trop bizarre de t'entendre parler en… en quoi déjà ?, demande Sam un peu perdu.

— Japonais., répond Tuan en levant les yeux au ciel.

— Aomine prétend pouvoir me mettre une raclée demain au basket… Mais il se fourre le doigt dans l'oeil., sourit Kagami en regardant son compatriote avec un regard brillant de malice et de défi., Ok pour 14h. »

Aomine acquiesce d'un hochement de tête, puis regarde les autres et reprend en anglais, sourire aux lèvres :

« Ce qu'il vous dit pas, c'est que j'ai toujours été meilleur que lui au basket… » Puis, reportant son attention sur Kagami, il ne résiste pas à pousser la provocation : « C'est quand la dernière fois que tu m'as battu, hein ? T'avais quoi, quinze ans ? Donc ok ça fait un moment qu'on s'est pas affrontés, et même si j'ai foi en tes progrès... »

Il se renfonce dans son siège et croise les bras sur sa poitrine avec un sourire satisfait avant de conclure :

« ...Pas moyen que t'y arrives. »

KAGAMI

Il sent déjà l'adrénaline couler dans ses veines par anticipation. Son regard rubis est fiché dans celui d'Aomine et son sourire est franc et pur. Le basket contre Aomine l'a toujours fait vibrer, son corps s'en souvient de ces heures à s'exténuer sur un terrain, à ne jamais se laisser abattre, pas tant que la fatigue ne lui coupait pas les jambes.

« On verra ça Aomine… En effet. On avait que quinze ans… Et je t'ai déjà battu. Même si… Je te l'accorde, t'as toujours été meilleur que moi… J'en ai affronté des bons joueurs, des mecs exceptionnels, mais c'est vrai p'tet que c'est parce que j'avais que quinze ans mais tu es le joueur contre lequel j'ai préféré jouer… J'ai jamais retrouvé autant de challenge contre qui que ce soit. »

Il lui adresse un sourire presque charmeur, le même sourire qu'il avait toujours quand Aomine le défiait quand ils avaient quinze ans. Ce sourire est très particulier, même s'il ne l'a jamais réalisé, c'est un sourire que seul Aomine sait lui décrocher.

« J'ai… Vraiment hâte de t'affronter mec ! »

S'il n'avait pas des heures de surf dans les pattes et les restes de la cuite de la veille, il emmènerait même Aomine tout de suite pour faire un basket. Mais il doit malheureusement ronger son frein, malgré les fourmis qui courent déjà dans ses jambes.

AOMINE

Il reconnaît ce regard, ce sourire, et il a un coup au cœur en éprouvant les mêmes sensations qu'autrefois, et en s'apercevant à quel point ça lui avait manqué. Car dans cette expression, il voit plus plus que la promesse d'un beau match, plus que l'instinct de rivalité qui les oppose autant qu'il les rassemble. Quand Kagami lui sourit comme ça, c'est comme s'il le voyait d'une manière qui n'appartenait qu'à lui. Comme si ce qu'ils partageaient sur le terrain créait un petit bout de réalité qu'ils étaient les seuls à connaître. Un monde à eux, qu'il suffisait d'un terrain de basket pour conjurer.

Il lui sourit pareillement en retour, le cœur battant, impatient et fébrile comme s'il avait à nouveau quinze ans et qu'ils venaient de se rencontrer. Et puis... Kagami a raison. Lui aussi a affronté de très bons joueurs, il a pris énormément de plaisir, et d'autant plus depuis qu'il est arrivé aux USA. Mais jouer contre Kagami, ce sera toujours une expérience unique, plus stimulante et plus passionnante que n'importe quel autre affrontement.

« Moi aussi, Kagami… J'ai vraiment hâte. »

LEVI

Il observe l'échange entre les deux Japonais. Il y a définitivement un truc qui se passe entre eux. En fait, il n'a jamais vu Taiga avoir une telle expression pour du surf, pourtant il sait qu'il adore ça, mais il ne l'a jamais vu non plus avec cette expression pour du basket non plus. Cela dit ils n'abordent pas beaucoup ce sujet, pourtant ce sourire et ce regard qu'ils échangent le contrarient.

Il y a plus que du basket entre eux. Ils ont peut-être déjà couché ensemble. Sous la table, il pose sa main sur la cuisse de Taiga. Il ne réalise ce qu'il fait que lorsqu'il le sent tressaillir légèrement à ce contact.

KAGAMI

Son sourire se fane légèrement quand il sent la main de Levi se poser sur sa cuisse et il détourne le regard d'Aomine qui l'espace d'un long moment a semblé être seul à exister dans son univers. Il réalise qu'ils sont autour de cette table dans ce bar entourés d'amis et d'amants. Son cœur s'affole un peu dans sa poitrine. Il a une sensation étrange, amère, un poids sur l'estomac. Comme si les choses n'étaient pas dans le bon sens. Il a l'impression qu'il y a un truc qui ne va pas dans ce tableau, comme un grain de sable qui bloque les rouages d'une machine pourtant bien huilée, comme un puzzle qui ne s'imbrique pas tout à fait correctement. Il a conscience de nouveau de la présence de Levi à côté de lui.

Et comme si Levi réalisait seulement ce qu'il venait de faire, il retire sa main qui laisse une trace chaude sur sa cuisse et à la fois un coulée de sueur froide dans son dos. Jamais Levi ne le touche intimement quand ils sont en groupe comme ça habituellement. Pourquoi maintenant ? C'était comme s'il avait voulu attirer son attention. Attention qui était totalement et uniquement tournée avec Aomine quelques instants plus tôt. Est-ce que Levi est jaloux ?

LEVI

Il n'a pas regardé Taiga une seule fois en faisant ce geste. Ça avait été comme un réflexe. Il n'avait pas aimé ne plus être le centre d'attention du basketteur. Ce n'est pas de la jalousie. C'est plus pervers que ça et il le sait, même s'il a honte parfois de se l'avouer, car il a une vraie tendresse pour Taiga. Il n'a jamais eu une relation aussi longue avec un autre mec. Ça n'avait toujours été que des coups d'un soir. Mais pas Taiga. Lui, il a envie de le garder, comme un petit animal de compagnie. Il aime se sentir l'être tout puissant pour Taiga. Qu'il s'intéresse à un autre homme comme s'il était le centre de son monde, le fait rager. Quand ils vont rentrer ce soir, il va bien lui rappeler qui est son univers et ce n'est pas ce gars qui vient de débarquer d'un lointain passé.

« Et y'a moyen d'assister à cet affrontement qui s'annonce épique ?!, demande Cynthia très enthousiaste. »

Il n'aime pas le basket, mais si les autres y vont, il s'y rendra peut-être aussi pour s'assurer qu'il ne se passe rien d'autre que du basket entre les deux Japonais. Si c'est à quatorze heures, il aura le temps d'être à l'heure à son rendez-vous du soir.

LOLA

Comme Levi, elle a perçu quelque chose d'inattendu et d'extrêmement étrange passer entre les deux jeunes hommes. Mais contrairement à Levi, le sentiment que ça lui évoque est plus proche de l'angoisse. Tout à coup, elle est prise d'un gros doute. Est-ce que Daiki lui aurait caché plus de choses qu'elle ne le croyait ? Est-ce que son passif avec Taiga implique autre chose que de l'amitié et une forte rivalité sportive ? Évidemment, elle se fait sans doute des idées, mais…

Elle repense à l'expression embarrassée de Daiki quand elle a insisté pour en savoir plus sur la relation entre Taiga et Levi. Et si ce qui le gênait, ce n'était pas leur couple, mais... ses propres souvenirs ? Ou ses propres désirs ?... Elle regarde son homme en cherchant à lire sur son visage, mais c'est comme s'il avait totalement oublié sa présence, ce qui ne fait rien pour la rassurer. C'est seulement quand Taiga rompt le contact visuel que son expression change et qu'il semble revenir à la normale. Et encore... Il a l'air perturbé... Contrarié. Cette moue-là revient trop souvent ces temps-ci. Elle aimerait beaucoup savoir ce qui se passe dans sa tête, mais elle n'ose pas lui demander de peur de le braquer. Et puis, elle ne sait même pas vraiment ce qu'elle redoute, au juste.

Finalement, il lui adresse un léger sourire qui ne la convainc qu'à moitié, et elle le lui rend avec le même manque de conviction.

AOMINE

Le charme se brise aussi vite qu'il s'est installé, lui laissant une sensation désagréable de confusion. Pendant un instant, il a eu l'impression que... Que quoi, au juste ? Il n'arrive pas à mettre le doigt dessus. Quelque chose s'est réveillé en lui, quelque chose que le sourire solaire de Kagami a libéré, comme une plante qui perce le fin manteau neigeux à la veille du printemps. Il est à peine arrivé à L.A., et pourtant il lui semble déjà être passé en ce court laps de temps par tout le spectre des émotions. Il sent confusément que quelque chose lui échappe.

La question de Cynthia sur leur match le ramène sur Terre. Il regarde Lola et lui sourit légèrement, comme si... il cherchait à la rassurer ? C'est stupide. Il est stupide.

Quoi qu'il en soit, il n'a rien contre l'idée d'avoir du public. S'il y a une chose qu'il n'a jamais eu de difficultés à admettre, c'est son côté narcissique qui apprécie qu'on l'admire. Après tout, il est sportif de haut niveau : dans son milieu, aimer se donner en spectacle est plutôt un atout qu'un véritable défaut. Même si, quand il joue contre Kagami, il a tendance à oublier totalement le monde qui l'entoure.

« En ce qui me concerne, j'y vois pas d'inconvénient, répond-t-il donc à la jeune femme.

— Cool !

— Ah ben j'viens aussi alors j'suis bien curieux de voir ça !, ajoute Tuan en souriant. »

KAGAMI

Quelque part il aurait préféré aller faire ce match sans les autres, juste avec Aomine. C'était une occasion de se retrouver seuls tous les deux et peut-être discuter encore. Et puis, au fond, il avait presque envie de garder leurs échanges jalousement pour lui. Et son angoisse sur la question s'intensifie quand Levi propose qu'ils s'y retrouvent tous dans ce cas. Il se fait une raison, ils en auront d'autre des one-and-one, du moins, il l'espère.

Le reste de la soirée se passe, mais il reste un peu déphasé. Toujours cette impression que certaines choses devraient être changées, comme remises à l'endroit. C'est sûrement dû à cette discussion qu'il devrait avoir avec Levi et qu'il ne se décide pas à provoquer.

La soirée se passe et il ne retrouve pas ce sourire qu'il avait en regardant Aomine.

Les heures s'écoulent et il a une furieuse envie de fuir tout ça, avec au fond un truc qu'il n'ose pas s'avouer.

Il se lève soudain, attrape Aomine par le poignet et quitte le bar en courant, laissant les autres là derrière eux. Laissant les autres qui ne comprennent pas que Aomine est la clé. La clé de quoi, il ne sait pas encore mais il a besoin d'être seul avec lui, il sait qu'il va comprendre. Bizarrement, Aomine ne proteste pas en le suivant, comme s'il avait attendu ça lui aussi. Il court jusqu'au terrain de basket et réalise qu'il n'a pas de ballon. Son coeur s'emballe dans sa poitrine et il se retourne vers Aomine dont il n'a pas lâché le poignet et qu'il serre comme s'il avait peur qu'il s'enfuit. Et il le regarde… Une pulsion qui vient des tripes il s'avance sur lui et...

« TAIGA ! »

Il relève les yeux vers Levi. Visiblement, il devait l'appeler depuis quelques minutes.

« Une autre bière ?

— Ok... »

Il répond par réflexe, même pas tout à fait sûr de la question. Levi se rend au bar après avoir pris les commandes de tout le monde. Il s'était imaginé fuir avec Aomine ? Il avait failli… Son cœur s'affole dans sa poitrine, il blêmit et se prend la tête dans les mains. Fuck...

AOMINE

Après ce fugace instant de grâce, il est resté un peu en retrait, rêveur, mais la soirée s'est déroulée sans accrocs. Il s'entend plutôt bien avec la bande de Kagami, même s'il a un peu de mal avec Levi... Sans doute un préjugé à cause de ce que le basketteur lui a confié à son sujet. Il le trouve arrogant, ce mec. Il n'aime pas son sourire de pub pour dentifrice, sa façon de couver Kagami du regard comme s'il lui appartenait alors qu'il ne veut même pas officialiser leur relation. Et il déteste ses tatouages tribaux.

Quand le surfeur revient avec les verres, il prend sa bière en lui adressant à peine un regard.

« On rentre après ce verre ? »

Il n'entend pas tout de suite la question de Lola, toujours occupé à dresser la liste mentale des trucs qu'il n'aime pas chez Levi. C'est quand elle le lui demande une deuxième fois qu'il lève la tête et répond :

« Ouais, ok. J'suis crevé de toute façon. »

Il jette un coup d'œil à Kagami, on dirait qu'il a vu un fantôme. Il se demande à quoi il pense. Il éprouve ce besoin presque douloureux de le rassurer. De lui dire que tout ira bien. Qu'il n'a pas besoin de rester avec ce surfeur à la mord-moi-le-nœud et qu'il trouvera mieux ailleurs. Quelqu'un qui le connaîtra mieux, qui le comprendra mieux, quelqu'un qui lui ressemble un peu plus. Quelqu'un comme...

Il avale le reste de sa bière d'une traite, il est temps de partir. Il aimerait trouver le bouton "stop" dans son cerveau pour empêcher ses pensées de dériver ainsi, mais comme il n'y en a pas, il n'y a que deux choix : se soûler, ou fuir. Il a besoin de son énergie pour le lendemain et il a déjà largement assez bu comme ça, alors la fuite est préférable. Lola n'a pas pris de dernier verre, alors elle est prête à partir.

« On y va ? »

Elle acquiesce et ils se lèvent tous les deux. Il salue la joyeuse bande d'un geste de la main.

« On rentre. Bonne nuit. »

— À demain !, sourit Kelly.

— Oh vous partez déjà ?!, pleurniche une Cynthia qui a un peu trop bu et se lève pour serrer Lola dans ses bras. À demain Lola. »

Les autres rigolent ça n'a pas l'air d'être étonnant de la part de la jeune femme.

KAGAMI

Malgré ses pensées étranges, malgré son absence d'implication dans cette soirée, il est déçu de voir Aomine partir. Et à la fois, il se dit que ça vaut mieux parce qu'il est complètement en train de dérailler. Il est juste fatigué lui aussi. Il est temps qu'il aille se coucher. Il boit sa bière rapidement.

« Levi… J'suis mort j'vais rentrer aussi… Tu peux rester si tu veux… Tu m'prêtes tes clés s'il te plaît ?

— Non j'vais rentrer avec toi. »

Les autres les laissent s'en aller avec un peu moins de drama. Sur le chemin du retour ils restent silencieux un long moment jusqu'à ce que Levi se décide à poser une question qui le déstabilise.

« T'as couché avec Daiki aussi ?

— Quoi ?! »

Il ne s'est pas ce qui le surprend le plus qu'il puisse croire qu'il y ait eu quoique ce soit entre lui et Aomine, alors qu'il prend juste conscience que… Non de rien du tout. Il ne peut pas penser ça. Ou qu'il ait choisi le terme « coucher avec » et pas « sortir avec », coucher ? C'est tout ce qu'ils font alors ?

« Aomine… On n'a même pas eu le temps d'être potes on était juste rivaux au basket.

— Ok. »

Levi ne semble pas très convaincu par cette réponse, mais il n'ajoute rien, jusqu'à ce qu'ils franchissent la porte de son appartement. Là, il souffle d'une voix presque menaçante..

« Quoiqu'il se soit passé avec lui… Aujourd'hui, il appartient à une très jolie fille… Alors oublie… J'suis là Tai. Je peux m'occuper de tous tes besoins physiques. »

Ce soir, Levi lui fait l'amour avec moins de tendresse que d'habitude. Il a l'impression de se faire punir et malgré ses protestations il se laisse faire parce qu'il se sent coupable. Il mérite la brutalité de Levi. Et peut-être aussi parce que pour une fois, il a l'impression de susciter une vraie émotion chez son petit ami.

Il ne parvient pas à dormir. Il n'a même pas joui ce soir. Il regarde le plafond sur lequel les ombres des feuilles de palmiers dessinent des scènes hypnotiques. Il a envie de pleurer mais il n'en a même pas la force. Il se sent plus con que jamais. Il se sent mal et lâche.

Le sommeil finit malgré tout par l'emporter tard dans la nuit. Il se réveille à l'aube, de l'autre côté du lit, Levi lui tourne le dos. Les souvenirs de la soirée lui reviennent amèrement. On aura vu mieux comme soirée « en amoureux », dire qu'il avait sauté de joie quand Levi lui avait proposé de passer la nuit. Il se lève silencieusement. Dans la pièce principale, il s'habille rapidement pour aller courir et se vider la tête. Oublier Aomine, oublier Levi, oublier les mensonges, oublier qu'il se sent plus bas que terre. Fuir. Encore et toujours. Il est très doué pour ça.

Il met ses écouteurs et part sur la plage. Il adore courir sur la plage, sur le sable humide fraîchement découvert par les vagues.

AOMINE

Quand ils rentrent chez eux ce soir-là, Lola se montre encore plus câline que d'habitude. Elle l'attire dans la chambre et il ne proteste pas. Il répond à ses baisers, se concentre sur sa chaleur, sur son odeur... Il fait le vide dans sa tête. Aujourd'hui, elle semble particulièrement déterminée à lui faire plaisir et il est plutôt content quand elle s'agenouille entre ses jambes et vient lécher son membre qui se raidit au contact de sa langue chaude et agile. Il ferme les yeux et se détend, glissant une main distraite dans sa longue chevelure blonde. En plus, il est toujours plus sensible quand il est crevé, alors les attentions de la jeune femme lui procurent un plaisir qu'il accueille sans se poser de questions. La sensualité de la bouche de Lola lui fait oublier pendant quelques instants toutes les pensées et les émotions étranges qui le tourmentent. Il commence à lâcher prise et se laisse aller au plaisir qui l'envahit.

Et soudain, alors qu'il est sur le point de jouir, une image surgit dans son esprit. Paniqué, il tente de la repousser, mais il est trop tard pour retenir l'orgasme...

Après quoi, il reste allongé dans le noir, glacé tout à coup, son cœur cognant dans sa poitrine. Car l'espace de quelques secondes, ce n'était plus Lola devant lui.

C'était Kagami.

Il se passe une main sur le visage en étouffant un « Fuck » catastrophé.

« C'était si bon que ça ? »

Il met quelques instants à comprendre la question, et il s'aperçoit que Lola se méprend totalement sur sa réaction. La culpabilité lui noue les tripes.

T'as pas le droit. T'as pas le droit de faire ça à Lola. Et t'as pas le droit de te faire ça à toi-même, après toutes ces années.

Et pourtant, il vient d'avoir un orgasme en pensant à Kagami.

Pour ne pas trahir les émotions qui le bouleversent, il chuchote dans le noir :

« Ouais... C'était vraiment bon. »

Ce n'est pas vraiment un mensonge, mais la réalité que dissimulent ces mots innocents est bien pire qu'un mensonge. À cet instant, il se déteste lui-même avec une intensité qu'il a rarement éprouvée.

Ressaisis-toi, Daiki, bordel. D'une façon ou d'une autre, tu vas devoir gérer ce merdier.

Certes... Mais pour l'instant, il n'a aucune idée de comment il va s'y prendre. Il a l'impression de venir de tomber d'une falaise.

Lola vient se coller à lui et il passe un bras autour de ses épaules, refoulant son envie de pleurer.

« Dors bien, mon cœur... » murmure-t-elle d'une voix déjà ensommeillée.

Il pose un baiser sur sa tempe et ferme les yeux, en espérant que son état d'épuisement va lui permettre de perdre rapidement conscience. Et heureusement, les émotions trop fortes et le sexe induisent ce qu'il fallait de fatigue supplémentaire pour le faire sombrer malgré la panique, la culpabilité et le chagrin qui lui bouffent le cœur.

Le lendemain matin, il peine à croire à ce qui s'est passé dans sa tête la veille. Ça ressemble à un rêve... Malheureusement, il sait très bien que ça n'en est pas un. En ouvrant les yeux, il est surpris de constater qu'il est encore tôt. Il se rend dans la cuisine faire du café, qu'il apporte au lit à Lola, comme si ce geste anodin allait suffire à se faire pardonner.

Pardonner de quoi ? T'as encore rien fait.

Techniquement, non, il n'a rien fait. Mais il se sent malhonnête. Il se sent sale. Il a mal au cœur. Il ignore tout ça et l'enfouit tout au fond de lui-même. Il se concentre sur l'instant présent et les prochaines heures. Lola est ravie de sa petite attention, et après avoir avalé un rapide petit-déjeuner, ils se mettent en route pour la plage.

KAGAMI

D'habitude quand il court, il arrive à se vider la tête mais pas aujourd'hui. Il se sent coupable. Son rêve éveillé de la veille le hante. Il s'est arrêté et regarde l'océan bleu, essoufflé d'avoir couru comme un dératé sans succès pour se vider la tête.

Il se sent coupable, de penser que la réaction un peu jalouse de Levi est comme une victoire. Il a honte d'avoir pensé à fuir avec Aomine. Il se sent minable de reporter ses angoisses, sur son ami. Il a l'impression que ses retrouvailles avec son ancien rival avaient ouvert trop de vannes en lui qu'il peine à colmater.

Pourquoi est-ce qu'il faut que son esprit veuille salir de cette manière sa relation avec son compatriote, cette amitié nouvelle ?

Tout ça parce qu'il a été sympa avec lui, parce qu'il l'a écouté, parce qu'il a eu l'air de s'inquiéter sincèrement pour lui… Il est en train de tout gâcher. S'il tombe amoureux d'Aomine… Non il ne peut pas faire ça. Il n'a pas le droit. Il est juste… Juste faible. Ouais c'est ça. Il est dans une mauvaise passe. Il doute de sa relation avec Levi, les mensonges lui pèsent. Il est juste fatigué.

Les choses vont rentrer dans l'ordre d'elles-mêmes. Il faut juste qu'il oublie ça.

Et mentir encore ?

Il se mord la lèvre et il repart en courant, pour quitter la plage et rentrer chez Levi. Il a un basket à assurer cet après-midi, il doit préparer à manger, ranger ses affaires pour rentrer chez lui. Encore une fois, repenser à la façon dont Levi l'avait congédié le rend amer.

Il entre dans l'appartement, Levi n'est pas là. Un petit mot sur le comptoir l'informe qu'il est chez la voisine pour la dépanner. Il ne précise rien d'autre. Il jette le papier et file sous la douche. Une douche express comme d'habitude.

Levi rentre tard. Il ne lui pose aucune question et son petit ami se montre de meilleure humeur que la veille. Il prépare le repas et il appréhende. Il a hâte d'affronter Aomine sur le terrain et à la fois il a peur de ses pensées pour lui. Il n'arrive plus à savoir s'il veut que les minutes s'égrainent plus vite ou plus lentement. Il est bientôt l'heure et il envoie un message à Aomine.

[Kagami – 13h37]

Hello Aho. Toujours chaud pour un basket ? Tu veux que je passe te prendre où je t'envoie l'adresse ?

AOMINE

Comme Lola l'a promis, rien n'est comparable à l'océan le matin. Le ciel se reflète sur la surface presque lisse, immense, non troublée par les sportifs et les baigneurs. Quelques oiseaux piaillent sur la plage, impuissants à déranger le calme majestueux de la scène. L'air est frais et fait frissonner sa peau nue, mais il s'avance vers l'eau en retrouvant un peu de sérénité. Il avait vraiment besoin de ça. Sinon il aurait eu l'impression de devenir dingue, cloîtré dans ses pensées. Mais maintenant, avec aucun bâtiment venant briser les lignes pures de l'horizon qui permettent à peine de distinguer la mer du ciel, il a enfin l'impression de pouvoir respirer un peu.

Lola le précède et une fois qu'ils ont de l'eau jusqu'à la taille, elle entreprend de lui montrer les mouvements basiques de la brasse.

« Si t'arrives à faire ça, le crawl ça sera un jeu d'enfant. C'est pas difficile, tout est dans la coordination. T'es un sportif, tu devrais pas avoir trop de mal. »

Il essaie de reproduire ses mouvements et s'aperçoit assez vite qu'elle a probablement raison. L'eau lui semble accueillante, il ne la voit pas comme un élément hostile, mais comme une alliée qui soulage son corps des contraintes de la gravité. Il s'adapte doucement à sa texture, à son poids, à la façon dont son corps s'y meut. Et tout cela lui semble étrangement naturel.

« Tu te débrouilles super bien ! l'encourage Lola.

— Ouais, je crois bien que c'est mon truc la natation ! »

La blonde rigole.

« Ouais, t'as encore besoin d'entraînement, tout ça manque un peu d'élégance et de fluidité, et en plus là t'es dans des conditions optimales ! Mais j'suis sûre que ça viendra vite. »

Il acquiesce en souriant et continue à nager. L'eau roulant sur ses muscles lui donne la sensation de le purifier. Son esprit se clarifie comme le ciel où la lumière augmente, et pour une fois, il ne regrette pas le moins du monde de s'être levé à l'aube.

Ils restent un long moment dans l'eau, jusqu'à ce qu'ils commencent à claquer des dents. Ensuite, ils regagnent la plage pour faire le plein d'énergie et de soleil. Ils manquent tous les deux de s'endormir, échoués sur le sable, ayant perdu la notion du temps et celle de l'espace, à force de fixer le ciel d'un bleu si profond. Ce sont leurs estomacs qui les rappellent à la réalité, et c'est nettement plus détendu qu'en se levant ce matin-là qu'Aomine rejoint l'appartement avec Lola.

Après un repas léger mais nourrissant, il est en train de boire un thé sur le balcon – et pas n'importe lequel, un thé sencha spécialement expédié du Japon par Satsu – quand il reçoit le message de Kagami. Il répond rapidement, saisi par un mélange d'anxiété à l'idée de le voir après son petit dérapage imaginaire de la veille, et d'impatience à celle de l'affronter de nouveau sur un terrain.

KAGAMI

[Aomine - 13h38]

Hello Bakagami, évidemment que je suis chaud. Viens me chercher stp. À tout de suite :)

Il ne peut empêcher un sourire s'afficher sur ses lèvres en lisant les mots d'Aomine. Et surtout il a la réponse à sa question, quoiqu'il se soit passé la veille, il a envie de le voir et de l'affronter.

« Bon... Je vais y aller. Faut que je passe prendre Aomine.

— Attends je t'accompagne ! »

Levi le rejoint dans l'entrée en souriant et l'embrasse avec gourmandise. Ça lui donne l'impression qu'il marque son territoire et c'est assez déplaisant. Mais il ne fait pas de remarques. Pas maintenant. Surtout pas maintenant. Il veut juste faire un basket. Ils sortent donc et en bas de l'immeuble il fait sonner le téléphone d'Aomine, en espérant que ce ne sera pas Lola qui va décrocher encore une fois. Il ne sait pas pourquoi, enfin si il sait... En tout cas il se sent honteux et mal à l'aise vis à vis d'elle.

« Yes, Kagami, lance Aomine en décrochant à la première sonnerie. T'es en bas ?

— Ouais. Vous êtes prêts ?

— Yep. On descend ! »

AOMINE

Il raccroche. Comme à son habitude, Lola est déjà prête, s'il y a bien une chose qu'il ne peut pas lui reprocher, c'est de manquer de ponctualité !

« J'avoue, confie-t-elle alors qu'ils descendent les escaliers, je suis un peu curieuse de te voir jouer avec Taiga. Ça a vraiment l'air d'être un truc important pour vous.

— Peut-être que tu comprendras quand on sera sur le terrain, réplique-t-il avec une neutralité étudiée. Y a certains trucs qui s'expriment pas avec des mots. »

Elle acquiesce, un peu trop pensivement à son goût, mais retrouve le sourire dès qu'ils sortent de l'immeuble et se retrouvent face à Levi et Kagami.

« Salut ! Vous avez bien dormi ?

— Moi très bien. Mais Tai est tombé du lit comme d'hab'.

— Ça veut pas dire que j'ai mal dormi.

— Pas faux !

— On y va ? » le regard impatient de Kagami se pose sur Aomine.

Le brun déglutit, soudain presque intimidé par ce regard. Il tente de bloquer l'image mentale qui s'est imprimée dans son esprit la veille, mais n'y parvient qu'à moitié parce que dans son imagination Kagami avait presque le même regard, tout en intensité contenue. Il se secoue et fait de son mieux pour chasser son trouble.

« On y va, confirme-t-il en lui adressant un demi sourire. J'te suis. C'est un terrain dont t'as l'habitude ? Il doit y avoir plein de monde qui pratique le street basket dans le coin, j'imagine. À Chicago y en avait plein. »

Il parle – trop vite, il en a bien conscience – pour couvrir son stress, et aussi parce que ça l'intéresse vraiment, et du coup il ne se rend pas compte qu'il est encore passé au japonais.

KAGAMI

Il sourit et commence à prendre la direction du terrain.

« Ouais c'est un terrain que je fréquente... Une fois par mois. Même quand j'étais à New York et que je revenais que trois-quatre jours ici... Impossible de pas faire quelques paniers. Je connais bien les jeunes qui le fréquentent aussi alors... Je saurai négocier pour qu'ils nous laissent la place. »

Aomine a l'air aussi impatient que lui de jouer et c'est pas pour lui déplaire. Il l'a rarement vu aussi nerveux. Non en fait, jamais. Et ça, le ramène à ses pensées de la veille. Heureusement qu'ils ne sont pas seuls, il ne sait pas quelle pulsion il pourrait être incapable de retenir. Non en fait il regrette de ne pas être seul avec lui. Alors ça lui va bien de parler japonais, c'est comme un peu se retrouver seuls dans un monde qui n'appartiendrait qu'à eux sauf que... Lola comprend.

Il jette soudain un regard intense légèrement confus, à Aomine qui marche à côté de lui en finissant de parler alors que ses pensées le mènent à une conclusion étonnante.

Seuls ? Depuis quand il a des envies de solitude accompagnée ? Des envies de solitude, l'envie de fuir. Il connaît bien oui. Mais jamais il n'a pas pensé à les partager. Son cœur cogne soudain plus vite dans sa poitrine. Non. Il se trompe ce n'est pas ça. Aomine... C'est comme ce soir-là au bar, il a juste une indescriptible envie de lui faire confiance, envie de se dévoiler entièrement à lui, d'accepter d'être faible et lâche. Il n'arrive pas à se l'expliquer. Juste être avec Aomine c'est être lui-même. Fuir avec Aomine c'est arrêter de fuir finalement, arrêter de s'enfermer dans cette solitude où il n'y a que lui qui sait qui il est réellement.

AOMINE

Il sent peser le regard de Kagami sur lui et comme par réflexe, il lui adresse un sourire qui se veut rassurant. Il ne peut pas se l'expliquer, mais il a l'impression que Kagami a besoin de se raccrocher à quelque chose, à quelqu'un. Ou alors c'est juste son imagination, encore, qui lui joue des tours. Peut-être qu'il ne fait que chercher une raison, une justification à sa propre confusion.

« C'est sûr qu'avoir un joueur de NBA qui vient squatter les terrains de rue ça fait son petit effet. »

Il a la gorge un peu sèche et pioche une bouteille d'eau dans son sac de sport. Il en avale quelques gorgées et reprend :

« À Chicago pour moi ça a vite été moitié basket, moitié séance de dédicaces... » Il rigole un peu. « Évidemment c'est pas franchement déplaisant, mais c'est chelou, quoi. »

KAGAMI

Il détourne le regard en réalisant qu'il fixe un peu trop Aomine peut-être.

« Ouais ici aussi. Mais ce sont souvent les mêmes gamins et maintenant... Ils ont compris que s'ils voulaient des dédicaces et échanger quelques ballons fallait qu'ils rangent leurs téléphones. »

Derrière eux, Levi regarde Lola.

« Tu comprends quelque chose ? »

La jeune femme soupire un peu.

« Pas tout... Daiki a un japonais très argotique et informel, c'est plutôt différent de ce que j'apprends en cours... J'arrive un peu mieux à suivre Taiga mais bon... Enfin, je comprends l'idée générale ! Là, ils sont en train de parler du fait d'être célèbre et d'attirer l'attention des jeunes fans quand ils vont jouer dans la rue ! »

Aomine, lui, rigole aux paroles de Kagami.

« Ah ouais ?! Tu sais mieux gérer les fans que moi, alors !

— Bah j'espère en tout cas... Pas sûr que le club soit super content si le fait qu'on est tous les deux à L.A. filtre sur les réseaux sociaux avant l'annonce officielle de notre recrutement.

— Bah... Qu'est-ce qu'on y peut si on est des stars, hein ?! » Il lui sourit et lui donne un coup de poing amical dans l'épaule.

Kagami rigole.

« Aho ! »

Puis il regarde devant lui.

« On y est. »

Ils arrivent sur un terrain effectivement déjà occupé par six jeunes. Ils s'arrêtent en les voyant arriver. Les surfeurs eux ne sont pas encore arrivés.

« Hey Tiger !

— C'est... Aomine avec toi ?

— Tout à fait. »

Un silence béat s'installe puis certains des jeunes viennent s'agglutiner autour d'eux. Et ils commencent à réclamer des signatures.

« Stop ! Vous nous laissez jouer ? Et on vous signera tous ce que vous voulez à la fin ! Ok ? Et comme d'hab... Pas de téléphone.

— Ok... Mais vous jouez contre nous aussi ?

— Oh..., regarde Aomine, ça te dit ? ça nous échauffera. »

Aomine acquiesce en souriant.

« Ouais, pourquoi pas. »

Là-dessus, le brun disperse quelques gamins qui lui barrent le chemin, pose son sac contre le grillage et procède à quelques étirements.

Kagami vient poser son sac à côté du sien et sort son ballon. Et il s'étire lui aussi, avant de se remettre face aux garçons.

« Ok... Deux contre 5 et un remplaçant chez vous. Dix paniers. Ok Aomine ? »

Il sourit c'est marrant de commencer en jouant dans la même équipe finalement.

« Ouais... Sans vouloir vous manquer de respect les gars... ça sera vite plié.

— Tu m'étonnes ! »

Il regarde les jeunes se mettre en position et il lance la balle au sixième gamin.

« Tu fais l'entre-deux ? »

Et il regarde Aomine en souriant et parle en japonais.

« Je m'y colle... Je te laisse le premier panier. »

Aomine acquiesce et se positionne sur le terrain, amusé devant les gamins excités. Il attend que le ballon entre en jeu, les mains posées sur ses genoux.

Le gamin lance la balle, Kagami décolle avant même que le gars en face ait eu le temps de lever les bras et il envoie la balle sans regarder vers Aomine mais exactement dans la bonne direction pour qu'elle lui arrive quasiment dans la main.

« Dépêchez-vous... Il va marquer. »

AOMINE

Il zigzague sans efforts entre les jeunes joueurs et dunke avant que les gamins aient le temps de s'apercevoir de ce qui se passait.

« Bah alors ?! Vous en faites pas, le prochain sera plus facile à contrer. Il est un peu lent, Kagami. »

Il offre à son rival son plus beau sourire provocateur, ayant tout oublié de son stress et de son anxiété quasiment dès l'instant où il a posé le pied sur le terrain.

KAGAMI

Il rigole doucement.

« Fais ton malin Aho... On verra qui est le plus rapide tout à l'heure. »

Il laisse les gamins relancer la balle. Il sourit les laisse jouer un peu et se rapprocher du panier. Puis quand l'un d'eux passe trop près de lui, il tend le bras pour lui voler la balle et part en dribblant jusqu'au panier en face, évitant les adversaires sans effort et dunke à son tour.

AOMINE

Il le regarde faire et s'aperçoit qu'il sourit toujours aussi bêtement. Au Japon, et puis au cours de ces six derniers mois aux USA, il a regardé un certain nombre des matchs de Kagami à la télévision, mais c'est carrément autre chose de le revoir jouer en chair et en os. Il dégage toujours cette sensation de puissance brute, presque animale, et il a un instinct de jeu remarquable, sans compter sa vitesse et sa souplesse. Il laisse les gamins récupérer le ballon et à son tour les regarde jouer sans guère intervenir, jusqu'à ce qu'ils prennent un peu trop la confiance et qu'il bondisse pour bloquer aisément un tir.

« T'aurais pu y arriver si t'avais fait la passe à ton pote placé dans la zone des trois points, fait-il remarquer. Ni Kagami ni moi on était sur sa trajectoire de tir. Le basket c'est un sport collectif, quoi qu'en pensent les egos des joueurs pros. Et même une starlette sait la jouer collectif, parce que ce qui importe au fond, c'est de faire gagner son équipe. »

KAGAMI

C'est assez amusant d'entendre Aomine faire des leçons sur le jeu collectif quand on connaît son passé. Il lève la main pour appeler la balle parce que justement il est toujours à côté du panier adversaire et il n'aura quasiment rien à faire pour mettre la balle dans l'anneau.

« Aomine ! »

Le brun la lui lance d'un geste presque négligé, gardant un œil sur les mouvements de l'équipe adverse.

Il récupère la balle sans effort et il l'envoie directement dans le panier sans même regarder.

« Et trois les gars... Faut vous réveiller un peu ! »

Le nombre de spectateurs a augmenté avec l'arrivée des surfeurs et une glacière de bières fraîches. Pendant qu'Aomine et Kagami mettent une jolie fessée aux gamins, Kelly tend une bière à Levi et en propose une à Lola.

« Lola tu en veux une ? »

LOLA

« Oh ! Ouais, avec plaisir ! »

Elle prend la bière et reporte son attention sur le jeu. Elle aime toujours regarder Daiki faire du basket. D'après elle, il est tout particulièrement sexy sur un terrain. Elle a presque oublié ses doutes de la veille... En tout cas, elle les a provisoirement remisés dans un coin de son esprit. Dans ces moments-là, à le regarder évoluer dans le sport où il excelle, elle est plus fière de lui que jamais.

LEVI

Il n'aime pas le basket mais il est certain que voir les deux basketteurs professionnels s'échanger des ballons aussi facilement et mettre les paniers en regardant à peine où ils visent est assez impressionnant. En réalité, il n'a jamais pris le temps de vraiment observer Taiga jouer. Enfin, il ne l'a jamais vu jouer en vrai. Il n'est ici que pour la curiosité de le voir affronter l'autre Japonais. Mais son visage concentré et rayonnant est encore différent de celui qu'il peut avoir au surf. Il semble plus jeune, plus innocent. Et il est clairement sexy. Il regarde Lola à la dérobée, elle semble hypnotisée par le jeu, par Aomine.

KAGAMI

Il fait la passe décisive pour permettre à Aomine de mettre le dernier panier de la victoire.

« 10-0 les gars. Va falloir vous entraîner un peu plus… »

Les deux basketteurs professionnels tapent dans les mains de chacun des gamins et les invitent à s'installer sur les côtés en rappelant une dernière fois de ne pas sortir les téléphones portables. Puis, Taiga se place au centre du terrain pour faire face à Aomine. Il l'observe silencieusement, le sourire aux lèvres et l'adrénaline courant dans ses veines. Il marmonne en japonais.

« Prêt ? »

AOMINE

Enfin. Ça faisait des années... On dirait que toute sa vie s'est déroulée pour le ramener ici, sur un terrain de basket face au tigre.

En dépit de ses provocations, il sait que Kagami n'est pas un joueur à sous-estimer et il prend quelques instants pour se concentrer. Il fixe intensément son adversaire, comme s'il cherchait à lire ses futurs mouvements dans sa posture. Il inspire et expire profondément à plusieurs reprises. Puis, il lui envoie le ballon avec lequel il dribblait pendant qu'il se concentrait.

« À toi l'honneur, comme au bon vieux temps. Histoire de te laisser une chance d'ouvrir le score », ne peut-il s'empêcher d'ajouter avec un sourire non dénué de perversité.

KAGAMI

Il se laisse happer par ce regard bleu-gris comme un océan avant la tempête. Ça le ramène loin dans ses souvenirs cette couleur. Il attrape la balle sans la regarder. Il n'est pas prêt encore à lâcher le regard d'Aomine.

« Merci. Compte pas sur moi pour te ménager… »

Il inspire profondément et se met en position. Il fait rebondir la balle. Cette sensation est juste divine. Aomine, la balle, l'asphalte. Rien d'autre ne compte. Ils sont déjà dans leur monde, dans leur univers. Il s'élance, il passe à côté d'Aomine un peu trop près pour le provoquer ou juste pour avoir une excuse de le frôler. Peu importe, il se retrouve derrière Aomine. Il part à gauche et s'élance pour tirer.

AOMINE

Il pivote sur lui-même avec souplesse et se replace devant Kagami en un instant, entamant avec lui cette danse familière qui consiste à se tourner autour, tout en feintes et en esquives, exigeant autant d'équilibre que d'habileté. Il teste, cherche à éprouver les techniques de Kagami. Il ne le laissera pas marquer, mais il n'est pas pressé de lui reprendre le ballon. Il préfère faire durer les préliminaires.

KAGAMI

Il n'en attendait pas moins de lui. C'est peut-être les moments qu'ils préfèrent. Leurs regards ne se lâchent jamais. Le bleu est zébré maintenant d'éclairs électriques. Ils se touchent, se frôlent. C'est presque un besoin physique, comme pour se raccrocher à la réalité de l'autre. Ils sont loin de se donner à fond encore. Mais pour les spectateurs le jeu va déjà extrêmement vite. On pourrait croire qu'ils n'ont pas envie de marquer que le seul intérêt est cette danse sensuelle, cette sorte de parade amoureuse à laquelle ils s'adonnent à se tester à se jauger.

Ils sont bien meilleurs que la dernière fois qu'ils se sont affrontés. Mais cette fois, l'avantage d'Aomine n'est pas si grand qu'avant. Le jeu est bien plus serré.

AOMINE

Il sent la résistance dans le jeu de Kagami. Il n'aura pas la victoire facile. Alors il va chercher des ressources plus profondes, et adopte un rythme de jeu plus rapide. Ses yeux ne loupent aucun des mouvements de son adversaire, ses autres sens enregistrent tous les détails. Et soudain, il bondit comme un fauve sur sa proie, intercepte le ballon et accélère brusquement, gagnant sa vitesse de pointe en quelques foulées.

KAGAMI

Il réagit aussitôt. Bien plus rapide qu'avant il ne laisse pas Aomine le prendre de vitesse et revient à sa hauteur pour se placer devant lui. Son regard est plein de défi quand il se pose sur son adversaire et plein aussi d'un immense plaisir. Son cœur tambourine dans sa poitrine. Mais il garde son sang froid. Ses yeux sont sur Aomine pourtant il voit tout. Il ne se laisse pas perturber par ses jeux de jambes, il ne se laisse pas perturber par ses feintes. Le match va être très serré et il ne fait que commencer. Et cette nouvelle le réjouit.

AOMINE

Il dribble devant Kagami et ses yeux se plantent dans les siens. Il lui sourit.

« Ok, je l'reconnais, t'es moins facile à passer qu'avant. Mais d'une, c'est plutôt une bonne nouvelle, de deux, t'as pas encore tout vu. »

Il s'élance sans même penser à ce qu'il va faire, il laisse son instinct parler. Il a testé, il sait à peu près à quoi s'en tenir. Maintenant, il doit se fier à ses sens et à son intuition. Il parvient à trouver une faille et continue sur sa lancée vers le panier. Il n'attend pas, ne réfléchit pas, et bondit pour dunker.

KAGAMI

Il se lance à sa poursuite. Il sait ce qu'il tente, il a juste un pas de retard. Il saute un instant après Aomine. Il saute toujours plus haut et plus vite il frôle la balle mais elle passe quand même dans le panier. Et à ce moment, juste à ce moment là, il se permet de relâcher un peu sa concentration et alors que leur corps se frôlent au point de sentir la chaleur d'Aomine irradier le sien, il remarque son odeur. Non. Il la connaît déjà en fait. Il la connaît même très bien. Mais il n'a jamais réalisé qu'il aime cette senteur, qu'elle lui rappelle quelque chose de familier, réconfortant, la nostalgie d'un autre temps, un plaisir retrouvé. Une odeur envoûtante.

Il se réceptionne sur ses pieds avec souplesse et oublie ses pensées parasites et lui sourit.

« Bien joué. Mais ça suffira pas pour gagner. »

AOMINE

Il lui sourit largement et lui tend son poing fermé pour qu'il tape dedans comme si c'était déjà la fin du match. Juste un vieux réflexe dont il s'étonne un peu. Un flot de souvenirs l'envahit tout à coup.

Il revoit Tetsu épuisé, soutenu par Kagami, qui avait accompli le même geste à la fin de leur deuxième match, celui qu'il avait perdu. Il se rappelle le sentiment indescriptible qu'il a éprouvé à ce moment-là. Il se souvient du regard qu'il a échangé avec Kagami. La façon presque désinvolte dont celui-ci lui avait proposé de remettre ça, comme s'il ne réalisait pas qu'il venait de perdre son premier match depuis... Le début du collège.

Ça l'émeut soudain et son sourire se fait un peu plus vague, teinté de nostalgie et d'espoir à la fois. Il veut retrouver ces moments éphémères du lycée, mais pour de bon, cette fois.

KAGAMI

Il lui rend son sourire et frappe son poing. Lui aussi ça lui rappelle une autre époque.

« Mais c'est pas fini mec… Le premier qui arrive à dix paniers. »

Il passe à côté d'Aomine sans attendre, il le frôle au passage, c'est pas comme si le terrain était immense mais il a l'impression qu'un aimant l'attire vers lui. Il récupère le ballon et se remet en position. De nouveau c'est une bataille acharnée. Ils ont totalement oublié ceux qui les regardent autour. Sont-ils encore là ? Peu importe, l'important c'est qu'ils soient tous les deux là, sur ce terrain.

LEVI

La vitesse de jeu est spectaculaire. Ils jouent ensemble clairement un basket de rue, ils n'hésitent pas à se bousculer et faire des fautes pour progresser vers le panier adversaire. Ils utilisent les particularités du terrain qui glisse à cause du sable pour se piéger. Il n'a plus l'impression d'assister à un affrontement de basket. Ça lui semble bien plus que ça. Il y a comme un truc électrique dans l'air. C'est comme s'ils n'arrivaient pas à se départager parce qu'ils étaient trop en harmonie, comme si leurs instincts se parlaient directement. C'est sensuel, sexy. Taiga ne lui aurait pas menti, pourtant la tension sexuelle sur le terrain lui semble juste évidente. Pas possible que les deux garçons ne s'en soient jamais rendu compte. Il regrette presque d'avoir viré Taiga pour le soir, il sait qu'il a été con hier, mais il commence à sérieusement se sentir menacé par ce mec. Pas que sa relation avec Taiga soit sérieuse. C'est juste du sexe, mais c'est son partenaire préféré en ce moment, ça ne lui plairait pas de le perdre.

LOLA

Le plaisir initial de voir Daiki jouer s'est mué en anxiété au fil des minutes. Elle repense à la veille, à ce regard que les deux jeunes hommes ont échangé, et elle frissonne dans la chaleur du soleil. Elle ne peut s'empêcher de jeter un coup d'œil à Levi : est-ce qu'il voit ce qu'elle voit ?

L'alchimie entre Taiga et Daiki a quelque chose d'animal, et... elle n'est pas sûre de savoir à quoi ça tient, mais quand elle les regarde évoluer sur le terrain, elle a la sensation qu'ils cherchent à se séduire. En tout cas, ils essaient sans aucun doute de s'impressionner mutuellement.

Et ils l'impressionnent, elle, mais ils n'en ont rien à foutre. Ils ne voient plus personne, elle en est certaine. Ils sont dans leur monde. Hors de portée. Et cette sensation la glace plus que tout le reste.

Daiki lui échappe.

Ça a peut-être commencé dès le début, ou peut-être que ça s'est installé avec le temps, creusant irrémédiablement la distance entre eux. Ou peut-être que le point de rupture a été franchi dès le moment où Taiga est revenu dans la vie de son homme.

Elle reste convaincue d'une seule chose : quoi qu'il se passe entre ces deux-là, il y a un fond de vérité dans les idées qu'elle se fait depuis la veille.

LEVI

Ses yeux se posent sur Lola, le regard qu'il lui adresse n'est ni séducteur, ni gentil mais empreint d'une profonde contrariété. Il s'assombrit un peu plus les bras croisés sur son torse, adossé au grillage. Il boit une autre bière en entendant les autres s'extasier devant la beauté du match. Il ne comprend pas comment personne ne voit ce qui se passe entre les deux Japonais.

« Youhou ! Tiger vient encore de marquer ! On est à huit-huit. Le suspens est insoutenable ! » rigole Sam.

LOLA

Ce qu'elle voit dans le regard de Levi ne la rassure pas du tout. Il a perçu la même chose qu'elle, pas de doute là-dessus. Elle boit sa bière nerveusement et sursaute quand Sam s'exclame.

« Je devrais regarder plus souvent le basket... approuve Tuan, un peu éberlué par le spectacle.

— Tiger va avoir le dessus, j'en suis sûre ! commente Kelly, confiante, aussitôt approuvée par Rachel.

— Moi, je mise sur Daiki ! » annonce Cynthia.

Sur ce, les amis commencent à débattre des mérites de l'un et de l'autre, un débat passionné même s'ils n'y connaissent pas grand-chose. Lola écoute à peine. Elle voudrait que ça s'arrête. Elle voudrait rentrer chez elle. Elle voudrait que Daiki apaise ses craintes. Elle veut l'entendre lui dire qu'il l'aime et qu'il ne la quittera pas.

KAGAMI

Il faut avouer que c'est intense. Il prend un plaisir de dingue à affronter Aomine. Il frissonne chaque fois que son corps touche celui de son ami. Il ne sait pas à quel moment mais ils sont entrés dans cette transe particulière proche de la zone, ce moment où seul l'instinct parle, où ils n'écoutent que leurs tripes. Il a une vague idée du score. Il sait juste que chaque fois que l'un marque l'autre met le prochain panier. Le combat est acharné, ils n'arrivent pas réellement à se départager, mais après tout, peu importe. Il s'en fout de perdre ou gagner là, Aomine est là, à lui offrir cette intensité qu'il avait oubliée, à lui faire vivre le basket comme une expérience absolue de pur plaisir. Pour un peu il en aurait un orgasme tellement il prend son pied à danser sur ce terrain avec Daiki. Sur ce terrain où il n'est qu'à lui.

AOMINE

La confrontation qu'il désirait dépasse ses attentes. Il se sent renaître, c'est presque comme s'il redécouvrait le basket. Il n'a jamais été aussi vivant qu'en jouant contre Kagami, et c'est encore vrai aujourd'hui, peut-être même encore plus. Son niveau et sa technique l'impressionnent. Le tigre se comporte comme s'il lisait dans ses pensées, l'empêchant de vraiment le surprendre. Il lui a promis une dérouillée, mais il voit bien que qu'ils sont arrivés au même niveau. Il leur faudra sans doute encore travailler pour pouvoir, un jour, se départager à nouveau. À ce niveau-là, le panier de la victoire ne creusera qu'un infime écart entre eux. Ce sera au plus rapide d'entre eux, ou à celui qui a un coup de chance. Enfin, ça, c'est si l'un d'entre eux parvient à le mettre, ce panier... Il concentre tout son jeu dans la défense, et tant pis si ça s'éternise. Il va tenter d'avoir son adversaire à l'usure.

KAGAMI

Il devine la tactique choisie par Aomine. Il n'est pas impossible que l'échange dure encore longtemps. Mais peu importe, il a de l'endurance et il ne compte pas céder si facilement à la défense d'Aomine. Il n'a pas envie de terminer ce jeu. Il n'a pas envie de quitter ce monde où il n'y a qu'eux. Il lui adresse le même sourire que la veille.

LEVI

Il remarque cette expression qui lui avait déjà déplue hier. Il serre la bouteille dans sa main. Il jette un oeil à son téléphone et décide de partir. Il en a assez vu.

« Tu vas où Levi ?, s'étonne Kelly.

— J'ai un rendez-vous ce soir... Faut que j'aille me préparer.

— Encore une nouvelle nana ? C'est qui cette fois ?

— La nouvelle voisine. À demain. »

LOLA

Elle cligne des yeux. Elle a sûrement dû mal entendre. Elle doit prendre sur elle pour ne pas lui demander carrément si Taiga est au courant, et se retient de justesse en se rappelant que les autres ne savent rien et que ça pourrait faire plus de mal que de bien. Elle se sent perdue, la situation lui échappe et le départ de Levi ne fait qu'ajouter à sa confusion. Elle a vraiment besoin d'une bonne discussion avec Daiki. Et ce problème avec Levi fournira un bon prétexte pour ne pas aborder directement le sujet qui la préoccupe le plus.

AOMINE

Il ne remarque rien de ces échanges, pas plus que le départ de Levi. Son attention est tout entière centrée sur son adversaire qui lui adresse un sourire chaleureux. Il prend quelques instants pour se reconcentrer, prêt à entamer une bataille de longue haleine. Avec un peu de chance, il arrivera à provoquer une erreur de la part de Kagami, à le faire se précipiter. Et quand viendra ce moment, il saisira sa chance.

KAGAMI

Ils sont aux coudes à coudes. Il a chaud. Il est essoufflé. C'est peut-être un peu à cause de la fatigue, mais l'espace d'une seconde alors que Aomine fait barrage dans son dos, son corps pratiquement entièrement collé au sien et qu'il tourne légèrement la tête, l'odeur d'Aomine vient chatouiller ses narines une odeur virile et chaude du soleil, légèrement sucrée comme le caramel. Cette distraction de très courte durée suffit à lui faire perdre la balle. Jamais il ne pourra avouer à Aomine pourquoi il a fait cette erreur.

AOMINE

Il s'engouffre dans la faille et dès qu'il récupère la balle, il fonce pour marquer. Il met toutes ses ressources dans un dernier effort pour dunker brutalement. C'est le panier de la victoire ! Il retombe sur ses pieds et s'appuie sur ses genoux, épuisé, mais heureux.

« Eh bah putain, Kagami... Sacré match. » commente-t-il d'une voix essoufflée.

Il se redresse et s'essuie dans son t-shirt, dévoilant ses abdos luisants de sueur.

KAGAMI

Il le regarde en souriant toujours, encore perdu dans la torpeur du moment. Il ne détourne les yeux que quand Aomine dévoile un peu son corps. Ça le met mal à l'aise, il a l'impression de le reluquer. Ça se fait pas Aomine est son ami juste son ami.

Il réalise qu'ils ne sont pas seuls ou du moins ils s'en rappellent quand il entend les cris et les applaudissements des jeunes et des surfeurs.

Il se tourne vers les spectateurs. Levi n'est plus là, il sait qu'il avait un truc de prévu le soir, alors il ne pose pas de questions. Et il attrape la bouteille d'eau que Cynthia lui lance.

AOMINE

Il revient lui aussi à la réalité, reprenant conscience des gens qui l'entourent. Il va prendre sa bouteille d'eau dans son sac et est surpris de lire de l'inquiétude dans les yeux de Lola quand il croise son regard. Pourquoi de l'inquiétude ? Il ne comprend pas.

« Ça va ? »

Elle répond avec un petit oui qui veut dire non. Ça l'embête mais... il est encore dans l'euphorie de son match. Il ne remarque même pas que Levi s'est barré. Il boit quelques longues gorgées à sa bouteille et se tourne vers Kagami en souriant.

« J'crois que ça va, on est prêts pour les Lakers

— Je crois qu'on peut le dire ouais !, répond Kagami en rigolant.

— En tout cas, faudra qu'on remette ça.

— Carrément, c'était impressionnant, les gars ! s'enthousiasme Kelly.

— Et en plus j'ai gagné, j'avais parié sur toi ! s'exclame Cynthia.

— Ah, c'est gentil ça ! sourit-il. Ou plutôt devrais-je dire... lucide ! »

Il accompagne sa remarque d'un clin d'œil pour Kagami.

KAGAMI

« La prochaine fois c'est moi qui gagne. »

Les jeunes se sont rapprochés et après une mini séance de dédicaces tout le monde se disperse. Les surfeurs sont partis ne reste plus qu'eux et Lola.

« Merci pour le match Aomine... C'était génial. Bon... Je vais rentrer chez moi... La douche m'appelle !

— Pas de problème. On se refait ça quand tu veux. Demain, même, si ça te tente. »

Il offre à Aomine un sourire solaire. Il ne fait plus attention à Lola seul Aomine existe dans son univers. Un autre basket demain avec lui ? Bien-sûr qu'il veut. Il est excité par le sport, la perspective d'un échange passionnant mais aussi par l'idée simple de revoir Aomine.

« OK pour demain. Je suis partant. »

Le brun hoche la tête en souriant.

« Génial. Tu me textotes pour me dire où et quand. Si ça t'arrange j'peux venir jusqu'à chez toi, les taxis ils sont pas comme moi, ils se perdent pas.

— OK ça marche », répondit il en rigolant.

Il prend son sac et il est un peu réticent à s'en aller il faut avouer.

« À demain Aomine. À plus Lola. »

Et comme il n'a vraiment plus rien à faire là, ni à dire de pertinent. Il s'éloigne avec un dernier geste de la main.

AOMINE

Il le suit des yeux quelques instants, puis part de son côté avec Lola, qui reste bien silencieuse. Il hésite à lui demander ce qui ne va pas, mais pressent que ce n'est pas une conversation à avoir dans la rue. Une fois à l'appartement, il file sous la douche et quand il en ressort, elle l'attend dans le salon.

« Il faut que je te dise quelque chose... »

Elle se mordille la lèvre, nerveuse, et ça ne lui plaît pas. Il passe mentalement en revue tout ce qui s'est passé ses dernières 48h pour chercher là où il a foiré. Et comme elle n'a aucun moyen de savoir ce qui s'est passé dans sa tête la veille au soir… Il n'a aucune idée de quoi il s'agit, mais il sait déjà qu'il ne va pas aimer ça.