Hello à tous !
Vu qu'on nous a reproché d'être sadiques, on a tâché de pas être en retard pour la publication. Même si... Pas sûres que vous allez nous trouver moins sadiques ce coup-ci !
Dans tous les cas, enjoy !
Stella : Merci pour ta review enthousiaste, comme toujours ça fait très plaisir ! Bonne lecture pour ce nouveau chapitre :)
LOLA
Les paroles de Daiki avant le match ne cessent de tourner dans sa tête. « Peut-être que tu comprendras quand on sera sur le terrain. Y a certains trucs qui s'expriment pas avec des mots. » Elle a compris, oui, mais pas ce qu'elle s'attendait à comprendre. Elle ne sait pas ce que c'est, mais il y a quelque chose entre son homme et celui de Levi…
Levi. Son sujet de diversion. Elle commence d'une voix tendue :
« Levi a dit un truc qui m'a perturbée... »
Daiki hausse un sourcil et vient s'asseoir à côté d'elle.
« Il a dit qu'il avait un rendez-vous », poursuit-elle sans trop oser le regarder, incertaine de la façon dont il va réagir. « Et Kelly a demandé 'encore une nouvelle nana' ? Il a répondu 'la nouvelle voisine'. C'est un peu chelou, non ? Et je sais pas, j'ai pas eu l'impression que Taiga est au courant, alors je me suis dit que... comme t'as l'air de beaucoup tenir à lui... Tu voudrais savoir. »
Elle relève les yeux vers lui, observant son visage pour guetter sa réaction.
AOMINE
Il ne note pas l'insistance dans les mots de Lola. Ni même la façon mi suppliante, mi interrogative dont elle le regarde.
Il voit rouge. Ce salaud de surfeur…
Il crispe les poings sur ses cuisses. Il est furieux. Irrationnellement et totalement furieux.
« Mais peut-être que Taiga est au courant et qu'ils ont un arrangement... » ajoute Lola doucement.
Il secoue la tête.
« Je le connais, réplique-t-il d'une voix sourde. J'y crois pas une seule seconde. Putain je le savais, je le sentais pas ce mec... Fuck... »
S'il s'écoutait, il irait directement sonner à l'appart de ce connard et lui foutrait un poing dans la gueule avant qu'il n'ait le temps de prononcer un mot.
Mais il ne peut pas faire ça. Il n'est pas assez sûr pour ça. Pas assez... proche de Kagami. En faisant ça, il risque juste de se le mettre à dos. Il réfléchit, les sourcils froncés, le visage tendu.
LOLA
La réaction de Daiki ne lui dit rien qui vaille. Elle ne l'a jamais vu autant en boule. Il dégage une énergie électrique. Elle a bien remarqué qu'il avait un côté protecteur envers les gens qu'il aime, mais là, elle sent autre chose. En fait, cette réaction seule ne l'aurait pas tant dérangée que ça, mais... C'est un réseau d'indices qui s'accumulent... Et ça l'effraie de plus en plus.
Et pourtant, elle ne parvient pas à poser la seule question à laquelle elle veut vraiment une réponse.
Est-ce que tu es amoureux de lui ?
AOMINE
Mâchoires serrées, il ressasse les paroles de Lola. Obligé, il va falloir qu'il le dise à Kagami. Il ne sait pas comment... Il va peut-être l'envoyer chier... Mais il ne peut pas garder ça pour lui. Si la situation est telle qu'il l'imagine, que Kagami se trompe complètement sur la nature de sa relation avec Levi... Il ne peut pas simplement pas le laisser se faire utiliser en restant les bras croisés.
Il inspire et expire, mais ça ne suffit pas à le calmer. Il a besoin de se défouler. De prendre l'air. Même s'il était dehors tout l'après-midi.
« Je vais faire un tour », annonce-t-il.
Lola ne répond rien.
« Merci de me l'avoir dit. Je règlerai ça avec Kagami demain. »
Elle hoche la tête, et il enfile ses baskets pour sortir. Il prend ses clefs, descend les escaliers quatre à quatre et rejoint la plage pour y déambuler sans but. Le bruit du ressac et l'immensité du ciel et de l'eau, comme ce matin, l'aident à s'apaiser. Il marche très longtemps, jusqu'à ce qu'il fasse totalement nuit.
KAGAMI
Il monte dans le taxi la tête encore dans son match avec Aomine. L'adrénaline redescend doucement alors qu'il boit tranquillement sa bouteille d'eau. Quand le taxi arrive en bas de son immeuble, il reconnaît le lieu mais rien n'est familier. Une nouvelle vie commence pour lui, durant ces deux derniers jours il avait presque oublié.
C'est vrai. Maintenant il vit ici.
Il se demande quand il verra Levi la prochaine fois. Il était déjà parti après le match, mais de toute façon ça n'aurait pas changé grand-chose.
Il entre dans son appartement. Il est encore loin de s'y sentir chez lui. Il met de la musique, pour combler le silence angoissant et file sous la douche. Elle lui fait du bien, elle lave la sueur de l'effort et clarifie un peu ses idées. Il accepte, là sous sa douche entièrement nu, il se fait face à lui-même sans rien se cacher, sans se mentir, ouais il est attiré par Aomine. Quelque part, ça le soulage de se le dire, ça n'enlève ni la honte, ni la culpabilité mais ça fait du bien d'être honnête avec soi-même. Même si cette vérité n'est pas plaisante.
Il se rhabille, va se prendre une bière et s'installe sur la terrasse, sur une couverture qu'il étale par terre et son regard se perd dans le ciel bleu parsemé de tâches cotonneuses blanches.
Il doit parler à Levi. Savoir où ils vont. Il se sent coupable d'avoir des pensées pour Aomine. Mais il doit vraiment garder à l'esprit que ces deux sujets ne sont pas liés et qu'il doit les gérer séparément.
Même s'il se sent coupable d'avoir des pensées pour Aomine, vis à vis de Levi évidemment mais aussi vis à vis d'Aomine. Son compatriote a une petite amie, elle est sympa et charmante, elle doit pouvoir le rendre heureux. Mais surtout, il n'est pas gay. Ça va juste lui passer. C'est sûrement juste un petit crush parce qu'il se pose des questions vis à vis de Levi et Aomine a su être une oreille attentive.
Il aime Levi. Même s'il ressent aussi quelque chose pour Aomine, c'est différent. Aomine c'est un embryon de quelque chose qu'il peut encore étouffer. Levi c'est un monstre qui le bouffe de l'intérieur, qu'il ne peut pas museler aisément. Et même si c'est parfois douloureux. Non souvent. De plus en plus souvent malheureusement. S'il ne l'aimait pas il ne souffrirait pas autant.
Il ne sait pas combien de temps il passe à ressasser ses questions. Son téléphone sonne il décroche machinalement.
« Salut papa.
— Bonsoir fils. Tu es bien installé ?
— Plutôt bien oui. Merci pour ton aide. »
Un sourire se dessine sur ses lèvres, son père est aujourd'hui sa seule famille et il est content d'avoir pu se rapprocher de lui. Il avait éprouvé beaucoup de colère vis à vis de son père quand il était rentré seul au Japon. Son père n'avait finalement jamais réussi à le rejoindre et travaillait énormément. Au lycée, ça peut sembler génial d'être autonome et de vivre seul, en réalité il avait beaucoup souffert de cette solitude. Il laisse son père lui raconter sa journée comme il avait l'habitude de le faire une ou deux fois par semaine et il finit par l'interrompre amusé.
« Hey… ça te dit des sushis frais ?
— …
— Je t'invite à manger.
— Oh… Oui ok ! »
Il lui donne rendez-vous pour vingt heures. Ça lui fait plaisir de pouvoir passer une soirée avec son père aussi facilement. Le ciel prend des teintes orangées et roses. Il se lève pour ressortir acheter du poisson frais pour le repas. En remontant chez lui, il envoie un message à Aomine.
[Kagami – 19h17]
Yo ! 14H demain ? Mon adresse : 333 Westminster Avenue.
AOMINE
En rentrant, l'appartement est vide. Il en est curieusement soulagé. Même s'il n'avait pas eu toutes ces réserves sur sa relation avec Lola, il en aurait eu de toute façon sur le fait d'habiter à deux. Mais ce choix leur avait paru le plus simple, alors... Il secoue la tête et balance ses chaussures dans le vestibule. Il va falloir qu'il apprenne un jour à prendre des décisions. Et des risques, en dehors du terrain de basket. Mais ça sera pas aujourd'hui.
Il se rend dans la cuisine où il trouve un mot de Lola sur le comptoir : "Partie au ciné avec Cynthia, Kelly et Rachel. Je vais sûrement rentrer tard. Je t'aime." De nouveau, il est soulagé. Il prend une bière et rejoint le salon, où il se laisse tomber dans le canapé et allume la télévision pour avoir un fond sonore. Il a eu le temps de réfléchir au cours de sa petite promenade. Il a décidé qu'il était perturbé par son emménagement à L.A. et ses retrouvailles inattendues avec son ancien rival. Il a décidé que ça lui passerait, et que Lola et lui reprendraient le cours de leur relation comme avant. Il a aussi décidé qu'il ne changerait pas d'avis et que Levi est un gros con, et que Kagami finira par s'en apercevoir, surtout lorsqu'il lui parlera de la voisine.
Et même s'il a décidé tout ça – comme quoi, si, si, il sait prendre des décisions – il est quand même content que Lola ne soit pas là ce soir.
Parce que rien ne peut effacer cette sensation de malaise qui s'accroche à lui. La sensation que quelque chose ne tourne pas rond. La sensation d'être arrivé au bout d'un cycle. Avec à l'horizon, la certitude qui se profile que sa vie est sur le point de changer à jamais.
Mais sa dernière décision avant de rentrer, ça a été celle-ci : ignorer tout sentiment de malaise, verrouiller ses désirs, museler son vague à l'âme. Parce que si, il peut très bien tout continuer comme avant, il suffit de le vouloir. Ça a bien marché, pendant toutes ces années, alors pourquoi plus maintenant ?
Il avait treize ans quand il avait compris qu'il ne s'intéressait pas au bon sexe. Il a passé deux ans à se sentir radicalement perdu, seul. Il ne comprenait pas le monde qui l'entourait, et il semblait que la réciproque était vraie. Alors, il a observé, analysé, muré dans son silence, renfermé, rejetant le contact des autres. Même de Satsu et Tetsu, il avait du mal à se sentir proche, protégeant son secret toutes griffes dehors. Et à quinze ans, sa stratégie était prête et bien rodée. Ça avait été étonnamment facile de se fondre dans le rôle qu'il avait inventé, ridiculement aisé de faire tomber tout le monde dans le panneau. Il suffisait de reluquer les filles au bon endroit, de faire étalage de ses magazines cochons, de jouer de ses charmes – et il avait été gâté par la nature de ce côté. Et voilà, Aomine Daiki était devenu le tombeur de ces dames.
Et même si son armure est fabriquée de mensonges, elle l'a protégé pendant toutes ces années. Pas un faux pas. Il a même quasiment fini par croire à son propre personnage. Parfois seulement, surtout le soir, la réalité factice de son masque se fendille, et lorsqu'il affronte le miroir, il voit un menteur et un lâche.
Il ne veut plus revivre ça. Alors il imagine que la seule solution est de faire preuve de plus de rigueur encore. Il ne se rend même pas compte de la violence dont il fait preuve envers lui-même. C'est quotidien, c'est normal. C'est sa vie. Au moins, elle reste stable.
Alors... Même ce vide qui lui troue la poitrine, ce truc qui lui tient lieu de cœur, même s'il le sent s'agrandir chaque jour, et sa noirceur se rapprocher chaque fois un peu plus, il l'ignore aussi. Il ferme simplement les yeux plus fort, comme un gamin persuadé que les monstres vont disparaître s'il reste caché sous la couette.
Il a déjà fini sa bière et tressaille en sentant son portable vibrer.
Semblerait-il qu'il ait toujours un cœur, après tout, puisqu'il le sent cogner contre ses côtes en lisant le message de Kagami. Il essuie ses mains moites sur son pantalon et compose une réponse rapide.
KAGAMI
[Aomine - 19h18]
14h, ça me va. Merci pour l'adresse. À demain !
Quand la sonnette retentit, il crie à travers l'appartement.
« Entre c'est ouvert ! »
Ce soir, il se sent un peu plus en paix avec lui même. Il a terminé de cuisiner ses sushis. Cuisiner est toujours une activité qui le détend et la confection de délicats sushis encore plus, la découpe du poisson est un art. Il rit un peu tout seul et prend son téléphone pour faire une photo de son plat richement garni de boules de riz recouvertes de poissons crus de premier choix et il envoie la photo à Aomine avec un petit commentaire – Bon app' –.
« Eh bien tu en as fait pour dix !, s'exclame son père.
— Mais non. J'ai juste super faim.
— T'as toujours super faim… Encore plus quand tu es préoccupé.
— Mais non… Là, j'ai juste fait un basket ! »
Son père a raison, dès qu'il va mal, il a tendance à se venger sur la bouffe. Au décès de sa mère il était devenu quasiment boulimique, il se remplissait à s'en rendre malade. Il pose les plats sur la table basse. Les baies vitrées sont grandes ouvertes. Il faudra qu'il s'achète un salon de jardin, pour manger sur la terrasse. Ils prennent des coussins pour s'installer au sol.
Il vit aux U.S.A. avec son père depuis qu'il est au primaire, mais Taiga a été élevé à la japonaise. On retire ses chaussures à l'intérieur, on dort sur des futons et on mange sur une table basse. Et Taiga a toujours conservé cette manière de faire qu'il trouve plus zen. Et dieu sait qu'il a besoin de zenitude vu son caractère nerveux et énergique.
Ils prennent des baguettes et commencent à manger, accompagnant leurs sushis d'un thé vert traditionnel.
« Hm… C'est vraiment excellent fils.
— Je pourrai t'en faire plus souvent.
— T'en auras bien vite marre de voir ton vieux père.
— Vieux. Qu'est ce qu'il faut pas entendre !
— Alors tu as joué avec les gamins de Santa Monica ?
— Non ! Mieux que ça ! »
Il affiche un grand sourire et c'est avec beaucoup d'enthousiasme que Taiga partage avec son père ses retrouvailles avec Aomine et le basket qu'ils ont disputé l'après-midi même. Quand il peut en placer une, alors que le fils ne semble pas vouloir cesser de parler de son rival, le père rit.
« Je me souviens comme tu me parlais de ce garçon à l'époque. Quand on arrivait à discuter… Il n'y en avait que pour lui. Il était ton sujet de discussion préféré… Déjà que ta vie tournait autour du basket à l'époque, mais j'aurai pu dire que ta vie tournait même autour d'Aomine-kun. Il t'a fait forte impression et que je vois qu'il le fait toujours. Je suis content pour toi que vous vous soyez retrouvés. Tu n'as jamais été aussi enthousiaste sur quelque chose qu'en ce qui concerne le basket avec lui.
— Ah… Ah bon ?!… Je m'en rendais pas compte… »
La remarque de son père le trouble un peu. Il rigole puis change de sujet. Il était vraiment obnubilé à ce point par Aomine à l'époque pour que même son père avec lequel la communication avait été très compliquée à cette période, le remarque ? … ça le laisse vraiment perplexe.
Mais il relègue cette information dans un coin de sa tête et essaie de profiter de son père et d'éviter d'aborder encore le sujet Aomine. Et il se rend compte que naturellement, il a tendance à vouloir ramener la discussion à lui. C'est vraiment troublant.
Son père le quitte vers vingt-deux heures trente. Taiga débarrasse, range et laisse cette fois ses pensées fouiller son passé pour se rappeler le lycée et la place qu'Aomine prenait dans son univers à l'époque.
AOMINE
Quand il reçoit la photo de Kagami, il en est déjà à sa troisième bière. Eh bah en voilà un qui va se faire un dîner sympa, au moins. Lui, il est plutôt parti pour dîner liquide. Il n'a pas d'appétit de toute façon, et il n'y a rien qui lui fasse envie. Du coup, il envoie une photo de ses bières vides, accompagnée du commentaire "Santé !" pour répondre au "Bon app'" de Kagami.
Malgré ses bonnes résolutions et toutes ses "décisions", il sent que la soirée va être difficile. Il laisse la télé allumée mais déménage sur le balcon. Deux minutes plus tard, la télé le saoule et il l'éteint, et met de la musique à la place. Il n'a rien à faire, à part attendre que le temps passe. Il regarde les lumières de la ville palpiter dans la nuit, il cherche à deviner l'océan dans le scintillement plus lointain et vague qui se dessine au-delà des bâtiments. Et il ouvre une autre bière.
Et quand il sent qu'il est sur le point de faire une connerie, du genre passer un appel éméché à des amis qui n'ont rien demandé et pour qui on est en plein milieu de la journée, il bat en retraite dans la chambre. Il s'enfouit sous les draps, branche ses écouteurs sur son portable, et garde une bière sur la table de chevet.
Et il attend que la soirée se termine. Que le sommeil vienne le chercher. Ça prendra du temps, il est encore tôt.
Pour s'occuper, il repense au match de cet après-midi. Il pense à ceux qui viendront. C'est ça qui l'empêche vraiment de passer ce coup de fil éméché. Il a encore quelque chose auquel se raccrocher. Et puis, il pense au lendemain aussi. Même s'il n'est pas très tranquille sur le sujet. Il a envie de voir Kagami, mais il va devoir dire un truc qui va probablement déboucher sur le fait de se faire virer de l'appartement de Kagami et rentrer avec la conscience tranquille, mais le cœur dans les chaussettes. Mais bon. Il a l'habitude.
Il a conscience que ses pensées sont très négatives. Mais de ça aussi, il a l'habitude. Quand on ne parle jamais de soi, on finit par ressasser ses propres pensées jusqu'à se convaincre profondément qu'il n'existe pas d'autre réalité que celle du mal-être qui les a provoquées. Et si de telles réalités alternatives existent, elle sont éphémères. Des parenthèses, des oasis dans le désert.
Comme le match de cet après-midi.
Il peut juste repenser à ces moments-là. S'en satisfaire. Et continuer à vivre.
KAGAMI
Il ne voit le message d'Aomine qu'après le départ de son père et avoir tout ranger et débarrasser. Il envoie sa réponse en se prépare à se coucher.
[Kagami - 23h36]
Encore une soirée bien arrosée ? Désolé j'avais pas vu ta réponse. J'ai dîné avec mon père. Je me suis pas mal débrouillé avec ces sushis.
AOMINE
Toujours réveillé, il attrape son portable qui gît pas loin de lui dans son lit. Il a l'impression d'avoir attendu ce message toute la soirée. Il le lit et y répond avec trop d'empressement.
[Aomine - 23h38]
Yep. Cool pour ta soirée. Ton père a dû apprécier avec les saloperies qu'on bouffe ici. Ah les sushis... Tu me vends du rêve, là. Tous ceux que j'ai mangés ici c'étaient de gros fake. Le Japon me manque.
KAGAMI
Il est en train de se brosser les dents quand il reçoit la réponse d'Aomine. Il a un petit sourire aux lèvres et des papillons dans le ventre. Il essaie de se raisonner il est beaucoup trop 'content' de recevoir des messages de son ami. Il arrête tout pour répondre brosse à dents encore dans la bouche et le dentifrice à la menthe qui assèche mais c'est pas grave. Il n'hésite pas longtemps le cœur battant un peu vite en envoyant sa réponse.
[Kagami - 23h39]
Tu veux venir manger japonais demain avant de se faire un basket ?
AOMINE
Il sursaute un peu en recevant la réponse aussi vite. Il hésite, le cœur battant. Ça le tente, mais... Il ne peut pas dire ce qu'il sait maintenant, comme ça, par texto. Alors est-ce que ça vaut le coup que Kaga se démène pour un déjeuner qu'il n'aura même plus envie de manger quand il le lui aura dit ? Mais il n'a pas le courage de refuser.
[Aomine - 23h43]
Pourquoi pas :)
[Kagami - 23h43]
J'ai cru qu'tu t'étais endormi ! T'as envie de quoi ?
KAGAMI
Il avait fini de se brosser les dents en surveillant son téléphone. Ces quatre minutes lui avaient semblé beaucoup trop longues. Il sait qu'il n'a pas le droit d'être aussi impatient et content de recevoir les messages d'Aomine. Mais c'est plus fort que lui. Il essaie de se raisonner, ça va passer ce n'est qu'un petit crush.
AOMINE
Il se sent tellement seul ce soir qu'il est touché plus que de raison par cette petite conversation. Ça lui réchauffe le cœur, et ça ne devrait pas. C'est juste un déjeuner, rien de plus. Même si Kagami l'aime bien... Il ne peut pas se reposer là-dessus. Il ne peut pas espérer. Mais il répond quand même.
[Aomine - 23h44]
La nuit je rêve de maki. C'est sérieux, en plus. Pas des putain de California Rolls. Des MAKI.
[Kagami - 23h45]
C'est parti pour des maki alors ! On se dit midi ?
[Aomine - 23h45]
Ok. À demain alors :)
KAGAMI
Il sourit et s'assied sur son lit en se passant une main sur la nuque. Ok. Calme toi. C'est juste Aomine.
[Kagami - 23h46]
Ouais. A demain :). Bonne nuit Aomine.
Et puis, il se rappelle de Lola. Est-ce qu'il devrait l'inviter aussi ? Honnêtement, il n'a pas envie qu'elle vienne. Il hésite à poser la question, mais... Aomine l'aurait prévenu non ? Il hésite nerveux et finalement pose son téléphone à côté de son lit. Il achève de se déshabiller et se glisse sous la couette en caleçon, croisant ses bras sous sa tête. Il fera un peu plus de makis au cas où elle se pointe avec Aomine. Elle est gentille mais il a envie de profiter d'Aomine seul. Même s'il sait que c'est mal.
AOMINE
Il se sent rasséréné par cet échange, alors que ce n'est rien, trois fois rien. Il est vraiment pathétique. Mais ce soir il n'a pas le courage de continuer à s'insulter lui-même, et préfère penser à Kagami... enfin... à ses maki. Et dormir, enfin. Sombrer dans le sommeil et oublier. Tout oublier. Et cet échange tout bête de SMS a suffisamment relâché la tension pour qu'il atteigne finalement l'inconscience tant désirée, avant même que Lola ne rentre de sa soirée.
LEVI
Il attrape son téléphone sur la table de chevet alors que la jeune femme dort profondément à côté de lui. La soirée s'était passée comme prévue, il l'avait invitée au restaurant, lui avait fait son petit numéro de charme et elle avait terminé dans son lit. Un plan parfait qui s'est déroulé sans accroc.
Et pourtant, il n'est pas satisfait. Alors qu'il ne l'écoutait que d'une oreille discuter, ses pensées allaient inévitablement vers Taiga ce soir. Il n'arrive pas à sortir le basketteur de sa tête et ce foutu match. Que Taiga se trouve un jour une nana avec laquelle il voudrait fonder une famille, c'est inévitable, il s'y attend et ça ne les empêchera pas de coucher encore ensemble de temps en temps. Mais Daiki est un mec. Partager Taiga avec un autre gars lui semble inenvisageable. Comme lui-même ne se voit pas avec un autre homme que lui. Où est-ce qu'il a merdé pour que Taiga s'intéresse à un autre ?
[Kagami– 01h02]
Salut Tai. Tu viens chez moi demain ? J'ai envie de toi
KAGAMI
Il se réveille à l'aube. Il a la sensation d'avoir rêvé cette nuit, il ne se souvient pas des détails. Ce n'est qu'une impression diffuse qui reste après le sommeil, les images ne sont pas claires, voire mêmes plus confuses à mesure qu'il sort de l'inconscience, alors qu'elles semblaient limpides quelques instants plus tôt. La seule certitude, sa nuit a été peuplée d'Aomine. Des rêves agréables, auxquels il n'est plus tellement habitué. Il chasse la culpabilité qui tente de le rattraper pour se concentrer juste sur la sensation de bien-être qu'il ressent après cette nuit.
Il se lève et va prendre un petit déjeuner copieux et vitaminé avant de s'habiller et d'enfiler ses baskets pour aller courir, musique dans les oreilles. Il ne veut pas penser et se laisser envahir par ses doutes. Il veut juste rester sur cette note positive de début de journée.
Il ne réalise pas, mais depuis qu'il est levé c'est la première fois depuis deux ans, que ses premières pensées ne se dirigent pas vers son petit ami. D'ailleurs, il est levé depuis bientôt deux heures quand il rentre chez lui et c'est en lisant un message qu'il a reçu en pleine nuit de Levi qu'il pense pour la première fois à lui.
En lisant, son message il est pris d'un sentiment ambivalent. Il est content. Content que Levi veuille déjà le revoir. Content que Levi ait envie de lui et pas juste de son corps. Et alors qu'il se sent vraiment content de cette invitation, la culpabilité de ses sentiments naissants pour Aomine lui reviennent en pleine face. Mais encore une fois, il essaie de ne pas se prendre la tête. Rien n'est possible avec Aomine de toute façon, les sentiments disparaîtront d'eux-mêmes avec le temps, il suffit juste qu'il se consacre à Levi.
[Kagami – 08h12]
Hello, ok pour ce soir. J'arriverai vers 18h.
Il va se doucher et se préparer. Il ne peut pas s'empêcher de choisir sa tenue avec soin même s'il se martèle que ce n'est pas un rendez-vous séduction, qu'il voit juste un pote pour déjeuner et faire un basket. Il enfile donc un jean bleu brut ajusté et une superposition de deux débardeurs près du corps un blanc et un second par-dessus noir aux couleurs de Metallica. Il hésite mais reste comme ça. Tant pis, c'est pas comme si Aomine allait remarquer quoique ce soit de toutes façons. Il joue nerveusement avec le collier qu'il n'avait jamais cessé de porter puis sort de sa chambre pour enfin aller faire des courses et pouvoir se mettre au travail. Les makis c'est un peu plus long à préparer que les sushis et il ne veut pas se rater.
AOMINE
Il se réveille dans les mauvaises brumes trop familières d'un lendemain de soirée trop arrosé. Le soleil tente de s'infiltrer dans la chambre à travers les rideaux. Il tourne la tête de l'autre côté. Lola dort encore. Mais c'est vrai qu'elle avait dit qu'elle rentrerait tard. Il se redresse dans le lit et se frotte le visage, puis attrape son portable. 11h. Tiens, enfin un truc qui se goupille comme il veut : il a juste le temps de se préparer et de prendre le taxi pour rejoindre Kagami. Pas de prise de tête, pas de moment de désœuvrement. Pas de temps pour réfléchir.
Il se lève et se rend dans la cuisine où il lance la machine à café avant de rejoindre la salle de bain pour une bonne douche qui lui éclaircit les idées. Il va vite. Merde... Il est impatient. Impatient de rejoindre Kagami. Il se traite d'idiot mais se dépêche quand même d'aller s'habiller. Puis, il reste debout dans la cuisine à boire sa tasse en regardant dans le vide. À la moitié de son mug, il appelle un taxi. Il oublie encore une fois de parler anglais, se fait engueuler, et réitère sa demande dans la langue appropriée. On lui accorde son taxi. Il rassemble quelques affaires dans le placard de la chambre, puis se retourne pour regarder Lola qui dort, ses cheveux blonds étalés sur l'oreiller. Il se sent coupable. Il s'approche et se penche pour déposer un baiser sur son front. Elle remue un peu dans son sommeil, mais ne se réveille pas.
Il retourne dans le salon et lui griffonne un mot. Puis, il attrape ses clés et sort dans la rue ensoleillée. Seulement quand il est installé dans le taxi, il se rappelle tout le contexte de la journée. Il est heureux de réaliser tout ça au dernier moment, sinon il n'aurait peut-être pas eu le courage de monter dans cette bagnole. Il regarde défiler la ville derrière la vitre, un assemblage hétéroclite auquel il ne parvient pas à donner une cohérence d'ensemble, parce qu'il n'y est encore qu'un étranger. Est-ce qu'il pourra un jour se sentir chez lui ici ? Il l'espère... Mais sans trop y croire.
Enfin, le taxi s'arrête devant l'immeuble de Kagami. Il cherche son nom sur l'interphone et appuie sur le bouton pour sonner. Plus le temps de reculer. Advienne que pourra. Il est un peu nerveux. Il ne sait même plus pour quelle raison. Il en a plusieurs, et elles sont plus ou moins avouables. Alors, planté là sur le trottoir sous la lumière éclatante du soleil californien, il attend la réponse de Kagami dans un subtil mélange d'appréhension et d'impatience.
KAGAMI
Il est presque prêt mais pas tout à fait, il aurait dû penser à donner le code à Aomine pour entrer dans l'immeuble. Il attrape le combiné de l'interphone après avoir essuyé ses mains sur le torchon qu'il pose sur son épaule et parle en japonais.
« Je t'ouvre. C'est au dernier étage. »
Il appuie sur le bouton d'ouverture de la porte sans attendre de réponse et déverrouille la porte d'entrée avant de retourner à la cuisine pour terminer de dresser son plat de maki. Il aligne soigneusement les derniers rouleaux sur un plat et sort la bouteille de vin qu'il avait mis au frais en se disant qu'il en faisait encore trop mais... Il se sent fébrile, impatient et excité de voir Aomine.
AOMINE
Il pénètre dans un hall d'immeuble spacieux et clair, et se dirige vers l'ascenseur. Il appuie sur le bouton du dernier étage et jette un coup d'œil au miroir sur la paroi du fond. Il n'a pas une super tête. Il a le teint un peu gris, et de gros cernes. Oh, et tiens, il a oublié de se passer un coup de peigne, aussi. Tant pis. C'est pas comme s'il allait à un rendez-vous galant non plus, hein ?!
Et pourtant, il est nerveux comme si c'était le cas, vu la façon dont il sursaute au simple "ding" de l'ascenseur lui annonçant qu'il est arrivé à destination. Les portes s'ouvrent et il pénètre dans un couloir tapissé de moquette qui étouffe le bruit de ses pas. Il espère que Kagami a mis son nom sur sa porte. Ah oui, apparemment. Il se racle la gorge, vérifie qu'il n'a pas mis son t-shirt à l'envers ou oublié de fermer sa braguette, et il sonne.
KAGAMI
Son cœur se met à battre plus vite.
Fuck Taiga... Détends-toi c'est juste Aomine.
Il prend une profonde inspiration et en oubliant de retirer le tablier et le torchon qui est toujours sur son épaule et va lui ouvrir. Malgré son cœur complètement affolé, il sourit, comme il ne sait plus le faire qu'avec Aomine. Un sourire pur et solaire.
« Salut. »
AOMINE
Il regarde Kagami des pieds à la tête. Ça lui fait bizarre de le voir comme ça. Comme... hors contexte. Il a déjà eu cette impression. C'est normal. Après tout, ils n'ont guère de vécu tous les deux en dehors du basket... Et malgré sa nervosité, son sourire naît tout seul sur ses lèvres. Il l'aime bien, habillé comme ça. Il remarque la façon dont ses épaules sont mises en valeur sous le tablier et son double débardeur. Il est... sexy ? La pensée ne fait que traverser son esprit, pas assez de temps pour qu'elle ternisse son sourire.
« Salut. Je t'interromps en plein préparatifs ?
— Huh ?!, et prend conscience de sa tenue et rougit, Oh… non non j'ai terminé. »
KAGAMI
Il le laisse entrer dans l'appartement en retirant son tablier, Aomine a l'air fatigué et autre chose qu'il ne sait pas déterminer.
« Si ça t'embête pas… On fait comme au Japon on enlève les chaussures à l'entrée. »
— Jamais pu faire autrement de toute façon. Old habits die hard, comme on dit dans le coin.
— Ouais j'connais ça », rigole-t-il un peu nerveux.
Il passe sa main sur sa nuque. Lola n'est pas là, il en est un peu trop content et ça ne fait qu'augmenter sa nervosité.
« Désolé c'est pas encore hyper personnalisé... J't'aurais bien proposé de manger sur la terrasse... Mais j'ai pas encore le mobilier qui va bien. Installe-toi... Fais comme chez toi. »
Il va dans la cuisine chercher la bouteille et les deux verres. Les makis sont déjà posés sur la table basse.
AOMINE
Il voit que Kagami est un peu nerveux, et met ça sur le compte de sa timidité, vu que c'est la première fois qu'il met les pieds chez lui. Il était déjà comme ça à l'époque du lycée. Ça l'amuse un peu. Il retire donc ses chaussures et s'avance dans le vaste salon abondamment éclairé par la baie vitrée.
« Ouah, c'est encore plus grand que chez moi ! Et ouais, va falloir que tu fasses quelque chose de cette terrasse... »
Il avise ensuite la table et les maki prêts à être mangés et se met instantanément à saliver. Il s'installe et hausse les sourcils en voyant Kagami avec ses verres et sa bouteille de vin. C'était pas un rendez-vous galant on avait dit, hein ? Il rougit un peu et rigole pour masquer sa propre nervosité.
« Eh bah, tu sors le grand jeu !
— Mais ce vin est super bon avec des Makis... Bon en vrai j'y connais rien en vin... Mais mon père avait ramené deux bouteilles hier… », répond Taiga toujours aussi gêné.
KAGAMI
Il en fait vraiment trop, même Aomine le remarque. Bon en même temps c'est pas comme si son mec lui permettait d'organiser ce genre de repas. Même s'il cuisine toujours pour Levi, c'est différent de recevoir chez soi et jamais Levi n'est venu le voir à New York. Et puis Levi n'aime pas les sushis et les makis.
« Et puis... ça fait toujours plaisir de manger un plat japonais avec quelqu'un qui sait les apprécier. »
Il regarde Aomine.
« Mais j't'oblige pas à boire du vin ! Dans tous les cas faut qu'on reste raisonnable. Y'a basket après ! »
L'évocation du sujet basket le détend et lui donne le sourire à la place de cette moue gênée qu'il affiche depuis l'arrivée d'Aomine.
AOMINE
Son sourire vacille un peu. Il n'a pas envie de mettre les pieds dans le plat alors... il va au moins savourer ce repas et un verre de vin, mais après... Avec ce qu'il à lui dire, pas sûr que le basket tienne toujours.
« J'en veux bien un verre. Lola elle aime la bouffe japonaise mais moi je trouve que ça a pas le même goût ici. Alors moi aussi je suis content de manger un plat japonais avec quelqu'un qui sait les apprécier. »
Il examine la bouteille.
« Ton père s'y connaît, ouais. Ça c'est un point positif de la Californie. On y fait du bon vin.
— Ouais c'est clair., Kagami sert les verres, et l'invite à commencer à se servir. »
Le brun goûte un maki et s'illumine.
« Comme à la maison, mais en mieux !
— Oh..., son compatriote rougit un peu, merci. Content que ça te convienne., et il attaque aussi, piochant un rouleau dans un des plats. »
Aomine prend une gorgée de vin, il est délicat, peu sucré, et s'accorde effectivement très bien aux makis.
« Il va bien ton père, au fait ?
— Ouais il va bien. Et ça fait plaisir de se rapprocher de lui... Au final, depuis le lycée c'est la première fois que je reviens ici...
— Ah ouais... Ça doit te faire bizarre. Tu dois avoir plein de vécu dans cette ville. »
Il se rend compte qu'il temporise, mais ça lui fait plaisir aussi de discuter tranquillement. Alors il profite de ce moment de calme, des makis et du vin.
« De mes cinq ans jusqu'à quinze ans... Ouais... ça fait pas mal de temps. Et tes parents tu as des nouvelles ? Tu prévois de rentrer un peu à Tokyo ?, Kagami hésite — pas sûr de vouloir parler d'elle — mais ajoute néanmoins, Avec Lola peut-être... »
Il se crispe un peu, comme à chaque fois que Kagami lui parle de sa petite amie.
« Mes parents, ça va. Mais je sais pas quand j'aurai le temps de rentrer à Tokyo. Pas que j'ai pas envie, mais... Ouais, c'est chaud de trouver le temps. Cela dit, Satsu pense venir aux prochaines vacances scolaires. »
Il soupire et ajoute :
« Mais ça, j'en ai pas encore parlé à Lola. Ça va être chiant. Elles se sont pas rencontrées et Lola a tendance à penser que Satsu est la petite amie que j'ai laissée au pays, tu vois... »
Il secoue la tête comme pour marquer sa désapprobation.
KAGAMI
Il rigole un peu.
« En même temps, Momoi est une fille charmante, très jolie, la tête bien faite et... Fan de basket. Faut avouer que le doute est facile... D'un autre côté... J'suis sûre qu'elles pourraient s'entendre super bien vu qu'elles arrivent toutes les deux à te supporter. »
Il rigole, mais au fond penser "aux femmes" d'Aomine, ça lui fait un peu mal au cœur. Depuis, le début du repas, il essaie de ne pas trop le regarder, enfin pas avec trop d'insistance en tout cas et il n'est absolument pas sûr d'y arriver. Il se surprend lui-même à le détailler, son regard bleu perçant qui semble voir au fond de vous, la couleur de sa peau caramel, son sourire même s'il est parfois un peu triste et son visage aux traits nets et bien proportionnés. Depuis quand Aomine est aussi beau gosse ? C'est comme s'il le réalisait juste là. Et c'est sans compter son corps d'athlète finement musclé et puissant, ou encore son odeur dont le souvenir de la veille lui donne encore des coups de chaud.
Les maki... Les maki aussi sont jolis avec leur robe verte de nori.
« Si ça peut t'aider, j'ai une chambre d'ami. Je pourrai l'héberger. »
AOMINE
Les mots de Kagami sur Satsu lui serrent un peu le cœur. Charmante, jolie, tête bien faite, fan de basket, oui, Satsu est tout cela. Et on peut en dire autant de Lola. Il ne mérite clairement pas des filles comme elles.
« C'est gentil, je note la proposition. J'aimerais bien faire venir Tetsu aussi, mais il a l'air pas mal occupé cette année... »
Il se reprend un maki. Ils sont vraiment délicieux. Il n'a pas envie de mettre fin à cette conversation, pas envie de parler d'autre chose, de sujets qui fâchent. Comme le soir de leur arrivée à L.A., la discussion est facile, naturelle, et ça a apaisé sa nervosité initiale. C'est comme si la présence de Kagami suffisait à le calmer. Il ne sait pas trop pourquoi c'est le cas, d'ailleurs, compte tenu du fait que...
Non. On avait dit qu'on ne pensait plus à ça. Il ne s'est rien passé. Penser à lui pendant le sexe, c'était...
C'était quoi ? Un accident ? T'es vraiment con quand tu t'y mets.
Une nouvelle fois, il repousse ses pensées et se ressert encore un maki en buvant une gorgée de vin.
KAGAMI
« Oh... Ouais ça fait un bout de temps que j'ai pas eu de nouvelles de lui en dehors des quelques messages qu'on n'a pu s'envoyer par-ci par-là... »
Les plats se vident tranquillement, la bouteille de vin aussi. C'est agréable de discuter avec Aomine. C'est agréable d'être ici avec lui. Ils discutent un peu des nouvelles du Pays, ils abordent même un peu les sujets politiques. Ils évitent soigneusement de parler de Lola et de Levi. Il en a conscience et ça accroît son sentiment de culpabilité et d'amertume. Il recommence à mentir. Il s'était promis d'être honnête avec son ami, mais comment lui avouer qu'il a un crush sur lui ? Alors il se force à parler d'elle au moins.
« Tes parents sont au courant pour Lola ? Que... Vous avez emménagé ensemble ? »
AOMINE
Il s'assombrit en entendant cette question.
« Ouais, répond-t-il avec réticence. Ils sont ravis. 'On pensait pas que tu te poserais, c'est bien que tu aies une femme dans ta vie', et j'en passe. Limite ils me demandent pas pour quand c'est le mariage et les gosses. »
Il secoue la tête, dégoûté. Même si c'est avant tout par lui-même qu'il l'est.
KAGAMI
Il hoche la tête doucement.
« J'imagine que les parents sont tous pareils... J'ai eu le droit à mon quart d'heure 'c'est quand que tu te trouves quelqu'un, tu m'as jamais parlé de copines...', rigole jaune, j'ai même eu le droit à la question 'est-ce que t'es puceau'... Je te jure... »
Il secoue la tête pour montrer son exaspération.
Aomine éclate de rire à sa dernière remarque.
« J'peux pas lui en vouloir de t'avoir demandé ça, moi aussi j'me suis posé la question ! » Il se marre encore et reprend : « C'est parce que à l'époque... T'avais pas l'air vraiment intéressé par l'amour ou le sexe...
— Quoi?! Non... Mais OK c'était pas ma priorité... Enfin de là à me croire puceau... Tain qu'est-ce qui faut pas entendre sérieux ! Bon OK... Techniquement j'suis puceau avec les meufs... Mais si j'avais voulu... »
Il hausse les épaules sans terminer et reprend un maki.
AOMINE
Il sourit et finit son verre de vin.
« Ouais. Un vrai tombeur, hein... »
Il jette un coup d'œil à Kagami, toujours un peu rouge de s'être fait prendre pour un puceau, il trouve ça mignon, et... Il recommence à penser à ce qu'il doit lui dire. Il est de nouveau nerveux.
« Écoute, il y a... Il y a quelque chose dont il faut que je te parle. C'est à propos de Levi... »
Il déglutit et regarde son ami. Merde, il n'a pas du tout envie de lui parler de ça... Mais il ne peut pas garder le silence non plus, de cela il est certain.
KAGAMI
Il fronce les sourcils. La tête que fait Aomine ne lui plaît pas beaucoup. Il reste quelques longues secondes silencieux, essayant de deviner ce qu'il a à dire, pressentant que ça n'allait pas lui plaire et qu'il n'a pas envie d'entendre ça venant d'Aomine. Non en fait il n'a juste pas envie de parler de Levi avec Aomine. Sa voix est un peu dure quand il répond.
« Je t'écoute. »
AOMINE
Il se racle la gorge. Ça ne va pas être facile.
« Hier, quand il est parti... Lola l'a entendu dire qu'il avait rendez-vous. Avec une fille. Sa voisine, apparemment. Et à la façon dont Kelly a demandé 'encore une nouvelle nana ?!', ça... eh bah... Ça avait pas l'air d'être innocent, quoi. »
Il n'ose pas regarder Kagami.
« Désolé. C'est peut-être rien. Ou peut-être que tu savais déjà. Mais je pouvais pas... faire comme si j'avais rien entendu. »
KAGAMI
Il regarde Aomine sous le choc. Il s'était attendu à plein de trucs... Non en fait à pas grand chose. Juste peut être que Aomine lui dise que Levi est pas un mec bien. Il a eu l'impression qu'il ne le portait pas dans son cœur. Mais ça. Il a envie de nier. Levi ne ferait pas ça. Levi est avec lui.
Il a envie de dire à Aomine qu'il se trompe, que ce n'est pas possible.
La voisine, celle qu'il est allé dépanner le matin ?
Aomine a l'air sincère et vraiment embêté pour lui. Il se dit qu'il aurait mieux fait de rien dire. Qu'il n'avait pas envie de savoir.
Tous ses doutes qu'il avait mis tant de soin à repousser, reviennent en force.
Il n'avait pas envie de savoir. Il avait toujours fait en sorte de ne pas savoir.
Sa mâchoire est contractée. Il est en colère. Il a envie de crier sur quelqu'un mais il n'y a que Aomine en face de lui et... Et il n'a pas envie de s'en prendre à lui... Pourtant...
« Peut-être que je savais ?! J'ai l'air désespéré au point d'accepter ce genre de truc ?! »
Il sait qu'il n'a pas le droit de s'en prendre à lui. Il sait que ce qu'il dit est idiot. Oui, il y a des couples libres.
« Fuck ! Si tu pouvais faire comme si t'avais rien entendu ! T'as bien réussi en bouffant les makis ! Pourquoi tu pouvais juste pas garder ça pour toi hein ?! Comme tout le reste que tu dis pas ? »
Des larmes glissent sur ses joues. Il a mal. Il a honte. Il ne savait pas, mais il avait des doutes. Ce secret faisait parti de ceux qu'il gardait bien caché au fond de lui, parce qu'il aime trop Levi pour l'affronter.
Il a honte d'être un homme trompé. Mais plus encore que ce soit Aomine qui l'ait découvert, que Aomine sache à quel point il est suffisamment faible et lâche pour permettre qu'une telle chose se produise sous son nez.
La honte, la culpabilité, la tristesse, la colère. Tout s'emmêle dans sa tête. Il remonte ses genoux devant lui et cache son visage entre ses bras. Il est secoué de sanglots.
Il est injuste avec Aomine. Il sait qu'il a agi dans son intérêt. Il aurait probablement fait la même chose à sa place. Cependant non seulement il vient avec ces quelques mots de détruire son couple, mais en plus il a détruit le dernier rempart qui lui permettait de nier ses sentiments naissants pour lui. Et il ne veut pas tomber amoureux d'Aomine. Aomine c'est impossible et les amours impossibles il a donné.
« Laisse-moi... »
Il est pétri de honte et de culpabilité. Parce qu'une part de lui est soulagée de se libérer de cette relation malsaine dont il n'aurait probablement pas réussi à se dépêtrer seul. Parce qu'il aime Levi et ça fait mal. Mais ça faisait déjà plus de mal que de bien depuis un moment.
L'autre part à peur de ce qu'il commence à éprouver pour Aomine, de ce qui est en train de grandir au fond de ses tripes pour son ami.
Il est injuste avec Aomine. Parce qu'il n'est pas prêt à assumer tout ça, ni cette envie furieuse de pleurer dans ses bras.
AOMINE
Il déglutit. Il s'attendait à se faire engueuler, alors il n'est pas surpris. Mais ça fait mal quand même. Certains mots plus que d'autres.
Certains mots très bien choisis.
Il a envie de chialer, mais il refoule.
Et puis surtout, il ne supporte pas de voir Kagami souffrir comme ça. Il a peut-être raison. Peut-être qu'il n'aurait rien dû dire. Peut-être que ça arrangeait Kagami de ne rien savoir, ou de fermer les yeux. Et puis, qui il est pour débarquer dans les relations des autres quand la sienne est un mensonge ?
« Je suis désolé. »
C'est tout ce qu'il trouve à dire, et d'une voix si peu audible qu'il n'est pas sûr que Kagami ait entendu. Il n'a pas osé le regarder une seule fois dans les yeux, et il ne le fait pas non plus tandis qu'il se lève, va enfiler ses chaussures, et quitte l'appartement.
Une fois dehors, il ne fait même pas attention à la direction qu'il prend. Il se met juste à déambuler en maudissant ce foutu soleil resplendissant. Il a l'habitude d'avoir, pour employer un doux euphémisme, des sentiments négatifs envers lui-même. Mais cette fois-ci, c'est du costaud.
Son portable sonne, il le laisse faire. Il ne regarde même pas qui l'appelle. Il se fait klaxonner furieusement en traversant la rue par un conducteur qui vient de manquer de le renverser. Il insulte en japonais un passant qui lui rentre dedans, même si c'est probablement de sa faute. Il avance. Il ne sait pas où il va. Il se contente de marcher.
Au bout d'un moment, il repère une enseigne familière. Un bar. Il entre. Se pose au comptoir. Demande un double whisky. Il l'avale et en demande un autre, et puis décide que ça va être chiant.
« Donnez-moi la bouteille.
— Dure journée ? » demande le barman en essuyant ses verres, avec le ton mi-compatissant mi-professionnel du proprio habitué à servir des gens au bout de leur vie.
Ce ton-là ne lui déplaît pas. Au moins, c'est pas un barman qui va lui expliquer que l'alcool ne résout pas tous les problèmes. Il prend la bouteille qu'on lui tend, avale un autre verre et répond :
« Ouais, j'suis sûr que vous serez ravi de m'entendre me plaindre de ma petite vie une fois que je serai bourré. J'vous préviens c'est super pathétique, mais vous devez avoir l'habitude.
— Ah, oui. Les vies pathétiques de mes clients, c'est mon gagne-pain. »
Ça fait rire Aomine. Il regarde autour de lui. Il est tout seul dans le bar. En même temps, il est... à peine 14h.
« Vous voulez pas mettre de la zik, là ? On s'entend trop penser, dans votre bar. »
Le barman sourit et s'exécute. Tiens, c'est du Tori Amos. Ironique, Lola aime bien... Mais lui aussi, alors il ne demande pas de changer. Et puis il faut dire que les paroles entrent pas mal en résonance avec son état d'esprit.
I've been looking for a savior in these dirty streets
Looking for a savior beneath these dirty sheets
I've been raising up my hands
Drive another nail in
Got enough guilt to start my own religion
Why do we
Crucify ourselves
Every day
I crucify myself
Nothing I do is good enough for you
Crucify myself
Every day
I crucify myself
My heart is sick of being in chains
Il a un sourire triste. Il est en plein cliché de film hollywoodien, à se soûler au bar, au whisky, avec un cœur en miettes, de la musique triste et un barman compréhensif. Normalement, si tout suit bien le cliché, le barman va bientôt partager avec lui sa sagesse millénaire de tenancier de débit de boisson, et peut-être qu'il aura une épiphanie.
Mais il n'y a pas de révélation au programme pour aujourd'hui. Le barman continue simplement à astiquer ses verres en chantonnant, et lui à boire sa bouteille. Au bout d'un moment, il est obligé d'essuyer des larmes que le barman fait gentiment semblant de ne pas voir. Il n'a plus aucune idée de l'heure qu'il est. D'ailleurs, il ne sait même pas où il est. Mais ce sont des problèmes qu'il règlera en temps voulu. Pour l'instant, il picole. Personne pour le juger, le rappeler à l'ordre, et de toute façon aujourd'hui il n'a vraiment rien de mieux à faire. Et puis, il mérite d'être là où il est, à se saouler en plein après-midi. Pas de réconfort pour lui.
Il commence à avoir un peu la tête qui tourne, et se lève pour partir en sortant maladroitement son portefeuille.
« Je vous appelle un taxi ? demande le barman.
— Pas la peine. Je sais pas où je vais de toute façon. » Il sourit d'un sourire ivre et triste. « Au sens propre et figuré, vous voyez... M'enfin. Voilà. Gardez la monnaie. »
Quand il ressort, la chaleur et la lumière ont baissé. Ce qui signifie probablement qu'il a passé l'après-midi dans ce bar. Oh, well... Il se remet à marcher sans but. Il devrait rentrer, il le sait bien. Mais il n'a le courage de rien, là. Alors il continue juste à marcher.
KAGAMI
Il reste un long moment prostré à pleurer quand Aomine s'en va et le laisse seul. Il a l'impression qu'il l'a abandonné. Bien-sûr c'est lui qui lui a demandé de partir mais il n'est pas en état d'être cohérent. Quand il se calme un peu, il prend la bouteille de vin blanc et sort sur la terrasse pour la descendre tranquillement après avoir pris soin d'éteindre son téléphone. Il ne veut pas avoir à faire à Levi, ni avec… Les autres. Et il ne s'attend pas à avoir des nouvelles d'Aomine de sitôt.
Ironiquement, Aomine est le seul à savoir où il vit. Il n'a même pas encore informé le groupe de surfeur de sa nouvelle adresse. Levi… Levi ne s'en est même pas préoccupé à vrai dire.
Il a juste été trop con. Il se berce d'illusions depuis des mois. Il se dégoûte d'avoir été aussi lâche. Il s'en veut d'avoir déchargé sa colère sur Aomine. Et il en veut à Levi…
Il pleure encore. Sa poitrine semble se comprimer au point de l'empêcher de respirer correctement. Il est frigorifié malgré le soleil éclatant qui arrose sa terrasse de ses doux rayons. Il se sent vide et perdu.
La bouteille de blanc est finie bien trop vite. La cuisine est loin… Mais il se lève pour aller chercher des bières et il revient sur la terrasse avec le pack et le décapsuleur. Boire pour oublier… Il n'est pas sûr d'avoir assez d'alcool dans cette appartement vide, impersonnel où il ne se sent même pas chez lui.
Pourquoi il a quitté les Knicks déjà ? Alors qu'il faisait une super saison ? Pour se rapprocher de son père ? Parce que cette ville c'est chez lui ? Fuck non… Ouais c'est un plus… Mais il est revenu ici pour Levi, dans l'espoir de construire quelque chose de vrai avec lui, parce qu'il a ce sentiment depuis des mois qu'ils ne sont pas vraiment un couple. Ouais, il est venu dans l'espoir de construire quelque chose avec lui.
LEVI
Il est dix-neuf heures, le téléphone de Taiga ne sonne pas et il n'est toujours pas là. Taiga n'est JAMAIS en retard. Il a appelé Cynthia, elle n'a pas eu de nouvelles. Il commence à s'énerver.
À vingt-et-une heures, il se commande un truc à manger et s'installe devant la télé. Le téléphone de Taiga ne répond toujours pas. Il envisage d'aller chez lui et réalise qu'il n'a pas l'adresse. Il demande sur le groupe whatsapp mais personne n'a l'information. Merde.
À vingt-deux heures il est en bas de l'immeuble de Lola et Daiki. La colère passée il est sincèrement inquiet. Taiga ne disparaît pas comme ça. Il sonne.
AOMINE
Il marche assez longtemps pour dessoûler un peu. Il se sent épuisé, et complètement perdu. Il se traîne jusqu'au coin d'une rue, déchiffre son nom sur la plaque et appelle un taxi. Sur le chemin il envoie un texto à Lola, elle doit commencer à s'inquiéter. Il ne sait pas ce qu'il va lui dire en rentrant. Il a juste envie d'aller se coucher. Après son texto à Lola, il regarde longuement son portable, hésitant à envoyer un message à Kagami. Mais pour quoi faire ? Juste lui demander s'il va bien ? La réponse à cette question semble plutôt évidente, non ? Alors non. Il ferait mieux de le laisser tranquille. Peut-être qu'il est en train de s'expliquer avec Levi. Et de toute façon il s'est déjà beaucoup trop mêlé de tout ça. Il range son portable en soupirant et se masse les tempes alors qu'un mal de crâne naissant commence à galoper dans sa tête.
Il s'aperçoit seulement en arrivant qu'il a oublié son sac de sport chez Kagami. Tant pis. Il a toujours ses clés... Il rentre chez lui et trouve Lola en train de jouer sur une console toute neuve qu'elle a dû acheter aujourd'hui. Elle lui lance un regard qu'il ne sait pas trop interpréter, et puis elle demande :
« Ça va ? T'as l'air... »
Il secoue la tête.
« J'ai dit à Kagami ce que tu m'as dit hier à propos de Levi... Il l'a plutôt mal pris... Évidemment... »
Lola fronce les sourcils.
« Vous vous êtes engueulés ?
— Pas vraiment. Enfin... lui, il m'a engueulé, m'enfin... peu importe. »
Lola l'examine quelques instants en silence, puis elle pose sa manette, se lève, et pose ses deux mains sur ses épaules comme pour l'empêcher de se dérober.
« Dai, qu'est-ce qui se passe au juste ? T'as vu l'heure qu'il est ? Et puis t'as encore été picoler... Qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi tu me dis rien ? Si t'as des problèmes... Si y a quelque chose qui va pas... Y compris... quelque chose entre nous... Tu peux m'en parler, tu sais ? Je suis pas en porcelaine. Tu peux me parler. Ok ? »
Elle parle de plus en plus vite, et pose une main sur son menton pour diriger vers elle son regard qu'il s'entête à laisser dériver ailleurs.
« Dai. Parle-moi. Rien qu'une fois ? »
Il déglutit, consent enfin à la regarder. Il y a de l'inquiétude dans ses yeux noisette. De la tristesse, aussi. Rien qui ne soulage son immense sentiment de culpabilité. Même s'il avait envie de répondre... Il ne saurait même pas par où commencer. Il est allé trop loin... Les mots qu'il a tus pendant si longtemps ne peuvent plus sortir. C'est comme s'il avait complètement oublié comment les prononcer. Il a la gorge sèche, le cœur qui cogne contre ses côtes, le mal de tête qui pulse dans son crâne... et les mots se dérobent. Il ouvre et referme la bouche comme un poisson hors de l'eau sans parvenir à articuler un seul son.
La sonnerie de l'interphone le sauve.
Lola soupire. Elle semble hésiter un instant, puis elle le lâche pour se diriger vers la porte et décrocher le téléphone.
« Oui ? ...Levi ?! Oh... euh... Attends, je t'ouvre. »
Aomine se masse les tempes et se laisse tomber dans le canapé.
Vraiment, il ne manquait plus que ça…
KAGAMI
Il a terminé toutes les bières. Il fait nuit. Il frissonne. Il commence à faire frais, à moins que ce soit tout l'alcool ingurgité. Il est allongé les bras en croix à regarder les étoiles et l'infini au-dessus de lui. Et il se dit que ce serait bien de s'y noyer. Ça résoudrait sûrement tous ses problèmes. Peut-être qu'il devrait aller sur la plage, pour se noyer c'est mieux.
Non. Non il a pas vraiment envie de ça. Mais des fois, il est fatigué. Fatigué de mentir. Fatigué d'aimer des connards ou des mecs à meuf.
Et puis, il se met à rire comme ça, ça sort de nulle part c'est nerveux. Mais quelque part ça lui fait du bien un peu. Et il parle tout seul entre ses rires.
« Je suis pitoyable Aomine. J't'ai viré de chez moi… Mais j'voudrais qu'tu sois là… J'crois qu'j'suis vraiment en train de tomber amoureux de toi… Putain… J'sais qu'j'ai pas le droit… J'espère que tu m'pardonneras… J'me suis promis… J't'ai promis de pas t'mentir… Alors j'serai bien obligé d't'le dire si… si ça se confirme… Fuck… Fuck… Fuck… Pourquoi il a fait ça ? J'suis pas assez bien ?! J'croyais… J'croyais qu'il m'aimait… Un peu… J'l'aime putain… Vraiment. Vraiment à en avoir mal… »
LEVI
Il frappe à la porte. Peut-être que Taiga est là. Lola lui a ouvert sans poser de questions c'est bizarre non ? Ils doivent savoir quelque chose en tout cas, et ça lui plaît pas. Tout se passait bien avant qu'ils débarquent ces deux-là.
C'est Lola qui lui ouvre la porte.
« Salut… Désolé de venir si tard. Taiga est là ? »
LOLA
Elle le regarde en hésitant. Il y a plein de choses qui lui échappent dans cette histoire. Elle ne sait pas ce qu'il faut dire ou ne pas dire. Levi n'est même pas au courant que Daiki et elle savent qu'il sort avec Taiga. Mais en tout cas, elle peut toujours répondre à sa question. Et lui en poser une autre.
« Non... Il est pas là. Pourquoi ?
— On devait se voir ce soir... Il n'est pas venu. Tai... N'est jamais en retard. Et son téléphone semble être éteint. »
Elle jette un coup d'œil à Daiki.
« Euh... Dai, t'as des nouvelles, toi ? »
AOMINE
"Dai", il est en train de bouillir. Il sait bien qu'il ne devrait pas intervenir. Il s'était bien dit qu'il s'en était trop mêlé, non ? Mais simplement entendre la voix de ce mec, ça l'énerve. Il se lève, passe devant Lola et lance un regard hostile à Levi.
« Il a pas envie de te parler parce qu'il sait que tu le trompes. Fallait mieux couvrir tes traces, mec. »
LEVI
Il regarde Daiki, puis Lola. Puis de nouveau Daiki. Il bout de rage définitivement. Ce mec depuis le début il le sent pas. Il serre les poings, il a juste envie de lui en coller une et de lui dire de plus s'approcher de Taiga. Taiga n'a pas besoin d'un deuxième mec.
« J'l'ai pas trompé parce qu'il y a rien à tromper ! Tu lui as raconté quoi putain ?! »
Aomine croise les bras sur sa poitrine et lui adresse un regard glacial.
« Et coucher avec des gonzesses sans son consentement, t'appelles ça comment, toi ?
— Ça n'a rien à voir ! Les nanas et Taiga..., il ricane, Lui aussi il se trouvera une meuf un jour. Y'a pas de problème. Ça nous empêchera pas de passer du bon temps ensemble. Les meufs, c'est pour la façade. Y'a pas d'avenir avec un autre mec c'est tout ! J'ai pas couché avec d'autres mecs putain ! Il est le seul ! »
AOMINE
Au début, il ne comprend pas. Il ne comprend pas un seul mot de ce que lui dit Levi. Et puis, il y a comme un flash aveuglant dans sa tête. Sa réaction est instantanée et incontrôlable. Son esprit est parfaitement vide quand son poing s'abat sur le visage de Levi.
Le coup envoie bouler le surfeur de l'autre côté du couloir. Il se débarrasse de Lola qui lui agrippe le bras et crie des choses qu'il n'entend pas. Il prend Levi par le col et le frappe une nouvelle fois. Puis, il s'entend parler comme s'il était un simple témoin de la scène, et pas un protagoniste :
« T'avise pas de revenir ici, prononce-t-il d'une voix sourde, chargée de menace. Et si j'apprends que t'as fait chier Taiga d'une manière ou d'une autre, y'a pas que ta jolie petite gueule qui va morfler. Pigé ? »
Et sans attendre la réponse, il jette le surfeur de côté comme s'il se débarrassait d'un truc encombrant. Il pousse un peu Lola qui encombre le passage, il referme la porte derrière eux et s'appuie dessus, essoufflé comme s'il sortait d'un match. Il serre et desserre les poings sans s'en rendre compte. Il s'est ouvert une jointure. Il a vaguement conscience de la sensation du sang chaud qui coule sur sa peau. Sa tête bourdonne. Il s'aperçoit qu'il a pratiquement oublié de respirer. Il inspire, expire. Serre et desserre le poing.
LEVI
Il ne comprend pas tout ce qui vient de se passer. Il lui faut quelques minutes pour reprendre ses esprits.
Espèce de connard ! De quoi tu viens te mêler ! On était très bien comme ça !
Son visage lui fait mal mais il se redresse et abat son poing violemment sur la porte de l'appartement d'Aomine. Et il se met à hurler dans le couloir sans considération aucune pour les voisins.
« Connard ! Tu vaux pas mieux qu'moi ! J'sais qu't'en as après le cul de Taiga ! Et quoi ? Tu vas plaquer ta jolie Lola pour lui ? J'voudrais bien voir ça ! »
Il ricane et fait demi-tour après un dernier cri de rage et se barre en dévalant les escaliers en courant. Il a besoin d'air, besoin de respirer, besoin de la mer.
AOMINE
Tout à coup, il se sent extrêmement calme. Mais c'est un calme pas très naturel. C'est plutôt comme si on avait débranché son système nerveux. Les derniers mots de Levi résonnent à la périphérie de sa conscience, très lointains. La voix de Lola, elle, est plus proche. Il s'aperçoit qu'il a fermé les yeux, et il ne les rouvre pas, mais il n'a pas besoin de la voir pour connaître son expression.
« Est-ce que c'est vrai, Dai ? »
Sa voix tremble, mais elle semble déterminée à obtenir une réponse, et elle insiste devant son silence buté :
« Est-ce qu'il y a quelque chose entre toi et Taiga ? »
Comme il ne répond toujours pas, elle pose une autre question.
« Est-ce que tu as des sentiments pour lui ? »
Il reste un moment sans réagir, puis, il hoche la tête. Un silence succède à sa réponse muette, puis Lola reprend, plus faiblement :
« Est-ce que... tu en as pour moi ? »
Il rouvre les yeux pour la regarder.
« Oui. »
Elle fait un effort pour se contrôler, il voit qu'elle souffre, mais lui, il ne ressent plus rien. Plus rien du tout.
« Est-ce que... Tu es amoureux de moi ? »
Il secoue la tête doucement.
Elle rejoint le canapé et s'y accroche comme si elle était sur le point de perdre l'équilibre avant de s'y asseoir lourdement. Elle trouve la force de poser une dernière question.
« Est-ce que tu es gay ? »
Il ne répond pas. Mais elle, elle hoche la tête, semblant considérer son silence comme une réponse suffisante.
« Ok... Je... je comprends mieux, maintenant… En fait... ça explique plein de choses… »
Elle a l'air perdu pendant un moment, avant d'ajouter dans un souffle :
« Alors... qu'est-ce qu'on fait ? »
Il voit bien qu'elle retient ses larmes, mais il ne peut pas la rassurer, démentir, atténuer sa peine, sa colère, peut-être, ni même lui fournir une réponse à cette question. Son cœur et son esprit sont vides.
« Je ne sais pas », chuchote-t-il.
Alors, seulement, elle se met à pleurer.
