Mot de l'auteur : Bonnjouurrr tout le monde ! Je suis heureuse de vous revoir pour notre rendez-vous du mercredi ! Comme je vous l'avais promis, après deux petits interludes, on retourne voir Harry… Et c'est un long chapitre ! Profitez-en bien !
Rappel :
Gérant: Ivan Desclare (dragon bronze Norlith)
Intendante des Cavernes Inférieures : Gwendolyn Steenwich
Chef des Candidats : Adrian Montemps (dragon brun Goleth)
Maitresse des Aspirants : Amber Stevens (dragon vert Legith) –compagne de Rebecca -
Aspirants : Edmund Deiricht (dragon bronze Arenth)
Damian (dragon brun Emlith)
Valentine Lassauge (dragon vert Dinth - lézard de feu or Delilah)
Ronan Watteau (dragon bronze Kyreth)
Harry Potter (reine dragon or Talath- lézard de feu brun Moineau)
Chevaliers: Charlie Weasley (dragon bronze Derianth- lézard de feu vert Jade)
Rebecca (dragon bleu Farlith) –compagne de Amber Stevens-
Chapitre 13 : Faire Un
-Sérieusement, c'est un dragon ou une vache avec des ailes ? Fais-le monter un peu plus haut blondinet !
Damian fit la grimace et poussa un peu plus Emlith qui n'avait pas particulièrement envie d'entamer un ballet aérien. Le dragon brun stationnait à une hauteur paresseuse, balayant l'air de ses grandes ailes de façon régulière.
/A quoi bon ? Je vole là, plus haut ou plus bas n'a aucune importance !/
-Stevens vient de te traiter de vache, là ! Tu ne vas pas réagir ?
/La maitresse des Aspirants vous traite tout le temps de diverses choses et je ne vous ais pas encore vu changer quoi que ce soit à votre façon de faire./ Répliqua Emlith d'un ton catégorique, s'attirant une exclamation de désespoir de son compagnon.
Le reptile jeta alors un regard las à Dinth, la dragonette verte, qui voltigeait dans tous les sens comme une abeille folle, faisant à l'occasion de brusques pointes de vitesses sans se soucier de l'exercice.
Valentine était tout aussi incapable de s'imposer à cet instant, mais Stevens avait rapidement cessé de lui hurler dessus, invoquant « le quart d'heure de folie des vertes ». Damian avait crié à l'injustice, mais il pouvait difficilement faire passer le vol nonchalant de Emlith comme un quelconque moment de folie.
Quant aux deux bronzes, à la hauteur requise, ils suivaient les exercices avec diligence, étendant bien les ailes, gardant un rythme le plus régulier possible grâce aux indications de leurs chevaliers. Ces derniers, à terre, leur donnaient la cadence avec un métronome.
Kyreth était de plus soumis à un autre exercice : il devait compenser un léger décalage à droite qui découlait de son œil aveugle.
Tout se passait très bien pour eux quand, soudain, une ombre noir s'abattit sur leurs dos, et sans autre avertissement que le grondement poussé au moment même, ils durent s'écarter en vitesse, agressés par la dragonne dorée qui plongeait sur eux.
/Hors de mon chemin !/ Ordonna autoritairement Talath en venant se poser pesamment à terre, faisant ployer l'herbe tout autour d'elle.
Elle replia son immense envergure d'ailes et avec un reniflement agacé, termina de s'assurer que son espace aérien personnel était dégagé.
Il n'y avait plus rien de la princesse dragon taille poney shetland qu'Harry pouvait faire dormir dans son lit, elle dépassait dès à présent la plupart des créatures existantes et côtoyait les hauteurs des dragons verts adultes de la réserve.
Ayant une fois de plus rappelé à ses frères et sœur qui était le chef, elle se dirigea, le bout de la queue frétillant, vers Harry et allongea son cou pour qu'il vienne la gratter autour de l'œil.
Harry lui-même avait bien grandi durant l'été.
Et les plus grands changements étaient plus subtils que ce que l'on pouvait voir au premier coup d'œil.
Cela s'entendait, par contre, sa voix se cassant de façon inopinée, mais il s'y faisait, conscient qu'il s'agissait d'un passage obligatoire vers sa future voix d'adulte, plus grave. Quelque chose venant avec la fin de son corps d'enfant imberbe.
En plus, pour un adolescent, il poussait de façon fort harmonieuse, s'épargnant la silhouette dégingandée de jambes ou bras trop longs par rapport au reste de son corps. Non, il avait enfin la silhouette sportive de tous les garçons de la Réserve, faite de muscles élégants sous une peau halée marquée ici et là de cicatrices blanches dues soit à des blessures d'entrainements, soit à quelques accolades un peu trop enthousiastes de Talath. Mais contrairement à celle qu'il avait sur le front, il les regardait avec contentement, comme les preuves de son dur labeur.
Fier de lui et de ce qu'il devenait, il commençait à être sensible aux regards que posaient les femmes des cavernes inferieures sur lui.
-Tu as été parfaite, complimenta-t-il sa moitié.
/NOUS l'avons été/ Le reprit Talath en roucoulant de bonheur.
-J'ai hâte de pouvoir voler avec toi.
/Bientôt. Très bientôt. Moi aussi je suis impatiente de partager cela avec vous. Je n'arrive pas à croire que j'ai pu vivre autant de temps sans voler./
Harry s'amusa de son effarement et la laissa repartir, en vol libre cette fois-ci, admirant sa silhouette lorsqu'elle se jeta du perchoir de sa caverne pour récupérer son morceau de ciel. Grace à leur lien, il partageait lui aussi un peu de son expérience, goutant à son euphorie de sentir le vent épouser son corps, d'attraper un courant aérien, puis de s'en laisser tomber jusqu'à un autre, plus chaud ou plus froid. De n'avoir aucune limite de chaque côté, offrant une sensation de liberté presque infinie.
Mais il savait que tout ça n'était qu'un aperçu. Voler avec Talath serait grandiose.
/La meilleure chose./ Approuva Talath en s'essayant à un looping.
Harry fut néanmoins obligé de se détacher de cette vision pour aller assister à sa propre partie de l'entrainement : la zone d'entrainement n° 6, le simulateur de vol.
C'était encore des représentations de dragons en bois, mais celles-ci s'animaient avec un sort pour reproduire les mouvements que seraient amenés à expérimenter les chevaliers en vol. Elles s'élevaient donc, s'inclinaient parfois à 90°, effectuaient des tonneaux ou des piqués.
Honnêtement, Harry s'amusait comme un petit fou. Il avait une assiette et un équilibre impeccable grâce au Quidditch et il fallait croire qu'il adorait être malmené dans tous les sens. Les autres aspirants, par contre… Ce cours était la bête noire de Valentine qui passait pratiquement tout son temps à tomber ou être balloté par son harnais. Pour sa défense, qui disait dragon plus petit, disait moins de stabilité. Edmund et Ronan essayaient quant à eux de faire bonne figure, mais tous deux finissaient aussi un certain nombre de fois pendu en l'air.
Il ne s'agissait pas que de rester assis sur sa selle comme le lui avait dit un jour Montemps : Stevens les faisaient se lever debout, tourner sur eux même, s'installer à l'envers, se rendre à la base de la queue ou même sous le ventre du dragon. Pendant ce temps-là, la sculpture bougeait, et il fallait être capable de prévoir un minimum les déplacements pour ne pas être déstabilisé.
Parfois, ils mettaient en scène des actions possibles durant un simple vol ou en combat : aller soigner une blessure sur la cuisse du dragon, réparer une lanière déchirée, transmettre des signaux avec des drapeaux, se ravitailler en vol, et pour Harry qui était le plus avancé, Stevens jouait parfois un abordage où il s'agissait de se battre à même le dos d'un dragon.
Le brun était heureux d'avoir enfin un entrainement concret de ce qu'ils auraient à affronter. Il avait besoin de cette adrénaline pour pouvoir supporter les ennuyeux courts de gestion de la Réserve que lui infligeait Desclare.
-Je suis jaloux, fit Damian alors qu'ayant terminé l'entrainement du matin, ils se dirigeaient vers le Hall des Repas. C'est comme si tu étais né sur le dos d'un dragon ! C'est écœurant ta façon de te tenir tranquillement debout comme si de rien n'était !
-Hey, j'ai été attrapeur pendant deux ans ! Se justifia Harry alors qu'ils s'asseyaient à leurs places habituelles. Mon père était aussi bon en quidditch, ça doit être dans mes gènes !
-Tu veux pas m'en passer un peu ? Demanda Valentine d'un ton maussade en massant ses futurs bleues sur les bras.
Harry secoua la tête avec dépit et se tourna légèrement vers Edmund qui, à plusieurs tables de là, s'installait avec Ronan auprès d'un groupe de chevaliers bronze.
Autrefois, Edmund était celui avec qui il pouvait parler Quidditch.
-Regardez-moi ce poseur, maugréa Damian qui avait suivi son regard. On dirait qu'on est plus assez bien pour Monsieur le bronze.
Harry détourna rapidement la tête car plusieurs de ces chevaliers avaient remarqué son intérêt et lui avaient adressés ce qu'il avait fini par appeler « leurs sourires bizarres ». Il avait l'impression de pouvoir les voir se jeter des regards de connivences en se donnant des coups de coudes amicaux. Même les amis de Charlie faisaient ça alors qu'Harry trouvait ça juste gênant et légèrement irritant : il avait l'impression qu'ils se moquaient de lui.
A la place il sourit à la jeune fille venu leur déposer des assiettes pleines de nourritures et fut heureux de la voir lui répondre en retour, même si elle sembla tout autant subjuguée par Damian qui avait beaucoup de charme à défaut d'un visage régulier comme pouvait l'être par exemple celui de Ronan.
Beau mais peu rassurant. Un étrange contraste.
Valentine roula les yeux devant le manège de ses deux amis et attrapa d'autorité son assiette en leur demandant acerbement s'ils voulaient deux miroirs pour pouvoir admirer leurs gueules d'anges. Harry rougit, n'aimant pas l'idée de paraitre narcissique, mais Damian réagit en rigolant et en chassant les paroles de la jeune fille d'un geste de la main.
-Les gars draguent, c'est dans notre nature, affirma t'il.
-Cela doit dénoter d'un besoin maladif de vous rassurer sur vos capacités de reproducteurs, répliqua t'elle. Mais puisque tu sembles si inquiet à ce sujet Damian, laisse-moi te dire que ton pénis me semble être d'une taille tout à fait honorable vue la tente qui tire ton drap tous les matins !
Harry s'étouffa avec son verre d'eau tandis que le sourire de Damian s'agrandissait, bizarrement ravi :
- C'est vrai ? Tant mieux alors !
-Damian ! Val' ! Gémit Harry en s'essuyant la bouche. Je ne voulais PAS savoir ça !
-Ho allez, Harry, c'est de la pudibonderie sorcière ! Il faut que tu t'en détache au risque de finir avec un balai dans le cul comme Edmund ! … Eh non, Emlith, Edmund n'a PAS vraiment un balai à cet endroit-là, c'est une façon de parler !
/Mais je n'ai rien dit…/
-Je ne suis pas pudibond, râla Harry. Ce n'est pas parce que je suis plus jeune que je ne sais pas des choses !
C'était un mensonge. Pratiquement tout ce qu'il savait à ce sujet-là venait des autres aspirants. Ce n'était pas comme si son oncle et sa tante parlaient librement de ce genre de sujet. Il était pratiquement sûr que le mot « sexe » n'avait jamais franchi les lèvres de Petunia.
Quant à Poudlard… Il ne fallait même pas y penser. Ses deux amis étaient des enfants bien élevés qui ne disaient pas de vilains mots.
Ici… Les choses semblaient très différentes. Et Harry avait l'impression de commencer à entrevoir quelque chose qui pour l'instant lui avait échappé totalement.
Il oublia son pressentiment lorsque Thot fit son apparition, s'empressant de lâcher sa lettre dans les mains de Harry pour partir jouer avec les autres lézards de feu.
-Eh bien,je me sens aimé, ironisa Harry en jetant un regard au petit bleu qui n'avait pas pris la peine de lui faire un câlin.
-Une nouvelle lettre de Ron ? Demanda Valentine entre deux bouchées de ragout.
-Ça doit être son rapport de la rentrée, lui expliqua Harry en décachetant la missive.
« Cher Harry,
Nous revoilà Hermione et moi à Poudlard pour la quatrième année. La dernière de tranquillité avant les BUSEs ! J'ai trois grandes nouvelles à t'annoncer.
Je commence par la pire : Il n'y aura pas de compétition de Quidditch cette année !
Mon père savait bel et bien quelque chose. Et par conséquence, pas de sélection – et donc je me suis foutu la pression pour rien ! Je l'ai en travers de la gorge, là !
A la place, et c'est en quelque sorte une bonne nouvelle, c'est le retour du Tournoi des Trois Sorciers !
Je te vois déjà faire les yeux ronds mon cher ami, mais laisse-moi faire l'impasse sur les explications. Il y aura bien quelqu'un dans ton volcan pour te l'expliquer. J'ai hâte de voir les élèves des autres écoles, voir les différences entre nous, tout ça. Et de découvrir qui sera notre champion !
Tu me connais, je me serais bien proposé, parce que, bon, imagine : gagner une gloire éternelle ! Bon, toi, c'est déjà fait, Mr le Survivant, mais moi ça me ferait pas de mal, sans parler de la récompense en galions ! Mais ces gros peureux du département des sports magiques ont imposés une limite d'âge ! C'est de la discrimination !
Fred et Georges sont furieux. Ils auront l'âge requis en avril, mais ce sera trop tard. Ils ont néanmoins bien l'intention de participer et cherchent déjà des idées pour contourner les mesures qui seront mises en place par le directeur.
Hermione a cet air de « ça ne marchera pas » et ça les rends fous et encore plus déterminés à réussir. Je n'y avais pas fait attention jusque-là mais on dirait qu'ils se sont bien rapprochés durant son séjour à la maison. Garde le pour toi, mais je crois que Fred en pince un peu pour elle, il est… très joueur avec elle, je trouve.
Ça devrait me rendre jaloux… Mais même pas.
Et, pour terminer, tu ne le croiras pas, moi-même j'ai refusé de le faire avant que ne finisse notre première journée de cours, mais pas de Malefoy cette année ! Eh oui, notre serpentard « préféré » est aux abonnés absents ! La rumeur veut que son père l'ait fait transférer à Durmstrang et je ne sais pas trop quoi en penser, même si, au fond, ça lui va bien. Durmstrang est reconnue pour enseigner la magie noire. Il doit donc s'y sentir comme un poisson dans l'eau !
Enfin, bon débarras !
Amitié,
Ron.
PS : Notre nouveau professeur de DCFM est plutôt cool, bien qu'un peu flippant. Fred et Georges l'ont eu aujourd'hui et nous ont dit que le cours valait le coup d'œil. On attend avec impatience notre tour. Par contre, Rogue est toujours là, malheureusement, avec son chien. Ce dernier semble un peu moins abattu, je me demande si quelqu'un n'y serais pas pour quelque chose ) »
Harry replia la lettre en fronçant les sourcils, doublement intrigué par ces mystères.
Cela lui faisait cependant drôle d'imaginer Poudlard sans Malefoy. Ca semblait presque… dénaturer les lieux. Sa rivalité avec le blond avait été une part intégrante de sa vie là-bas. Même si c'était irritant sur le moment, c'était ces petits tracas qui rendaient le reste plus intense. Il ne pouvait désormais s'empêcher de penser que l'école devait être devenue bien ennuyeuse pour Ron, même si cet évènement, le Tournoi des Trois Sorciers lui donnerait probablement à s'occuper.
-Le Tournoi des Trois Sorciers est une compétition amicale sur trois épreuves que se livrent un champion de chaque école de magie participante, à savoir, si je ne me trompe pas, ton Poudlard, l'Académie française de Beaubâtons et l'école nordique de Durmstrang, expliqua Valentine à sa demande.
Elle ajouta presque aussitôt :
-Je crois savoir que c'est un tournoi très difficile et qu'il y a eu des morts.
Harry aurait pu demander des précisions, mais il se retrouva avec un jeune garçon blond dans les pattes qui se trémoussait d'impatience et qui le regardait avec des yeux brillants d'étoiles. Harry s'écarta un peu avant de se rendre compte que Desclare se tenait derrière l'enfant. L'air un peu trop satisfait.
-Ha ! Potter ! Je voulais vous faire rencontrer notre nouveau Candidat, arrivé tout droit d'Angleterre grâce à vous !
-Ah… Fit Harry, légèrement décontenancé.
-Je m'appelle Dennis Crivey ! Pépia à toute vitesse le garçon avant de continuer sans avoir besoin de respirer apparemment : Je suis le frère de Colin Crivey qui était avec toi à Poudlard ! Il m'a TELLEMENT parlé de toi ! Il m'a envoyé des taaas de photos ! Je suis complétement fan, dis, tu pourras me signer un autographe ? Je pourrais voir ton dragon ? Quand on a appris que moi aussi j'étais sorcier, j'ai préféré venir ici qu'à Poudlard, pour pouvoir être au même endroit que toi ! Pour mes parents c'étaient du pareil au même, ce sont des moldus alors ils ne voient pas trop la différence !
Quand Dennis cessa de parler, Harry reprit une respiration qu'il avait apparemment retenue.
-Ouah… Euh… Je me souviens de Colin.
De façon mitigée et s'il avait su, il aurait prié pour que son frère ne soit pas, lui aussi, bâti sur le modèle d'un stalker envahissant.
-Mais… Tu sais… La Réserve ce n'est VRAIMENT pas pareil que Poudlard…
Il avait l'impression que cette petite chose n'avait pas la moindre idée de l'endroit où elle avait mis les pieds mais Desclare l'empêcha de commencer une argumentation contraire à ses désirs, à savoir : récupérer le plus possible de Candidats.
D'un côté, Harry le comprenait, ils en auraient besoin pour que les futurs dragonnets aient plus de choix, mais de là à envoyer d'innocents enfants dans un tel traquenard… Aller à Poudlard n'engageait à rien, contrairement à être chevalier dragon.
-Il verra bien tout ça en étant Candidat ! Le coupa Desclare. De toute façon, il n'y aura aucun œuf ici avant trois ans. Je pense qu'il sera fixé à ce moment-là !
Ainsi dit, il attrapa l'enfant par l'épaule et le dirigea vers le baraquement des Candidats. Dennis se contorsionna tout le long de leur sortie du Hall des Repas pour continuer à fixer Harry, un sourire extatique fendant son visage.
En réponse, le brun rentra sa tête dans ses épaules comme si ça pouvait le faire disparaitre.
-Je lui donne cinq jours, lâcha Damian en fixant leurs deux silhouettes. Ce garçon est minuscule !
-Ouais bein, s'il est comme son frère, je parierais pas là-dessus, grinça Harry. Sont increvable ces Crivey !
Sur ce, ils finirent leur repas pour retourner en cours. L'Après-midi était habituellement réservé aux cours théoriques.
-Pas vous Potter, l'arrêta cependant Stevens avant qu'il n'entre dans la salle.
Depuis ce matin, la maitresse des Aspirants avait l'air plus courroucée que d'habitude, ce que Damian avait mis sur le dos de Legith qui, d'après lui, devait être en chaleur. Harry ne voyait pas vraiment le rapport, mais une chose était sûre : il ne valait mieux pas aller contre elle aujourd'hui. Pourtant, là, il était à deux doigts de le faire.
-Vous n'assisterez pas à ce cours, Desclare veut que vous rejoigniez Gwendolyn pour son inventaire des caves.
-QUOI ?! S'exclama t'il, mais sa voix le lâcha lâchement en fin de son cri, l'obligeant à se racler la gorge pour reprendre avec un semblant de ton normal : Mais comment je vais faire pour rattraper ? Est-ce vraiment…
-Vous n'aurez pas besoin de rattraper ce cours, il ne vous concerne pas ! Maintenant cessez de me faire perdre du temps et courrez aux cuisines !
Muet d'indignation, Harry laissa ses deux amis pour rebrousser chemin.
Il ne voyait pas comment un cours que les autres suivaient ne pouvait pas le concerner lui aussi ! Surtout pour aller compter de stupides meules de fromages !
-Ce ne sont pas de « stupides meules de fromages », répliqua Gwendolyn qui l'entendait grommeler dans sa barbe depuis leur entrée dans l'une des caves où l'on entreposait la nourriture et diverses fournitures utiles comme du tissu ou des bougies.
L'Intendante l'avait pris avec elle en lui expliquant ce à quoi ils consacreraient leur après-midi : A savoir compter et noter le contenu des différentes caves de la Réserve. Ce qui était la chose la moins passionnante du monde.
-Tu dois savoir que les différents Ministères dont nous dépondons nous versent une dîme deux fois l'an. Cela peut être de l'argent ou des produits. Même si nous sommes en grande partie auto suffisant, il y a des choses que nous pouvons difficilement produire ici-même. Et parfois nous subissons des aléas climatiques ou d'autres catastrophes qui nous donnent de mauvaises récoltes ou trop peu de bétail pour nourrir tout le monde. C'est pourquoi il est dans le devoir de l'Intendante, mais aussi de la Dame, ou en l'occurrence, du Seigneur de la Réserve de s'assurer du niveau des caves afin d'être certain d'avoir le nécessaire pour survivre. Et nous en avons besoin, aussi, pour savoir ce que nous pouvons vendre.
-Je croyais déjà que les carcasses des dragonnets morts nous rapportaient suffisamment, lâcha Harry qui était encore un peu choqué de la marchandisation de ces pauvres créatures qui n'avaient pas eu la chance de trouver un compagnon.
-Par éthique, tout cet argent est utilisé uniquement pour les dragons. Cela nous sert à acheter et à maintenir notre cheptel de bétail à abattre. Même s'ils ne mangent pas tous les jours, chaque dragon adulte prélève deux à six bêtes par semaine, surtout si le chevalier ne sait pas le modérer.
Voilà qui concluait la discussion et Harry poussa un soupir en retournant à ses étagères de fromage.
/Les autres viennent de sortir de cours/ Se plaignit Talath qui était toute aussi atteinte par ce coup du sort. /Les aspirants sont avec leur dragon. La maitresse de Dinth a l'air plutôt secouée. Elle s'est mise à l'écart./
*Valentine ?*
Harry voulut essayer de capter les pensées de Dinth, mais Gwendolyn le regarda avec agacement, les poings sur les hanches :
-Harry ! Tu n'es pas concentré du tout !
-Mais les autres viennent de finir…
-Ça ne veut pas dire que toi tu as fini ! Il va falloir que tu te fasses au fait que tu n'auras jamais les mêmes responsabilités que tes amis ! C'est dur, je m'en doute, et tu préfèrerais sans doute aller jouer avec eux, mais nous avons une tâche importante à finir.
Serrant les dents, Harry s'exécuta. Il détestait ces moments réservés aux cours de gestion de la Réserve car cela l'éloignait de Val' et de Damian. Le mettait à l'écart. Alors si maintenant cela venait à empiéter sur les cours des aspirants !
Il ne décrocha plus un mot jusqu'à ce qu'ils se retrouvent dans son cabinet de travail, entouré de tableau de concordance de prix et de livres d'archives, et ce fut seulement pour acquiescer quand Gwendolyn lui demanda de retranscrire l'inventaire et de calculer les prix, avant de comparer avec le relevé des années précédentes pour voir s'ils avaient assez pour tenir le prochain hiver.
Dès qu'elle fut partie pour superviser le travail dans les cuisines, Harry laissa son front se cogner contre la table, désespéré et frustré.
Il le refit plusieurs fois sans se préoccuper des expressions moqueuses des anciennes Dames.
La vie était si injuste.
Intrigué par son comportement, Moineau vint se poser près de lui et inclina la tête pour pouvoir le regarder droit tandis qu'Harry était affalé sur ses parchemins.
-Toi tu n'auras jamais à te soucier de ce genre de truc, lui dit Harry d'un ton geignard, si un truc te plait pas, il te suffit de disparaitre.
Un grondement interrompit ses pensées maussades, arrivant depuis l'extérieur, et Harry se redressa.
*Legith ?*
Il n'eut pas de réponse de Talath puisque celle-ci s'était assoupie, d'ennui certainement, mais il eut l'impression d'avoir touché juste quand d'autres grondements retentirent et qu'il sentit par son lien avec les dragons une sorte de frénésie.
Il ne savait pas tout à fait ce qu'il se passait durant les chaleurs des dragonnes. Juste qu'il y avait souvent des combats entre dragons et que ça s'agitait pas mal. Il semblait que la femelle montrait un caractère difficile les jours, voire même les heures précédentes.
C'était sans doute ce qui influençait l'humeur de son partenaire.
Durant ces moments, les chevaliers avaient ce petit sourire aux lèvres et s'éclipsaient souvent sans que personne ne dise quoique ce soit.
Et les lézards de feu mâles devenaient bizarres, gazouillant et voletant dans tous les sens, excités, comme le faisait en ce moment Moineau.
Harry s'apprêtait à lui dire d'aller faire son cirque ailleurs, ne pouvant définitivement se concentrer avec cette furie, mais une vague de chaleur l'envahit sans prévenir.
Son cœur commença à battre étrangement dans sa cage thoracique, s'emballant à chaque grondement lancinant de Legith et une sensation électrisante fila presque aussitôt se concentrer dans son bas ventre, un chatouillis désagréable remontant le long de sa colonne vertébrale alors qu'il se retrouvait avec la plus brutale érection de son existence.
Bon, c'était récent, c'est vrai, mais ça ne lui avait jamais fait ça comme ça, sans raison, aussi vite.
Qu'est-ce qu'il lui arrivait ?
Tendu comme un arc il se leva de sa chaise, les mains crispées contre le bord de sa table de travail, démuni face aux réactions de son corps. Des grondements retentirent à nouveau et Harry haleta tandis qu'il avait l'impression d'être dévasté de l'intérieur par un désir qui devait impérativement être assouvi.
Déglutissant, il jeta un regard à la porte de son cabinet de travail, puis priant pour que personne ne passe cette porte dans les minutes à venir, il s'empressa de défaire sa ceinture pour baisser son pantalon.
Voyant la bosse qui déformait son caleçon, il hésita.
Il ne s'était jamais soulagé de la sorte. Jusqu'ici tout ce qu'il avait eu était des érections matinales qui partaient toutes seules, et une fois où il avait réagi en tombant sur les fesses de Valentine alors qu'elle était dans une position plutôt érotique, mais il avait vite été déconcentré.
Là, il savait que rien d'autres ne pourrait le calmer. Pas sans le faire se tordre de frustration durant de trop longues minutes.
Attrapant son sexe hypersensible entre ses doigts pour le sortir de son sous-vêtement, il commença à le caresser de façon totalement expérimentale. Son rythme cardiaque augmenta brusquement, comme sa respiration tandis qu'il éprouvait cette étrange mélange de soulagement, de tension, de plaisir, avec une pointe de douleur.
Il comprit aussitôt avec un peu d'horreur qu'il ne pourrait plus s'arrêter, pas sans arriver au point d'orgue.
Comme obéissant à un rythme primal gravé en lui depuis le début de son existence, il accéléra la cadence de ses va et vient, s'empalant de lui-même entre ses doigts en poussant des halètements et des grognements autant de plaisir que d'insatisfaction. C'était bon mais c'était encore mieux à chaque friction. Il ne savait pas ce qu'il faisait, mais il s'exécutait, plus certain d'être oui ou non commandé par son cerveau – en tout cas plus de façon consciente et réfléchie mais de façon totalement automatique.
Il était en quête de la jouissance ultime, rien ne pourrait l'arrêter, même si ses jambes tremblaient, même si son cœur semblait sur le point de s'arrêter après surtension.
Et son cœur s'arrêta. Quelques secondes. Arrivé en haut de la vague, avec cette intuition imparable qu'elle allait retomber brutalement. Il cria, l'esprit complétement envahi par le meilleur shoot de… de quoi d'ailleurs ? De plaisir ? De sensations délectables ?
C'était mieux que du bien être. C'était du ressentis à l'état pur.
Et pendant un instant, il eut la même réflexion que Talath ce matin à propos de voler : Comment avait-il pu vivre jusqu'ici sans ça ?
Et vu comme il avait l'impression de flotter dans un océan de nuage moelleux, il se demanda si le ressenti du vol était aussi intense.
Néanmoins, il se sentit aussi redescendre très vite, et se retrouva, son cerveau à nouveau connecté, avec le pantalon sur les chevilles, la main couverte d'une substance bizarre, en plein milieu de son cabinet d'étude et des tableaux des précédentes Dames dont certaines étaient parties se cacher par pudeur, et d'autres l'observaient en cachant mal leur gourmandise derrière un air offusqué.
La gêne et la honte s'emparèrent de lui, son visage virant au rouge cramoisi, et il s'empressa de se rhabiller pour fuir la salle.
Ses pas le conduisirent jusqu'à sa salle de bain, où, se débarrassant en vitesse de ses vêtements, il plongea dans l'eau chaude du bassin, et s'assit sur le sable doux qui en tapissait le fond, avant de se coucher complètement pour faire passer sa tête sous l'eau.
Là, dans l'univers assourdit où ne résonnait que les traitres battements de son cœur encore affolé, il put repenser à ce qu'il venait de se passer.
Il suffisait d'additionner 1+1 pour comprendre un certain nombre de choses qui lui avaient été abstraites jusqu'ici.
Il y avait encore peu de temps, l'excitation sexuelle lui était personnellement inconnue, mais il avait déjà surpris Damian en train de se masturber dans la salle de bain des Aspirants. Bien évidemment, il s'était empressé de tourner les talons, embarrassé et plein de question à ce sujet. Puis ça s'était réveillé chez lui, petit à petit, à l'occasion de seins lourds tirant une toile de lin clair, ou de mèches de cheveux caressant la courbe d'un cou.
Valentine était la principale source de ses pulsions, même si étrangement, il n'était pas amoureux d'elle. Elle lui plaisait physiquement, et il aimait son caractère et sa personnalité, mais juste comme une amie.
Son coeur ne battait pas à la folie pour elle quand elle le touchait ou lui souriait.
Cela était très récent. Et c'était la première fois qu'une verte avait ses chaleurs depuis.
Il se demandait s'il était si bizarre que les chevaliers disparaissent brusquement durant ces moments… Ou s'il n'avait pas eux aussi de brusques montées de… De sève.
Il essayait de se rappeler si Damian ou Edmund étaient là durant ces moments, mais maintenant qu'il y repensait, il lui semblait qu'il était soit seul, soit juste en compagnie de Valentine.
*Si c'est le cas, ils auraient pu me prévenir !*
L'idée de devenir sexuellement excité dès qu'une verte aura des velléités de reproduction était assez angoissante.
En manque d'air, il creva la surface de l'eau et secoua sa crinière pour en retirer le liquide superflu.
Comment allait-il gérer ce nouvel élément de sa vie ?
-D-
Dans l'immédiat, le lendemain, il eut à gérer une toute autre sorte de crise.
Depuis qu'ils avaient tous leurs appartements personnels, lui, Damian et Valentine se retrouvaient à 6h30 dans le Hall du Repas pour le petit déjeuner, mais aujourd'hui, il était tout seul à leur table.
-C'est bizarre, marmonna t'il en cherchant vainement quelqu'un de sa « promotion ».
-Eh bien Harry, tu es tout seul aujourd'hui ? Fit quelqu'un qui lui tapota l'épaule.
C'était Charlie qui lui adressa un grand sourire, une assiette couverte d'œufs et de bacon dans les mains.
-Bonjour Charlie. Je ne sais pas où ils sont tous. J'espère qu'on n'avait pas entrainement super tôt parce que personne ne m'a prévenu hier, vu qu'on m'a jeté des cours de l'après-midi…
A la mention d'hier, le roux regarda vers le plafond, l'air songeur.
-Je doute qu'il y ait quoi que ce soit de prévu aussi tôt après le vol de Legith.
Harry rougit violemment au nom de la dragonne, ayant brusquement l'impression que tout le monde pouvait savoir ce qu'il avait fait hier. Heureusement, le chevalier bronze ne semblât pas le remarquer, toujours perdu dans ses pensées.
-Ils ont probablement eu CE cours…
-Hein ? Quel cours ? Le questionna Harry en oubliant tout embarras.
-Rien dont tu ne dois te soucier dans l'immédiat, promis, s'amusa Charlie en lui frottant les cheveux.
-C'est quoi cette réponse ?! S'agaça Harry en essayant de chasser la grande main de sa tête.
Le roux se moqua de ses efforts en l'esquivant, venant en plus lui enserrer le cou de son coude.
Leur chamaillerie finit lorsqu'un chevalier bronze apostropha sèchement Charlie et ce dernier s'éloigna de lui, non sans laisser sa main s'attarder un peu sur son épaule.
Harry put alors faire attention aux regards accusateurs des bronzes qui ne faisaient pas partie du groupe d'amis de Charlie. Celui qui venait de parler, un homme massif aux courts cheveux noirs, était plus ou moins le second de Desclare.
-Un problème O'Connel ? Le défia Charlie en se dressant fièrement face à lui.
-Tu le sais déjà, fit l'homme en reprenant une gorgée de son klah.
Harry, lui, ne savait rien, et observa avec perplexité le face à face de volonté qui avait lieu devant lui.
Ce dernier ne cessa que lorsque Rebecca entra dans le hall en claquant des mains comme une maitresse de primaire s'apprêtant à mettre au coin deux élèves dissipés.
-Ca suffit vous deux, fit la chevalier bleu. Vous donnez un très mauvais exemple à vos cadets !
O'Connel détourna fièrement la tête avec un son de gorge méprisant tandis qu'elle approchait de Charlie et Harry.
-Tiens, déjà debout ? La taquina Charlie avec un levé et baissé de sourcil évocateur.
-Amber m'a jeté du lit sans ménagement, soupira la brune. J'imagine que ça n'a pas été ton cas, à toi.
-Derianth et moi étions d'humeur matinale. Et j'ai un briefing de mission tout à l'heure.
Rebecca approuva du chef avant de se tourner vers Harry :
-Tu devrais te rendre rapidement dans la grotte d'entrainement. Ça ne m'étonnerait pas qu'Amber commence l'entrainement en avance.
-Ah ! Tu vois ! Fit Harry à Charlie avant d'avaler rapidement ses toasts en essayant de ne pas s'étouffer.
Il laissa alors les deux adultes et leurs discussions étranges derrière lui, se disant qu'avec un peu de chance, il finirait par comprendre un jour. Ses pas le menèrent vers les autres Aspirants qui étaient déjà là, dispatchés bizarrement dans la surface.
Depuis l'Eclosion, il n'était pas rare de voir Edmund et Ronan ensemble, puisqu'ils partageaient la même expérience de chevaliers bronzes, mais aujourd'hui, ils étaient chacun de leur côté. Pareil du côté de Damian et Valentine qui, même s'ils se disputaient tout le temps comme chat et chien, cherchaient la compagnie de l'autre… Là ils se tenaient à deux bords opposés sans se regarder.
Harry les fixa avec incompréhension, se demandant ce qu'il avait bien pu se passer hier, pendant ce cours qui lui avait été refusé, pour qu'une apocalypse sociale se soit déclarée.
Il s'avança donc d'un pas décidé sur Damian qui, perdu dans ses pensées, ne le remarqua qu'au dernier moment et sembla embarrassé, évitant son regard comme avait pris l'habitude de le faire Edmund.
Harry vit alors rouge :
-Ah non ! Pas toi aussi ! Je peux savoir ce qu'il vous prend à tous ce matin ? Je vous laisse une après-midi et plus personne ne s'adresse la parole !
Attiré par le son de sa voix, Valentine tourna la tête vers eux, mais ne fit pas signe de les approcher. Ronan, par contre, s'installa confortablement avec un sourire mauvais aux lèvres, semblant se délecter de la situation.
Damian se gratta la tête, une grimace sur le visage. Il semblait clairement partagé sur ses émotions. Mais au moins, il le regardait à nouveau.
-Désolé Harry. C'est pas cool, je sais. D'autant plus que… Bah, laisse tomber.
Il lui donna une tape dans le dos et lui sourit.
-Je me comporte comme un vrai con, ajouta t'il à un Harry qui n'avait pas cessé son froncement de sourcil.
-Ca ne me dit pas ce qu'il s'est passé !
Damian sembla à nouveau marcher pieds nus sur des éclats de verre, mais il lui fit grâce d'un semblant de réponse.
-Le cours d'hier était un peu déstabilisant. Plus pour certain (ses yeux obliquèrent une fraction de seconde sur Valentine) que pour d'autre… Mais. Désolé. On n'a pas le droit de t'en parler !
-Vous.N' . .de.m' ? Répéta Harry, halluciné et horriblement frustré.
-Désolé, répéta Damian.
-Ah bein ça, c'est gonflé… Souffla Harry en se détournant, cherchant inconsciemment à obtenir le soutien et le réconfort de sa moitié qui, malheureusement, dormait encore.
Il entendit alors les pas de Valentine qui s'approchait de lui, le regard grave :
-Moi aussi je trouve que ce n'est pas juste que tu ne sois pas au courant.
-Parce que ça me concerne aussi ?
-Absolument, répondit Valentine alors qu'Edmund et Damian cherchèrent à la faire taire d'un « Val ! » exaspéré.
Elle foudroya les deux garçons du regard :
-Ils ne font juste que reculer l'échéance ! Qui leur dit que la réaction d'Harry sera meilleure plus tard ? Je n'ai pas aimé du tout ce que j'ai appris, mais au moins je peux m'y préparer. Vous autres ne pouvez pas comprendre !
-Ne fait pas comme si nous, aussi, n'étions pas impacté, la reprit sévèrement Edmund.
-Ce n'est pas comparable, marmonna pour elle Valentine avant de s'éloigner à nouveau.
Harry ouvrit les bras, impuissant et complétement perdu face à ce qu'ils disaient. Comme Stevens fit son apparition à ce moment précis, il courut vers elle, et ce, malgré son expression renfrognée et ouvrit la bouche… Mais elle ne le laissa pas parler.
-Ce sont les ordres de Desclare. Il va falloir vous y habituer parce que, désormais, vous n'assisterez plus à tous les cours.
La sentence était prononcée, et se vérifia les jours suivants. A toute occasion, même le matin parfois, il se retrouvait à devoir rejoindre son cabinet de travail ou assister Gwendolyn. Il n'apprenait plus qu'à voler avec Talath, assistait encore heureusement aux cours de magie, mais la théorie ne se limitait plus qu'à l'histoire, les soins et les généralités sur les dragons.
Et comme cette fois-ci ses amis n'étaient pas privé de lui raconter ce qu'ils faisaient, il découvrit qu'on l'éloignait consciemment de tous les cours militaires.
On ne lui apprenait plus à se battre.
Alors, au milieu du mois d'Octobre, il explosa de colère dans le bureau du Gérant.
Desclare resta immuable à la façon d'un roc qui regardait stoïquement des vagues s'éclater contre lui. Ce ne fut que lorsqu'Harry annonça qu'il n'irait plus perdre son temps à apprendre de stupides poèmes ou à faire la bonniche dans la Réserve que l'homme se dressa devant lui, le visage effrayant :
-Oui, vous n'assistez pas aux leçons de combat ! C'est parce qu'il est hors de question que Talath mette le moindre bout de pattes sur un champ de bataille ! Elle est trop précieuse pour pouvoir être perdue aussi bêtement ! Et ce n'est pas sa place ! Et donc ce n'est pas la vôtre non plus !
/MAIS JE VEUX ME BATTRE !/ Se scandalisa Talath en poussant un grondement depuis l'extérieur.
Elle faisait de écho aux pensées d'Harry. S'il avait voulu devenir chevalier dragon, c'était certes pour tout le côté dragon, mais aussi pour le côté chevalier !
En plus à quoi servirait que les reines dragons soient si grandes, plus grandes que les bronzes, si ce n'était pour se battre ?
-Talath n'est pas en sucre ! Et certaines missions n'exigent même pas de combat ! C'est trop injuste de nous mettre sur la touche juste parce qu'elle est capable de pondre des œufs !
-C'est un ordre Potter, et ce n'est pas négociable ! N'oubliez pas que vous êtes un soldat…
-Eh bein apparemment pas, le coupa abruptement Harry avec acidité.
-… UN SOLDAT, appuya Desclare avant de continuer : et que comme tel, toute insubordination de votre part peut vous valoir de graves conséquences ! Des peines allant de la cellule d'isolement pour plusieurs jours au baiser du détraqueur ! La désertion peut vous amener à Azkaban, la trahison à la mise à mort de votre dragon !
Harry se sentit pâlir et reculer un peu. Il n'avait pas vraiment envisagé cela.
/Il ne pourra pas nous donner des ordres éternellement/ Répliqua Talath en grognant de colère. / Souvenez-vous ce qu'a dit la Maitresse des Aspirants : Gloria avait réussi à remplacer un chef de la Réserve qu'elle n'aimait pas. /
C'était vrai, mais Harry n'avait pas la moindre idée de la façon dont elle s'y été prise et il se doutait que Desclare ne le lui apprendrait pas.
L'homme ne lui apprenait que ce qui l'arrangeait.
Et pour l'instant, il n'avait pas d'autre choix que d'obéir.
-D-
C'était déprimé et pleins de sentiments de fatalité que Harry finit sur le bord de la corniche de Talath, repassant dans sa tête les propos de Desclare.
Il poussa un profond soupir en observant les autres Aspirants s'entrainer aux manœuvres d'abordages depuis le sol. Il devrait être avec eux en ce moment. Il VOULAIT apprendre et lui et Talath en avaient les capacités.
Il la sentit avant de l'entendre s'approcher de lui depuis le ciel. Elle s'arrêta en vol stationnaire à son niveau, brassant l'air de ses larges et gracieux mouvements.
/Allons voler/
Harry leva son visage en direction de la dragonne, surpris par sa demande. Ses yeux étaient un mélange de vert sombre, assez semblable au sien, signe chez elle d'une détermination tranquille, et de paillettes orange qui trahissaient leur état à tous les deux d'agacement.
Bien sûr, il n'avait pas besoin de la voir pour savoir tout ça, juste de le ressentir.
Leur compréhension était immédiate et absolue.
Harry hocha de la tête.
-D'accord.
D'accord pour voler sans harnais.
D'accord pour le faire alors qu'on a à peine commencé à le voir en entrainement.
D'accord pour enfreindre les règles et se faire punir.
Tout ça se passa en un regard et Harry se leva, recula, puis sprinta pour sauter du bord, juste au moment où Talath passait en dessous.
Il se rétablit sur ses pieds, accroupi, ses mains le stabilisant sur le cuir lisse et doré. Il pouvait sentir sous elles la chaleur émanant de la dragonne, ainsi que le travail des muscles de son dos alors que ses ailes redoublaient d'efforts pour leur faire prendre de l'altitude.
C'était de la folie. Leur folie à eux deux.
Ils seraient tous furieux quand ils s'en rendraient compte mais lui et Talath ne s'en préoccupaient pas. Ils avaient besoin de ça – de faire entendre leur volonté.
Précautionneusement, Harry se hissa le long de la colonne vertébrale jusqu'à atteindre la jonction entre le cou et les antérieurs, légèrement en avant des ailes pour ne pas les gêner. Il s'y assit alors en position et constata qu'il était suffisamment stabilisé, et ce, même sans selle. Enserrant le cou entre ses cuisses, ses pieds reposaient contre les deux épaules.
*Je ne te fais pas de mal ?*Demanda t'il.
/Non, c'est parfait. Accrochez-vous maintenant, je vais prendre de la vitesse./
Elle voulait quitter au plus vite la cuvette du volcan, craignant d'être trop vite remarquée.
/J'ai demandé à Farlith de faire diversion./
Trop occupé à s'agripper alors que la dragonne se plaçait presque à la verticale, le brun ne put voir ce que faisait le dragon bleu pour distraire tout le monde, mais il fut vite lui-même éloigné de ces pensées alors qu'il goutait, en première main, les sensations du vol.
Le vent très frais léchait son corps, lui rougissant les joues, mais il n'avait pas froid, l'adrénaline, la chaleur corporelle de Talath et son blouson fourré le protégeaient très bien.
Quand il le put, il attrapa ses lunettes de vol qu'il gardait en collier à son cou, et les enfila pour pouvoir observer son environnement sans pleurer à cause du vent.
C'était grandiose. Ils volaient bien au-dessus du volcan et la chaine des Carpates s'étendaient au milieu des nuages, avec ses neiges éternelles, ses forêts et ses cours d'eaux. La Transylvanie était bien plus belle que l'image qu'il s'en était fait en Angleterre ou même à l'intérieur des parois de la Montagne Blanche.
Ca n'avait l'air de rien, mais il réalisait que cela faisait plus d'un an qu'il voyait les mêmes paysages, restreint dans la cuvette du volcan.
Talath volait sans destination précise, toute aussi curieuse et surprise, heureuse de pouvoir étirer ses ailes.
*Rapproche toi du sol* Lui conseilla Harry.
Elle piqua alors vers le flanc de la montagne, se rapprochant de son ombre qui se peignait sur le sol. Sa vitesse et le souffle de son déplacement faisait se ployer les végétaux à son passage, traçant un sillon qui peinait à disparaitre derrière eux.
Arrivé en bas, Talath prit le chemin d'une rivière, plongeant un peu de ses pattes dans l'onde, admirant au passage son reflet doré et aspergeant légèrement Harry.
Comme ils s'éloignaient de la Réserve, ce dernier se rappela alors de lancer le sort qui les rendraient tous deux invisibles aux moldus.
/Pourquoi ne pas essayer ce nouveau Mot que nous avons appris ?/ Proposa Talath en reprenant un peu de hauteur.
Unin pour « Union », était un mot incroyable qui pouvait permettre à Harry de voir à travers les yeux de Talath, exactement comme s'il était elle. Il l'avait déjà essayé à terre, mais dans le ciel, cela devait être toute autre chose.
Sans attendre, il s'étira un peu plus sur le cou de Talath, épousant encore mieux ses mouvements et lança le mot.
Il ne pouvait pas le voir, mais comme à chaque fois qu'il utilisait la magie draconique, ses pupilles se rétractèrent en un fin losange et ses iris prirent la couleur des yeux changeant de Talath.
Et en ce moment plus que jamais cela avait un sens puisque la vision d'Harry s'élargit brusquement, lui offrant un panorama direct d'au moins 200 ° sur le paysage devant eux.
C'était comme si c'était lui qui volait, flottant dans l'air sans aucune contrainte.
/C'est le cas/ Fit Talath dans un coin de son esprit. /En ce moment, nous sommes un. /
Oui, Harry et Talath n'étaient que deux moitiés de quelque chose de plus grand et ils étaient à présent réunis, invincible et inflexible.
Jusqu'au moment où il leur faudrait malheureusement rentrer et affronter les conséquences de leurs actes.
Mais pour l'instant, ils volaient.
A suivre…
Et voilà pour aujourd'hui ! J'espère que ça vous a plût ! Et que vous avez pleins de nouvelles questions en tête ! ( Comment ça je me plait à torturer mes lecteurs ? Mais non ! ). Je vous dis donc à mercredi prochain !
