Il est bientôt vingt heure. Gon a passé la journée à slalomer derrière son comptoir et entre les tables de la salle en essayant désespérément de ne pas se tromper dans les commandes tant les premières heures de son service ont été éprouvantes.
De plus, son patron, lui avait demandé de faire la fermeture pour ce soir. Lui-même devant régler un souci mineur dans un autre de ses commerces. En dehors de sa chaîne de café aux allures de Starbucks, il possédait d'autres actifs encore.
Bref, bientôt son service allait toucher à sa fin.
Il n'y a plus de client depuis dix minutes, mais il préfère attendre encore un peu pour être sûr. Sûr de quoi ? Lui-même ne sait pas trop. Il commence même à trouver le temps long.
Gon soupire et se met finalement à ranger, de toute façon les rues commencent déjà à se vider. Il commence par nettoyer les utilitaires puis il s'occupe de la salle. En essuyant sa dernière table, son regard rencontre une chose bien étrange.
Derrière l'une des fenêtres, il y a une ombre. Elle est immobile et semble collée à la vitre. Au vue de la forme, ce n'est ni un buisson, ni un arbre. Malheureusement cette fichue fenêtre donne sur la seule rue du quartier qui a un défaut de lampadaire.
Gon, qui n'est nullement impressionnable de nature, avance vers la chose, avec pour seule arme son balais. La pénombre lui renvoie son reflet sur la vitre. Il cherche un possible visage derrière le sien, un regard derrière le marron de ses yeux, une silhouette autre que la sienne. Et là, un son qu'il connaît bien retentit dans le silence malaisant dans lequel il est plongé depuis que cette ombre est apparue.
Un puis deux et enfin trois « click », le son caractéristique d'un appareil photo dont l'objectif semble directement pointé sur lui.
Il y a quelqu'un derrière cette fenêtre. Cette ombre est une personne qui visiblement l'observe et même bien plus.
Son sang ne faisant qu'un tour dans ses veines, G précipite la fermeture de l'établissement et alors qu'il se change dans la salle dédiée aux employés après avoir vérifier que toutes les ouvertures possibles étaient bien closes, il compose un numéro à toute vitesse. Seul, s'il s'agissait vraiment d'une personne dangereuse, il ne pourrait pas faire grand chose.
« -Surtout ne sort pas, j'arrive.»
*
Gon effleure du bout des doigts le manteau de Killua posé sur ses épaules et note dans un coin de son esprit que celui aux cheveux blanc était un peu plus grand que lui. Il essaie aussi de visualiser correctement ce qui s'est passé, encore un peu désemparé.
Killua ne dit rien, concentré sur la route alors qu'il conduit vers leur immeuble. Il jette de temps à autre des regards furtifs vers Gon sans pour autant dire un mot. Aucun des deux ne savaient comment débuter cette conversation, en réalité.
Killua est arrivé une dizaine de minutes après que Gon l'ait appelé. Il l'a trouvé à l'arrière, dans la réserve de l'établissement et ensemble ils avaient fait le tour des lieux sans croiser personne. À l'évidence, celui ou celle qui était à cette fenêtre avait probablement pris la poudre d'escampette quand Gon l'a remarqué.
Ils avaient aussi convenu de ne pas alerter la police, ça ne servirait à rien. Il ne pouvait pas prouver leur récit et même il n'y avait pas eu de danger immédiat pour Gon.
« -Ton invitation tient toujours ? »
Gon pose la question du bout des lèvres, hésitant. Killua, retire l'une de ses mains du volant pour la poser sur la sienne et emmêler leurs doigts, sa main était agréablement froide. Avec son fameux sourire espiègle, il lui répond positivement.
« -Parfait, j'ai besoin de me changer les idées.
-C'est normal. »
Le silence reprend ensuite ses droits mais l'atmosphère est drôlement moins lourde tout d'un coup.
Aussi, Killua n'avait pas retiré sa main.
