Bonjour et bon dimanche :)

On se retrouve pour un nouveau chapitre, où l'enquête avance ! Est-ce que ça confirmera certaines de vos hypothèses ? Il n'y a plus qu'à lire pour le savoir :D

Enjoy !


CHAPITRE NEUF

I

Kagami attendait avec anxiété tandis qu'Aomine parlait au shérif. L'interrogatoire d'Adam Keller était terminé, et ils étaient censés passer un coup de fil à L.A. pour faire le point sur leurs informations. Alors, livré à lui-même, Kagami déambulait dans le hall étroit du commissariat, un gobelet de café froid à la main. Il regarda les photos en noir et blanc d'illustres membres du commissariat, ainsi que des photos du désert sur les murs jaune pâle. L'endroit était presque chaleureux, mais ça ne gommait pas l'inquiétude qui continuait de grandir en lui. Il revint finalement s'assoir sur un siège le long du mur, sa jambe s'agitant nerveusement.

Il sursauta quand la porte s'ouvrit. Aomine émergea du bureau, la mine sombre. Il se prépara à recevoir de mauvaises nouvelles et se leva pour s'avancer vers son homme.

« Alors ? demanda-t-il.

— Keller va se faire coffrer pour trafic de drogues.

— Mais pas pour…

— On pense pas qu'il est impliqué. »

Aomine se laissa tomber le siège qu'occupait précédemment Kagami et se frotta la tête d'un geste las.

« Ils commencent à envisager de plus en plus sérieusement l'idée que Ryota ait disparu de son propre chef. »

Kagami le fixa d'un regard paniqué et bredouilla :

« Mais ça veut dire que…

— Non, ils vont pas laisser tomber l'enquête tout de suite, le rassura Aomine. Y a encore trop de flou. Mais s'ils retiennent cette hypothèse… Bah, y a pas de loi contre les disparitions volontaires. »

Kagami eut l'impression que la pièce se mettait à tourner autour de lui, il s'assit lourdement sur le siège voisin, sous une photographie de cactus au coucher du soleil.

« Et toi, tu crois que… »

Devant le silence d'Aomine, il releva la tête. Et dans ses yeux, il lut un doute profond mêlé d'une douleur latente. Et le brun avoua d'une voix blanche :

« Je sais pas… Je sais plus. »

Kagami baissa les yeux sur le lino beige, essayant d'assimiler cette idée. Ils savaient que Kise avait des problèmes… Selon leurs amis, il avait l'air déphasé, voire déprimé, les premiers éléments de l'enquête de police avaient révélé que l'affaire était probablement en lien avec la drogue, et Akashi les avait informés que Kise avait un stalker. Mais rien de tout cela ne lui semblait justifier un choix pareil. Tout abandonner, laisser tomber tout le monde, et simple disparaître ? Le concept lui semblait trop énorme, impossible à appréhender. Où en arrive-t-on dans sa vie pour vouloir en recommencer une autre totalement différente, en se séparant de tout ce qui faisait celle d'avant, y compris les gens qui l'habitaient et qu'on aimait ?

« Je ne comprends pas… » murmura-t-il finalement, quelques mots qui sonnèrent désagréablement comme un aveu d'impuissance.

« Moi non plus, admit Aomine. Mais quoi qu'il arrive, ça va pas m'empêcher de le chercher. »

À ces mots, la brume qui bourdonnait dans son crâne sembla se dissiper un peu, et il hocha la tête en répondant d'une voix plus ferme :

« Bien sûr que non. Je veux la vérité, moi aussi. Et je veux le retrouver, quoi qu'il ait décidé, lui. »

Une fois rentrés dans leur chambre de motel, Aomine lui raconta plus en détail les aveux de Keller. Tout avait commencé lors de cette soirée du 6 juin chez Rick Bell, le producteur de Beverly Hills. Keller avait expliqué s'y être rendu pour affaires. Quand Kise l'avait abordé à son tour, Keller était à sec. Il avait décidé de se rendre à Hyde Park, où il avait une planque, pour refaire ses stocks. Le mannequin avait tenu à l'accompagner. Il avait l'air nerveux, selon le dealeur. Jetant des regards à la dérobée autour de lui comme s'il craignait quelque chose… ou quelqu'un. Keller avait accepté de l'emmener. Ensuite, il avait raconté comment son ami DiSantos s'était pointé en reconnaissant la Audi blanche, puis leur avait proposé de prolonger les festivités ailleurs. Kise ne connaissait pas DiSantos, mais il avait accepté comme s'il s'agissait de la chose la plus naturelle du monde. Keller ne savait pas pourquoi. Ils s'étaient ensuite retrouvés chez DiSantos, à Oceanside. Keller avait chargé son « ami » en laissant entendre que quoi qu'il soit arrivé à Kise, c'était sans doute de la faute de ce DiSantos. Assez clairement, Keller avait compris qu'il allait plonger, et voulait entraîner DiSantos avec lui. Il disait mal se rappeler son séjour, et n'avait pas particulièrement noté les faits et gestes du mannequin. Keller mentionna que Kise avait dit quelque chose à propos du fait de ne pas retrouver son portable, et de devoir aller travailler, mais il s'était attardé malgré tout et Keller pensait qu'il avait quitté les lieux le 8. Lui, il était rentré deux jours après, et avait découvert qu'on s'inquiétait de la disparition du mannequin. Il avait craint que ça ne lui retombe dessus, et s'était planqué quelques jours avant de prendre la décision de se rendre à Julian, où menait la piste, dans l'idée de retrouver le mannequin lui-même et ainsi s'éviter des ennuis. Mais à la place, il était tombé sur Kagami et Aomine.

« On n'a pas plus de détails sur ce qui s'est passé à Oceanside ?

— Non, Keller prétend avoir plané la majeure partie du temps. Évidemment, la police va aller faire un tour sur place. Qui sait… Kise a peut-être laissé des indices là-bas. Et… j'ai pu négocier avec Lopez. Ou plutôt, elle a parlé à Brownson et… J'ai l'autorisation de l'accompagner. Je vais pouvoir fouiner à ma façon. »

Kagami poussa un soupir de soulagement. Depuis le début, il n'aimait pas cette idée de confier l'enquête à un parfait inconnu, alors même qu'il savait son compagnon compétent, et qu'il s'impliquerait plus que n'importe qui d'autre. Ç'avait été une sacrée source de frustration.

« Sans compter que ce DiSantos a sûrement des trucs intéressants à raconter, dit le rouge. Et y a rien d'autre pour prouver que Keller raconte bien la vérité ?

— On est en train de vérifier. Mais a priori, personne n'a eu de nouvelles de lui après qu'il a quitté la résidence de DiSantos. Ce qui correspondrait avec son histoire comme quoi il s'est planqué.

— Ok, alors on fait nos valises pour Oceanside ? »

Aomine acquiesça.

« On n'a qu'à partir tout de suite. On y sera avant le crépuscule. »

II

Oceanside était une localité huppée blottie au bord de l'océan. Des villas cossues dont les jardins débarquaient directement sur une plage de sable blanc s'alignaient paisiblement sur le littoral. Un petit paradis pour beaucoup, mais Aomine avait l'intuition que ça avait été autre chose pour Kise. Tandis qu'il approchait de la villa de DiSantos, son regard dériva sur l'océan, et il se demanda à quoi son ami avait pensé en contemplant le même paysage. Y avait-il vu une échappatoire ? Avait-il pensé au Japon, très loin par-delà les eaux bleues ? Avait-il eu envie de rentrer chez lui ? Avait-il, pour une raison quelconque, pensé qu'il ne pouvait plus rentrer ?

Ces questions le rendaient fous, mais le blond ne lui avait pas laissé d'autre choix que de les ressasser, encore et encore. Cependant, la piste de DiSantos renouvelait ses espoirs. Kise devait bien avoir laissé quelque chose derrière lui. N'importe quoi, même un minuscule indice ferait l'affaire. Et DiSantos avait peut-être un rôle plus important qu'il n'y paraissait au premier abord. Il avait l'impression que la villa en bord de mer du riche Italien constituait l'une des clés du mystère, et il avait appris à se fier à ses pressentiments. Aussi, ce matin-là, il était plus que prêt à mener son enquête, les sens aiguisés et l'esprit vif.

Quelques minutes plus tard, il s'arrêta devant le portail ouvert de la demeure de DiSantos. Le soleil n'était pas levé depuis longtemps et enveloppait de rayons dorés la maison blanche et vaste, à l'architecture trop recherchée à son goût, mais plutôt impressionnante malgré tout. On devait pouvoir héberger vingt personnes confortablement, ici. Aomine remonta l'allée bordée de cyprès et s'approcha de l'entrée où Brownson, les pouces glissés dans les passants de sa ceinture, discutait avec le propriétaire des lieux. Son adjoint et quelques agents l'accompagnaient : ils disposaient d'un mandat pour fouiller les lieux, et ça risquait de prendre du temps. En revanche, il repéra un peu en retrait une silhouette familière qu'il ne s'attendait pas à voir, et il s'approcha à grands pas pour saluer son ancienne supérieure.

« Hé, Lopez ! Qu'est-ce que tu fiches ici ? »

Elle se tourna vers lui en lui souriant, mais son expression avait quelque chose de crispé qui ne lui plut pas.

« J'avais à te parler. En personne », chuchota-t-elle en prenant un air de conspiratrice qui ne fit rien pour le rassurer. « Mais ça devra attendre », ajouta-t-elle en tournant la tête en direction de l'entrée.

Aomine suivit son regard et examina l'homme dans l'encadrement de la porte. Un quarantenaire à forte carrure, la peau halée, les cheveux noirs mi-longs plaqués en arrière avec la coopération d'une bonne couche de gel, qui s'adressait aux policiers d'un ton jovial sans paraître inquiet le moins du monde. Aomine plissa les yeux. Il n'aimait pas l'aura qui émanait de ce type. Il parlait comme un commercial, avec beaucoup de politesse et de chaleur, mais sans dégager la moindre sincérité. Il rongea son frein pendant que les policiers pénétraient à l'intérieur et commençaient les recherches. Sa présence était tolérée, mais il ne devait pas interférer avec leur travail.

Il s'avança dans un hall éclairé par un dôme de lumière, un double escalier s'enroulant vers l'étage. Keller avait accusé DiSantos d'être un plus gros dealer que lui, mais la police n'avait aucune information à ce sujet, aucun dossier criminel, et la réputation de DiSantos était impeccable. Ce qui ne voulait rien dire, Aomine le savait. Il se pouvait très bien que DiSantos soit simplement beaucoup plus malin que Keller. En tout cas, sa fortune ne faisait aucun doute. Aomine déambula lentement dans les pièces meublées avec luxe, apercevant côté mer une terrasse dotée d'une vaste piscine scintillant paisiblement dans le matin. Tandis qu'il observait la maison, il essayait d'imaginer Kise dans cet environnement. Qu'avait-il fait ici pendant deux jours ? Keller avait mentionné qu'il ne connaissait même pas ce DiSantos. Est-ce qu'il en avait juste profité pour faire la fête sans penser au lendemain ? Ça ne collait pas… Kise avait peut-être ses déboires, mais il avait toujours été très professionnel, et il ne manquerait pas une journée de travail pour pouvoir s'envoyer en l'air ou planer quelques heures de plus. Aomine n'y croyait simplement pas.

Alors qu'il montait à l'étage, il eut la sensation de marcher directement dans les pas du mannequin, jusqu'à ce qu'il lui semble apparaître devant lui, ses bracelets chuintant doucement sur la rampe où il laissait traîner sa main ornée d'autres bijoux. C'était si fort que ça ressemblait à une réminiscence, un écho de sa présence, et non une simple projection de son imagination, et ça lui glaça les sangs comme s'il avait croisé un fantôme.

« Reprends-toi, Daiki. Jusqu'à preuve du contraire, il n'est pas mort », marmonna-t-il entre ses dents.

Quand il vit un agent sortir de l'une des chambres, il se glissa à l'intérieur. C'était une grande et belle pièce, lumineuse, avec un lit king size impeccablement fait. Ses pas le menèrent à la salle de bain attenante, où son regard tomba sur quelque chose qui scintillait sur le lavabo. La réminiscence revint le frapper de plein fouet, et il eut une vision étrangement nette de Kise ôtant ses bijoux devant le miroir. Car cette bague qui avait attiré son attention, il la reconnaissait. C'était la sienne. Il releva les yeux et pendant un instant, il crut croiser le regard du mannequin dans le miroir. Sauf que ce regard, il ne le reconnut pas. Il fixait un parfait étranger qui avait l'apparence de Kise, ou son fantôme qui s'attardait dans la pâle lumière du matin. La vision poussa un bref soupir et s'évanouit, ne laissant que l'écho de son souffle, et la présence scintillante de ces petits morceaux de lui qu'il avait laissés derrière lui. Car Aomine réalisa qu'il y avait d'autres bijoux. Même les piercings. Kise avait tout laissé.

Il approcha du lavabo, le cœur cognant dans ses oreilles, tout autre bruit ou présence balayés à la périphérie de sa conscience. Il tendit la main, avant que ses réflexes professionnels ne reprennent le dessus et retiennent son geste. Il y avait quelque chose d'inscrit à l'intérieur de la bague. Il se pencha pour mieux discerner quand une grosse voix le fit sursauter. Il pivota sur ses talons et fit face à Brownson.

« On n'a pas été présentés, je crois », fit l'homme en lui tendant la main.

Aomine la prit machinalement.

« Daiki Aomine, adjoint du shérif du comté de Dandridge, Tennessee », récita-t-il.

L'homme eut un rire qui sonna désagréablement à ses oreilles.

« Lopez m'a fait le topo. Donc le disparu est votre ami ? »

Il hocha la tête distraitement, son regard revenant vers le lavabo, comme hypnotisé par les bijoux.

« Vous les reconnaissez ? interrogea Brownson.

— Ils appartiennent à Ryota… » murmura Aomine, qui réalisa soudain qu'il vacillait un peu sur ses pieds et qu'il ne pensait plus clairement.

« On dirait que vous avez vu un fantôme », renchérit Brownson en tirant sur sa moustache et en l'examinant d'un air suspicieux. « Vous n'y avez pas touché, j'espère ? » ajouta-t-il en sortant une pochette en plastique pour les preuves.

Aomine grogna, agacé qu'on lui pose une question pareille.

« Bien sûr que non. »

Brownson le dépassa en le frôlant dans l'espace exigu de la salle de bain, ce qui le fit se hérisser, et il s'empressa de quitter la pièce. Il avait besoin de prendre l'air.

III

Quelques heures plus tard, Aomine, Kagami et Lopez étaient assis dans le café le moins bourgeois disponible à la ronde, dans un recoin de la salle où les habitués ne faisaient pas attention à eux. Des surfeurs échangeaient leurs anecdotes au comptoir, élancés, halés et blondis par le soleil, complètement en décalage avec leurs trois visages graves penchés sur leurs cafés amers. Une musique salsa résonnait avec insouciance dans la salle peinte en turquoise claire, ouverte sur la mer et le soleil qui tonnaient à l'extérieur.

« On n'a rien trouvé d'intéressant ou d'incriminant, résumait Lopez. Si DiSantos est un delaer comme le prétend Keller, il cache bien son jeu. La maison était impeccable. » Elle but une gorgée de café et fixa Aomine. « Mais tu as trouvé les bijoux. Ça te semble normal que ton ami soit parti sans ? »

Aomine secoua la tête, portant la tasse à ses lèvres. Le liquide amer lui brûla la langue.

« Je l'ai toujours vu avec. J'aime pas ça. »

Bien entendu, il n'avait pas mentionné sa « vision », mais il avait évoqué la gravure sur la bague, qu'il n'avait pas eu le temps de lire.

« Et DiSantos, il a dit quoi ? » interrogea-t-il.

Lopez mâchonna son sachet de sucre, visiblement très tentée par une cigarette, mais on n'avait pas le droit de fumer ici. Elle soupira et reposa ses mains à plat sur la table.

« Il confirme l'histoire de Keller, en partie. Il dit qu'ils sont de simples amis, en aucun cas des associés. Il a vu Keller à Hyde Park le 6 juin, après la soirée chez Rick Bell. Il était en chemin pour rentrer chez lui après une soirée en ville. Il a remarqué que Keller avait l'air alcoolisé et s'est soucié de le voir conduire dans son état. Il lui a proposé de venir chez lui.

— Pourquoi ? Keller avait l'air de dire que c'est la débauche 24/24h chez lui, pourtant on en a trouvé aucune trace.

— DiSantos se présente comme un type sociable, qui reçoit beaucoup. Bien sûr que ses fêtes sont peut-être plus sulfureuses qu'il n'y paraît. S'il est malin, il a tout bien nettoyé après que l'affaire de ton ami est parue dans la presse. »

Aomine acquiesça d'un grognement.

« Il a pas eu l'air de se poser beaucoup de questions sur Kise non plus, intervint Kagami.

— D'après DiSantos, M. Kise n'a pas dit grand-chose, mais il l'a invité spontanément, puisqu'il accompagnait Keller. Il dit qu'il y a de la place chez lui. Ce qui est un euphémisme, ajouta-t-elle avec un rire bref, rendu rauque par ses habitudes tabagiques.

— Et il s'est passé quoi ensuite ? Kise serait resté deux jours là-bas ! s'impatienta Kagami.

— DiSantos a balayé les questions en disant qu'il ne menait pas d'interrogatoires auprès de ses invités, et que chacun était libre de profiter de son hospitalité.

— Un type en or… cracha Aomine, fixant son café d'un air mauvais.

— Quoiqu'il en soit, d'après lui, il ne s'est rien passé de spécial. Ils ont juste pris du bon temps. Il a confirmé que M. Kise était parti le 8, sans dire où il allait.

— Il est parti comment ?

— En taxi. À l'heure qu'il est, Brownson est en train de suivre cette piste. Si vous vous souvenez bien, le téléphone de M. Kise a borné le 8. Il devait être éteint avant ça… Il l'aura allumé pour appeler ce taxi. Maintenant, reste à savoir ce qu'il a fait jusqu'au 13 juin, date du retrait de 5000 dollars à Julian, et date à laquelle son téléphone a également borné dans cette mêle ville. Évidemment, on continue à suivre son téléphone, mais on n'a plus rien. Par contre… »

Lopez hésita, ce qui ne lui ressemblait pas. Aomine n'osa rien dire, et se contenta de la fixer tandis qu'elle cherchait ses mots. Elle reprit une gorgée de café puis croisa les mains devant elle, dans cette posture qu'elle prenait lorsqu'elle avait quelque chose de pénible à annoncer.

« C'est la raison pour laquelle je voulais te parler en privé, Daiki. Ce que je vais te dire n'est pas officiel, et tu ne l'as pas entendu de ma bouche. C'est clair ? »

Il acquiesça automatiquement, et Lopez planta un regard sévère sur Kagami, qui s'empressa d'hocher la tête à son tour.

« Jusque-là, reprit-elle lentement, on n'avait que le bornage du téléphone, qui permet de le pister géographiquement. Là, on a les relevés téléphoniques. On sait quelle compagnie de taxi il a appelé, ça va être facile de remonter cette piste. Mais on sait aussi qu'il a appelé quelqu'un à Julian, juste avant qu'on perde sa trace. »

Elle fit une pause, et ni Aomine ni Kagami n'osèrent poser la moindre question.

« On a identifié le numéro. Il appartient à Seijuro Akashi. »

Les deux hommes restèrent muets et Lopez les regarda tour à tour avec intensité, son regard fouillant leur expression faciale à la recherche du moindre indice.

« Vous ne savez rien à ce propos, on dirait ? »

Ils secouèrent la tête et échangèrent un regard partagé entre la consternation et la détresse. Qu'est-ce qui était en train de se passer, bon sang ?!

« M. Akashi a quitté la ville, annonça Lopez. Il a pris un billet d'avion pour Atlanta, Géorgie. Ensuite, il a disparu des radars. Impossible de le contacter. »

Kagami se massa les temps. Le 13 juin… C'était le jour où Akashi était venu les chercher à l'aéroport. Il se souvint comme il lui avait semblé livide. Peut-être qu'il venait de recevoir cet appel… Mais pourquoi l'avait-il caché ? Et pourquoi fuyait-il maintenant ?

« C'est presque comme s'il le faisait exprès d'avoir l'air suspect… marmonna Aomine en écho à ses pensées.

— Tu crois qu'il l'est ? demanda Lopez avec sa franchise habituelle.

— Ça n'a aucun sens, répondit le brun d'un ton las. Je comprends pas.

— Eh bien, tu n'es pas le seul, soupira Lopez. Mais on va trouver. C'est notre boulot, pas vrai le bleu ? » poursuivit-elle d'un ton plus énergique, cherchant le regard de Daiki.

Kagami comprit qu'elle cherchait à lui remonter le moral. Elle savait comme ça devait être difficile pour eux, et faisait visiblement de son mieux pour aider. Il en éprouva un élan de gratitude, mais Aomine ruminait ses pensées sans croiser le regard de son ancienne supérieure.

« Évidemment, finit-il par acquiescer d'un air sombre. Akashi savait que ça allait lui retomber dessus, et pourtant, il n'a rien dit. Pourquoi ? Il espère vraiment pouvoir échapper la police ? Et dans ce cas, pourquoi il est pas rentré au Japon ? Ç'aurait été beaucoup plus simple pour échapper aux soupçons ou à une potentielle arrestation…

— De toute évidence, il a un lien quelconque avec cette disparition. Il nous reste à découvrir son rôle exact. »

C'était certain, mais Kagami savait que pour Aomine, ça sonnait comme une trahison. Quelque chose d'impardonnable. Akashi savait quelque chose, et pourtant refusait de le partager. Quoi que ce soit, ça ne pouvait pas justifier de les laisser tous dans le noir. Lui, il ne savait pas quoi penser. Keller et DiSantos apparaissaient de plus en plus comme de simples témoins. Ils avaient bien vu Kise avant qu'il ne disparaisse, mais a priori, rien dans leurs témoignages et les preuves recueillies ne semblaient pointer directement vers une potentielle culpabilité. Kise avait bien laissé ses bijoux chez DiSantos, mais il semblait être parti de son propre chef en taxi. La compagnie confirmerait. Si DiSantos disait vrai… Alors il semblait bien qu'Akashi soit le seul à savoir réellement quelque chose. Et cette idée lui fichait une trouille de tous les diables.