Le lendemain, Annie était particulièrement motivée à obtenir quelque chose du pirate. Elle avait passé une bonne partie de la nuit à réfléchir à comment s'y prendre avec lui. Elle pensait avoir une idée. Il semblait bien moins dangereux que Devon ou Crocodile. Cela dit, il fallait éviter de se fier aux apparences. Il n'en restait pas moins un des commandants de Barbe Blanche.
Elle soupira. Pour la première fois depuis de nombreuses années, elle avait des doutes quant à sa capacité à récupérer les informations. Elle avait un joker, mais… Si seulement elle pouvait éviter de l'utiliser. Si elle le faisait, Portgas s'attendrait aux révélations que l'Amiral ferait lors de son exécution. Il n'était pas censé s'y attendre.
Elle entra dans la pièce en tentant de chasser ses pensées intrusives.
— Bonjour Ace, sourit-elle.
Le pirate lui jeta un regard courroucé par sa familiarité. De quel droit se permettait-elle de se comporter ainsi ?
— J'imagine que vous n'êtes pas bien installé, cela dit j'espère que vous avez passé une bonne nuit.
Ace eut un rire sans joie. Se fichait-elle de lui ? Il se mordit l'intérieur de la joue pour ne pas lui répondre. Il comprenait bien qu'elle cherchait à lancer une conversation en le provoquant ainsi, elle serait bien trop heureuse qu'il joue le jeu.
— J'espère que vous avez pris le temps de réfléchir à notre échange d'hier.
— Je ne dirai rien. Jamais.
— Je vois, j'en suis navrée, soupira-t-elle. Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour vous dans ce cas ?
Ace redressa la tête. Il l'observa attentivement. Il ne comprenait pas bien son rôle. Elle était là pour poursuivre l'interrogatoire, c'était évident. Il serra les dents.
— Je suis condamné, à quoi bon ?
— Même les morts ont des choses à dire…
Il plissa les yeux.
— Tu n'es pas obligé de me dire des choses compromettantes. Raconte-moi ton histoire, simplement. Tu peux me dire que des choses insignifiantes pour la marine, si c'est important pour toi. Je me doute bien que tu ne me diras jamais comment faire tomber ton équipage. Tout le monde s'en doute.
Ace soupira.
— Je suppose que si nous ne parlons pas ces quelques jours seront un véritable supplice.
Un sourire franc illumina le visage de la jeune femme.
— Raconte-moi pourquoi tu as décidé de faire ce travail.
Annie resta silencieuse, surprise par la question.
— Quoi ? Tu ne veux pas répondre ?
— Oh, euh si. Personne ne s'y était jamais intéressé. Ta question m'a prise au dépourvue.
Je suppose que je peux te le dire.
— Je t'écoute.
Ace s'installa confortablement dans la chaise dure sur laquelle on l'avait attaché. Son regard acier se posa sur la marine. Il n'était pas spécialement intéressé par sa réponse, mais il n'avait rien d'autre à faire. Ça lui passerait le temps.
— Cette vocation ne s'est pas imposée d'elle-même, débuta-t-elle. En fait, je voulais être marine à part entière. Je voulais même devenir Amiral !
Elle étouffa un rire à cette pensée. Elle secoua la tête pour se reprendre.
— Je me suis engagée dès que je l'ai pu, se reprit-elle. A chaque fois que j'évoquais ce rêve, on se moquait de moi…
— On ne devrait jamais rire des rêves des autres.
Elle eut un sourire en voyant l'air renfrogné du pirate.
— Tu as raison. J'étais d'une faiblesse affligeante. Aucune force. Aucune endurance. Je ne me suis même pas démarquée en stratégie. Les larmes dévalaient mes joues à chaque fois que quelqu'un était blessé et je ne supportais pas que l'on malmène les prisonniers devant moi.
— Ce qui est assez ironique venant de quelqu'un qui passe la moitié de son temps à Impel Down, commenta le pirate. Et qui tente de plaisanter avec des condamnés à mort.
Elle lui accorda ce point.
— Bien vite, ils ont abandonné l'idée de faire quoique ce soit de moi. Et alors qu'on allait me faire quitter la base d'entrainement, après m'avoir notifié de plus jamais m'y présenter, j'ai rencontré mon prédécesseur. Il cherchait quelqu'un à former pour prendre sa relève. C'est ainsi que je suis entrée dans cette voie. J'ignore ce qu'il a vu en moi, mais il a cru en ma réussite ce que personne n'avait fait avant lui. C'est important d'avoir des gens qui croient en nous.
— Oui…
Le regard de Ace se fit vague.
— Depuis je recueille les histoires des condamnés. Ce n'est pas ce que j'avais imaginé faire, ça ne compte pas vraiment, mais je le fais de mon mieux.
Elle soupira.
— J'espère que ça libère certains de me parler. En tout cas, je veux y croire.
Ace hocha la tête.
— Merci de m'avoir posé la question, ça me fait plaisir.
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