Chapitre 12.
PDV Externe.
Après s'être assuré que le feu était bien éteint, Marco voulut aller dehors pour évaluer l'ampleur de la tempête. Ace l'interrompit a mi-chemin, une expression agitée et soucieuse sur le visage.
-Jewel agit étrangement.
-Comment ça ?
Réalisant que toutes les explications du monde ne pouvaient être assez précises,le brun entraîna un navigateur perplexe, qui voulait penser a l'urgence de la situation et aux dégâts que le bateau était en train de subir mais dont l'esprit était maintenant occupé par la musicienne, qui apparemment agissait assez bizarrement pour perturber son commandant. Ace se perdait en tentatives d'explications et le blond réfléchissait a un moyen de gérer la blanche et la tempête en même temps.
Mais alors qu'ils sortirent sur le pont, battu par la pluie et le vent, il l'aperçut. Et quelque chose lui fit immédiatement comprendre qu'il ne voyait pas complètement la jeune femme telle qu'il la connaissait.
C'était bien la figure de Jewel mais son aura différait de d'habitude, elle imposait une présence plus ancienne que ce que lui même avait pu connaitre. Elle se tenait fermement au milieu du pont, malgré les éléments qui se déchaînaient. Malgré l'eau et le vent qui la frappait de plein fouet, elle ne broncha pas. Il se demanda comment elle pouvait tenir au milieu de ce chaos mais il observa alors que son visage était crispé, elle semblait immergée dans une bataille interne.
Ace le secoua et il revint finalement a lui, les autres attendaient ses ordres. Il regarda rapidement le ciel et la mer puis commença a donner ses directives, il devait crier pour se faire entendre par dessus le rugissement des vagues qui grossissaient au fur et a mesure.
Mais alors que les hommes tentaient de suivre ses ordres, les commandes ne répondaient pas. Les cordes glissaient des mains de leur détenteurs et le gouvernail n'en faisait qu'a sa tête, peu importe la force exercée dessus. Il jeta un œil a Jewel et remarqua qu'elle bougeait a présent ses mains, il fit rapidement le rapprochement entre elle et la perte de contrôle des sauta par dessus la rambarde et atterrit sur le pont principal et s'arrêta devant le gouvernail.
Il reconnu alors enfin celle qui lui faisait face. Marco eu la chance de rencontrer la fantaisie de tous les Marins, celle qui contrôlait les océans et qui n'était jusque là une légende. Jewel, qu'il avait surnommée "petite souris", incarnait la déesse Calypso. Il décida de tenter le tout pour le tout et cria en direction de la blanche.
-Jewel ! Si tu m'entends, c'est le moment de tourner a bâbord !
Il observa la musicienne bouger les doigts, ses muscles pris de convulsions. Les dents serrées, elle fit lentement tourner le gouvernail dans la bonne direction et il s'aggripa a la barre.
-C'est bon, je m'en occupe ! Dirige les voiles dans le sens du vent !
Mais cette fois, son pouvoir fut plus fort que sa volonté et les voiles partirent dans le sens contraire. Il observa alors Ace s'approcher.
-Marco ! Elle n'en peut plus ! Il faut la faire revenir a elle !
-Ne la touche pas, Ace !
Malgré l'avertissement du blond, le 2° commandant s'avança et brava le vent pour parvenir devant Jewel. Il approcha le bras et posa la main sur l'épaule de la jeune femme qui le projeta en arrière avec une force inédite. Ace alla s'écraser contre le mat principal, qui grinça dangereusement suite au choc. Mais au même moment, une vague immense vint s'abattre sur le pont. Il s'accrocha au gouvernail, pour ne pas être balayé par la force du courant et s'inquiéta pour Jewel. Elle tournait le dos a l'océan et n'avait pas vu la vague arriver.
Pourtant, un cri déchira l'espace pendant quelques secondes et la vague se brisa en une multitude gouttes avant d'avoir pu faire plus de dégâts. La voix de ce cri était celle de la blanche, confirmant qu'elle avait retrouvé le dessus sur la déesse. Elle franchit la barrière d'écume en courant et se précipita vers le mat pour le retenir, soudainement frappé par un deuxième éclair.
PDV Interne.
J'avais tué Ace. Du moins, j'en étais certaine. Avec la force utilisée, ce coup l'avait sans doute tué. C'est cette réalisation qui me fit sortir de ma transe dans laquelle mes pouvoir m'avaient plongée. J'ai pu brièvement entendre Marco mais j'avais repoussé Ace contre mon gré. Après avoir posé mes mains contre le mat principal, je décidait de m'entretenir avec mes pouvoirs, la rage au cœur.
"Vous vous êtes assez amusés avec mon corps. Maintenant, c'est moi qui décide !"
Je me mets a pousser de toute ma volonté contre le mat pour le remettre en place. J'appelle à moi les courants aériens pour me contrer et équilibrer de nouveau le pilier. Mon duel interne semblait s'être calmé. Malheureusement, le destin du décider qu'il ne s'était pas assez amusé et une vive douleur commença a pointer dans mes lombaires et l'ignorer ne faisait pas partie de mes choix.
Surplombant le corps inconscient d'Ace, la douleur aussi lancinante qu'un sabre transperça mon dos et je m'écroulais au sol, le visage crispé par la douleur. Tout ce que j'avais ressenti jusqu'ici n'était rien face au déchirement que je ressentais dans mon dos.
PDV Externe
Lorsque Barbe Blanche vint le remplacer a la navigation du gouvernail, Marco eut finalement la possibilité de se retourner et de contempler le corps inerte de la souris. Il se précipita vers elle et ses yeux parcoururent l'ensemble de son corps pour voir ou elle était blessée mais il ne trouva rien d'apparent. Mais le visage de Jewel contracté par la souffrance n'était pas là pour rien.
Alors que deux hommes s'occupaient de transporter Ace, il appela deux docteurs qui la transportèrent a l'infirmerie. Il voulut la suivre mais fut rappelé a l'aide par ses frères. Ils n'étaient pas encore sortis de la tempête et c'était a lui de les guider. Il ne voulait pas la laisser seule, il voulait qu'elle arête de souffrir, elle qui s'était jetée contre le mat pour l'empêcher de tomber et de faire plus de mal a Ace ainsi qu'au bateau. Mais il n'avait pas le choix alors il retourna au gouvernail, là ou Barbe Blanche contrôlait avec vigueur la direction du Moby Dick.
-Père, vous voulez bien accompagner Jewel ? Elle ne doit pas y aller seule. Pas maintenant.
-Je m'en occupe, Marco.
Il lui sourit pour le rassurer et suivit les docteurs. Sachant qu'elle était désormais entre de bonnes mains, il se concentra sur la tempête. Ça se calmait mais rien n'était fini. Il prit fermement le gouvernail entre ses mains et navigua, donnant a ses frères les ordres nécessaires.
PDV Interne.
Si il y a bien une chose que je déteste, c'est d'être considérée comme faible.
Peu importe les causes, je préfère nettement souffrir en silence plutôt que d'entendre quelqu'un adoucir sa voix, changer sa façon de m'approcher et me considérer avec condescendance. Ma mère me disait souvent que je comprendrais, un jour. Je n'ai jamais su ce qu'elle entendait exactement par comprendre mais je n'avais aucun désir de tenter l'expérience.
Pourtant, l'expérience commença d'elle meme, pendant cette terrible tempête sur le Moby Dick, je me blessa.
Concentrée comme je l'étais, je n'avais rien senti venir. Pendant une seconde, je maintenais le mat en place pour sauver mon commandant inconscient et la seconde d'après, une douleur cuisante grandissait au creux de mes lombaires, se transformant en problème inquiétant alors que je perdais ma connexion avec le vent.
La pluie battait sur ma peau et le déchirement dans mon dos me rendait incapable de me concentrer sur autre chose que sur cet élancement poignant parcourant mes muscles. Très vite, je m'écroulais au sol et quelques secondes plus tard, j'étais transportée a l'infirmerie. Ma chute sur le matelas me fit grogner, la douleur semblait empirer à chaque seconde alors que je m'efforçais d'être immobile. Meme ma respiration erratique, conséquence de l'effort physique, secouait mon corps de spasmes.
-Jewel !
La porte s'ouvrit hâtivement et sembla sortir de ses gonds alors que Marco entrait, plusieurs docteurs l'entourant aussitôt, quelques uns lui conseillant de marcher plus doucement, de repartir ou simplement de les laisser faire leur travail. Mais le navigateur avait d'autres plans en tête. D'un regard, il fit s'écarter l'équipe médicale et s'approcha, laissant une infirmière à mon chevet.
-Qu'est-ce qui s'est passé, Jewel ?
Les dents serrées, je tente de reprendre mon souffle pour répondre mais alors que j'ouvrais la bouche, le supplice me submerge et je secoue la tête, impuissante. D'un geste que j'aurais normalement fui avec soin, il leva lentement la main et glissa ses doigts sur mon front pour déplacer des mèches dégoulinantes d'eau.
-Quelque que chose dans son dos a du se tordre.
L'infirmière a mon chevet s'était finalement décidée a parler et elle lança un regard timide au phénix.
-Je ne pense pas qu'on puisse l'aider, simplement lui donner des cachets pour stopper la douleur.
Le blond acquiesce et j'observe les muscles de mâchoire se serrer, à travers mes paupières plissées.
-Faites ce que vous avez a faire pour qu'elle arrête de souffrir.
L'équipe médicale se mit alors en mouvement mais il était le seul a a voir mon attention. Son regard croisa le mien, empli de douleur et il se penche vers moi.
-Ça va s'arranger, je suis là.
Malgré sa voix qui se veut rassurante, je ressens l'inquiétude qu'il éprouve. En dépit de mon inaptitude a répondre, je mis mes derniers efforts dans un hochement de tête. Tout ça devait s'arrêter et vite. J'avale les cachets qu'on me tendit et quelques minutes plus tard, je sombrais dans un profond sommeil.
Les semaines qui suivirent furent compliquées.
Ce fut tout ce que je ne voulais pas. Une fois que la rumeur comme quoi j'étais blessée et en plus incapable de bouger sous peine de souffrir constamment me concernant fut propagée et confirmée, tout le monde se mit a agir comme si j'étais faite de verre. Meme si j'appréciais leurs visites, l'attention qu'ils me portaient et leur inquiétude pour ma santé, je remarquais a chaque fois leur pitié.
Oui, j'étais allaitée mais ça ne signifiait pas une permanence a l'infirmerie. Je souhaitais qu'ils ne me traitent pas comme une biche blessée parce que j'étais toujours la meme fille enjouée qui participait aux activités quotidiennes.
-Personne ne pense que tu es faible, ma fille.
Barbe-Blanche était assis a mon chevet, appréciant ma compagnie et j'appréciais tellement la sienne que je m'étais finalement confiée, observant le plafond.
-As-tu pris tes cachets ?
-Oui, père.
J'expirai aussi profondément que me le permettait mon dos, affligée.
-Écoute, tu l'une de mes enfants, meme si tu le voulais tu ne pourrais pas être faible. La force n'a rien a voir avec ton corps. La force, c'est que tu as dans le crane. Et tu es consciente de ce qu'il y a dans ta tête, pas vrai ?
J'acquiesçais doucement, souriant meme au compliment caché. Après cette conversation, je ne faisais plus tellement attention et acceptais la compassion de ma famille. Père avait raisons, je n'avais pas besoin de faire attention aux apparences. Être blessée ou demander de l'aide ne changeait en rien ma force et j'étais contente d'avoir appris cette leçon contente d'avoir compris ce que ma mère voulait dire.
-Service de chambre !
Je retire mon bras, posé sur mes yeux et la porte de ma chambre s'ouvre sur Tatch, tenant un plateau qui mit immédiatement mon estomac en appétit. Il souriait, les yeux brillants d'espièglerie.
-Chambre 320 ? Jewel Diem ? Jolie musicienne et terrible pirate ?
-Tatch, tu devrais sérieusement arrêter, ça fait plus de deux semaines.
Mais ma réplique, doublée d'un petit sourire ne lui fit rien perdre de son air taquin.
-Ca te fait toujours sourire. J'ai mis plus de légumes cette fois parce que c'est bon pour la forme. J'espère que ça ira.
Il m'amène la nourriture alors que je tente de me redresser. Aussitot, il redresse mes oreillers et grimace alors que j'émets un grognement.
-Toujours aussi mal ?
La première bouchée est toujours aussi bonne. Je lui réponds après avoir avalé.
-Non. Mais c'est toujours là. Après manger, je reprendrai des cachets et ça ne fera plus aussi mal.
Il hoche la tête puis prend un siège, ses cheveux chocolats coiffés en banane brillant de santé dans la lumière de l'après-midi. La curiosité envahit ses prunelles ambrées.
-Est-ce que tu peux te lever, quand meme ?
Je bois une gorgée d'eau puis lui lance un regard amusé.
-Eh bien, disons que je peux poser mes pieds sur le sol pendant 3 secondes sans me plaindre.
Il sourit et pousse doucement mon bras, l'air impressionné.
-Wow, c'est... Nul.
Cette fois, je ne peux m'empêcher de rire.
-Merci pour le plat, c'est toujours aussi délicieux.
-Je sais.
Il finit par se lever et m'offre un regard sérieux.
-Mange tes légumes, je vérifie.
Je hausse les sourcils et acquiesce en souriant. Il sort, me laissant de nouveau compter le temps qui me sépare de ma guérison complète.
