Ecrit pour ladiesbingo sur le thème "Declarations of love". Spoilers jusqu'à la fin.


Ryuuko était toujours abasourdie d'être revenue vivante. La joie d'avoir sauvé le monde, de pouvoir de reposer enfin, alternait avec le deuil d'avoir perdu Senketsu - un deuil aux mots difficiles, quand peu de gens acceptaient que c'était une personne, encore moins qu'il était de leur côté.

Ryuuko avait la ferme intention de ne pas laisser l'amertume la priver de sa vie, de sa soeur retrouvée. C'était juste difficile, parfois.

Elle ne laisserait certainement pas l'amertume la priver du rendez-vous qu'elle avait promis à Mako. C'était une des multiples choses qui lui avaient donné de la force et de l'espoir, quand elle se battait dans le ciel.

Son manque d'énergie se manifestait autrement. Au lieu de faire des plans avec Mako, elle la laissa tout organiser. Je te fais confiance, dit-elle. Et déjà, Mako se frottait les mains, donc cela devait être un bon choix.

Le jour du rendez-vous, Ryuuko se leva et trouva un papier sur sa table de nuit.

"Est-ce qu'on se retrouve directement au parc sous la statue de l'homme nu qui se bat contre un poisson ? Ou est-ce que je t'y accompagne ? Ca ne ferait pas bizarre, d'aller ensemble à un rendez-vous ?

Ryuuko sourit, et soupçonna que quelque part autour d'elle, Mako écoutait sa réponse, ou au moins qu'elle avait des espions.

"On se retrouve là-bas !" dit-elle aux murs, minces et bavards, de la maison. Il lui sembla même entendre le choc étouffé de quelqu'un qui se préparait à partir en courant.

C'était agréable de se retrouver, de faire un peu semblant de ne pas vivre ensemble. Il y avait un stand aux très nombreux parfums de glace. Mako pataugea dans la mare et essaya d'attraper un canard vivant pour le manger le soir.

Tellement agréable, et Ryuuko aurait dû être heureuse, mais elle sentait dans son coeur une tension, la morsure de l'ennui, comme si les combats et les cruautés qu'elle avaient traversées voulaient la rappeler à elle.

C'est alors que Mako monta sur un banc, pour être plus haute, et la montra du doigt.

"Matoi Ryuko !"

"Oui ?" demanda Ryuko. Un instant son esprit pédala dans la purée, et elle se demanda si elle avait raté quelque chose d'important.

"Quand je t'ai demandé un rendez-vous et que tu as dis oui, j'ai pas vraiment été claire. J'avais peur que tu meures et j'ai imaginé tellement de scénarios où tu ne revenais pas, sans parler de ceux où tu revenais, mais tu avais été transformée en écharpe géante." Mako fixa un instant le ciel avec une expression d'indéfinissable anxiété, puis se recentra sur Ryuuko, et serra le poing. "Alors je serai claire maintenant. Tu es ma mailleure amie ! Mais j'ai des sentiments romantiques pour toi ! Je voulais un rendez-vous romantique ! Et si tu as répondu oui sans savoir ce que je demandais, eh bien, tant pis pour moi, mais maintenant c'est clair ! Est-ce que je suis la première à te déclarer mon amour ? Enfin, cela ne change rien, j'aimerais juste être la première."

Tous les promeneurs du parc étaient en train de fixer Mako. Elle le réalisait probablement, mais n'éprouvait pas la moindre honte.

Ryuuko réalisa que toute impression d'ennui s'était envolée.

Elle choisit de négliger la dernière partie du discours, parce que clairement, c'était une façon d'esquiver la vraie question.

"Tu veux dire qu'on devrait s'embrasser ?" demanda-t-elle.

L'effet fut immédiat. Mako s'étangla, devint toute molle, et se laissa tomber du banc, tombant à terre comme une feuille morte.

"Tu vas très vite mais oui," et déjà elle se relevait et sa voix devenait plus énergique, "oui, mille fois oui !"

Ryuuko lui tendit la main, que Mako accepta avec une excitation non dissimulée et une pression des doigts excessive, le rouge lui montant au joues comme un verre de jus de tomates versé avec énergie.

"Tu sais, c'est comme ça que je l'avais pris la première fois. Et j'ai dit oui, n'est-ce pas ?"

Ce n'était pas évident d'en parler si simplement. Ryuuko ne regardait pas Mako directement, se contentant d'un regard en coin, pour être sûre qu'elle faisait les choses correctement.

Mako lui agrippa la taille, manifestement décidée à devenir une extension permanente de sa personne.

Ryuuko décida que cela ne valait plus la peine de faire semblant de ne pas apprécier.