Chapitre 79

Le Domaine Intérieur retenait son souffle.

Leur Seigneur et son épouse avaient disparus en plein milieu de la nuit sans prévenir personne. Comme ils avaient disparu avec une partie de leurs soldats et surtout, leurs assassins personnels, personne ne s'était vraiment inquiété.

Le couple avait bien droit à sa lune de miel après tout.

Maintenant, après six semaines d'absence, ils sentaient tous que le couple régnant allait revenir d'ici peu.

Avec le futur héritier du domaine au chaud ? Ils l'espéraient tous.

Bien loin des espoirs de la cour, Boya somnolait la tête sur le torse de QingMing. Ce qui avait été les premières véritables chaleurs du renard s'étaient lentement calmées grâce au dévouement de son mari. Le pauvre chasseur était épuisé. Depuis une dizaine de jours il pouvait heureusement se reposer un peu.

Après la frénésie des premiers jours où Boya n'avait fait que couvrir et nourrir son mari, leurs jeux sous les couvertures s'était un peu élargis. Comme l'arrière train de Boya d'ailleurs. QingMing lui avait également fait découvrir ses formes féminines dans une joyeuse énergie sans le moindre complexe qui avait étonné le couple. Ils testaient sans se poser de question, ils essayaient et s'amusaient comme des ados. Ca ne finissait pas forcément très bien mais pour l'instant, les quelques acrobaties un peu approximatives auxquelles ils s'étaient livrés s'étaient juste terminées avec quelques bleus, un œil au beurre noir et pas mal d'éclats de rire.

Rasséréné et repus comme jamais, QingMing ne quittait pas des yeux la merveilleuse créature qui dormait dans ses bras. Le renard avait conscience d'avoir été affreux avec son mari une fois que Boya avait vaincu ses dernières résistances. Si les renardes étaient toujours comme ça quand elles avaient faim, il pouvait comprendre pourquoi son espèce était si dangereuse et mal vue. Si Boya n'avait pas été un puissant cultivateur, il serait mort !

QingMing caressa la joue de son mari. Boya soupira de plaisir dans son sommeil. Meme pendant qu'il dormait il savait que son mari était là. Il frotta sa joue contre son torse, se recroquevilla un peu plus contre son renard sans jamais se réveiller.

Ils allaient devoir rentrer au Domaine sous peu, QingMing en avait conscience. Malgré son envie de vivre d'amour et d'eau fraiche avec son mari entre ses cuisses ou lui entre les siennes, ils avaient tous les deux des responsabilités.

QingMing avait la chance d'avoir des gens efficaces sur qui compter. Pendant un temps. Il ne pouvait se permettre de rester encore ici très longtemps. Être à l'abri du monde était une bénédiction évidemment. Mais il restait le Seigneur d'un Domaine beaucoup trop grand pour l'abandonner aussi longtemps qu'il l'aurait voulu. (Enfin, il était surtout un grand nerveux. Il avait laissé la gestion du Domaine à d'autres beaucoup plus longtemps. Là, il y avait juste une petite voix qui ressemblait bien trop à celle de Boya qui lui susurrait qu'il devait être raisonnable)

Ses doigts glissèrent sur la hanche de Boya. Le pauvre humain était couvert de morsures, de griffures et de bleus. Lui aussi d'ailleurs. Si leurs étreintes pouvaient être tendre, elles pouvaient être tout autant passionnées voir brutales.

Un frisson lui remonta dans le dos. Pendant un instant, QingMing eut l'impression que le désir allait encore le submerger. Cette fois pourtant, il fit long feu avant de s'éteindre gentiment lorsqu'il serra un peu plus son compagnon contre lui.

Ses chaleurs étaient finies. Parce qu'ils avaient été productifs ? Parce que le moment était passé ?

QingMing aurait pu le savoir immédiatement mais il n'en avait pas envie. La surprise faisait partie du plaisir après tout. S'il était plein, tant mieux. S'il ne l'était pas, tant pis, ce serait pour la prochaine fois. Alors qu'il avait été terrorisé à l'idée de ne pas pouvoir donner de petit à son mari, cette crainte avait été balayée. QingMing était persuadé qu'il finirait par avoir un petit. Soit Boya le lui ferait, soit il le lui donnerait. La question ne se posait plus vraiment.

"- QingMing ? Ça ne va pas ?"

La main sur sa joue fit soupirer de plaisir le renard démon

"- Boya. Je t'ai réveillé. Je suis désolé."

Les doigts du chasseur glissèrent de sa joue sur ses lèvres.

"- Ce n'est pas grave."

Ils restèrent dans les bras l'un de l'autre jusqu'à ce que l'aube éclaire l'intérieur de leur petite grotte d'une lumière blafarde.

"- Te sens-tu prêt à rentrer ?"

"- Hmmm."

C'était la première conversation intelligente qu'ils avaient depuis des jours. Cette fois, les hormones avaient enfin abandonnées la cervelle du renard.

Boya posa la main sur le ventre du renard

"- Sais-tu si…"

"- Je n'en sais rien et je ne veux pas savoir avant qu'il y ait d'éventuels symptômes."

Boya hocha la tête sans protester ou insister.

"- Très bien." Ça lui allait aussi. Autant se laisser porter par la vague. Et puis avec ce que QingMing lui avait mis, il avait tout autant de chance de porter leur rejeton que l'inverse. Ca faisait partie des pouvoirs des renards après tout, n'est-ce pas ?

Ce n'est que lorsque l'estomac de Boya grogna que QingMing s'étira.

"- Il faut que tu manges." Après des semaines à se faire nourrir, le renard ressentait le désir intense de nourrir à son tour son partenaire.

Avant que Boya ait pu protester, le grand renard blanc à neuf queues bondit de leur nid pour aller chasser pour eux deux.

Boya eut une grimace. Maintenant que QingMing avait retrouvé sa cervelle, il allait forcement réaliser la présence des soldats autour d'eux. Bah. Anbei Furen avait fait ce qu'il avait à faire.

Pour la peine, il profita de l'absence de QingMing pour mettre de l'eau à chauffer pour le thé autant que pour se laver.

Pendant que le thé refroidissait gentiment, il se décrassa vigoureusement, lava ses cheveux qui avaient retrouvés une longueur presque correcte à une main prêt, les natta puis s'habilla de frais.

Lorsque le grand renard revint avec un petit cerf entre les crocs, Boya avait eu le temps de mettre du riz à cuire ainsi que des légumes et des tubercules. Ce ne serait peut-être pas leur dernier repas ici, mais il n'en restait pas beaucoup. Autant utiliser ce qui leur restait.

"- Des soldats ? Vraiment ?"

"- Nous étions en position de faiblesse. C'était plus simple. Et j'avais besoin de me concentrer exclusivement sur toi." Boya n'avait aucun remord.

QingMing soupira. Il ne pouvait rien dire, Boya avait raison. Pendant que son mari continuait à préparer les légumes, le renard écorcha la viande, mit quelques morceaux sur une brochette qu'il posa au-dessus du feu.

Les longues queues blanches s'enroulèrent autour de l'humain qui sourit de leur contact. Il adorait quand QingMing se montrait possessif avec lui.

"- Tu vas te bruler les poils. Je cuisine."

Les bras du renard s'ajoutèrent aux queues.

"- Tu me protègeras du feu."

"- Je peux faire ce que je peux tant que tu ne fais pas n'importe quoi."

Les lèvres de QingMing glissèrent sur la gorge de son mari.

"- Je t'aime mon renard. Mais je cuisine." Insista l'humain.

"- Je t'aime aussi mon humain. Et j'attends que ce soit cuit." Non, il n'allait pas le grimper une fois de plus ou réclamer que Boya le monte encore.

Une fois le repas prêt, Boya se retrouva assis sur les genoux de son renard.

"- Cette fois, c'est moi qui te nourris." Insista QingMing.

Boya se laissa faire avec plaisir. Il n'y avait plus l'insistance et le besoin profond du renard pour s'accoupler. Il pouvait profiter de l'affection réelle de son mari sans que les hormones soient là pour les forcer.

Après le repas, ils restèrent encore dans les bras l'un de l'autre.

"- QingMing ?"

"- Mmm ?"

"- Tu pues."

"- Je n'en doute pas." Il était tout collant alors…

"- Tu me laisserais te laver ?"

Comment le renard pourrait-il refuser l'expression de l'affection de son mari ?

Lorsque le soleil se couchait dehors, Boya avait fini de prendre soin une fois encore de son mari.

Après des semaines, le Seigneur Démon et le Chasseur étaient redevenu eux-mêmes.

Il était temps de rentrer.

Luo Lin attendait le retour de son maitre avec la meme impatience que tout le reste du Domaine. Il avait de la chance d'avoir réussi à se hisser à ce poste. Ils avaient été nombreux à tenter leur chance. Comment avait-il réussit là où d'autres étaient meilleur que lui, il n'en savait rien. Il savait juste que sa famille ne manquerait plus jamais de rien, qu'il pourrait trouver à se marier et que s'il servait bien Anbei Furen, il profiterait tout autant de sa propre réussite. Son boulot était de s'assurer que Anbei Furen ne manquait de rien, que ses finances étaient propres et qu'elles se développaient correctement. Pour un jeune, très jeune tengu comme lui, c'était une belle réussite.

Depuis qu'il était à son service, il pensait avoir fait du bon boulot. Anbei Furen n'était pas compliqué à satisfaire. Il voulait juste avoir la paix, faire ce qu'il voulait et… C'était tout. C'était peu.

Luo Lin avait donc carte blanche pour s'occuper de ses finances et de ses affaires.

La seule difficulté dans la maintenance de son maitre avait été sa demande pour embêter JingYun. Et encore. La demande avait été subtile. A aucun moment il n'avait clairement exigé quoi que ce soit au point que Luo Lin se demandait parfois s'il n'avait pas mal comprit la demande de son maitre.
le yin Yang avait été surpris la première fois que les enfants sauvé de la Capitale Impériale leur avait été apporté. N'étaient-ils pas au courant ?

Ça avait perturbé le démon mais pas assez pour lui faire arrêter les opérations. Pas sans un ordre de son maitre.

Le portail s'était ouvert au milieu des appartements de QingMing.

Le couple en était sorti calmement. A cette heure, ils savaient qu'ils ne risquaient pas de tomber sur qui que ce soit.
Le Seigneur Anbei avait eu pitié des soldats qui les avaient surveillés et protégés pendant ces quelques semaines. Il leur avait ouvert un portail pour leur caserne pour qu'ils n'aient pas à se faire le retour à pied. Les soldats lui en avait été reconnaissant même s'ils avaient toutes les peines du monde à le regarder dans les yeux.

Pendant des semaines ils avaient entendu ses cris. forcément, ça remettait pas mal de choses en perspectives. Leur puissant Seigneur était tout docile sous les mains affectueuses de sa Furen.

"- A-Ming ?"

Le renard chercha immédiatement les mains de son époux qui lui caressa aussitôt le visage du bout des doigts.

"- Nous sommes rentrés."

"- Et ni la Capitale ni le Domaine Intérieur n'ont l'air de s'être écroulés pendant notre absence." Souriait largement Boya.

Il faisait nuit. Une nuit noire mais confortable. Une nuit chaude de fin d'été.

"- Allons-nous coucher, veux-tu ?"

Ils prendraient un vrai bain au matin. En attendant, ils se débarrassèrent de leurs vêtements pour aller s'installer sous les couvertures fraiches et propres de la tanière sur Seigneur Anbei.

Ils s'y assoupirent gentiment. Le Seigneur Anbei était niché dans les bras de son mari comme chaque nuit. Boya le protégeait des terreurs de la nuit avec la plus grande assurance. Une main posée sur le ventre de son renard, l'ancien chasseur déposa un baiser sur son front avant de s'assoupir.

MiChong se faufila dans la chambre. Elle était SURE qu'elle avait senti son maitre revenir.

Elle dut retenir un cri d'excitation lorsqu'elle vit le couple nu enlacé sous la couverture. Beaucoup trop petite la couverture, d'ailleurs. Elle leur couvrait à peine les fesses à tous les deux. Il leur en fallait une bien plus grande pour qu'ils puissent crapuler autant qu'ils voulaient dessous. Un petit sourire aux lèvres, elle remonta la couverture sur l'épaule d'Anbei Furen. Le jeune homme avait maigrit au point qu'elle lui voyait les côtes.
Halala, une fois de plus, elle allait devoir le gaver. Parviendraient-ils jamais à l'épaissir un peu ? A l'inverse, leur Seigneur avait fait du gras. Ce n'était pas anormal. Et si Boya avait réussi à s'occuper de lui comme il l'avait prévu, leur Seigneur n'avait pas dû quitter leur tanière plus de quelques minutes en quelques semaines.

Elle quitta la chambre sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller le couple. Ils avaient besoin d'autant de repos que possible. Une fois seule dans le couloir, elle pria n'importe quel dieu qui voudrait bien répondre à sa demande. Si leur Seigneur ou son époux pouvait porter un petit, elle aurait tout ce qu'elle voulait.

"- MiChong ? Ils sont rentrés ?"

"- Ils dorment."

"- Comment vont-ils ?"

Xue TianGou ne voulait pas montrer son inquiétude, mais elle était évidente. Ils étaient restés absent longtemps.

"- Très bien. Anbei Furen a maigrit. Le Seigneur Anbei a pris du gras là où il faut de ce que j'ai vu."

C'était une bonne nouvelle.

"- Ils sont…"

"- Aucune idée."

Le tengu hocha encore la tête. Les deux hommes pouvaient se reposer autant qu'ils le voulaient. Personne n'avait besoin d'eux pour l'instant. Le Domaine était stable, la Capitale aussi.

Ils avaient le temps.

"- MiChong… non."

"- Mais… Seigneur Anbei… Anbei Furen… Nous avons besoin de…"

"- VOUS n'avez besoin de rien. NOUS ne voulons pas savoir." Insista QingMing non sans gentillesse. "Si petits il y a, nous voulons le savoir à notre rythme et le vivre tranquillement. Personne n'a besoin de se rajouter à notre chambre à coucher et encore moins au contenu de mon ventre ni à celui de Boya."

La petite démone voulu insister mais se tut lorsqu'elle vit les sourcils de Boya se froncer. Elle l'avait déjà vu faire ça une fois et avait été punie. Elle n'insisterait pas.

"- Très bien. Mais vous accepterez que vous soyez nourrit comme si vous étiez tous les deux pleins." Imposa-t-elle. "Au pire des cas, ça remettra un peu de chair sur les os d'Anbei Furen. Il est maigre comme un cadavre."

La proposition était raisonnable aussi ne protestèrent-ils pas davantage.

Intérieurement, ils ne savaient pas s'ils espéraient ou craignait que l'un d'eux attende un petit.

Boya en tout cas espérait très fort que le seul à être plein était QingMing. Ce n'était pas pour lui de porter un petit.

"- Seigneur Anbei ! Anbei Furen !"

Dès qu'ils étaient sorti, les habitants de la Maison s'inclinaient très bas en souriant pour les saluer. Ils leur avait manqué ! Il était aussi évident qu'ils attendaient des informations. Ils voulaient savoir si… enfin, comme les autres, quoi. Ils allaient devoir s'y faire et ne pas prendre mal leur excitation de savoir des renardeaux prêts à rejoindre le Domaine.

Les deux hommes se séparèrent à regret pour reprendre en main leurs devoirs et fonctions. Le Domaine Intérieur et la Capitale attendaient Boya, le reste du Domaine attendait QingMing.

Luo Lin attendait son maitre avec impatience. Après une longue, beaucoup trop longue journée de travail à son gout qu'il avait passé à aider Anbei Furen, Luo Lin voulait lui parler de ses propres biens.

"- Anbei Furen ? Avez-vous un peu de temps à me consacrer ?"

L'aveugle avait mal à la tête. Il voulait rejoindre son renard pour le nourrir et le cajoler. Zhuque lui faisait même la gueule pour avoir osé se séparer de lui si vite après ses chaleurs.

"- Bien sur Luo Lin. Assis toi, je t'en prie." Invita le chasseur avec un soupir.

Son majordome s'assit devant lui avec une inclinaison du buste pour le remercier.

"- Anbei Furen, je suis navré de devoir vous séparer un peu plus longtemps du Seigneur Anbei mais il nous faut parler de vos biens."

Boya prit l'épaisse plaquette que lui tendit le jeune démon. Il grimaça lorsqu'il l'ouvrit, la tête déjà cassée par les listes et les chiffres qui l'emplissaient.

"- En résumé ?"

"- En résumé vos biens sont au beau fixe et votre orphelinat aussi."

"- Mon…Quoi ?"

Luo Lin tressaillit. Ha. C'était ce qu'il craignait.

"- Et bien... l'orphelinat qui a été créé en votre nom à Tiandu. Comme vous le souhaitiez."

"- Comme je… Ce n'était qu'une parole en l'air, Luo Lin."

"- Anbei Furen ! Je suis désolé !" le pauvre démon était réellement horrifié. Son maitre était en position de lui faire regretter son erreur.

Boya l'empêcha de se prosterner devant lui.

"- Bah. Maintenant que c'est fait, c'est fait." Et ce n'était peut-être pas plus mal. Ça n'avait été qu'un vœu pieux, l'expression de son cœur d'enfant qui aurait aimé être sauvé de la sauvagerie de JingYun avant de la connaitre et avoir une autre vie. Même si cette autre vie ne lui aurait pas permis de rencontrer son renard. "C'est rentable au moins ?"

"- Absolument pas. Ce n'est pas le but. Mais le yin yang a accepté de prendre en charge les enfants."

Boya en resta bête. Le yin yang ? Qu'est-ce que….

"- Il va falloir que tu m'expliques tout ça."

Un peu rassuré par le manque de violence de son maitre, Luo Lin prit le thé que le jeune homme lui tendait. Il était comme toujours un peu renversé par la proximité que Boya mettait entre lui et les gens qui le servaient. C'était à penser qu'il ne croyait pas en une hiérarchie stricte. Ou plus exactement, qu'il respectait ses inférieurs. Etrange, mais pas malvenu. Il était plus simple de s'attacher à quelqu'un qui vous respectait qu'à un tyran. Même le Seigneur Anbei n'était pas si ouvert à ses gens. C'était sans doute la différence entre Anbei Furen et le Seigneur Anbei. Dans l'imaginaire collectif, le Seigneur Anbei était le Maitre, Anbei Furen la Mère. Une mère était forcément plus affectueuse qu'un Maitre.

"- Bien sur Anbei Furen." Luo Lin fouilla dans sa sacoche pour en tirer un dossier épais sur l'évolution de l'orphelinat lui-même. "Nous avons pu acheter un petit domaine abandonné au cœur de la capitale. Il appartenait à une famille de moyenne noblesse. Le chef de famille, un général de second rang, a été décapité pour lâcheté. Sa famille en a bien entendu subit les conséquences. La vente de leur domaine a permis à l'épouse et ses enfants de partir loin de la capitale pour refaire leur vie." Mieux valait une vie humble dans la campagne qu'un esclavage cruel. "J'ai engagé une équipe de démons qui ne sortent pas du petit domaine pour encadrer des humains qui font le tour de la capitale. Quand ils tombent sur un gamin des rues, ils l'évaluent et s'il a une chance d'être intéressant pour JingYun, il est nourri et invité à venir à l'orphelinat."

"- Pourquoi juste les shidi potentiel ?"

"- Parce qu'il faut bien savoir quoi faire d'eux après. Il y a tellement de misère que nous ne pouvons pas prendre en charge tout ce qui bouge." Le gronda gentiment Luo Lin tout en retenant son souffle. Allait-il se faire tancer pour sa remarque ?

Mais Boya hocha juste la tête.

"- C'est pertinent. JingYun ne s'intéresse pas aux gamins sans talents. Les priver de shidi est une bonne idée."

Luo Lin s'inclina devant le compliment puis continua.

"- Il me semblait que vous aviez négocié avec le Yin yang pour prendre en charge les enfants, donc je les leur ai fait apporter. Leur manque de protestation m'a confirmé la chose."

Boya secoua la tête.

"- Je n'en avais jamais parlé à qui que ce soit. Tout cela n'était qu'une idée en l'air. Qu'ils aient accepté aussi aisément m'inquiète un peu." Il faudrait qu'il contacte Zhong Xing pour s'excuser de cette situation qui allait forcément les troubler et les déranger. "J'irais voir Zhong Xing pour en discuter avec lui. Peux-tu me trouver quelque chose à lui offrir pour apaiser un peu les tensions ?"

"- Des tensions ? Maitre, je suis désolé de…" Mais Boya le fit taire d'un geste de la main.

"- Tu n'as rien fait de mal. Tu as voulu bien faire et interprété mes souhaits comme un ordre. Ce problème de communication entre nous n'est pas grave ici. Pour l'avenir, je préfèrerai que tu me pose clairement la question si tu penses que j'ai demandé quelque chose mais que ce n'est pas clair."

Là, c'était un détail. Boya avait tendance à marmotter bien des choses qui n'étaient pas forcément bien vues ni intelligentes.

Son majordome hocha frénétiquement la tête.

"- Bien sur Anbei Furen."

"- J'ai toujours eu du mal à communiquer. Alors n'hésite jamais à me demander ou à insister. Autre chose ?"

"- Oui, Anbei Furen. Nous recevons des candidats à votre emploi quasi chaque jour. Vos serviteurs sont assez nombreux mais la masse des demandeurs est toujours aussi forte. Que devons-nous faire ?"

Boya y réfléchit longuement.

"- Vois avec l'épouse de Xue Mao si elle manque encore de bras quelque part. et avec mon général si ses troupes manquent de soldats. En fonction, fait propager la nouvelle. C'est à vous trois de gérer mes serviteurs, Luo Lin. On m'a imposé la présence d'une écurie de serviteurs. Ce que je peux comprendre. Mais si vous êtes là, c'est pour que je n'ai pas à m'en occuper. Alors occupe-t-en avec eux. Si vous décidez d'embaucher encore du monde, soit. Mais point trop n'en faut non plus. Et ils devront tous prêter serment de silence. Comme vous." Une idée fascinante de MiChong quand elle-même s'était recruté deux aides. Quiconque voudrait trahir serait foudroyé par un maléfice latent avant qu'il ne donne la moindre information. On pouvait être généreux sans être idiot. QingMing avait trop de secrets pour risquer d'en perdre une partie."

"- Bien Anbei Furen." C'était une grande responsabilité que Boya donnait là à Luo Lin.

"- Autre chose ?"

"- Non, Anbei Furen. Je ne vais pas vous importuner plus longtemps."

Boya le remercia. Il nota mentalement de lui offrir une petite augmentation pour l'encourager dans son travail de qualité.

Sans le vouloir, un large sourire lui monta aux lèvres. L'idée d'embêter JingYun n'avait été que ça. Une idée.

Et voilà qu'elle existait.

C'est un Boya hilare que QingMing retrouva en début de soirée après une journée bien trop longue sans son chasseur.

Le renard démon se coula immédiatement dans les bras de Boya comme une anguille.

"- Diantre, me voilà cloué au sol par un prédateur dangereux." S'amusa le chasseur. "Ou diable est mon arme ?"

Les doigts de QingMing massèrent gentiment l'entre jambe de son mari.

"- Je crois que j'ai trouvé une épée abandonnée."

"- Ne l'as-tu pas assez faire reluire ces derniers temps ?"

"- Jamais elle me pourra être trop astiquée."

C'était d'un mauvais gout absolu qui les faisait glousser tous les deux.

QingMing cessa de le titiller pour enfouir son nez dans son cou. Le petit coup de langue sur la gorge du chasseur fit frémir lourdement ce dernier de la tête aux pieds. Il se vengea d'un coup de dents sur l'épaule de son renard.

"- Tu m'as manqué Boya." Gémit encore le Seigneur Anbei.

La créature plus large que la vie qui avait fasciné Boya dès leur première rencontre n'était plus qu'un chiot de manchon totalement abandonné dans les bras du chasseur. Lui qui avait toujours eut une estime de soi aussi bas que terre ne pouvait que se sentir grandit par la confiance de son mari. Le Seigneur Démon si fort qu'il aurait pu détruire seul une armée entière se laisser cajoler, protéger et aimer par le petit humain que Boya était. C'était à la fois un honneur et d'une grande humilité pour Boya.

Les petites lèches dans son cou se calmèrent progressivement à mesure que le renard se rassurait d'avoir retrouvé son époux.

"- As-tu diné ?"

"- Pas encore."

"- MICHONG ?"

La jeune démone se précipita à l'appel de Boya.

"- Anbei Furen ?"

"- De quoi diner pour deux s'il te plait. Quelque chose qui fasse plaisir à ma boule de poils préférée. Il est bien câlin ce soir." Souriait Boya tout en caressant la nuque du Seigneur Démon qui en ronronnait de plaisir.

Depuis leur union, QingMing était affreusement sensuel avec Boya. La moindre caresse semblait le satisfaire à un niveau mystique.

"- Peut-être que…"

"- MiChong… non." La gronda gentiment QingMing.

Non, il ne voulait pas savoir si sa réaction venait d'une grossesse, ou s'il était simplement content, ou s'il répondait au fait d'avoir un partenaire. Peu importait la cause. La conséquence était tout ce qui comptait : QingMing voulait sans cesse l'attention de son Boya, quel que soit le type d'attention. Même avoir ses doigts dans les siens lui était suffisant. Simplement être en sa compagnie lui allait.

MiChong n'avait pas insisté. Elle fila en cuisine pour en rapporter un solide diner pour deux, bien chargé en viandes autant qu'en douceurs.

Boya avait toujours QingMing sur ses genoux lorsqu'elle revint. Elle posa le lourd plateau près de l'humain pour qu'il puisse y accéder facilement même sans le voir autant que pour qu'il puisse nourrir leur Seigneur à la main.

Elle ne resta près d'eux que le temps de s'assurer que Anbei Furen avait trouvé le plateau.
Les premiers morceaux de viande étaient déjà entre les lèvres du renard démon qui machait avec satisfaction, les yeux mi-clos.

"- Et n'oubliez pas de manger vous aussi, Anbei Furen. Vous avez beaucoup trop maigri."

Boya tira la langue à la démone qui éclata de rire pendant qu'il marmottait entre ses dents.

"- MiChong a raison, Boya. Toi aussi tu dois manger." Et pour preuve, il attrapa lui aussi un plat pour présenter des petits baos de la taille de bouchée à son mari.

Satisfaite, MiChong les abandonna enfin chez eux. Ils étaient ensemble, elle pouvait prendre sa soirée.

Enfin seuls, si on oubliait Zhuque qui s'était posé sur un meuble et qui n'avait absolument aucun problème à rester lorsque les deux hommes s'aimaient, QingMing finit par nourrir Boya qui dû refuser plusieurs fois la viande que lui présentait le renard avant qu'il n'accepte que Boya soit correctement repus.

Puis les lèvres du Seigneur Démon remplacèrent ses doigts. La faim du renard était comme toujours évidente jusqu'à ce que son mari le satisfasse.

Les deux hommes reprenaient leur souffle sous les couvertures neuves du lit, bien plus grandes et confortables que celles d'avant. MiChong avait encore agit.

QingMing somnolait la tête sur le torse de son mari. Il traçait du bout des doigts des caresses paresseuses sur son ventre, amusé par la contraction machinale des muscles sous la légère chatouille.

"- Boya ?"

"- Mmm ?"

"- Tu semblais très amusé quand je suis arrivé."

"- Luo Lin a été proactif sur mes désirs."

"- Ho ?"

"- Il a installé un orphelinat à Tiandu. Les enfants sont envoyés au Yin Yang. Il est en train de fonctionnellement assécher JingYun."

La satisfaction dans la voix de Boya avait quelque chose de légèrement malsain en même temps qui fit se redresser quelque peu QingMing.

"- Tu ne m'avais pas dit que tu avais intrigué avec Zhong Xing !"

"- Mais je n'ai pas ! Je n'avais émis qu'un vœu pieux a portée d'oreilles de Luo Lin. Et ce garçon a décidé de lui-même de lancer ça."

"- Ce garçon a cinq fois ton âge."

"- Peu importe. Il est efficace."

QingMing pinça les lèvres. Il n'aimait pas trop l'évidente admiration dans la voix de son mari. Tant et si bien qu'il mordit cruellement un mamelon brun qui se durcit immédiatement sous ses dents.

"- A-Ming !"

"- Tu es à moi."

"- Evidemment que je suis… Tu es jaloux ? Juste parce que le majordome que tu m'as trouvé fait du bon travail ?" La voix de Boya était chargée de tendresse.

"- Bien sûr que je suis jaloux ! Tu es mon mari. Tu n'as pas à montrer de reconnaissance envers qui que ce soit. A part moi parfois."

"- ha mon adorable renard possessif et agressif."

Pour la peine, QingMing lui mordit l'autre mamelon. Boya lâcha un petit gémissement de plaisir inattendu qui fit se contracter le ventre du renard de satisfaction. L'un comme l'autre avait encore faim. Leur libido très libre à l'un comme à l'autre trouvait là un exutoire naturel tranquille qui les stabilisait tous les deux.

Ils ne savaient pas s'ils avaient conçu ni s'ils y arriveraient un jour, mais… ça arriverait. Ou pas. Ce n'était plus vraiment de leur responsabilité.