Chapitre 50

C'était dans une atmosphère étrange, à la fois réconfortante et inconfortable, que Dean et l'autre version de Sam s'étaient mis au travail, comme celui-ci l'avait décrété. Le sort que le naufragé avait commencé à élaborer avait semblé constituer une bonne base ; mais il manquait un ingrédient de taille s'ils se référaient uniquement à leurs connaissances en matière de portails interdimensionnels, sans compter l'incertitude de pouvoir ouvrir une voie vers la dimension souhaitée et aucune autre. Pour remédier à ces deux lacunes, ils s'étaient donc employés à rechercher une alternative parmi les livres de la bibliothèque. Combien de fois les avaient-ils déjà consultés dans ce but précis, par le passé ? Ils ne s'étaient pas posé la question. Ils avaient commencé à travailler conjointement, d'abord chacun de leur côté, silencieusement. Dans la gêne. Dean conscient que sa présence était un tison ardent dans le cœur de Sam, et lui, faisant tout pour garder à l'esprit que ce frère n'était pas le sien malgré le fait que toutes les apparences contredisaient cette vérité.

Mais les années-lumière qui les séparaient ne pesaient pas grand-chose face au sentiment de proximité, d'intimité qui les unissait, même par-delà les réalités. Ils étaient beaucoup trop proches de ce que chacun connaissait de l'autre pour résister au désir de jeter un pont entre eux, et la curiosité de ce que chacun vivait ou avait vécu, l'intérêt qu'ils se portaient viscéralement, le besoin de savoir, toujours, omniprésent, prégnant, en avaient posé les fondations. Cela avait débuté par une remarque de Dean, mal à l'aise en raison de la chape de plomb de leur mutisme commun, sur l'endroit où il avait trouvé rangé un lourd volume bardé de fer. Sam, soulagé de pouvoir saisir une perche qu'il n'avait pas eu la force de tendre, y avait aussitôt répondu en évoquant tendrement, malgré la morsure du souvenir, le désaccord qu'il avait eu plusieurs fois avec son frère à ce propos. Une anecdote qui avait instantanément trouvé écho dans la mémoire de Dean. Après cela, peu à peu, les échanges s'étaient multipliés. Étoffés. Chacun livrant un instant de leurs vies respectives, d'abord en trois mots timides, puis de façon de plus en plus précise et détaillée à mesure que l'autre confirmait invariablement avoir vécu la même chose. C'en était même devenu un jeu, à la fin. Une façon de se parler ; de refaire connaissance ; de renouer ce lien impossible, à la fois illusoire et réel. Et dans un ping-pong qui les mena jusqu'en fin d'après-midi, ils se mirent au défi de trouver une divergence entre leurs existences, depuis l'origine jusqu'au moment fatidique où...
Azazel. La mort de Mary. La chasse aux côtés de leur père, des années. Puis la distance. Stanford, Jessica. Et les démons, de nouveau. L'enfer et l'Apocalypse. Les forces du Ciel. Anna. Ruby. Lilith. Lucifer. La guerre au Paradis. La perte de leurs amis les plus chers. Celle d'un autre frère. Leurs ennemis les plus épouvantables. Ceux qui étaient devenus des alliés, ceux qui l'avaient toujours été et qui avaient disparu. Assassinés. Sacrifiés. Crowley. Kevin. Rowena. Charlie. Les Hommes de Lettres, le retour de Mary puis son départ, encore. Jack. Chuck. Et tant, tant d'autres événements, de leurs querelles enfantines à leurs affrontements, parfois jusqu'à la rupture. Les filles séduites puis perdues, parfois dans la douleur. Les doutes. Les regrets. Les mille monstres de tous poils qu'ils avaient vaincus.
Ils s'étaient tout dit. Jusqu'à cette nuit terrible, où Dean, ici, avait laissé la vie, et dont ils ne dirent presque rien. Et ils ne s'étaient pas contredits une seule fois, hormis au détour d'un souvenir altéré qu'à force de mots, ils avaient toujours réussi à remettre en ordre dans leur mémoire pour s'apercevoir sans savoir qu'en penser, que rien ne les différenciait. Ils s'étaient tout dit, du moins...Presque tout. Car face à ce Sam qui n'était que son frère, ignorant du péché qu'ils avaient commis, comment Dean aurait-il pu lui avouer qu'il était aussi maintenant son amant ?

Il s'en voulut de penser cela, de ressentir au creux de ses tripes cette honte qui l'avait longtemps tenaillé, car elle lui donna l'impression d'insulter ce qu'ils avaient partagé et cette place si particulière que son frère prenait de plus en plus dans son cœur, sans qu'il ait rien pu faire pour l'empêcher. Mais côtoyer une version de Sam préservée de la souillure originelle qu'il lui avait infligée, chamboulait considérablement sa manière de penser. Il sentait infiniment ravivée cette étouffante conviction d'avoir commis un acte pleinement condamnable, et savait qu'il n'aurait jamais le courage d'avouer à l'homme face à lui, à quel point leurs rapports avaient été bouleversés. Sam ne soupçonnait rien et ne faisait que profiter de l'instant, chéri comme un trésor sans prix. Assis face à Dean, autour d'une table au beau milieu de la bibliothèque, ils sirotaient une bière, ensemble, tout en parlant.
Jamais le cadet n'aurait cru avoir cette chance à nouveau. Et si c'était un rêve, il ne voulait surtout pas se réveiller.
- C'est un truc de dingue, souffla Dean l'air sonné en repensant à tout ce qu'ils venaient de se dire. Le bunker, la chasse, notre passé... Tout est pareil, jusqu'au poil à gratter que je te versais dans le calbut ! Y'a pas une différence, comment un truc pareil peut être possible ?
Le regard ébaubi de Dean interrogeait Sam qui, les mains serrées autour de la bouteille en verre devant lui, avança après un temps de retard en se forçant à faire bonne figure :
- En théorie, ça n'a rien d'impossible. Les autres mondes qu'on a connus, de ton côté comme du mien, étaient très différents mais ce n'est sûrement pas une constante...
- Différents, ouais, tu parles... la Terre apocalyptique, le Mauvais endroit... ou même le monde d'où venaient nos doubles en chemises de soie, tu sais ?
- Les fils à papa ? sourit lourdement Sam malgré lui.
- Ouais. Je me demande s'ils sont toujours à Rio, ceux-là...
Il avait maladroitement voulu redonner un peu de baume au cœur à Sam, mais ce fut un échec.
- Il existe sûrement une infinité de réalités où les écarts tiennent à rien du tout, supposa ce dernier qui y avait réfléchi. Où la seule différence... tient peut-être au côté du lit où tu poses le pied pour te lever le matin.
- C'est le pied droit, annonça Dean après avoir pris le temps de se remettre en situation.
- C'est juste un exemple, reprit Sam dans un léger soupir, bien plus affecté qu'il l'aurait voulu par cette réponse premier degré qui lui rappela formidablement son frère décédé. En tout cas, en ce qui concerne ton monde et le mien, on la connait, la différence. Y'en a au moins une, t'en es la preuve vivante. Enfin... tout dépend de quel côté on se place.
Dean n'était pas habitué à voir son frère manier l'humour noir et eut la désagréable impression d'y lire un signe peu encourageant quant à sa capacité à surmonter son deuil. L'aîné désespérait de trouver un moyen de le soulager un peu de son affliction, tout en sachant bien qu'une chose et une seule pourrait vraiment l'en guérir.
- Sam, lui dit-il avec tant de force que de douceur, l'air sérieux et sincère. Ça va aller. Je dis pas ça à la légère, je sais que c'est ce qui va arriver parce que t'as déjà vécu ça. Quand j'étais en Enfer. Au Purgatoire. Ou même quand Métatron m'a eu. T'as réussi à surmonter tout ça et je t'ai même retrouvé plus fort qu'avant à chaque fois.
Sam baissa les yeux et eut un mouvement de tête qui montra combien il en doutait.
- Tu enjolives un peu l'histoire, en tout cas la mienne. Ces fois-là... soit je m'étais résigné à ta mort, pour une raison ou une autre, soit j'ai pas lâché l'espoir de te ramener. Mais là, c'est différent. Je sais que cet espoir-là n'existe plus. Je sais que cette fois, je te... je le reverrai plus jamais.
Ses lèvres se scellèrent alors que son visage incliné se figea, éteint et sombre comme une nuit sans lune. Ses désillusions troublèrent Dean, qui lui demanda doucement :
- C'est parce qu'il... est au Paradis, que tu dis ça ?
L'aîné des deux hommes ne comprenait pas l'irrévocabilité et le caractère définitif du renoncement du cadet, alors qu'ils avaient passé leur vie à se ramener d'entre les morts. Littéralement. Il attendit que Sam lui explique pourquoi il avait abandonné, mais ce dernier ne le suivit pas sur ce terrain.
- Parlons d'autre chose, tu veux ? pria-t-il la voix râpeuse en prenant une frêle inspiration. Si on s'y remettait ?
Il se redressa sur sa chaise et se passa hâtivement la main sur le visage sous le regard fixe et silencieux de Dean. Qui, avec un sentiment d'oppression sur le cœur, baissa à son tour des yeux désemparés.
- T'as raison, acquiesça-t-il bientôt en niant son amertume. C'est juste que... même si t'es pas vraiment mon petit frère... tu lui ressembles tellement que je voudrais que tu ailles bien.
Sa sincérité, son empathie ainsi que son affection frappèrent Sam en plein cœur, et il fut bien en peine de retenir ses larmes. Il se frotta les yeux d'un geste rapide, et se força à sourire.
- T'en fais pas, assura-t-il sans même essayer de réellement donner le change tant la tâche était hors de portée. Miracle est là quand j'ai un coup de blues.
Le chien, couché entre eux sous la table, leva la tête vers son maître qui se baissa pour lui gratter l'oreille. Dean sourit, lui aussi, et se réjouit de la présence de l'animal.
- Ce chien est une crème. C'est bien qu'il soit là.
Saisissant l'occasion d'aborder un sujet moins sensible, du moins l'espéra-t-il, Sam se renseigna avec un brin d'anxiété :
- Il n'est plus avec vous, là-bas ?
- Il va bien, mais, pour lui éviter d'avoir à passer son temps dans la bagnole entre deux chasses, on l'a confié à Jody. Les filles en sont folles, il vit sa meilleure vie, avec elles.
- J'imagine qu'elles le chouchoutent bien, fit Sam en essayant de ne pas trop sentir le couteau remuer dans la plaie en pensant à l'Impala qui ne les reverrait jamais ensemble. Mais, ouais. Heureusement que je l'ai.
La mélancolie qui émana du ton de sa voix et de son regard perdu prit une fois de plus Dean aux tripes. Il eut cette fois conscience que la question qui lui brûlait les lèvres ne lui ferait pas de bien, mais il ne put longtemps se retenir de demander à Sam :
- Tu... Tu vois du monde, quand même, Sammy ? Vous êtes pas vraiment tout seuls, toi et Miracle ?
Il avait lui-même senti l'espoir d'une réponse rassurante rendre sa voix moins grave et eut soudain deux craintes : d'avoir meurtri Sam plus encore, et de l'entendre lui dire que, Jack et Castiel partis, il n'avait que son fidèle compagnon pour tromper sa solitude.
À sa grande surprise, l'aîné vit alors le visage du cadet s'éclairer subtilement, son regard se réchauffer, et un véritable début de sourire ranimer ses traits.
- Non, on n'est pas vraiment tout seuls. Eileen est là aussi.
Au bout d'une seconde, il leva les yeux vers Dean qu'il vit figé, les yeux ouverts et les lèvres légèrement détachées l'une de l'autre. Celui-ci avait senti comme un coup de poing dans l'estomac, mais sans la moindre douleur.
- Eileen, répéta-t-il en laissant éclore un sourire pudique. Eileen... Eileen ?
- Eileen Leahy, confirma Sam en souriant de plus belle, capable cette fois de s'amuser de l'air coi de son faux frère.
Dean étira son dos pour prendre une position plus alerte, les yeux braqués sur le puîné qui reprit doucement :
- Quand... Quand tu... Quand il est parti, elle m'a vraiment aidé à tenir le coup. Si elle avait pas été là, ç'aurait été plus compliqué. Je lui dois beaucoup.
À cet instant, Dean lui découvrit un air vivant qui lui fit un bien fou. Il comprit que tout n'était pas si noir dans la vie de ce Sam, et qu'au-delà du choc que son apparition avait malheureusement provoqué, la roue continuait de tourner.
- Je connais cette mine d'ado enamouré, moqua-t-il gentiment. T'as le béguin, toi.
Sam, penchant la tête de côté, ne nia pas.
- On s'est retrouvés, et on s'est rapprochés, ouais.
Dean en prit acte d'un léger hochement de tête songeur. À la lumière de ce qu'il était en train d'apprendre, ses pensées s'évadèrent partiellement vers son véritable frère.
- À quel point ? fut-il curieux de savoir, sans pouvoir empêcher cette pointe d'anxiété de venir lui rétrécir la gorge.
- Au point où on peut dire qu'on est ensemble, déclara Sam en puisant dans ce constat une force aussi fragile que merveilleuse. Une amie avait besoin d'elle mais elle sera de retour dans deux jours. J'ai hâte de la revoir.
Dean prit une gifle. Donnée par une main gantée de laine, mais il la sentit comme si elle avait été réelle. Il était foncièrement heureux que ce frère dont il ne connaissait rien et tout à la fois, cet étranger qu'il aimait depuis sa naissance, puisse poursuivre sa vie malgré son absence. C'était son vœu le plus cher, et le voir se réaliser, même si les circonstances qui y avaient présidé étaient sombres, lui prouva que dans son monde, Sam en était lui aussi capable.
Mais parce qu'il avait sous les yeux la preuve manifeste que son frère pouvait mener une autre vie, une vie qui ne serait pas faite uniquement de danger et de mort, une vie auprès d'une femme aimante porteuse d'espoir et d'avenir, Dean se sentit soudain accablé comme il l'avait rarement été. Parce que, chez lui, la trajectoire prise par Sam était tout autre. Parce qu'Eileen semblait s'éloigner au lieu de se rapprocher. Et parce que les raisons, au moins pour partie, lui étaient connues.
- Ça a l'air de t'étonner, remarqua Sam qui interpréta de façon erronée l'expression affligée de Dean. Mon... double, n'est pas proche d'elle ?
- Quoi ? réagit-il d'un air distrait en levant des yeux vitreux. Oh, c'est... Si, si, mais... Enfin, pas tant que ça. Pas encore ! Je le tanne, hein, parce qu'il a beau être une grosse tête, il voit pas qu'il a trouvé la perle rare !
Le sourire emprunté qu'il exhiba dissimula tant bien que mal la profonde remise en question qui s'empara de lui. Il eut envie de changer de sujet. Mal à l'aise, comme intrus à ce témoignage de bonheur qu'il avait l'horrible sensation d'entraver. Et ce que Sam lui dit alors, ce qu'il l'entendit prononcer et qui se grava au feu dans son esprit, ne fit que l'en convaincre.
- Il ne le sait pas encore, mais il le saura, prophétisa le cadet des Winchester avec une bienveillante assurance. Il finira pas comprendre que c'est de ça dont il a besoin.
Il n'y avait pas de doute dans sa voix. Aucune hésitation ; nulle incertitude. Rien que l'absolue conviction qu'Eileen était son futur, l'unique voie à suivre, et cette brutale prise de conscience, aussi violente qu'une vague déferlante, crucifia Dean qui eut l'impression de ne plus pouvoir respirer. L'ampleur de ce qu'il empêchait, ce rêve devenu presque inaccessible après des années prisonniers de leur destin, lui apparut démesurée. Et déjà groggy, il ne vit pas arriver le coup de grâce.
- Elle est enceinte, tu sais ?

Le temps suspendit son vol et Dean demeura prostré, comme figé dans la pierre. Ce fut trop. Il parut ne pas comprendre, au sens premier du terme, le sens de ces mots, alors que ce fut tout le contraire et que les murs gris de sa vie s'écroulèrent tout à coup pour faire place à un horizon jusqu'ici impossible. Il lui fallut longtemps pour réagir. Être capable de seulement cligner des yeux. Ce qu'il venait d'entendre lui parut relever d'un songe, et s'il répéta le mot, il le fit si bas que Sam le lut sur ses lèvres plus qu'il l'entendit.
- Enceinte, ouais, confirma-t-il. T'as bien entendu. C'est tout récent, mais...
Il dut contenir son émotion pour empêcher ses larmes de revenir lui piquer les yeux. L'expression abasourdie de Dean, cette joie qui couvait sous le couvercle d'une prudence ne visant qu'à se prémunir d'une déception trop grande, était exactement la manière dont il avait imaginé que son frère réagirait à l'annonce de la nouvelle, et il fut heureux, l'espace d'une seconde, d'avoir pu le voir. Même par procuration.
- En... Enceinte, répéta encore Dean, cette fois plus distinctement. Enceinte... ? Ce... C'est bien vrai, vous... Tu vas avoir... un enfant ?
- Pas moi tout seul, souligna Sam d'un sourire profondément ému et plein de chaleur. C'est surtout elle qui va faire le boulot, mais... ouais. Ouais, on dirait bien.
Dean, bouche bée, yeux écarquillés, visait Sam sans pouvoir croire à une bénédiction pareille. Ce dernier semblait soudain si heureux en évoquant l'arrivée prochaine de son enfant, retrouver tant d'espoir, que l'aîné oublia toutes les barrières. De son cœur jaillirent en lui des flots d'amour et d'émotion qui inondèrent ses veines d'une envie irrésistible, et il se leva aussitôt pour aller étreindre celui qui était son frère ; celui en qui il vit son frère.
- Je suis tellement content, pleura-t-il presque contre son cou. Tellement content, Sammy... Je sais que c'est ce que t'as toujours voulu, et ça va arriver... Putain, j'en reviens pas.
Sam, qui avait tout juste eu le temps de se mettre debout pour l'accueillir dans ses bras, resta un instant tétanisé par l'intensité de l'étreinte. Puis il ferma les yeux, laissant ses larmes couler librement, cette fois, et il s'imagina retrouver son véritable frère dont il reconnut l'odeur, les gestes, le timbre. En tentant de se le cacher l'un à l'autre, ils pleurèrent à chaudes larmes, mais chacun capta clairement l'émoi de l'autre car ils ne pouvaient rien se dissimuler et ce ne fut qu'une preuve de plus de la troublante proximité que partageaient leurs deux réalités. Ces embrassades spontanées, libres et inspirées par les sentiments les plus nobles et les plus profonds, n'eurent pas de prix pour Sam, qui se sentit jouir du privilège insensé de retrouver son frère et personne d'autre.
Quant à Dean, incapable de tarir ses larmes, il eut cette pensée, terrible, que mourir avait peut-être été le plus beau cadeau qu'il pouvait lui faire. Et, sachant ce que la vie promettait à Sam, que ne pas réussir à rentrer chez lui ne serait finalement pas si grave.

Son frère, son véritable frère, était très loin de partager cette vision. Le ramener, à tout prix, était son unique obsession, et pour y parvenir il avait besoin de savoir où le chercher, information que les Moires n'avaient toujours pas divulguée. Les Érotes et lui attendaient, en contrebas des vastes marches au sommet desquelles Clotho, la déesse titanesque, avait remis en marche son rouet. Inlassablement, elle tissait, expulsant de ses larges manches des chapelets de filaments qui s'en allaient rejoindre la prodigieuse tapisserie comme des bancs de poissons dérivant entre deux eaux, et eux attendaient. Himéros assis sur un rocher, Pothos debout plus loin sur sa droite, rectiligne, et Sam, à quelques mètres, qui ne cessait de faire les cent pas en se rongeant les sangs.
- Qu'est-ce qu'elle fabrique, maugréa-t-il pour la énième fois. Pourquoi c'est si long...
- Répéter sans fin la même chose ne la fera pas venir plus vite, lâcha Pothos en voyant qu'il se tenait le flanc, encore douloureux.
- Ça fait des heures ! s'emporta Sam en oubliant Clotho qui, de toutes les façons, semblait vouloir les ignorer royalement.
- Et quand bien même attendrions-nous depuis des jours que cela ne ferait pas la moindre différence, rétorqua Himéros. Notre impatience lui est égale. Lachésis l'entretient, même. C'est nous, qui avons besoin d'elle. Pas l'inverse.
Sam lui lança un regard indigné avant de reporter machinalement les yeux sur le majestueux entrelacs où la Moire belliqueuse avait disparu comme en s'enfonçant dans les profondeurs de l'espace. Il la revoyait s'élever dans les airs jusqu'à atteindre la base de l'hypnotique édifice irradiant de lumière, et se fondre parmi les myriades de fils d'or telle une flaque d'eau s'infiltrant entre les barreaux d'une grille. Il y avait des heures de cela. Il fallait qu'elle revienne. Sam ne pensait qu'à cela. Qu'à sauver Dean. Car c'était son frère. Et parce que c'était lui qui, à l'origine, avait poussé son aîné à entrer dans la lutte contre Chaos, se rendant de facto responsable des événements qui avaient entraîné sa disparition. Son sang se mit à bouillir. Il vissa le regard sur la masse sombre de la robe de Clotho, dont on ne voyait rien d'autre que le dos, et ne se vit pas vraiment faire les pas qui l'amenèrent au pied des marches.
- Abstiens-toi, somma Himéros en le surveillant du regard.
Sam sursauta, s'étonnant lui-même de la distance qu'il avait parcourue sans même s'en apercevoir. Il jeta un coup d'œil en biais à l'Érote, puis rattacha son regard à la seule Moire encore présente, occupée à activer le rouet mystique qui faisait entendre sans fin son cliquetis caractéristique. Il repensa à Atropos, opportunément absente. Fatalement occupée à sectionner par milliers les fils déployés à l'infini sous ses yeux, et il en fut plutôt content. Car il craignait que la présence de la troisième déesse de la Destinée ait pu faire pencher la balance du mauvais côté en incitant ses sœurs à ne pas prêter d'oreille attentive, même aux demandes de leurs cousins divins, dès lors qu'elles impliquaient un Winchester. Mais sa tranquillité d'esprit fut loin d'être acquise pour autant, et ce fut même le contraire qui se produisit, quand il se mit à imaginer que si Atropos était invisible, c'était parce qu'elle était concentrée à sectionner le fil de vie de Dean, renseignée par sa sœur sur la déroute de ce dernier. Cela s'était déjà produit. Éros le leur avait dit.
Il s'efforça de rester sourd à ces idées dictées uniquement par la peur mais le souvenir de leur échange avec Costume Blanc persista, si bien qu'en retournant vers les Érotes il interrogea d'un ton suspicieux :
- Pourquoi en êtes-vous venus à parler de nous, elles et vous ?
Sa question prit de court les deux frères, qui n'en saisirent pas le sens.
- De quoi est-ce que tu parles, finit par retourner Pothos, manifestement peu enclin à faire la conversation.
- Je parle de ce qu'Éros nous a dit, le jour où il est venu m'aider. Quand Castiel vous a retrouvés cachés dans votre temple.
Ils revirent le jour et l'instant. Tous deux déplacèrent leur regard d'une mine taciturne, quand Himéros soupira avant de l'inviter à poursuivre :
- Eh bien ?
- Éros a parlé d'une réalité où mon frère est mort, exposa Sam d'une voix ferme. Il le tenait des Moires, c'est que vous et elles avec parlé de nous. Pourquoi ?
En posant la question il se prit à redouter une espèce de complot dont Dean et lui étaient voués à faire les frais. Ce qui n'aurait rien eu de surprenant compte tenu de la propension des dieux à manipuler les mortels selon leur bon vouloir. L'explication des deux frères l'inquiéta, tant par sa teneur que parce qu'il réalisait qu'il avait fini par éprouver une moindre méfiance vis-à-vis d'eux, mais Himéros, qui consentit à apaiser ses doutes, en livra une version des plus banales.
- Peu après vous avoir rencontrés nous sommes en effet venus les trouver pour tenter de les convaincre de prendre fait et cause contre Chaos. Tu as compris tout seul quelle fut alors leur réponse. Nous espérions encore qu'un nombre suffisant d'entre nous pourrait éliminer la menace, mais avec la Bête à nos trousses il fallait agir rapidement, d'autant que Chaos n'était plus le seul à nous pourchasser.
Sam se sentit évidemment aussitôt visé.
- Elles ont été curieuses de savoir quel était ce... Cet autre caillou dans nos chaussures, comme disent les humains. Nous avions entendu dire que vous aviez eu maille à partir avec Atropos, mais sans imaginer sa réaction quand elle a entendu votre nom.
- C'est presque réjouie qu'elle nous a narré comment ton frère ou toi avez péri dans bien des dimensions, dont l'une visiblement très analogue à la nôtre, compléta Pothos avec un certain cynisme. Décrétant qu'enfin, ce brave Dean cesserait au moins là-bas de perturber le cours naturel des événements. Sur l'instant, j'avoue que je n'aurais pas détesté qu'il s'agisse de cette réalité.
Sa saillie gratuitement acerbe durcit d'autant plus le regard de Sam qu'il savait que ce n'était en partie que façade. Il voulut lu cracher la réalité au visage mais en fut empêché en voyant tout à coup les yeux des jumeaux se déplacer simultanément vers les hauteurs et, en en devinant l'évidente raison, il se retourna prestement dans un frisson pour découvrir Lachésis au premier plan, devant sa sœur, au sommet des degrés de pierre.
Sans un mot, elle les écrasa longtemps de son regard condescendant où brillait une étrange malice. Tout entière enveloppée dans sa robe étroite et longiligne, elle avait des airs de sarracenia, et elle ne daigna entamer la désescalade de son promontoire qu'au moment où Himéros, dans un soupir silencieux, consentit lui-même à se lever.
- Mon frère, poussa faiblement Sam dont les yeux fixes ne la quittèrent pas une seconde pendant qu'elle descendit une à une les vastes marches de pierre froide. Il est vivant ?
Elle l'ignora du regard, lui, l'indigne, jusqu'à fouler du pied le même sol que lui.
- Il l'est, annonça-t-elle alors sans lui faire grâce de poser les yeux sur lui. Et il ne l'est pas.

Rassemblés face à elle, à quelques mètres, aucun des trois mâles n'eut l'air de saisir le sens de son propos. Leurs yeux braqués sur elle, ils paraissaient contempler un être énigmatique et indéchiffrable, sa si singulière physionomie renforçant encore l'impression surhumaine, dans tous les sens du terme, qui émanait de sa personne. Les contours fluides de sa silhouette soulignée de clair se détachaient particulièrement du sombre de la pierre qui s'élevait derrière elle, et le noir du dos de Clotho, là-haut, précédant les mille feux des filaments scintillant d'or et d'albâtre au-dessus des têtes jusqu'à des hauteurs qu'on aurait dit célestes, composa une scène tout à la fois grandiose et effrayante qui évoqua à Sam certains vitraux macabres ayant jalonné quelques-unes des affaires sur lesquelles Dean et lui avaient pu se pencher. La confusion le disputa à l'épouvante en imaginant quel sort avait pu frapper son frère pour mériter une description aussi sibylline, et pâle comme un cadavre il toussa :
- Qu... Qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce qui est arrivé à mon frère !
Les longs yeux de Lachésis se fichèrent dans les siens et un frisson glacial le traversa pour le frigorifier jusqu'au bout des orteils. Pothos se rapprocha un peu, pressentant une situation forcément moins favorable qu'ils l'avaient espéré. La déesse leva lentement les mains, dont elles joignit les doigts griffus devant ses seins menus, puis en les écartant de la largeur de ses épaules elle matérialisa entre ses deux index un fil d'une extrême finesse, brillant comme l'or en fusion.

La vie de Dean.

- Est-ce là le sens de tes dires ? défia Pothos pour éviter à Sam de le faire. Tu oserais trancher toi-même ce fil ?
Elle eut un sourire mystérieux tandis que Sam se sentit gagné par une atroce panique.
- Ta duplicité t'appartient, dieu du Désir. Contrairement à toi, les maitresses de la Destinée n'ont pas renié qui elles sont.
L'Érote feignit l'indifférence mais l'allusion aux actes que ses frères et lui avaient commis en dépit de leur raison d'être, dans l'espoir de mieux résister à Chaos, fut un rappel cuisant des torts qui avaient conduit les chasseurs à se lancer à leurs trousses.
- Là est la ligne de vie de Dean Winchester, déclama-t-elle en posant sur le fil un regard solennel. Ton frère est vivant, humain.
Sam, qui osa à peine y croire, sentit soudain un poids effroyable lui libérer le cœur et ses jambes menacer de ne plus le porter. Mais l'espoir lui fut rendu et aux Érotes, qui échangèrent un regard ardent, également.
- Où sont-ils ? exigea de savoir Himéros.
- J'ignore où se trouve Éros. La destinée des dieux leur est propre. Mais celle de l'humain apparaît clairement. Il emprunte désormais un chemin divergent. A confondu les sentiers qui parsèment sa route. Il s'est égaré tout en retrouvant sa place. Il est chez lui.
Elle continuait de servir des propos contradictoires, issus de cette lecture attentive et profonde qu'elle semblait faire de la surface du filament pourtant plus fin qu'un cheveu. Elle parlait, mais ses mots restaient incompréhensibles.
- Chez lui ? répéta Sam qui voulut croire à l'interprétation la plus littérale du propos.
- Son foyer, confirma-t-elle en tordant délicatement le fil d'or.
Le cœur de Sam manqua un battement et il jeta des yeux interloqués vers les Érotes qui, fixant Lachésis, captèrent son désarroi même sans croiser son regard.
- Cela n'a pas de sens, protesta Himéros. Nous sentirions sa présence, si tel était le cas !
- Sauf si c'est son cadavre, que tu évoques, ponctua Pothos sans une once d'ironie.
- Pauvres Érotes, plaignit-elle avec dédain. Tellement binaires... Tellement petits... À l'image de ces primates que vous idolâtrez.
La contemptrice prit le temps d'un soupir silencieux, les laissant goûter le sel de son dénigrement.
- J'évoque un humain au cœur battant, asséna-t-elle. Rentré chez lui. Sain et sauf. Mais suivant la course d'une autre ramification du destin qui vous est inaccessible.
Sam, qui ne l'entendait que souffler le chaud et le froid, eut peur de comprendre. Il vit Pothos serrer les lèvres en une mimique mécontente, et perçut le poids dans la voix sombre de Himéros lorsqu'il conclut :
- Il a basculé dans une autre univers. C'est cela, n'est-ce pas ?
- Tu simplifies à l'excès, réfuta-t-elle tandis que Sam accusa froidement le coup, cherchant à mesurer les vertigineuses implications de ce qu'il venait d'entendre. Ce que tu désignes par le terme absurde d'autre univers, renvoie à une simple continuité sans aucun point convergent avec les autres lignes de l'espace et du temps hormis celui de leur émergence.
Entre ses doigts, elle fit disparaître la ligne de vie de Dean pour joindre l'extrémité des cinq griffes de sa main droite et en toucher le bout de son index gauche. Elle écarta alors ses cinq doigts en les éloignant de l'index opposé, qui servit de point d'ancrage à cinq nouveaux filaments dorés tendant chacun dans sa propre direction.
- Les voilà, tes « autres univers ». Qui jamais ne se croisent. Et dont les similitudes, si similitudes il y a, ne sont que le fruit du hasard. Du jeu des probabilités.
Sam, renvoyé aux expériences qu'il avait vécues au sein de ces univers alternatifs, écoutait sans broncher, partagé entre terreur et fascination comme un écureuil hypnotisé par le cobra. L'idée que son frère fût vivant mais néanmoins perdu pour toujours, lui fut intolérable. Et les fils qu'il vit soudain s'éteindre entre les mains de la Moire, le glacèrent comme si c'était l'espoir lui-même, qui venait de disparaître.
- L'humain a dérivé sur un tout autre chemin, exprima-t-elle. Là où tu parles des arbres de la forêt, je parle, moi, des ramilles d'une même branche. Des nervures d'une seule feuille. Atropos n'a jamais fait mention d'une autre réalité. C'est seulement ce que vos esprits étriqués en ont compris. L'humain que vous avez perdu, est le même que celui qui n'est plus. Il a simplement été poussé sur le rameau voisin, comme un puceron soufflé par le vent. Mais la branche sur laquelle ses différentes incarnations ont prospéré, est la même.
Un silence de mort tomba, et le cœur de Sam se mit à battre si fort que le bruit qui cogna à ses tympans parut assourdissant. Ses pensées, lâchées dans son esprit comme une horde de bêtes folles, s'entrechoquèrent violemment dans le tumulte des affres qui lui dévorèrent le ventre et le paralysèrent, car il ne reconnaissait rien, dans les mots de Lachésis, de ce qu'il avait espéré ou craint qu'il fût arrivé à Dean. Sous la terreur qui le saisit dans ses serres, il perdit le contrôle de lui-même, ne sachant plus parler, plus penser, et les mille questions qui se bousculaient à ses lèvres formant une boule si compacte contre sa langue qu'il ne put en formuler aucune. Il ne comprenait plus rien. Ni au sort de Dean, ni à cet endroit, cet autre monde qui n'en était pas un, que la Moire mentionnait avec tant de mystère. Alors, comme un claquement de doigts l'aurait sorti d'une transe, il eut un vif sursaut au son de la voix de Pothos, qui ricana.
- Je comprends mieux, sembla-t-il s'amuser, froid et cynique, pourquoi ta sœur a paru si satisfaite, quand elle nous a raconté comment Dean Winchester a perdu la vie... Ce n'était pas d'un double lointain, dont elle nous narrait la fin... Mais bien celle de l'homme dont elle avait déjà croisé la route !
Sam le dévisagea d'un air dévasté. Peur et fureur se mélangèrent pour électriser la moindre cellule de son corps, et vomissant son refus d'une telle issue il cria :
- Tais-toi ! Tu dis n'importe quoi ! Elle a dit... que Dean est vivant !
- Il l'est, comprit à son tour Himéros, dont la voix blanche et le regard franc voguèrent droit vers Lachésis. Mais une itération de lui, issue de cette dimension, est bel et bien morte.
Sam le visa à son tour d'un regard déformé d'effroi. Ses neurones incandescents réussirent tant bien que mal à se représenter ce que le dieu de l'Amour venait de dire, et il comprit qu'il prétendait que deux versions de son frère cohabitaient - où avaient cohabité - au sein de sa réalité. Il ne s'agissait même pas d'un alter ego échoué d'ailleurs, comme celui qui s'était exilé au Brésil des mois plus tôt, mais bien du Dean de cet univers, qui aurait existé deux fois. Un postulat inconcevable à ses yeux.
- Vous débloquez, ça n'a aucun sens... Sortez-moi d'ici, je n'ai pas besoin de vous ! Je vais me débrouiller pour le retrouver moi-même !
- Tu souhaitais savoir ce qu'il est advenu de ton frère, tu le sais désormais, mortel ! tonna la Moire d'une voix si pénétrante qu'elle lui glaça la moelle des os. Il a repris le cours d'une vie qui n'est plus, comblé le vide qu'il a lui-même laissé, la réponse que tu cherchais t'a été donnée, ta présence n'est plus tolérée !
Sam renonça à chercher à comprendre, décidant qu'il aurait tout le temps plus tard, quand Dean lui aurait être rendu.
- Attendez ! adjura-t-il en lui jetant un regard vibrant de résolution. Ce n'est pas suffisant, où est-il exactement ? Comment le ramener !
Le vent brûlant, suffoquant, s'abattit sur son visage en même temps que la lumière aveuglante d'un soleil impitoyable. La douleur qui lui incendia les yeux l'obligea à clore brutalement les paupières et en écrasant un bras sur son nez il sentit le sol se dérober sous ses pieds. C'en était fini du cliquetis du rouet ; de l'obscurité ; du froid minéral de l'antre des déesses de la Destinée. En cherchant à conserver son équilibre, il sortit son pied d'une matière molle pour l'y renfoncer aussitôt, et prit conscience à la chaleur pulvérulente qu'il l'enveloppa qu'il s'agissait de sable chaud. Il crut un instant être revenu sur la plage en mer Égée, mais ni bruit des vagues, ni parfum d'embruns. Il rouvrit prudemment les yeux, se réaccoutumant peu à peu à la lumière vive, et le front déjà chaud il découvrit alors un spectacle saisissant d'immensité et de majesté, celui d'un désert de sable blond qui s'étendait de tous côtés jusqu'à l'horizon, et qu'il dominait sous le ciel azur depuis le sommet d'une dune, aussi isolé de tout que s'il s'était lui aussi trouvé dans un autre monde.

Il eut envie de hurler mais aucun son ne passa la barrière de ses lèvres tant sa gorge était nouée de désespoir. Si son frère était en vie, c'était presque comme s'il était mort tant le rejoindre lui paraissait impossible, et accablé d'épuisement il croula sous son propre poids, tombant à genoux dans le sable fin. Il ignorait dans quel coin du monde Lachésis l'avait banni, et cela lui était égal car, où qu'il fût, Dean était plus loin encore. Peut-être sans possibilité de jamais pouvoir lui revenir.
Il demeura ainsi, l'air d'avoir baissé les bras, les senteurs arides et sèches du sirocco venant lui cuire les poumons. Les Érotes furent bien les derniers auxquels il eut envie de penser en cet instant, mais ils ne lui firent pas la grâce de le laisser seul bien longtemps, et Sam perçut la présence de Pothos, apparaissant derrière lui, sans avoir besoin d'entendre sa voix.
- Si tu veux toujours retrouver ton frère, intervint la divinité sur un ton plat, nous allons travailler à chercher le nôtre. Ton concours est le bienvenu.
Sam serra les dents avant de serrer les poings. Et, mobilisant tout ce qu'il put trouver de force et de courage, il se releva.