Bienvenues à toutes sur cette fanfiction ! J'espère qu'elle vous plaira ! Je vous souhaite une bonne lecture !

Bien sûr, les personnages appartiennent à leur créatrice J. K. Rowling !

Il est encore temps

« Il est encore temps. Il est encore temps. Il est encore temps de faire demi-tour. Il est encore temps de partir », me répétais-je en boucle dans ma tête. A chaque pas, à chaque action, je sentais que je laissais passer l'occasion de m'enfuir.»

Je pris un chariot.

Je mis mes valises dessus.

Je pris de l'élan et je traversai le pilier menant à la voie neuf trois-quart. « Il est encore temps. Il est encore temps. »

J'étais dans un état second, comme si je me dirigeais vers quelque chose qui allait m'être néfaste, qui allait causer ma perte. Je savais que je ne devais pas être là, c'était comme contre nature après tout ce qui s'était passé ces deux dernières années… Malheureusement, à part ici, je ne voyais vraiment pas où pouvait être ma place.

Je récupérai mes valises et montai dans le train. J'étais arrivé tellement en avance qu'il n' y avait que peu de personnes à bord. Je choisis le wagon le plus proche de celui où devaient se retrouver les préfets afin de m'éviter de traverser l'ensemble du train à l'heure du rendez-vous.

Il s'agissait de m'épargner le plus de peine… Et Merlin devait savoir que ce n'était pas facile. S'il n'y avait que le regard des gens, je crois que j'aurais pu m'y faire… à la longue… Mais il ne s'agissait pas que de cela. Moi, Drago Malfoy, portait dans mon nom, sur ma peau, dans mes gènes toutes les caractéristiques de l'infamie. Les gens me haïssaient pour ce que j'étais, pour ce que j'avais pu faire et pour ce que je représentais : « un mangemort repenti ». Quelle blague… Mais ce n'était peut-être pas le pire car finalement, la haine qui me blessait le plus, c'était la mienne.

J'avais un tel dégoût pour moi que j'évoluais dans une colère toujours sourde et destructrice. J'avais commis tant de choses irréparables et pourtant, j'étais encore en vie… Alors que tant de personnes irréprochables dans leurs pensées et dans leurs actes étaient mortes… La vie est une succession de hasards, elle n'a pas de sens. La vie est cruelle et la naissance est la chose la plus injuste qui soit. Est-ce qu'on choisit qui on est ? Est-ce que j'aurais pu être quelqu'un d'autre si j'étais né de parents moldus ? Est-ce que j'aurais pu être quelqu'un d'autre malgré mon éducation, en faisant preuve d'une plus grande force de caractère ? J'étais d'une faiblesse méprisable. La peur, voilà la seule raison qui m'avait poussé à agir. La peur de perdre ma famille, la peur de mourir… En voilà une belle idéologie !

Désormais, je haïssais tout ce qui avait pu me prédestiner à cela : ma famille, le Choixpeau, la société entière qui fait que si on est un Serpentard, on est forcément quelqu'un de malhonnête.

Je m'assis sur la banquette, près de la fenêtre du compartiment que j'avais choisis et regardais rêveusement les passagers remonter les quais d'en face.

Je contemplais mes plaies à vif. J'étais un château en ruine : j'avais juste ce qu'il fallait pour tenir certains pans d'orgueil debout mais le reste était littéralement détruit.

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La porte s'ouvrit à la volée dans un bruit de tonnerre, laissant entrer un brouhaha terrible qui fit éclater la bulle de pensées dans laquelle je m'étais réfugié. Un sac atterrit violemment à côté de moi et je vis Pansy Parkinson s'asseoir, ou plutôt se laisser tomber sur la banquette en face de moi. Elle me dévisagea environ trente secondes, poussa un soupir en levant les yeux au ciel, croisa les bras et se tourna d'un quart vers la fenêtre. Alors que j'étais encore en train de me remettre de cette irruption, ce fut au tour de Théodore Nott de se présenter devant la porte qu'il ouvrit tranquillement. Dès que la poignée s'enclencha et que la porte s'entrebâilla, j'entendis à nouveau des bruits de chahut dans le couloir que je pus identifier : « Allez crever, les Mangemorts ! »

C'était exactement pour éviter ça que j'étais arrivé en avance. Tantôt mon orgueil vivace me faisait me rebeller contre ces insultes, tantôt la honte de moi-même me donnait l'envie de me dissoudre dans l'air.

Nott referma la porte de manière tout aussi posée puis finit par se retourner complètement vers nous. Il nous observa un instant en silence puis un faible sourire se dessina sur ses lèvres :

« Y a plus d'ambiance dans le couloir… Vu vos têtes, j'ai presque envie d'y retourner…

-Bah vas-y, on te retient pas surtout, cracha Pansy hors d'elle. Je suis sûre que les Poufsouffles te seront d'agréable compagnie.

Nott pouffa et finit par s'asseoir tranquillement sur la banquette, à côté de Pansy. Il contempla nos mines sombres puis reprit la parole.

-Donc le projet de cette année, c'est de raser les murs en se faisant pourrir par les autres maisons ?

-Oh mais nous attendons avec impatience tes autres suggestions ! Rétorqua Pansy.

Le silence courroucé qui s'installa ne réussit pas pour autant à effacer le sourire de Nott... Un sourire que j'avais bien envie de faire passer : sa désinvolture avait toujours eu le pouvoir de me faire sortir de mes gonds.

-Vous avez raison, je m'excuse, reprit-il. L'humeur n'est pas à la fête. Il ne faudrait surtout pas que nous soyons heureux de nous retrouver, satisfaits de revoir notre école… C'est vrai quoi ! Après tout, ils ont raison : nous sommes forcément coupables puisque nous sommes des Serpentards ! C'est à peine si nous avons le droit de vivre ! Je propose donc que nous fermions tous les rideaux du compartiment et que nous faisions vœux de silence jusqu'à la fin de l'année, pour expier nos vilaines actions ! Malfoy, fais semblant de pleurer, je suis sûr que tu es doué !

-Oh mais tais-toi ! s'écria Pansy. Je ne peux déjà plus te supporter !

-Qu'est-ce que tu cherches, exactement ? grondais-je. Mets-toi à leur place ! Nous avons tous, dans nos proches, des sympathisants : mon père ! Le tien ! Et même moi !

-Mais je ne suis pas mon père ! Et tu ne n'es pas le tien ! Quant à ton enrôlement, ce n'est pas comme si on t'avait laissé le choix ! Pourtant, ça ne t'a pas empêché de sauver Potter dans ton manoir ! Que pourrais-tu faire de plus ?! Ce n'est pas Justin Finch-Fletchley ou je ne sais quel autre petit crétin qui pourrait se targuer d'avoir sauvé la peau du trio.

Il fit une brève pause avant de reprendre plein d'amertume, comme pour lui même :

-De toute façon, tout le monde se méfie des Serpentards et ce, depuis des temps immémoriaux. Comme si en faire partie faisait forcément de nous des personnes mauvaises... Ils ne retiendront jamais que l'année dernière, nous détestions aussi les Carrow et que nous aurions pu défendre Poudlard avec eux si McGonagall ne nous avait pas enfermés dans nos dortoirs. Finalement, cette guerre n'a fait que mettre le feu au poudre.

Je m'avachis sur la banquette en soupirant, tout de même un peu rasséréné par le discours de Nott :

-Avec du temps, ça finira par se tasser... Il faut juste... attendre...

-Mais moi, je vis maintenant. Pas plus tard. Je ne veux rien attendre d'eux. Et franchement, qui a vraiment besoin de l'approbation de ces crétins ? Moi pas. Toi Pansy ?

Pansy répondit non de la tête avec son air méprisant habituel.

-Tu vois Malfoy, on a besoin de personne ! On est ensemble, entre nous, et nous savons ce que nous valons. C'est tout ce qui compte. De toute façon, c'est irréparable. Il ne faut pas être naïf ! Tu crois vraiment qu'un jour Potter va venir te dire « hmmm écoute, je sais que ta tante a tué mon parrain, que tu as essayé pendant toute une année de tuer mon mentor et que l'ami de ton père a tué mes parents, mais ce n'est pas grave, je suis sûr qu'on va bientôt être meilleurs amis » ?

Je soupirais encore et fermai les yeux un instant. Le fossé entre le monde des autres et moi me semblait infranchissable. Est-ce qu'un jour seulement je pourrais les atteindre ? Une chose était sûre cependant : je ne voulais pas d'une vie en autarcie, contrairement à Nott. J'étais trop longtemps resté enfermé, bien à l'étroit dans ce manoir et dans les principes de mon éducation, ma méchanceté gratuite et mon mépris. J'avais besoin d'air et j'avais soif du monde qui s'ouvrait désormais devant moi. Je me sentais comme un ouvrier, j'avais tout à construire et à réparer.

Un bruit d'agitation de l'autre côté de la porte me sortit de mes réflexions. C'était Blaise Zabini qui paniquait. Son pas était pressé et il dut s'y prendre plusieurs fois pour ouvrir la porte. Il entra et la referma précipitamment, visiblement fou de rage.

-Mais vous avez vu ça ? Mais vraiment, est-ce que vous avez vu ça ? On nous insulte, on nous hurle dessus ! Tu entends Malfoy ?! ON NOUS HURLE DESSUS !

Il m'avait attrapé par les épaules et était en train de me secouer comme un prunier tandis qu'il s'égosillait. Je me défaisais de son emprise :

-Oui, oui, je m'en suis rendu compte.

-Il ne faut pas rester comme ça ! Il faut une contre-attaque ! On ne va pas se laisser faire !

-A peine arrivé et tu me fatigues déjà, Zabini, soupira Nott.

-C'est toi qui me fatigues !... sérieusement, vous allez vraiment vous laisser faire ?

-Et que veux-tu faire ? demanda Nott agacé. Les provoquer en duel un par un ?

A cette question, il n'y eut pas de réponse. Blaise s'avachit sur la banquette, l'air véritablement abattu. Pansy s'empressa de le consoler. Je me levai tranquillement, essayant de cacher le tremblement dans mes jambes : il était temps que je rejoigne les autres préfets.

Comme les effectifs de Poudlard avaient été pratiquement divisés par deux, un seul préfet par maison avait été nommé. Malheureusement, c'était moi qui avais été désigné pour Serpentard… Comme si j'étais capable de m'occuper des autres ! Je ne savais déjà pas quoi faire de moi-même... Nott s'en serait beaucoup mieux sorti. J'ouvris la porte lentement, pour me préparer au flot d'insultes. Mes trois amis me sourirent moitié par pitié, moitié pour me rassurer. Comme un encouragement, Nott me rappela :

-Quoi qu'il se passe lors de cette réunion, n'oublie pas : on est ensemble et c'est tout ce qui compte. Les autres et leur haine, on s'en fiche.

J'acquiesçais d'un signe de tête et sortis en leur lançant un dernier regard, sans m'apercevoir que quelqu'un se trouvait juste devant moi. Évidemment, l'inévitable se produisit : je lui rentrai dedans.

Hermione Granger. Il FALLAIT que ce soit Hermione Granger. Ça ne pouvait pas être un 1ère année qui finirait à Poufsouffle ?! Je sentis mon cœur rater un battement. Et vu la tête de celle-ci, elle devait au moins être aussi ravie que moi de cette situation…

-Malfoy…

-Granger…

Je la voyais trembler de tout son corps. Comment aurait-il pu en être autrement ? Comment ne pas penser en se voyant à ce qu'il s'était passé l'année dernière ? C'était tout simplement impossible. Elle continua sa route jusqu'au wagon des préfets. Tandis que je me retournais vers la porte de mon compartiment pour la fermer, je vis les visages pâles de mes amis. Une héroïne de guerre, ça impressionne… Même ceux qui veulent vivre en autarcie.

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J'entrai dans le compartiment des préfets. Il était spacieux et confortable. Trois personnes avaient déjà pris place : Hermione Granger, Justin Finch-Fletchley, pour la maison Poufsouffle et Padma Patil pour la maison Serdaigle. Par-fait. Je devinais que ces dernières heures allaient être particulièrement réjouissantes. Je sentis leurs regards chargés de haine et d'incrédulité se poser sur moi. Oui, j'osais revenir à Poudlard. Cette tension me fit baisser les yeux et malgré mes efforts, je n'arrivai pas à les lever. Je sentis alors toute l'humiliation et la honte de la terre fondre sur moi et m'arracher le cœur. Mais soudain, comme un réflexe de survie, comme un bouclier de fortune, une colère sourde naquit en moi. C'était une rage de vaincre qui brûlait mes joues et bourdonnait à mes oreilles.

Ils pensaient triompher de moi, m'écraser de leur supériorité de vainqueur. En moi, ils voyaient une déchéance mais moi, je voulais voir une renaissance ! J'étais un homme désormais libre de ses mouvements et de ses pensées avec sa propre définition du bien et du mal, que personne ne saurait m'imposer. Je devais me faire pardonner, m'accepter moi-même avec mes erreurs, me faire oublier, peut-être, mais humilier, jamais ! Que pouvaient-ils savoir de ce que j'avais pu vivre, eux, avec leur petite vie toute tracée ? A ma manière, j'étais aussi un survivant. Je relevai la tête dans un effort qui me parut surhumain en affectant un air tranquille et m'assis dans le fauteuil le plus proche. Les trois autres étaient assis à côté les uns des autres et se parlaient à voix basse. Cette discussion n'était pas menée dans le but que je l'entende. Ils prenaient des nouvelles de leurs familles respectives je crois.

Soudain, Granger se redressa :

-Qu'en penses-tu Malfoy ?

Je sortis brusquement de ma torpeur. Les autres me regardaient sévèrement.

-Malfoy ne participe pas aux conversations de personnes qui ne sont pas du même rang que lui, excusez-le, minauda Padma Patil.

-De toute façon, ils sont tellement peu à Serpentard qu'il n'y a même pas besoin de préfet, continua Justin Finch-Fletchley.

Je puisais dans mes dernières réserves journalières de patience pour contenir mes réponses acerbes et ne pas aggraver mon cas. Cependant, je ne pus me retenir de leur jeter un regard plein de tout le mépris dont j'étais capable et les sentir se raidir avec satisfaction.

Granger, quant à elle, ne répondait pas aux regards complices des deux autres. Concentrée sur sa feuille de parchemin sur laquelle elle notait le compte rendu de la réunion, elle s'était rembrunie.

-Nous étions en train de dire qu'au vu des effectifs, le nombre de classe était divisé par deux en sixième et septième année. Et qu'une table dans la grande salle pouvait être libérée. Je pensais qu'il pourrait donc être profitable de…

Elle ménagea un silence en regardant d'un œil suspicieux les préfets de Poufsouffle et Serdaigle.

-… ne plus compartimenter les maisons et de laisser les élèves se placer où bon leur semble.

Les autres avaient blêmis. Visiblement, ils n'osaient pas la contredire mais n'en pensaient pas moins. Je trouvais cette idée intéressante, même si je ne me faisais pas d'illusion concernant l'intégration des Serpentards.

-En fait, en sixième et septième année, il n'y aura qu'une classe par niveau. Nous serons donc tous les quatre dans la même classe pour les mêmes cours. Je compte vraiment là-dessus pour montrer l'intérêt de renforcer la coopération entre les maisons et non pas la compétition, comme cela a toujours été.

Hermione était lancée dans ses explications. Elle avait de l'ambition, et je trouvais que ses idées étaient loin d'être idiotes. Non pas que je doutais qu'elle puisse avoir de bonnes idées, mais j'étais frappé par leur justesse.

-Alors, me demanda-t-elle, qu'en penses-tu ?

Je ne comprenais pas bien ce qu'elle attendait de moi. Est-ce qu'elle ne me haïssais pas, comme tout le monde ? Elle avait de quoi en plus ! Alors pourquoi chercher à tout prix à m'intégrer alors qu'elle pouvait très bien se passer de mon avis ?

-Je suis d'accord, dis-je sans vraiment avoir pris me temps de réfléchir à toutes ses idées.

-Très bien, dans ce cas j'avertirai Mme la directrice de notre proposition dès ce soir. Je pense que nous en avons fini pour aujourd'hui. En tant que préfète en chef, je déclare la séance levée.

-Je retourne dans mon compartiment pour mettre ma robe de sorcier, annonça Finch-Fletchley.

-Moi aussi, ajouta précipitamment Patil.

Il était clair qu'ils avaient hâte de partir et toute occasion était bonne à prendre. Ils me lancèrent un dernier regard noir et s'en allèrent. Hermione resta là sans un mot, terminant de rédiger le rapport de la –très courte– réunion. J'étais cloué dans mon fauteuil. Il aurait fallu que je trouve quelque chose à dire, mais c'était peut-être trop demander à mon cerveau embrumé. L'attitude d'Hermione m'intriguait. Tout semblait trop facile. L'avis d'Harry et de Ron, je m'en fichais éperdument : à l'intelligence médiocre, ils avaient un don pour prendre de mauvaises décisions et sans doute seraient-ils morts dès la première année sans elle...

Mais elle, avait toujours été différente à mes yeux. C'était d'ailleurs sans doute pour cela que je m'acharnais sur elle, avant. Plus douée, plus vive, plus solaire… J'avais l'impression qu'elle n'avait pas de côté sombre et que les seules choses que je ne soupçonnais pas chez elle ne pouvaient être que lumineuses et resplendissantes. Cela me frappa sur l'instant, la lumière du soleil derrière elle déposant sur sa chevelure châtain de délicats reflets miel. Et comme à chaque fois que mes paroles et mes actes dépassaient mes pensées, la culpabilité, cette vieille amie, vint frapper à la porte de ma conscience. Elle me chantait le même refrain depuis ma première année à Poudlard. Ce même refrain qui s'allongeait au fil des ans et de mes erreurs. Je maudissais alors tout ce que j'avais pu dire ou faire de malheureux. Jusqu'à quel point mon comportement avait-il été absurde ? A quel point ma vie avait-elle manqué de sens ? Comment se fait-il que des personnes comme Hermione, aussi simples, puissent exister dans un monde aussi sombre ? Je voyais en elle une sorte de solution, une sorte d'évidence, une lumière au bout d'un tunnel. Comme si elle était capable de changer la marche du monde et moi avec. Comme le sauvetage d'un homme à la mer. Toujours, elle me désarmait de mon mépris pour les autres et de mon orgueil. Aujourd'hui, face à elle, j'étais cette ruine nue, mais je savais, comme par une intuition qui me dépassait, qu'elle saurait me reconstruire. A ce moment, je n'avais plus d'orgueil et j'aurais été prêt à m'abandonner complètement à sa volonté.

-Tu ne vas pas te changer aussi ? Demanda-t-elle d'une voix froide.

-N…non…

Elle me dévisagea avec un air inquisiteur.

-Qu'est-ce que tu attends ?

-Rien, répondis-je en me ressaisissant.

J'affectais de nouveau un air tranquille, mal à l'aise.

-Alors sors. Je veux terminer rapidement.

Elle s'était mise à trembler et je sentais une sorte de panique l'envahir, même si elle arrivait à feindre le calme. Soucieux de ne pas rajouter à son trouble, je me levai rapidement mais elle m'arrêta avant que j'ouvre la porte.

-Je n'attends rien de toi. Ne parlons pas du passé, je n'en vois pas l'intérêt, le mal est fait. Nous essaierons de collaborer en tant que personnes civilisées, pas la peine d'en faire plus. De toute façon, ni toi ni moi n'y croirait.

Je serrai la mâchoire. C'est ce qu'on pouvait appeler un atterrissage brutal. Je me rembrunis.

-Je ne suis pas plus ravie que toi à l'idée de coopérer, reprit-elle, mais je pense qu'il est important que nous nous fassions un minimum confiance. Je sais que tu es capable de t'investir, lorsque cela sert tes intérêts.

-Vu le peu d'élèves à Serpentards, je n'aurais sans doute pas grand chose à faire, de toute façon, répondis-je avec ma nonchalance et le ton traînant qu'elle me connaissait, pour donner le change.

Elle fit une moue que je ne sus pas interpréter, acquiesça puis se replongea dans son travail. Je sortis. Ainsi, j'étais fixé. Une entente froide. Très bien. Je n'en attendais pas autant et aussi facilement. Je réprimais cette espèce de sentiment, de soif, qui me propulsait vers elle, comme un besoin d'elle… Comme si elle était cette bouée à laquelle je pouvais m'accrocher. Elle était « normale », elle, pas comme les Serpentards, seules personnes avec lesquelles j'entretenais des liens.

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Hermione avait du mal à se ressaisir. Elle dut fermer les yeux et se concentrer sur sa respiration pour essayer de la calmer et apaiser le tremblement de ses mains. Elle savait qu'en acceptant d'être préfète elle serait forcément amenée à côtoyer Malfoy mais elle ne pensait pas que cela la perturberait autant… Il osait se trouver là ! Plus fort et plus… Malfoy que jamais ! Affectant un air distancié, ne se mêlant pas à la conversation, semblant toujours mépriser autrui, assis négligemment sur son fauteuil et passant continuellement ses mains dans ses cheveux avec nonchalance. Il avait toujours ce même visage dur et son regard froid qui semblait vouloir transpercer tous ceux qui essayaient de le sonder. Hermione commençait sérieusement à douter de son aptitude à lui faire face. Sa rancœur rendait sa présence insupportable et, plus que tout, comment passer outre ce qu'elle avait vécu dans le manoir de sa famille ?! C'était tout simplement impossible. Le voir était synonyme de souvenirs atroces. Or, elle, tout ce qu'elle voulait, c'était oublier, effacer sa mémoire, cloisonner, enfermer ses angoisses dans un coffre et les noyer. Cela suffisait. Hermione stoppa net ce tourbillon de pensées qui serait capable de la dévorer. Elle regarda par la fenêtre et reconnu le paysage : il arrivaient. Elle rangea sa plume et revêtit sa robe de sorcier alors que le train commençait à ralentir.