Thème 62 : La Liste

Alors qu'il est triste de la séparation forcée avec son compagnon ou sa compagne, votre personnage décide de rédiger une liste sur tout ce qu'il pourrait faire pour montrer à l'autre à quel point il peut l'aimer. Si cela commence sagement, au fur et à mesure cela devient de plus en plus fou. Sa liste doit avoir au minimum 10 choses.


Léo avait posé des scellés magiques sur la porte de sa chambre pour empêcher quiconque d'entrer.

C'était une précaution bien inutile. Après les bruits de fracassements et de chocs sourds qui avaient retenti entre les murs de sa suite, personne ne se serait risqué à s'approcher de la porte. En fait, la fratrie royale avait même fait évacuer toute cette aile du palais et interdisait formellement à qui que ce soit d'y pénétrer.

Aucune personne, autre que Nyx, dans le château, n'était un assez bon ensorceleur pour créer des boucliers magiques derrière lesquels ils pourraient s'abriter en tentant de le raisonner. Léo était inapprochable. Ses pouvoirs étaient tellement déchaînés, il était trop dangereux.

Le jeune mage ne s'en rendait même pas compte. C'était comme malgré lui que les étagères sculptées, les tables précieuses et les candélabres d'argent tremblaient autour de lui. Elles vacillaient de plus belles lorsqu'il repassait devant elles et ça arrivait souvent : il effectuait de frénétiques cents pas dans le salon principal de ses appartements. Cinq ou six volumes jaillirent d'une étagère pour voler jusqu'au mur d'en face; une liasse de papier se libéra de son presse-papier en cristal et minuscules topazes – cadeau de sa famille – et s'aligna au centre du bureau. Un encrier déborda mais Léo ne le remarqua toujours pas : il se plaça seulement devant celui qui était intact et lui prit sa plume pour commencer à écrire.

Nyx, ma bien-aimée, ma si chère enchanteresse,

Sitôt revenu dans cette chambre qui m'a fait renaître par vos bras, je redirige mes pensées vers vous. C'est un errement voulu et volontaire, car je ne saurais, même fortuitement, vous chasser de mon cœur.

On me proposerait l'amnésie pour purger ma peine que je ne l'accepterais pas. Je souffre tellement de notre séparation et pourtant, contre aucun apaisement au monde je n'échangerais les moments que vous avons vécus. Ils resteront gravés au fond de moi pour l'éternité car les perdre, ce serait comme me perdre moi-même, oublier la personne que je suis devenue à vos côtés.

Vous avez sans doute du mal à le croire. Les menteurs et les hypocrites vont ont déjà si souvent abandonnée par le passé et j'ai poursuivi cette sinistre habitude en rompant nos liens à mon tour. Cependant, sachez que je n'ai agi ni par crainte, ni par désamour. C'est ma famille qui m'y a poussé, arguant que mon comportement avait changé depuis le milieu de l'été, où nous nous sommes fiancés. Je n'ai fait que ce que j'ai toujours fait pour soutenir mon frère : lui obéir en tout.

J'ai pourtant votre bonheur à cœur et je suis prêt à défendre votre honneur quoi qu'il arrive. Il ne sera pas dit que vous êtes responsable de la fin de notre relation. Je dirai que c'est de ma faute, que je suis incapable de vous rendre heureuse et que c'est pour cela que j'ai résolu de ne pas vous épouser. Cela me coupera de nombreux partis avantageux, puisque je suis le cadet de tous sauf d'Élise. Je n'ai rien à léguer à une potentielle compagne de beau milieu, pas même un espoir d'accéder au trône pour nos enfants. Si on me pense ingrat de corps, aucune n'aura de raison de me courtiser. Je suis prêt à ce que la lie soit sur moi, je suis prêt à demeurer sans les bienfaits des étreintes charnelles toute ma vie, je suis prêt à ne jamais devenir père, pour vous.

Ma famille va nous imposer une séparation radicale, plus définitive que vous et moi à Krakenburg avec l'interdiction de nous rencontrer. Je le sais. Je les connais bien. Cette idée me fait terriblement peur. J'ai presque besoin d'une pause pendant que je vous écris… la sensation de vos bras autour de moi me manque déjà terriblement.

Peut-être pourrais-je tenter de leur désobéir ? Vous voir en cachette durant la nuit ou lorsqu'ils me penseraient occupé à autre chose. La vie d'un prince laisse peu de place à l'oisiveté mais je sacrifierais mes devoirs pour vous. Oui, même si cela me coûte, j'abandonnerais le côté de Xander à qui j'ai promis de toujours prêter assistance. Je rendrais plus pénible la vie de Corrin et d'Élise par l'imposition d'une charge de travail qui me reviendrait et qui doit de beaucoup sa lourdeur à l'absence de Camilla. Vous qui me connaissez bien, vous savez déjà que cette décision me pèse. J'ai tellement de ferveur pour la politique, l'administration et la diplomatie; m'en tenir éloigné me peine presque autant que de l'être de vous !

Cette plaisanterie m'a distrait de ma douleur un instant mais la voilà qui ressurgit. Il m'apparaît que les choses pourraient être beaucoup plus simples, ma bien-aimée, si je pouvais me dispenser de me soucier de mes frères et sœurs. Nous saurions être heureux ensemble. Les avoir à mes côtés ne m'est pas indispensable… Je serais capable de les oublier.

L'ennui vient de leur côté : les liens qui nous unissent tous les cinq sont si forts que, lorsque nous arpentons la surface de ce monde, un sentiment invisible nous accorde les uns aux autres. Ils ne renonceraient jamais à moi. Je suis prêt à utiliser la magie, qui effacerait mon existence de leur mémoire, mais quand à ce qu'ils cessent de la ressentir par leur cœur, cela me semble difficile.

S'ils n'étaient pas en vie, ils ne pourraient plus ressentir, évidemment. J'ai peur de ce que je suis en train de vous écrire, mais l'idée s'insinue déjà lentement dans mon esprit. La voilà qui s'y ancre plus fermement. Oui, si mes frères et sœurs ne faisaient plus partie de ce monde, je serais libre d'être votre compagnon et vous ma compagne.

Ce bonheur me semble si primordial que, après tout, pourquoi ne pas être fou, pour une fois ? Ôtons de l'existence mes deux frères aînés, ma sœur aînée et ma sœur cadette, d'une façon douce et brève qui leur évitera toute douleur. Je ne souhaite pas les voir souffrir et je sais qu'ils ne le désireraient pas non plus pour moi : de cette façon, je serai heureux et je pense que, dans l'au-delà, ils le seront aussi.

J'ai hâte de vous revoir, ma très chère Nyx. Sachez que mon être, mon cœur et mon esprit vous appartiennent, pour toujours.

Léo.

Debout derrière la grille de la prison princière, quatre silhouettes floues regardaient Léo en train de se débattre. Il ne percevait pas leurs visages, seulement leurs voix.

« Quelqu'un devrait y aller. Ça fait trois heures que nous n'intervenons pas de peur d'aggraver les choses et sa condition ne s'est pas améliorée.

-Corrin, ta présence a quelque chose de très apaisant, c'est ce qu'il t'a dit l'autre jour, non ?

-Vous plaisantez ? Je suis le seul avec lequel il a des problèmes, ça ne va rien arranger.

-Sa magie, sa combinaison à celle de Nyx et leurs rituels mystiques lui ont fait perdre l'esprit. Nous devons immédiatement les séparer davantage ! »

Ainsi parlaient les frères et sœurs de Léo sans qu'il puisse les comprendre. Le peu de présence d'esprit dont il disposait encore le tournait irrémédiablement vers Nyx. Il avait besoin d'elle à un point où ç'en était devenu malsain. Et la magie noire n'avait besoin que d'émotions négatives pour s'accroître, affirmant sa prise sur un jeune homme qui, parce qu'il en voulait à sa famille, n'avait aucun sentiment d'amour positif auquel se raccrocher.


Le potentiel à hurt du LéoxNyx est infini.

Les deux raisons principales : la magie qui est trop puissante en chacun des deux et l'écart d'âge que ne comble pas forcément la maturité de Léo.