Il était arrivé un jour d'automne, un mardi. Toute la journée, la pluie n'avait cessé de tomber, et Augusta avait préféré rester à l'intérieur et profiter de la chaleur de la cheminée enroulée dans son plaid aux couleurs de Serdaigle. La jeune femme avait préparé son arrivée avec minutie après avoir demandé des renseignements à son sujet à son époux.
Tristan Londubat avait rencontré Iain McGowan, né-Moldu écossais, lors de sa première année d'étude à l'école de sorcellerie de Poudlard. Les deux jeunes garçons avaient tous les deux été répartis à Gryffondor, la maison des braves et des hardis et s'étaient donc retrouvés à la même table, autour d'un gigot d'agneau qu'ils avaient dévoré avec délice.
Les années avaient passé rendant les amis inséparables. Puis, lorsque leurs études avaient pris fin en juin mille neuf cent quarante-quatre, Tristan avait consenti au choix paternel d'épouser la fille cadette des Rosier. Augusta avait le même âge que lui et les deux jeunes gens s'appréciaient assez pour que l'union leur paraisse prometteuse. Iain avait été présent lors du mariage, mais n'avait pu tenir sa place de témoin. Mrs et Mr Rosier pouvaient tolérer bien des choses mais certainement pas que l'un des témoins du mariage de leur fille soit né-Moldu. À peine moins d'un mois plus tard, Iain avait quitté le pays, préférant le bush australien aux salons de thé anglais. L'Australie avait été peuplée par les né-Moldus et chacun se moquait du statut du sang de son voisin là-bas.
Cinq ans et demi plus tard, Iain était de retour en Grande-Bretagne. Après avoir rendu visite à sa famille dans leur petite ferme, Tristan avait proposé à son ami de venir s'installer chez lui, le temps de sa visite. Cette proposition avait bien entendu été faite sans en avoir discuté avec son épouse, ce qui avait entraîné une des plus grosses disputes du couple. Comment osait-il héberger son amant dans leur maison ? Dans sa maison ! Car Augusta en était certaine, Tristan n'éprouvait pas uniquement de l'amitié pour le né-Moldu ! Son regard s'adoucissait et un sourire affectueux se dessinait sur ses lèvres à chaque fois qu'il l'évoquait. Augusta avait depuis longtemps enfoui en elle la possibilité d'une relation de couple avec son époux. Malgré ses promesses d'enfant, cela faisait plus d'un an et demi qu'il ne l'avait pas touchée, rejetant la moindre approche qu'elle pouvait tenter. Excédée, la jeune femme avait fini par lui demander s'il souhaitait faire chambre à part, mais Tristan avait rejeté l'idée. Que dirait son père s'il s'en rendait compte ? Augusta n'avait pas insisté et faisait bien attention depuis à rester de son côté du lit.
La cloche annonçant l'arrivée d'Iain retentit peu avant dix-huit heures. Tristan n'était toujours pas rentré du travail. Le métier d'auror ne permettait pas d'avoir des horaires réguliers. Au début, la solitude avait pesé à Augusta, mais elle s'y était vite habituée et avait fini par se trouver des activités. Elle rendait visite à sa belle-sœur une à deux fois par semaine et profitait de ces moments paisibles pour lire, tricoter ou se promener dans la campagne environnante.
Cet après-midi-là, la jeune femme était justement plongée dans la lecture du dernier roman de Gudule Virgule. Elle sursauta en entendant les deux coups de heurtoir et posa son livre sur l'accoudoir du fauteuil avant de se diriger vers l'entrée du petit cottage.
— Bonsoir ! lança l'homme lorsqu'elle eut ouvert la porte.
Malgré elle, la jeune femme ne put s'empêcher de le fixer. Elle ne se rappelait pas l'avoir trouvé aussi séduisant la dernière fois qu'elle l'avait vu. Pourtant, elle était certaine qu'avec ses boucles auburn et son doux sourire, Iain avait dû faire chavirer le cœur de plus d'une Australienne.
Après de trop longues secondes, l'ancienne Serdaigle se reprit. Elle était mariée et ne pouvait observer avec autant d'insistance un autre homme. Cela était complètement indécent, et le statut incertain de Iain auprès de son époux n'arrangeait en rien la situation.
— Bonsoir ! Entrez, je vous en prie, répliqua-t-elle, formelle. Puis-je vous débarrasser de votre manteau ? demanda-t-elle poliment quand il fut entré.
— Euh… Oui, merci, répondit-il en souriant.
Augusta tendit les bras afin de récupérer le vêtement et l'accrocha au porte-manteau à quelques mètres de là.
— Le temps n'est vraiment pas fameux, déclara finalement Iain.
Sa voix était grave et son accent à couper au couteau lui donnait un charme certain. Augusta secoua la tête imperceptiblement. Elle ne pouvait pas penser cela de l'amant de son mari. Cela était conte-nature !
— En effet, répondit-elle ne sachant que dire d'autre. Laissez-moi vous montrer votre chambre ! déclara-t-elle en lui faisant signe de la suivre.
Iain s'essuya avec insistance les pieds sur le tapis de l'entrée et la suivit à l'étage. La chambre d'amis se trouvait face à la deuxième salle de bains de la maison et à côté de la bibliothèque.
— Je… Je vous laisse vous installer, dit-elle, un sourire crispé étirant ses lèvres. Souhaitez-vous boire quelque chose ? Thé, café, jus de citrouille, lista-t-elle.
— Euh… Je prendrai un café, merci.
— Très bien. Je vous laisse vous installer, votre tasse vous attendra dans le salon au rez-de-chaussée, déclara Augusta poliment.
La jeune femme perdit son sourire au moment où elle quitta la pièce et descendit les escaliers d'un pas mesuré en se dirigeant vers la cuisine afin de préparer des boissons chaudes et servir les biscuits qu'elle avait fait le matin même. Elle les servit dans le salon et dut aller tenir compagnie à Iain alors qu'il buvait son café. L'ancien Gryffondor essaya tant bien que mal de faire la conversation, mais, si elle ne fut pas impolie, Augusta se contenta de lui répondre le strict nécessaire et pas un mot de plus.
Ce soir-là, son époux rentra plus tôt qu'à son habitude. Augusta pinça les lèvres mais ne fit pas la moindre remarque ou pique alors qu'ils dînaient. En l'honneur de leur invité, l'ancienne Serdaigle avait cuisiné de la panse de brebis farcie, un plat typiquement écossais, le préféré de Iain, selon Tristan. La jeune femme n'avait pu s'empêcher de ressentir une pointe de jalousie lorsqu'il le lui avait dit. Ils étaient mariés depuis près de six ans et Tristan était toujours incapable de se souvenir de son allergie aux fruits de mer, mais il se rappelait le plat préféré d'un homme qu'il n'avait plus vu depuis autant de temps.
— Je vais me coucher, déclara-t-elle peu de temps après le dîner.
La vaisselle avait été lavée et rangée, la table débarrassée et Augusta venait de leur apporter le thé dans le salon où ils s'étaient installés.
— Êtes-vous certaine ? Ne souhaitez-vous pas entendre les anecdotes de Poudlard de Tristan ? plaisanta Iain.
L'ancienne Serdaigle lui offrit un petit sourire qui devait plus ressembler à une grimace avant de répondre qu'elle était épuisée mais qu'elle serait ravie d'en prendre connaissance le lendemain. Le cœur battant et plein de colère, Augusta quitta la pièce après leur avoir souhaité une bonne nuit.
Elle n'arrivait pas à y croire. La désinvolture qu'affichait Iain était aussi agaçante qu'humiliante. Ne se rendait-il donc pas compte du mal qu'il lui faisait ? Sans attendre, Augusta alla faire sa toilette et enfila une magnifique chemise de nuit bleu foncé ainsi que le déshabillé allant avec. Elle attrapa le livre qu'elle avait commencé plus tôt dans la journée et s'installa dans son lit. La jeune femme tenta tant bien que mal de se plonger dans l'histoire sans y parvenir. Les lignes et les mots se brouillaient devant ses yeux sans faire le moindre sens. Excédée, Augusta reposa violemment le livre sur sa table de chevet et éteignit les bougies du plafonnier d'un coup de baguette avant de se coucher sous les couvertures.
La jeune femme n'arriva pas à trouver le sommeil. Dès qu'elle fermait les paupières, des images de Tristan et Iain en train de s'embrasser dans le salon l'assaillaient. Bien qu'elle ait fini par faire le deuil de son couple, elle ne pouvait empêcher le dégoût et la colère de monter en elle. Finalement, après deux ou trois heures à se tourner et se retourner dans son lit, la porte de la chambre s'ouvrit délicatement et son époux pénétra à l'intérieur de la pièce. Ne souhaitant pas lui montrer son trouble, Augusta ferma les yeux et fit mine de dormir.
Le parquet grinça sous les pas de Tristan avant que les couvertures ne bougent et qu'il ne se glisse dans le lit.
— Je sais que tu ne dors pas, Augusta, lâcha-t-il après quelques secondes.
La jeune femme se retint de pousser un soupir tout en se maudissant d'être aussi mauvaise comédienne. Les paupières toujours closes, l'ancienne Serdaigle décida de continuer à faire semblant de dormir.
— Très bien, souffla-t-il tout en commençant à se dévêtir.
Quelques instants plus tard, Augusta sentit le matelas s'affaisser sous le poids de son époux.
— Ai-je fait quelque chose pour te déplaire ? finit-il par demander.
Augusta se pinça les lèvres, revoyant derrière ses yeux clos le sourire qui avait illuminé le visage de son mari lorsqu'il avait vu Iain. Constatant qu'elle ne répondait pas, Tristan poussa un soupir.
— Comptes-tu me faire la tête encore longtemps ?
Excédée qu'il insiste ainsi alors qu'il l'avait une fois de plus humiliée, Augusta se retourna dans le lit afin de se trouver sur le dos.
— Je ne vois pas en quoi cela peut t'ennuyer maintenant que ton amant se trouve sous notre toit.
— Ah ! C'est donc cela, souffla-t-il à la fois las et amusé.
— Je ne te permets pas, s'irrita-t-elle, piquée.
À la lueur de la bougie, Augusta pouvait voir le sourire amusé et moqueur qu'arborait Tristan. Irritée, la jeune femme ressentait une folle envie de lui lancer un maléfice.
— Et enlève-moi ce sourire de ton visage ! À moins que tu ne souhaites finir avec des furoncles !
— Augusta… Augusta… ma chère et tendre épouse… commença-t-il.
— Non ! le coupa-t-elle sèchement.
— Non ?
— Non, je ne te permets pas de m'appeler ainsi alors qu'une fois encore tu me manques de respect. Dois-je te rappeler que tu m'avais promis de ne plus recevoir tes amants chez nous ?
— Non et…
— Et pourtant, il est là. Tu n'as…
— Augusta ! intervint Tristan, tentant de se faire entendre à travers la diatribe de son époux.
— … de moi et de ma…
— Silencio ! s'écria Tristan.
Il avait osé ! La jeune femme sentait la colère monter en elle tandis que son époux expliquait que Iain n'était pas son amant et qu'il ne connaissait pas sa particularité. Augusta le fixait d'un regard mauvais, incapable de s'exprimer.
— Je te le promets, insista-t-il. Vraiment !
L'ancienne Serdaigle se contenta de continuer à le fixer sans ciller et désigna sa gorge d'une main.
— Oui, bien sûr ! Finite Incantatem, dit-il, lui permettant de retrouver sa voix. Je suis désolé mais…
Avant qu'il n'ait pu ajouter quoi que ce soit, Augusta avait récupéré sa baguette sur sa table de chevet et lui avait jeté le maléfice de Chauve-Furie. Tristan poussa un cri paniqué et tomba du lit dans un grand vacarme.
— Ne refais jamais cela ! cracha-t-elle, furieuse.
Tristan se releva hagard. Ses cheveux étaient emmêlés et quelques coupures étaient apparues sur son visage. L'homme porta sa main à ses joues et grimaça en touchant l'une des blessures. Son épouse ne put s'empêcher d'avoir un pincement au cœur en le voyant ainsi.
— Bonne nuit Tristan, finit-elle par dire, ne souhaitant pas céder au sentimentalisme.
Sans attendre, l'ancienne Serdaigle se réinstalla correctement sous les couvertures. À côté d'elle, le lit bougea, indiquant que son mari se couchait. Elle ferma les yeux, espérant que le sommeil l'emporte. Malheureusement pour elle, les ronflements de Tristan avaient envahi la pièce depuis bien longtemps lorsqu'enfin elle réussit à rejoindre le pays des songes.
— Bonjour, déclara Iain en entrant dans la cuisine.
Augusta releva la tête vers lui. Ses joues avaient été rougies par le vent frais et un sourire illuminait son beau visage. À l'aube, l'ancien Gryffondor avait quitté la maison et était allé se perdre dans la lande. Tristan avait expliqué à son épouse que Iain était botaniste et qu'il travaillait sur un livre.
— Bonjour Mr McGowan, répliqua-t-elle avant de reporter son attention vers le ragoût qui mijotait.
— Je vous en prie, appelez-moi Iain, déclara-t-il. Souhaitez-vous que je vous aide à quelque chose ? demanda-t-il en la voyant occupée.
L'ancienne Serdaigle ne put s'empêcher de lui jeter un regard surpris. Jamais, en presque six ans de mariage, son époux n'avait pris la peine de lui proposer son aide !
— Je… Vous pouvez mettre la table si cela ne vous ennuie pas.
— Nullement, répliqua-t-il en souriant.
— Les assiettes sont dans le placard à droite et les verres sur la gauche, expliqua-t-elle en le voyant chercher. Tristan ne rentre pas pour le déjeuner. Nous ne serons que tous les deux.
Cela lui avait paru fort peu convenable quand son mari lui avait annoncé qu'elle serait seule avec cet homme inconnu presque quotidiennement durant les prochaines semaines. Augusta avait tenté de protester mais Tristan n'avait pas cédé. Iain était son ami et il avait besoin d'un toit. Tristan était un homme, son époux, et c'était donc à lui de prendre ce genre de décision. Bien qu'elle ne se laissât plus faire, la jeune femme avait fini par apprendre à choisir ses combats.
À son grand étonnement, Iain ne se servit pas de la magie pour mettre la table. L'ancien Gryffondor étant né-Moldu, cela s'expliquait par conséquent sans difficulté. Malgré elle, Augusta ne put s'empêcher de le suivre du regard alors qu'il s'activait en silence. Son époux lui avait assuré que Iain n'était pas son amant, mais le peu de confiance qu'elle avait en Tristan l'empêchait de le croire sur parole.
Sentant certainement son regard, son invité jeta un coup d'œil dans sa direction. Embarrassée qu'il l'ait remarquée, la jeune femme ne put s'empêcher de rougir légèrement, mais refusa de détourner le regard. Elle devait faire de son mieux pour rester digne et ne pas montrer sa gêne. Iain, pour sa part, se contenta de lui offrir un sourire poli avant de continuer sa besogne.
Ce ne fut qu'à ce moment-là qu'Augusta s'autorisa à reporter son attention sur sa marmite. Seule la musique du léger bouillonnement venait aux oreilles de la jeune femme alors que la cuiller remuait à un rythme régulier le ragoût.
— Que faites-vous de bon ? demanda soudainement Iain.
Surprise, Augusta ne put s'empêcher de sursauter et la cuiller cessa son mouvement.
— Du ragoût avec des pommes de terre et des carottes, expliqua-t-elle.
— Je peux goûter ?
— Euh… Bien entendu, répondit-elle mettant sa cuiller en bois dans le plat.
Doucement, elle l'amena à la bouche de Iain qui souffla dessus sans la quitter des yeux. Envoûtée, Augusta se fit la réflexion qu'elle avait rarement vu un aussi joli vert. Finalement, Iain rapprocha sa bouche du ragoût. Le cœur de la jeune femme rata un battement en le voyant se lécher discrètement les lèvres. Malgré elle, l'ancienne Serdaigle sentit l'ombre d'un vieux désir l'envahir et serra les cuisses presque instinctivement. Trop surprise par la réaction de son corps, Augusta s'éloigna brusquement de son invité, lâchant par la même occasion la cuiller. Cette dernière atterrit sur le sol et le bruit la fit sursauter.
— Oh ! Quelle maladroite, je fais ! lança-t-elle.
— Je… commença Iain.
Les deux jeunes gens se baissèrent en même temps et aucun d'eux n'eut le temps d'éviter l'autre. Leurs deux fronts se rencontrèrent douloureusement et Augusta ne put retenir un petit cri.
— Oh Seigneur ! s'exclama Iain. Je suis désolé, Mrs Londubat ! lança-t-il visiblement catastrophé. Vous allez bien ?
Augusta sentit la main de Iain se poser sur son bras et elle dut prendre sur elle pour ne pas s'éloigner vivement de lui. Cela ne serait vraiment pas très aimable de sa part.
— Je… Je vais bien. Ne vous inquiétez pas, Mr McGowan, répliqua-t-elle avec un petit sourire.
Elle porta sa main à son front et grimaça quand ses doigts touchèrent la bosse qui était en train de se former.
— Oh Seigneur ! Vous allez avoir une belle bosse, souffla-t-il en l'effleurant avec son pouce. Avez-vous de la glace ?
— Dans la cave, répliqua-t-elle. Je vais en chercher.
— Non, ne bougez pas ! Asseyez-vous, j'y vais, dit-il en l'aidant à s'installer sur une des chaises de la cuisine.
Augusta le suivait du regard alors qu'il quittait la pièce d'un pas rapide. Elle porta de nouveau sa main à son front et grimaça. Quelle veaudelune faisait-elle ! Voilà qu'elle venait de se ridiculiser devant le meilleur ami, et certainement amant de son époux ! Elle n'osait pas imaginer ce qu'Iain allait pouvoir dire à Tristan. À cette simple pensée, les joues de la jeune femme se colorèrent. Avait-il remarqué le trouble qu'il avait inspiré en elle ? Elle était mortifiée rien qu'à l'idée qu'il puisse la prendre pour une de ces filles à la cuisse légère.
La porte de derrière s'ouvrit à nouveau et Iain revint avec un morceau de glace enroulé dans son mouchoir de poche.
— Je suis navré, je n'avais rien d'autre pour le prendre, expliqua-t-il en appliquant le tissu déjà humide sur la protubérance. Il est propre, bien entendu, ajouta-t-il face au mouvement de recul d'Augusta.
— Je vous remercie, répliqua-t-elle en récupérant le mouchoir.
Iain se contenta de lui offrir un léger signe de tête ainsi qu'un sourire.
— Et vous ? Votre tête ? demanda-t-elle.
— Oh ! Ne vous en faites pas, Mrs Londubat ! Rien que je puisse pas supporter, répliqua-t-il en souriant. Ma mère dit toujours qu'on a la tête dure chez les McGowan.
Sa mère, qui était aussi une Moldue, se rappela soudainement Augusta. Elle n'osait imaginer ce que ses parents diraient s'ils la voyaient aussi proche d'un né-Moldu, s'ils savaient qu'elle avait ressenti des choses pour lui qu'elle n'aurait certainement pas dues. La honte l'envahit subitement. Il fallait qu'elle mette fin à tout cela le plus vite possible. Ce Iain McGowan ne pouvait rester chez elle un jour de plus.
Tout le reste de la journée, Augusta avait été d'une politesse extrême à l'égard de l'invité de son époux. Elle l'avait laissé se servir en premier à table, l'avait écouté parler de plantes et de ses recherches en souriant aimablement et lui avait même proposé une boisson chaude à l'heure du thé. Elle avait été une hôtesse parfaite et exemplaire.
Après le dîner, les hommes s'installèrent de nouveau dans le salon et discutèrent tandis qu'elle nettoyait la vaisselle d'un coup de baguette. Sa belle-sœur, Callidora, lui avait appris un bon nombre de sortilèges ménagers bien utiles. Quand la cuisine fut propre, la jeune femme alla retrouver les deux hommes dans le salon. Ils cessèrent de parler et une fois de plus, Augusta se sentit comme une intruse dans sa propre maison. Iain releva son visage vers elle et sourit.
— Bon ! Je vais vous laisser passer un peu de temps ensemble ! lança-t-il en donnant une tape dans le dos de son ami. Bonne nuit, Tristan ! Mrs Londubat, ajouta-t-il à son adresse.
Les deux époux le regardèrent quitter la pièce en silence et entendirent les marches menant à l'étage craquer sous son poids. Aucun d'eux ne parla pendant plusieurs minutes. Finalement, Tristan leva son visage vers elle.
— Iain m'a dit qu'il avait passé une bonne journée.
Elle se contenta de hocher doucement la tête.
— Il est très aimable, répliqua-t-elle, sincère.
Il l'était ! C'était bien cela le problème. Aimable, charmant et… Augusta secoua légèrement la tête. Elle ne pouvait se laisser aller à ce genre de pensées. Elle était une femme mariée !
— Mais ? demanda Tristan d'une voix lasse.
— Je veux qu'il parte. Je n'ai plus l'impression d'être chez moi avec lui ici.
Son époux poussa un long soupir et serra le poing sur sa jambe. Elle l'agaçait, elle le savait. Mais elle était chez elle et avait le droit de ne pas vouloir d'un inconnu dans sa demeure.
— On en a déjà parlé, Augusta, répliqua-t-il finalement.
— Non, tu en as déjà parlé. J'estime que j'ai mon mot à dire là-dedans. Je ne le connais pas, il… C'est ton ami, je comprends, mais…
— Puisque je te dis que lui et moi ne sommes pas amants, la coupa-t-il dans un murmure.
— Certes, mais cela ne change rien au fait que… À ton avis, que vont penser les gens quand ils sauront ?
— Quand ils sauront ?
— Que tu me laisses toute la journée seule avec un homme, répondit-elle précipitamment.
Elle ne voulait qu'il pense qu'elle comptait raconter à tout à chacun qu'il la trompait régulièrement avec d'autres hommes.
— Que penses-tu que ton père dira ?
Doucement, Tristan se leva et posa ses mains sur les bras de son épouse. Son expression était sérieuse, mais il semblait moins tendu que quelques instants plus tôt.
— Comptes-tu me tromper avec Iain ?
Elle se dégagea de ses bras, blessée par ce qu'il venait de lui demander. Comment osait-il lui demander cela ? Elle qui lui avait toujours été fidèle malgré les humiliations et les tromperies, malgré le fait qu'il ne l'ait pas touchée depuis plus d'un an !
— Bien sûr que non. Pour quoi me prends-tu ? s'écria-t-elle, outrée. Crois-tu que je sois l'une de ces gourgandines que l'on croise sur les trottoirs de Whitechapel ?
— Non, justement. Je sais que tu ne feras jamais rien qui puisse amener la honte sur ta famille et la mienne, déclara-t-il. Tu n'es pas comme moi, Augusta, ajouta-t-il dans un murmure.
Le silence s'installa entre les deux époux. Timidement, Tristan fit un pas vers elle avant de l'enlacer. La jeune femme cala son menton sur son épaule, pensive. Elle espérait qu'il ait raison. Après quelques minutes, le couple se détacha l'un de l'autre et Tristan lui proposa d'aller se coucher. Elle hocha la tête et le suivit à l'étage. Elle n'était pas certaine que le sommeil s'emparerait d'elle aussi facilement qu'à l'accoutumée.
