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Celle qui est.

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« Pitoyable. » la voix s'était plantée dans son dos comme une épée bien aiguisée.

Il ouvrit difficilement les yeux pour se trouver nez à nez avec une paire d'escarpins noirs sacrément bien cirés. Il pouvait voir son visage, grotesquement déformé, se refléter dedans et il pouffa de rire.

« C'est donc ça, le Sauveur du Monde ? L'élu ? On m'avait bien fait remonter vos… exploits récents, mais je ne pensais pas que ça serait de ce niveau-là. »

Harry n'avait pas entendu la porte claquer. Ni s'ouvrir, ni se refermer. Alors à moins que quelqu'un ne soit entré par la fenêtre… il remonta ses yeux le long des jambes (carrément bien galbées) et découvrit un collant de résille très serré.

« C'est hasbeen, la résille… » maugréa-t-il avant de fermer à nouveau les yeux.

La silhouette soupira avant de s'accroupir devant lui : « Monsieur Potter, je n'ai pas votre temps. Je ne peux pas passer ma vie à vous aider. »

« M'aider ? – cette fois-ci, Harry se redressa à moitié pour fixer furieusement les cuisses fermes de l'intru – C'était quand exactement la dernière fois que quelqu'un m'a aidé ? »

« Mon Dieu. Vous voulez vraiment que je vous liste toutes les mains tendues que vous n'avez pas pris la peine de saisir ? Toutes vos occasions manquées ? Je ne sais plus quoi faire de vous, mon enfant. »

Harry releva enfin les yeux pour observer hargneusement la si irritante personne qui avait osé interrompre son week-end d'apitoiement.

Il eut un moment d'hésitation.

Une… femme ? De longs cheveux blancs, filandreux comme des toiles d'araignées, couraient jusqu'à ses épaules menues. Elle avait les traits fins, mais ses dents étaient légèrement plus effilées que la normale. Sa peau, presque translucide, laissait ressortir de grosses veines sombres qui pulsaient de façon dérangeante sous sa chair, comme un cœur humain pourrait le faire. Et ses yeux. Merlin ! Vous auriez vu ces yeux qui lui mangeaient un bon tier du visage. Noirs. Inexpressifs. Un gouffre d'abîme.

Il n'arrivait pas à savoir si la vision d'horreur qui s'offrait à lui était relié à la bouteille de Whisky pur feu qu'il venait de s'enfiler ou si…

Il décida finalement de prendre les choses comme elles venaient et resserra la main sur sa baguette : « Cassez-vous de chez moi. Vous êtes quoi de toute façon… »

La femme se redressa et tapota de ses longs doigts effilés le dossier du fauteuil : « Vous êtes vraiment grossier. Dire que j'ai pris la peine (elle insista sur le mot peine) de venir jusqu'ici pour vous voir… J'ai presque envie de rentrer chez moi maintenant. »

Harry se releva avec difficulté avant de se diriger en titubant vers le frigo. Il en extirpa une canette de bière. Cette créature n'avait clairement pas l'air « en peine ».

« Personne ne vous retient. » renâcla-t-il en jetant un coup d'œil dans sa direction.

Il voulait juste qu'on l'oublie. Qu'on lui foute la paix. Qu'on le laisse crever dans son coin, tranquillement.

« Je regrette, mais ça ne va pas être possible. J'ai bien trop misé sur vous. »

Harry frissonna. Elle venait… de lire dans son esprit, non ? Il vérifia les barrières mentales qu'il avait érigé, mais tout semblait en place. Il soupira. Du hasard. Juste du hasard.

Elle lui offrit un sourire carnassier : « J'ai bien l'impression que vous me prenez pour un amateur, mon enfant. »