Dans une petite maison en banlieue de la ville, vivait un jeune garçon du nom de (M/n). Il avait à peine 17 ans, mais pour son âge, il était fort malheureux. Depuis sa naissance, la malchance s'abattait sur ce jeune homme. Déjà car ses parents attendant une fille, furent déçus de se retrouver avec un petit garçon dans les bras. Il avait donc dû vivre dans une chambre de fille une bonne partie de son enfance.

Un autre malheur fut celui du drame de sa vie, lorsqu'à un an, sa mère, inquiète de ne jamais l'avoir vu ramper à quatre pattes et qu'il ne se décidait toujours pas à se lever sur deux, l'emmena consulter un médecin. On lui annonça alors qu'il ne pourrait jamais marcher, ses jambes ne pouvaient pas le porter, elles étaient trop faibles. Les sages-femmes ne l'avaient pas vu à sa naissance, mais dû à un manque d'oxygène lors de l'accouchement, ses jambes n'avaient pas pu se développer correctement. Il était paraplégique à vie, et n'avait jamais connu le bonheur d'être libre de ses pas. Condamné à rester dans son fauteuil roulant, ses parents lui payaient des cours à domicile, ainsi (M/n) ne s'était jamais fait d'amis. Il n'avait presque jamais vu d'autres visages que ceux de sa famille et des professeurs qui venaient enseigner à la maison, mis à part les quelques fois où ses parents l'emmenaient en ville, mais c'était rare. Il restait jour et nuit dans sa chambre au premier étage, n'allant au salon que pour les repas, et encore, parfois sa mère venait lui emmener ses plats. Ses parents dormaient au rez-de-chaussée. (M/n) était un enfant malheureux qui n'était jamais allé plus loin que le portique qui délimitait son jardin.

Alors pour s'évader, visiter d'autres mondes, voyager… Il lisait. Il lisait énormément. Il s'imaginait être le héros de ses lectures. Les livres étaient sa passion.

Ce jour-là était un jour d'hiver que (M/n) imaginait froid depuis son lit lorsqu'il regarda par la fenêtre. Il était en train de lire un livre de contes, plus particulièrement, il s'était pris de passion pour le conte de Jack Frost, personnification de l'hiver.

(M/n) a toujours aimé l'hiver, c'était sa saison préférée en plus d'être celle de sa naissance. Mais il y avait quelque chose de plus avec cette saison-là. Peut-être était-ce parce qu'il y avait Noël. Parce qu'il y avait de la neige qu'il aimait tant observer depuis sa fenêtre et toucher lorsque ses parents l'emmenaient occasionnellement dehors.

Ainsi, s'imaginait Jack Frost lui revenait à penser à un vieil homme au visage impassible et au cœur froid et dur. Il s'imaginait le rencontrer et que le vieil homme le prenne sous son aile avant de l'emmener loin de sa prison, dans son pays de nuit et de glace.

Lorsqu'il releva la tête, il fut fort surpris d'apercevoir de petits flocons tombaient devant sa fenêtre. Un large sourire vint fleurir ses lèvres alors qu'il eut en tête de s'en approcher. Il se plaça dans son fauteuil roulant à la seule force de ses bras et roula jusqu'à se fenêtre en emmenant avec lui son livre de contes qu'il déposa sur le rebord de fenêtre devant lui. Il leva les yeux vers le ciel d'un gris bleuté dont tombaient les flocons, avant de baisser le regard vers la rue qui commençait doucement à se couvrir de neige. Il resta quelques instants à observer la scène devant ses yeux. Finalement, la nuit tomba, les lampadaires, plus bas dans la rue s'allumèrent, diffusant une lueur jaunâtre sur le sol maintenant blanc de neige. (M/n) ne savait depuis combien de temps il se tenait accoudé au cadre, mais il finit par se rendre compte de l'heure tardive et se décida à aller se coucher.

Mais (M/n) avait toujours eu le sommeil léger, alors quand il entendit un bruit, ses yeux s'ouvrirent presque instantanément. Il fut d'abord effrayé d'ouvrir les yeux, de peur que ce ne soit un cambrioleur qui tenterait de le tuer. Mais bientôt, sa raison reprit le dessus et il se dit que ce ne devait être que son chat qui faisait du bruit dans la maison. Il se releva doucement pour essayer de voir dans l'obscurité, mais son esprit embrumé réalisa bien vite que le bruit ne venait pas de l'intérieur. Autre chose le dérangeait, la lumière de l'extérieur n'illuminait pas la pièce comme d'habitude. Ses yeux se dirigèrent d'eux même vers la fenêtre et son cœur rata un battement. Un jeune garçon se tenait devant sa fenêtre, assis sur le rebord. Il ne regardait pas à l'intérieur, mais vers le ciel. (M/n) poussa un cri de surprise. Qu'est-ce que faisait un garçon assis devant sa fenêtre, à cette heure-ci, au premier étage ?!

Il essaya de se relever davantage, mais sa main, au lieu de se poser sur le matelas, ne rencontra que le vide et son corps bascula sur le côté dans un grand bruit. Il gémit lorsque son épaule frappa lourdement contre le plancher. Il essaya de bouger pour faire tomber ses jambes inertes restées sur le matelas. Il ignorait bien comment il allait pouvoir se relever alors qu'il essaya de se tortiller pour se dégager. Il tenta à l'aide de ses bras de se tirer en arrière. L'esprit encore embrumé par son précédent sommeil, de la douleur qui irradiait de son épaule et par l'action qu'il essayait d'entreprendre, se dégager, il n'entendit pas le garçon qui se tenait devant sa fenêtre marchait doucement sur le plancher de sa chambre.

- Euh… Est-ce… ça va… ?

(M/n) poussa un nouveau cri et il se débattit plus vivement.

- Shh ! Shh ! Ne crie pas, je ne te veux pas de mal ! Ne t'inquiète pas ! Tenta-t-il en chuchotant un peu fort.

- Qui… Qui es-tu !? Qu'est-ce que tu fais ici !? S'écria le jeune homme.

- Shh, ne parle pas si fort ! Je m'appelle Jack ! Comment se fait-il que tu me vois ?

- Pardon ! Comment se fait-il que tu sois dans ma maison, d'abord ?

- Je n'étais pas dedans, j'étais à l'extérieur ! Je suis rentré seulement parce que tu as crié et que tu es tombé ! Tu veux que je t'aide ?

Il s'approcha alors.

- Ne t'approche pas de moi ! Je ne veux pas que tu m'aides ! Je peux parfaitement me débrouiller seul !

Le garçon s'immobilisa, peu sûr de lui, et observa le jeune homme tâcher de se redresser, mais sans l'appui de ses jambes, et vu la position dans laquelle il était tombé, il était très difficile pour (M/n) de se dégager. Voyant qu'il avait beaucoup de mal, il commença à le regarder curieusement. Il réitéra sa question :

- Tu… tu veux quand même que je t'aide ou pas ?

(M/n) savait déjà qu'il n'arriverait pas à se relever sans un peu d'aide, ses jambes étaient beaucoup trop lourdes à dégager.

- Ok, je veux bien !

L'autre garçon se précipita vers lui, retira ses jambes du matelas pour les déposer à côté de son corps et souleva (M/n) par les aisselles. Quand il considéra qu'il pouvait le laisser se tenir une fois sur ses jambes, il le relâcha, mais immédiatement après, le jeune homme se retrouva une nouvelle fois à terre d'où il lâcha un gros « ouch ».

- Mais qu'est-ce que tu fais ?! S'écria l'inconnu en essayant à nouveau de le remettre sur pieds.

- Je suis handicapé, crétin, je peux pas me tenir sur mes jambes !

- Comment ça ?

L'autre garçon sembla profondément surpris.

- Relève-moi et dépose-moi sur le lit.

L'inconnu s'attela à la tâche, il souleva une nouvelle fois le garçon à terre et le tira jusqu'au rebord du lit où il s'assit.

- Regarde ! Tu vois, mes jambes sont complétement inanimées. Je peux pas m'en servir. Expliqua alors (M/n) en soulevant sa jambe droite avec sa main.

- Wow ! C'est trop bizarre ! Et puis, comment ça se fait que tu puisses me voir ? S'écria l'étranger.

- Quoi ?! Non, c'est pas « bizarre » ! Je suis naît comme ça, c'est tout ! C'est toi qui es bizarre ! Et puis, comment tu es monté là-haut ? Et ça veut dire quoi « comment ça se fait que tu puisses me voir » ?

- Ecoute, je vais t'expliquer, mais ça risque d'être difficile à croire.

- Plus difficile à croire qu'un mec chelou qui s'est assis sur le rebord de votre fenêtre au premier étage avec des cheveux blancs, un drôle de bâton et.. c'est quoi ça ? Du givre sur ta veste ?!

- C'est ça la partie compliqué. Continua l'autre, l'air un peu gêné. En vérité, je m'appelle Jack Frost, l'Esprit de l'Hiver. Je me suis posé devant ta fenêtre par pur hasard. Je volais depuis plusieurs heures et il se trouve que je voulais me poser pour me reposer un peu. Je me suis assis – je te l'aie dit, tout à fait par hasard – sur le rebord de ta fenêtre. Je ne m'attendais pas à ce que la personne qui dormait là me voit. Normalement, personne ne me voit jamais, puisque je suis un esprit.

Jack s'arrêta soudain en voyant les yeux largement écarquillés de (M/n).

- Tu veux me faire gober ça ? Dit-il avec un regard clairement sceptique.

Jack soupira.

- C'est pour ça que je disais que c'était compliqué. Mais je peux te le prouver. Donne-moi un objet dont tu n'as pas besoin.

(M/n) pointa le mug « I love JJ ». Jack leva la main vers la tasse et (M/n) sursauta soudain en voyant que la porcelaine se recouvrait progressivement, mais avec une grande rapidité, de givre, puis d'une épaisse couche de glace. Ses yeux étaient écarquillés et sa bouche ouverte de surprise.

- Mais… mais qu'est-ce que c'est que ça ?! S'écria-t-il.

- Je te l'ai dit, je suis un esprit ! Répondit le garçon aux cheveux blancs en souriant, fier.

- Mais ce n'est pas possible ! Ça n'existe pas les esprits – enfin… pas vraiment…. Je crois…

- (M/n) (L/n), je me souviens de toi ! Dit alors Jack en plantant son regard dans celui du jeune humain. Tu étais un petit garçon avec la tête pleine de rêves. Tu l'es encore, mais le monde a voulu t'apprendre que ce qu'il y a écrit dans les contes n'existent pas. Pourtant, petit, tu étais celui qui y croyait le plus. Je me souviens de tes yeux émerveillés quand tu as vu le Père Noël pour la première fois. Nord gratifie certains enfants, souvent ceux qu'il pense être digne, d'une petite visite. J'étais avec lui ce soir-là, j'apportais la neige sur la ville. Ton sourire enchanté quand tu as vu ce fier bonhomme bourru au pied de ton lit, avec son manteau rouge, était mémorable. Mais tu ne m'avais pas vu, enfant, tu ne savais pas que j'existais, à l'inverse du Père Noël. Je suppose que tu ne t'en souviens pas…

- Je… je croyais que c'était un rêve. Dit alors (M/n) avec un regard perdu. J'ai toujours cru que j'avais rêvé ça. Quand mes parents sont venus me chercher le lendemain matin, je leur ai raconté, mais ils ne m'ont pas cru et ils ont dit que ce n'était qu'un rêve parce que le Père Noël ne doit pas être vu par les enfants et il viendrait encore moins les voir dans leurs chambres.

- Je sais ! C'est ce que disent tous les parents à leurs enfants. Ils sont très rares ceux qui adultes, croient encore en nous. Mais ce qui m'étonne, c'est comment, toi, tu peux me voir alors que même les enfants ne le peuvent pas.

- Comment ça ?

- Il m'a fallu des siècles pour qu'un enfant me voie enfin. Mais toi, tu me voies alors que tu n'es même plus un enfant. Comment est-ce possible ?

Soudain, les yeux de Jack se posèrent sur un livre, ouvert au sol. Intrigué, il l'attrapa et observa la page ouverte. Il s'agissait du livre que (M/n) avait lu plus tôt, celui à propos de la légende de Jack Frost.

- Tu lisais un livre sur moi ?

Le jeune humain se mit alors à rougir profusément. Il avait oublié qu'il avait ce livre en bas de son lit.

- Je le lisais seulement parce que j'aime les légendes. Dit-il pour se justifier.

- Mais si tu me voies, ça veut dire que tu croies en moi.

- Q-Quoi… ? C'est n'importe quoi, je… je…

- Je suis tellement content ! C'est la première fois que quelqu'un de mon âge peut me voir !

La voix de Jack était heureuse et ses yeux si tendres et (M/n) se sentait tout gêné. Les légendes doivent être si heureuses lorsqu'elles voient des gens qui croient encore en eux. Il ne savait même pas lui-même qu'il y croyait encore. Mais les contes avaient toujours fait partie de sa vie. Il y croyait inconsciemment. Et maintenant, il ne pourrait plus jamais penser le contraire ; il venait de rencontrer l'une d'elles ! C'était insensé ! Et l'émotion dans les yeux de l'esprit enserrèrent son cœur d'un étau.

Mais tout à coup, des bruits dans le couloir les firent relever la tête. Les parents de (M/n) devaient s'être réveillés avec tout le bruit qu'ils avaient fait.

- Mes parents ! Dit-il.

- Bon, je pense qu'il est temps pour moi d'y aller. Mais on se reverra très vite, (M/n), je te le promets ! Assura Jack en lui souriant.

- Attends ! Emmène la tasse avec toi ! Si mes parents la voit, ils se poseront de sacrées questions.

Il hocha la tête et prit la tasse givrée. Il se dirigea ensuite vers la fenêtre restée ouverte et sortit sur le rebord de l'autre côté en refermant la fenêtre sur lui. Au même instant, la porte de la chambre s'ouvrit sur le visage inquiet des deux adultes.

- (N/n), tout va bien ?! Demanda sa mère en s'approchant pour s'enquérir de son état.

- Oui, maman, c'est rien ! J'ai juste fait un cauchemar et je suis tombé du lit. Expliqua-t-il en lui souriant pour la rassurer.

- Et tu as réussi à remonter dessus ? S'étonna son père.

- Oui, j'ai eu du mal, mais je me suis aidé de ma table de nuit et j'ai réussi à regrimper.

L'histoire ne leur semblait pas invraisemblable et après s'être assuré une dernière fois que leur fils allait bien, ils repartirent. Lorsqu'ils eurent refermé la porte, (M/n) se tourna vers la fenêtre Jack était toujours là et lui souriait gentiment. Il ne put que répondre à son sourire. Un lien s'était créé entre eux. Avec un dernier signe de la main, Jack disparut dans l'hiver.

Ce ne fut que trois jours plus tard que (M/n) put revoir Jack. C'était en plein jour, cette fois. Une tempête de neige avait frappé l'autre nuit et le jeune homme ne doutait pas qu'un certain esprit était derrière ça. Mais ce jour-là, il n'y avait qu'une fine neige qui tombait et le ciel était un peu plus ensoleillé. (M/n) révisait son cours de géographie en se retournant régulièrement pour regarder de l'autre côté de la fenêtre. Ce qu'il aurait aimé sortir profiter et s'amuser dans la neige. Quand était-ce la dernière fois qu'il avait mis les pieds dans la neige et sentit le froid sur ses orteils et sa plante ? Car oui, il était peut-être paraplégique mais il avait toujours eu de la sensibilité. Il sentait les choses, il n'avait juste pas la motricité. Il rêvait d'un moment pareil.

Il fut dérangé dans ses révisions par des coups portés à sa fenêtre. Lorsqu'il se retourna, il sursauta en voyant une forme humaine accroupie sur son rebord avant de réaliser qu'il s'agissait de Jack Frost qui lui souriait depuis l'autre côté de la vitre. Il roula alors jusqu'à la fenêtre tandis que l'esprit, d'un coup de son bâton, ouvrit la fenêtre.

- Alors c'est donc comme ça que tu t'y es pris pour entrer dans ma chambre. Ricana l'humain.

- Et oui, ça sert d'avoir des pouvoirs magiques ! S'égaya Jack.

- Tu es toujours d'aussi bonne humeur ? Demanda (M/n) arrivé en face de l'esprit qui s'était assis sur le rebord intérieur de la fenêtre.

- Pas toujours, mais souvent. Après tout, je suis l'Esprit de l'Amusement. Mais je le suis encore plus maintenant que je me suis fait un ami de mon âge. Dit-il alors que son sourire s'agrandit davantage encore.

(M/n) sentit son cœur se mettre à battre plus fort. Il n'avait pas remarqué dans l'obscurité de la dernière nuit, mais il était vrai que Jack ressemblait fortement à un garçon de son âge et qu'il rayonnait d'une grande beauté. Ses cheveux blancs sauvages rehaussaient la blancheur parfaite de sa peau, le plus impressionnant était ses yeux d'un bleu azur profond qui brillait de mille feux. Son nez fin, ses lèvres pâles et bien dessinées et la perfection des traits de son visage donnait une impression d'irréel. Jack Frost était d'une très grande beauté, une beauté qui frappait (M/n) alors qu'il découvrait pour la première fois clairement le visage de l'esprit de l'hiver. Et ses joues rougirent malgré lui.

- Tout va bien, (M/n) ? Tu as de la fièvre ? Demanda Jack en posant sa main sur son front.

(M/n) rejeta sa main et essaya de cacher son visage.

- Mais non ! S'écria celui-ci en faisant demi-tour pour retourner à son bureau.

- Oh… D'accord !... Du coup, c'est comme ça que tu te déplaces ?

(M/n) le regarda.

- Ouais, c'est mon deux roues. Après, je me déplace pas beaucoup avec vu que... je sors pas souvent de cette chambre.

- Je vois...

Jack se mit alors à voler à sa suite. L'humain le regarda curieusement avant de se dire que voler pour un esprit n'était pas si extraordinaire.

- Qu'est-ce que tu faisais avant que je n'arrive ? Demanda-t-il en s'asseyant sur le bureau à côté des cahiers de (M/n).

- Je révisais ma géographie. J'ai un peu de mal avec cette matière donc je la révise plus que les autres. Mon professeur particulier me fera faire un test à la fin de la semaine. Expliqua-t-il doucement en tournant la page de son livre.

Jack se pencha pour regarder le livre.

- C'est la carte des États-Unis. C'est ça que tu dois réviser ?

- Entre autres, oui. Je suis censé pouvoir placer les différents états, les fleuves et les climats.

Un silence se prolongea alors que l'humain révisait et que l'esprit réfléchissait.

- J'ai une idée pour te faire réviser ta géographie ! Viens, habille-toi chaudement ! S'exclama d'un coup Jack en faisant sursauter (M/n).

- Non mais ça va pas ! Tu m'as fait super peur ! Et puis c'est hors de question ! Je ne sais pas ce que tu veux faire, mais c'est non !

- Mais si, je t'assure ! Habille-toi, je vais te porter pour que tu puisses voir un peu le pays du ciel !

Un regard de pure terreur naquit alors dans les yeux de l'humain.

- Tu… Tu veux me faire voler… ?!

- Mais oui ! Tu verras, tu apprendras beaucoup mieux comme ça. Je ne t'emmène pas loin, juste faire le tour de la région. De toute façon, je ne m'aventure pas dans les régions où il n'y a pas d'hiver.

- Tu es fou ! Je refuse que tu m'entraîne aussi haut. Et si tu me faisais tomber. Et puis, je ne suis jamais sortie de chez moi… je n'ai quasiment jamais dépassé la clôture de mon jardin. Et tu voudrais m'emmener à des kilomètres d'ici. Et puis, je ne te connais même pas vraiment. Qui me dit que tu ne vas pas m'emmener dans ta grotte de glace pour me manger.

Jack, s'étant tut pendant toute la tirade de l'humain, éclata soudain de rire en entendant sa dernière phrase.

- Hahaha ! Tu crois que j'ai une grotte de glace où je mange des humains ! Hahaha ! C'est la meilleure, j'avais encore jamais entendu un truc pareil ! Mais, (M/n), je suis un esprit de l'hiver, pas un troll ! Et puis, je t'assure, tu es en sécurité avec moi, je ne te laisserai pas tomber. Tu n'auras qu'à t'agripper à moi. Pour te prouver ma bonne foi, je vais juste t'emmener dans un endroit que j'aime beaucoup qui n'est pas loin de la ville. C'est à dix minutes d'ici, je te promets. Dit-il en lui tendant la main gentiment.

(M/n) le regarda, sceptique, jusqu'à ce qu'il voit la sincérité dans ses yeux bleus. Jack avait l'air d'être si gentil. Et puis, il avait promis de ne pas l'emmener loin. Il avait toujours rêvé de franchir les barrières que ses parents lui avaient imposées dès son plus jeune âge. Sortir voir le monde… C'était tout ce dont il avait toujours souhaité… Et quelque chose en Jack lui disait qu'il pouvait mettre sa vie entre ses mains en toute confiance et qu'il ne lui arriverait rien. Il baissa la tête.

- Bon, c'est d'accord… Dit-il tout doucement.

- Super ! Allez, habille-toi chaudement ! Je n'ai pas envie que tu tombes malades. Il fait gelé dehors. Dit-il en souriant.

(M/n) se vêtit alors d'un autre pantalon, plus chaud, par-dessus l'autre que Jack l'aida à mettre, d'un pull-over bien fourni, d'une bonne doudoune fourrée et d'une paire de bottes. Jack lui enfila aussi un bonnet, une écharpe et des gants en laine.

- Et toi, tu n'as pas froid ? Demanda l'humain.

- Je suis fait en grande majorité de glace. Touche ma main ! Je ne risque rien, moi.

(M/n) enleva son gant pour toucher sa main et constata qu'en effet, la main de Jack était gelée. Il se demandait comment un être pouvait supporter une telle température, mais se dit que comme il était un esprit, ça ne devait rien lui faire.

Après s'être habillé, arriva l'étape où Jack l'aida à se relever pour pouvoir le porter. Il se dit qu'il serait mieux que (M/n) s'accroche à son dos, les bras autour du cou et Jack tenant ses jambes autour de ses hanches. L'opération faillit les faire chuter mais l'esprit parvint à temps à se redresser.

- Je te jure que si tu me fais un coup pareil une fois en l'air, je te tue, Jack.

- Je suis déjà mort de toute façon. Rit l'autre et (M/n) se sentit un peu mal d'avoir dit ça, même s'il n'entendait pas de tristesse dans sa voix.

Jack prit alors une petite impulsion du pied et se mit à flotter dans la chambre avec (M/n) sur le dos. Celui-ci poussa un petit glapissement et resserra davantage sa prise autour du cou du garçon aux cheveux blancs.

- Ne t'inquiète pas, je te tiens, et je ne te lâcherai pas.

- Tu as intérêt. Marmonna l'autre dans son cou.

Jack eut un autre rire amusé et se dirigea finalement vers la fenêtre qu'il franchit. Avec ses pieds, il rabattit un peu la fenêtre et il commença à gagner en altitude. Au début, (M/n) n'osa pas regarder et garda son visage enfoui dans la nuque de Jack. Il ne le sentit pas, mais l'esprit frissonna sous lui en sentant ce souffle chaud contre sa peau glacée. Il ne laissa pourtant rien paraître et continua de monter doucement pour habituer l'humain à la hauteur et que le choc ne soit pas trop violent.

- Jack. Entendit-il juste à côté de son oreille. On n'y a pas pensé, mais si les humains ne peuvent pas te voir, moi ils peuvent.

- Ne t'inquiète pas. J'y ai pensé, mais il n'y a personne pour l'instant dans la rue et quand on sera plus haut, ils ne feront pas attention. C'est aussi pour ça que je veux t'emmener où on va. Il n'y a pas d'humain là-bas.

- D'accord.

A nouveau, le souffle chaud de (M/n) frôla sa peau et un autre frisson parcourut le corps de Jack. Bientôt, ils furent assez haut dans le ciel pour être à l'abri de la plupart des regards. Quels humains auraient de toute façon l'idée de regarder en l'air ? (M/n) derrière lui avait l'air de s'être habitué à l'altitude puisqu'il regardait autour d'eux en poussant des exclamations émerveillés. La ville enneigée, les champs autour dans cette étendue blanche, les montagnes bleues au loin. C'était splendide !

- Jack, c'est magnifique !

- Tu vois, je te l'avais dit ! J'étais sûr que ça te plairait. Après tout, c'est le rêve des humains, de pouvoir voler. Dis-toi qu'à partir de maintenant, tu auras ton avion personnel.

- Tu n'es pas un avion. Rit doucement (M/n). Tu es un esprit, le meilleur de tous !

Jack sourit tendrement. Il commença alors à avancer doucement au-dessus de la banlieue vers l'endroit qu'il avait en tête. Les maisons s'enchaînaient sous eux et (M/n) regardait leurs toits couverts de neige avec admiration. Ils voyaient des enfants jouaient dans les rues, faire des bonhommes de neige ou des batailles de boule de neige, des passants marchaient, des voitures, rares, roulaient sur les routes pas encore salées. Ils étaient tous si petits. Et personne n'avait à l'idée de lever la tête vers eux.

- Jack, je peux te dire un secret ? Demanda-t-il en murmurant.

- Vas-y.

- Ma saison préférée, ça a toujours été l'hiver.

Jack sourit.

- Je sais.

Il ne fallut pas beaucoup de temps avant que Jack ne redescende doucement vers la campagne environnant la ville. Ils devaient être à une bonne vingtaine de kilomètres de la ville lorsque l'esprit posa ses pieds nus sur la neige. Il y avait juste face à un eux un saule pleureur qui avait perdu toutes ses feuilles pour l'hiver et couvert de neige sur les branches. Juste à côté, il y avait un étang gelé, avec une petite grotte de l'autre côté. L'endroit était entouré par la forêt.

- C'est si beau ! Cet endroit endormi par l'hiver. Souffla (M/n).

Jack marcha jusqu'au saule pleureur où il déposa l'humain contre le tronc, face à l'étang. Il s'assit ensuite à côté de lui, épaule contre épaule. Un silence particulièrement confortable s'instaura entre eux, leurs esprit tous deux perdus dans la contemplation de l'endroit. (M/n) avait posait sa tête contre l'épaule de Jack, plus grand que lui. Il faisait froid, mais (M/n) était assez couvert pour ne pas en souffrir.

- Merci, Jack ! Merci d'avoir insisté pour que je vienne ici ! C'est la première fois que je pars aussi loin de chez moi, mais je ne le regrette pas. J'aime mes parents, mais ils ont toujours eu si peur pour moi qu'ils n'ont jamais voulu que je m'éloigne trop de la maison. J'ai toujours vécu enfermé dans ma chambre et mon seul moyen de m'évader était de lire. Aujourd'hui, grâce à toi, j'ai pu découvrir un peu le monde. Même si ce n'est pas loin de la maison, c'est assez pour emplir mes prochains rêves.

- Ce n'est que le début, (M/n) ! Je compte bien te faire découvrir le monde, te montrer comment moi, je le vois tous les jours. Si tu savais comme je suis heureux d'avoir trouvé quelqu'un de mon âge. Bien sûr, je suis plus vieux que toi, mais je veux dire… je suis mort à l'âge de quatorze ans et j'ai plus de trois cent ans, mais… j'ai gardé l'âme avec laquelle je suis mort. D'avoir un ami qui ne soit pas un enfant, ça compte beaucoup pour moi. Bien sûr, j'adore les enfants, mais c'est pas la même chose… enfin… tu comprends...

Une main chaude se posa sur la sienne qui reposait sur sa cuisse. Il regarda. (M/n) avait enlevé son gant pour mettre sa main sur la sienne. Il releva le regard vers l'humain.

- Je comprends exactement ce que tu veux dire. Depuis tout petit et de l'inquiétude maladive de mes parents, ils ne m'ont jamais envoyé à l'école et je n'ai jamais eu d'amis. J'ai passé ma vie seul. Moi aussi, je suis heureux d'avoir rencontré un garçon qui vit la même chose que moi et à qui parler.

Jack sourit et ses doigts se refermèrent sur ceux de (M/n). Ils se regardèrent dans les yeux un moment, et quelque chose sembla passer entre eux. Etait-ce la chaleur du souffle de l'humain qu'il sentait encore dans son cou, ou celle de sa main posait sur la sienne ? Ou était-ce le fait qu'il était heureux d'avoir trouvé un peu de chaleur – car il avait menti, il ne s'était jamais habitué au froid de son corps ? Etait-ce la beauté de cet humain qu'il connaissait depuis longtemps sans vraiment le connaître ou juste la beauté du moment ? Mais il se sentit pencher vers l'autre, et lorsque ses lèvres effleurèrent celles, tièdes, de l'humain, il sentit une grande chaleur se diffuser dans son être. Ne voyant pas l'autre reculer, et avide d'en avoir davantage, il pressa un peu plus sa bouche contre celle de (M/n). Un feu ardent se déclencha en lui et il savait qu'à partir de maintenant, il ne pourrait plus jamais s'en passer. Il eut soudain conscience de ce qu'il se passait et voulut se retirer de peur d'avoir effrayé son humain, mais la main qui passa sur sa joue, puis dans sa nuque pour le presser plus encore, il fut soulagé. Fou de joie, même. Bientôt, (M/n) eut besoin d'air et s'éloigna. Il regarda Jack dans les yeux avec une sorte d'appréhension.

- Je… Je ne sais pas trop ce qu'il m'a pris… je… pensais pas qu'être en présence d'un autre adolescent me mettrait dans un tel état. C'est juste que… je sais pas ce qui m'a pris… j'ai eu envie de… enfin, tu es quasiment le premier humain – euh, esprit - … garçon de mon âge que j'approche et je… je suppose que les hormones me font tourner la tête… Dit l'humain en paniquant.

- Je pense pas que ce soit que les hormones. Coupa Jack en le regardant, envoûté par son visage et le mouvement de ses lèvres. Je ressens la même chose. Je suis fait de glace, mais tu me donnes tellement chaud.

- Jack…

Deux bras s'enroulèrent autour du cou de l'esprit et le ramena près de (M/n) qui le serra fort contre lui. Même à travers la doudoune, Jack pouvait entendre le cœur de l'humain battre dans sa poitrine et son souffle brûlant sur son cou finissait de le rendre tout émoustillé. Il enserra à son tour le torse de (M/n) et posa son menton sur son épaule. Peu importe ce que s'était, c'était agréable et ni l'un ni l'autre ne l'avait ressenti. C'était peut-être ce qu'on appelait l'affection… Entre cet humain et cet esprit, c'était peut-être une question de destin qui les avait réunis.