_**Thème 57 : ça s'est passé un 28 octobre**_

**28 octobre 1791**

Présentation de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne à l'Assemblée nationale par son auteure, Olympe de Gouges.

*Ecrire sur une femme forte ou une femme de conviction . 1000 mots minimum*

Devenir la capitaine.

Morgan retourna dans sa cabine, le cœur en miettes, des tambours dans la tête, mais surtout la rage au ventre. Elle n'arrivait pas à croire que cette ordure de Scully se révolte contre elle et souhaite être capitaine à sa place. Elle allait lui montrer, elle allait leur montrer qu'elle serait une bien meilleure capitaine que lui, meilleure que son père même. L'image de son père agonisant lui demandant de lui raser le crâne la saisit, ainsi que le souvenir horrible du moment où elle avait dû le scalper pour récupérer la carte qu'il s'était faite tatouer dessus. Un haut-le-cœur la prit et elle attrapa un seau juste à temps pour y vomir le rhum qu'elle ingurgitait depuis qu'elle avait dû achever son père trois jours auparavant.

Pas honteuse du tout, elle alla jeter le contenu du seau, se rinça la bouche à l'eau de mer et se changea, décidée à ce que sa tenue reflète son poste de capitaine. Grâce à M. Glasspoole, qui était venu la chercher dans sa cabine, elle avait pu monter sur le pont à temps pour éviter que Scully retourne l'équipage contre elle. Elle avait partagé le secret de son père avec eux sur le trésor caché de son grand-père et celui-ci était devenu le fer de lance de tout le navire. Le plan était simple : ils allaient à Port-Royal trouver une personne qui parle latin, puis à Spitalfields convaincre son oncle Mordechai de se joindre à eux et de partager son fragment de carte. A deux bateaux contre celui de son autre oncle Dang, ils feraient le poids.

Morgan n'avait pas peur d'affronter Dang, elle savait qu'il était un pirate dangereux, sanguinaire et sans pitié, mais elle n'avait pas à rougir de ses propres capacités. Elle savait se battre avec de multiples armes et était intrépide. Elle avait trois objectifs : prouver à ses hommes et à la mémoire de son père qu'elle était à la hauteur du poste de capitaine, trouver le trésor et rester en vie. Elle était prête à tout pour atteindre ses objectifs et tuerait quiconque se mettrait en travers de son chemin, détruirait les obstacles ou ruserait pour les contourner.

Habillée d'un pantalon et d'une veste propres, elle se rendit sur le pont pour surveiller la navigation jusqu'à Port-Royal. A cet instant, il n'y avait qu'une poignée d'hommes sur lesquels elle était certaine de pouvoir compter : Blair, Glasspoole, Bowen et une poignée d'autres ; moins de dix en tout. Cependant, la majorité de l'équipage semblait en accord avec la décision de la reconnaître comme capitaine et le trajet se déroula sans accroc. Morgan ordonna de baisser leur pavillon quand ils arrivèrent au large de Port-Royal et commanda d'accoster à l'écart du port principal. Elle envoya ensuite, sur les conseils de Reed, ce dernier et Glasspoole lui acheter une robe afin qu'elle passe inaperçue dans les rues, mais aussi des tenues pour ceux qui allaient l'accompagner. Elle se savait recherchée par la garde royale et ne tenait pas à attirer l'attention des soldats.

Les deux hommes furent vite de retour et Reed aida Morgan à ajuster la robe. Une arme sous le jupon, une autre dans les plis de la ceinture, son petit singe, le Prince Charles, sur l'épaule, éventail en main, chapeau à plume sur la tête, elle descendit à terre avec Reed, Glaspoole et Bowen après avoir ordonné à Blair de les retrouver à Spitalfields.

Morgan envoya Bowen en reconnaissance pour trouver un esclave qui parle latin. Le jeune homme était le plus jeune membre de l'équipage, timide et inexpérimenté, il avait rejoint le navire quelques mois auparavant et attendait toujours l'occasion de faire ses preuves. En attendant son retour, Reed, le seul lettré de l'équipage, expliqua à Morgan et à Glasspoole comment se tenir et se comporter pour ne pas être repérés. Il reprit la jeune femme sur son maintient et son regard qui étaient trop fiers pour une fille de bonne famille. Ils marchèrent lentement dans la direction de la prison aux esclaves et l'écrivain continua de les corriger jusqu'à ce que Bowen vienne à leur rencontre, excité par le fait qu'il ait trouvé un homme parlant latin.

Reed les abandonna alors, prétextant une visite à son libraire et les pirates se rendirent aux prisons. Jusqu'aux enchères, Morgan parvint à garder son attitude de dame, mais lorsqu'un homme emperruqué fit monter les prix pour repartir avec l'homme dont elle avait besoin, la pirate en elle refit surface. Son regard et sa démarche changèrent alors qu'elle se plaçait derrière cet impudent et lui plantait sa dague dans les fesses.

Ce fut là que tout son plan commença à déraper. Elle remporta les enchères et M. Shaw, mais les gardes royaux vinrent dans sa direction. Elle comprit vite qu'elle avait été démasquée, donna le Prince Charles à ses hommes, leur fixa un rendez-vous et prit une autre direction avec l'esclave. C'était son plan, il était sa responsabilité et elle voulait être sûre de quitter la ville avec lui en vie. Rien ne pouvait entraver sa volonté, ni les gardes qu'elle tuait ou écartait les uns après les autres, ni les boulets de canon qui détruisaient chaque rue où elle passait. Shaw se montra être un homme réactif, prêt à faire ce qu'il fallait pour survivre, un atout pour elle à ce moment-là, mais qui pourrait la trahir plus tard.

Ivre de l'adrénaline du combat et de la destruction provoquée à cause d'elle, Morgan quitta la ville en voiture à cheval, heureuse d'avoir obtenu ce qu'elle était venue chercher. Elle le savait, peu importait les obstacles à venir, elle saurait y faire face pour atteindre ses objectifs.