05 décembre

Akaashi mit son manteau, noua son écharpe, attrapa son sac de sport et quitta son appartement. Il prit soin de fermer la porte à clé et jeta un nouveau coup d'oeil à son téléphone. Il lu une nouvelle fois le message que Bokuto lui avait envoyé pendant qu'il déjeunait avec ses parents « Hey hey hey ! Rendez-vous à l'arrêt « Grand Building » pour 20h, on se fait une nocturne à la patinoire ! ». Il imaginait parfaitement le ton et le sourire avec lequel Bokuto avait écrit ce message.

Il grimpa dans son bus et tapa rapidement sur son clavier « Dans le bus. » et appuya sur « envoyer ». Il n'eut pas le temps de le mettre dans sa poche que la réponse était déjà arrivée "J'ai hâte, à tout de suite !". Les quelques mots lui arrachèrent un sourire, il remit le téléphone dans sa poche et laissa son regard se perdre sur l'extérieur.

Lors de la sainte barbe, cette nuit, à minuit pile, Bokuto lui avait souhaité un joyeux anniversaire. Akaashi ne s'y était pas attendu, il n'avait jamais parlé de ça avec le sergent. Il s'était mis à lui parler de faire une sortie pour fêter ça. Puis Iwaizumi avait traversé la salle commune d'un pas rapide, sans leur adresser le moindre regard, ils avaient rapidement été rejoints par Kuroo et Tsukishima. Puis Oikawa les avait salué et était partit à son tour. Ça avait eu le mérite de distraire Bokuto qui était passé à autre chose.

Revenu sur la terre ferme, il appuya pour prévenir de son arrêt, il fit à peine deux pas hors du bus que Bokuto lui sautait dessus, un grand sourire aux lèvres. Akaashi s'était tendu, ils étaient dans la rue et avait senti des regards se poser sur eux. Ça n'avait pas semblé perturber Bokuto qui s'était mis à lui parler comme s'ils ne s'étaient pas vu depuis des jours.

— Tu vas voir, ça va être top ! On dirait pas comme ça, mais c'est hyper physique le patinage !

Bokuto passa un bras autour de ses épaules et l'entraîna à sa suite. Focalisé sur Bokuto, la tête tournée vers lui presque tout le long de leur marche, Akaashi ne prêta pas attention à la route une seule seconde. — On est arrivé !

Akaashi s'arrêta et se figea, il reconnut l'enseigne du bar d'Hanamaki et de Matsukawa. Sans pouvoir dire un mot, Bokuto l'entraîna à l'intérieur.

— Joyeux anniversaire !

Tout le tour de garde était présent. Akaashi cligna des yeux, hébété.

— Merci, bredouilla-t-il après de longues secondes.

Kuroo éclata de rire :

— Rappelle moi de te faire des surprises plus souvent, t'as une de ces têtes !

Akaashi s'empourpra.

— Je ne m'y attendais pas !

— C'était l'effet escompté, sourit Yaku.

Akaashi salua rapidement tout le monde d'un signe de la main avant que Bokuto ne l'entraine en direction du bar.

— Hello, Akaashi ! Bon anniversaire, sourit Hanamaki derrière son comptoir : « Table V.I.P ce soir, rien que pour vous. »

— C'était pas nécéssaire d'en faire autant...

— Dis pas ça devant Bokuto, il était surexcité par sa surprise, souffla-t-il assez fort pour que Bokuto l'entende quand même.

Ce dernier fit la moue, avant de sourire :

— Hey, c'est le premier anniversaire qu'on passe ensemble ! J'voulais juste faire plaisir ! Quand j'aime quelqu'un, j'fais toujours au mieux !

Akaashi resta interdit quelques secondes. Incertain d'avoir bien entendu, il resta silencieux, ne sachant que dire.

— Ça t'fait pas plaisir ? relança Bokuto

N'ayant pas envie que son silence soit mal interprété, Akaashi bafouilla, puis reprit :

— Si ! Si c'est juste que... On ne m'avait jamais fait de surprise.

Bien que gêné, il était, effectivement, surprit. On pouvait dire que c'était une réussite.

— Désolé de vous couper, mais qu'est-ce que j'vous sers ? demanda Hanamaki : « J'ai d'autres clients, et bien que les V.I.P passent en premier, je tiens aux autres. »

— Un cocktail sans alcool ? hasarda Akaashi, au dépourvu.

Bokuto, fixant Akaashi, ne répondit pas. Hanamaki ne se répéta pas, il savait ce qu'il prenait habituellement de toute manière.

— Bokuto ? Tout va bien ? demanda-t-il.

— Jamais de surprise ? répéta Bokuto, : « Ils étaient tout bidons tes amis ! »

Hanamaki déposa leur verre et s'approcha d'autres clients. Il leur offrait la première tournée. Gêné, Akaashi ne sut comment tourner sa phrase sans paraître ridicule. Il attrapa son verre et le fit tourner entre ses doigts.

— J'ai été scolarisé à la maison. Jusqu'au lycée, et même arrivé au lycée, j'ai eu du mal à m'intégrer. Trop de cours, pas de temps et beaucoup de pression... Les deux seuls que j'ai, c'est à l'école d'infirmier que je me les suis fait, i peine trois ans.

Bokuto bugua sur le chiffre.

— T'as que deux amis ? Comment un gars aussi chouette que toi peut avoir que deux amis ? Bokuto jeta un coup d'oeil aux gars dans la pièce : « Et nous alors ? »

Akaashi resta interdit, puis se mordit la lèvre.

— Je… Ça me semblait prétentieux de me dire votre ami alors que ça fait seulement deux mois qu'on se connait, et que vous... ça fait des années que vous êtes ensemble.

Bokuto pris Akaashi dans ses bras et l'étreignit quelques secondes.

— Moi, j'suis ton ami ! Enfin, si t'es ok avec ça bien sûr.

Bokuto sentait la cannelle et son pull le propre. Son étreinte lui sembla brûlante bien qu'elle ne dura pas. Étourdi, Akaashi hocha positivement la tête et ajouta un « bien sûr que je suis ok » à peine soufflé.

— De toute manière, on est comme une grande famille, tu verras !

Tout heureux, Bokuto l'entraina vers la table, où la garde se trouvait, presque au complet. Seuls Tsukishima et Oikawa manquaient à l'appel. À peu de choses près, ils s'étaient tous mis à la même place que la dernière fois, les compagnes de Sugawara et Sawamura en moins. Prenant soin de mettre Bokuto entre lui et Kuroo, Akaashi lui demanda tout de même :

— Tsukishima travaille ?

— Ouais, mais il a dit qu'il passerait.

— Oikawa aussi doit v'nir, mais il est en retard... Il d'vrait pas tarder, chantonna Bokuto, tout heureux.

— Au fait, ça te fait quel âge, Akaashi ? lança Yaku.

— Vingt-six ans, il tourna son verre sur la table : « Je ne connais aucun des votre, maintenant que j'y pense... Ni aucun de vos anniversaires. Désolé si j'en ai raté. »

— Vingt Septembre, vingt sept ans ! s'exclama Bokuto, Tsukki est du vingt-sept, on l'a fêté ensemble cette année !

— Le prochain c'est le mien, trente-et-un décembre, répondit Sawamura.

Ils firent un rapide tour de table. Akaashi apprit qu'il avait manqué l'anniversaire de Yamaguchi et de Kuroo. Il s'excusa platement et se promit de noter toutes ces infirmations dans son calendrier quand il aurait un instant. Oikawa choisi ce moment pour entrer dans le bar. Il était aussi bien habillé qu'à son habitude, un trench épais camel ouvert sur un pull à col roulé crème accompagné d'un chino à carreaux dans les mêmes tons. Simple, efficace. Il salua rapidement l'assemblée et lui souhaita un bon anniversaire avant de partir au bar se commander un verre.

Akaashi nota que contrairement à la dernière fois, Oikawa se tenait à distance raisonnable d'Iwaizumi. Ou peut-être était-ce Iwaizumi ? Assit entre Sawamura et Yaku, il avait a peine adressé un regard au lieutenant lorsqu'il était entré dans la pièce. Il mit ça sur le compte de l'esclandre qui avait éclaté la veille.

— Tu tournes au whisky toi maint'nant ? s'étonna Kuroo lorsqu'Oikawa s'assit en face de lui, un verre à la main.

Oikawa trempa ses lèvres dans son verre, retient une grimace et le reposa :

— C'est pour la science, devant l'air interrogatif de Kuroo, il poursuivit : « Tu sembles en avoir dans les veines, c'était pour m'assurer que ta connerie était naturelle et ne venait pas de ça. », un grand sourire aux lèvres.

Matsukawa qui s'était approché pour débarrasser les verres vides jeta un regard aux deux hommes.

— Alors c'est lui, le fameux Lieutenant, il jeta un regard à Iwaizumi, mit sur son plateau les verres qu'on lui tendait et prit note des commandes, : « La connerie c'est naturel chez lui, comme l'arrogance. »

— Il n'a rien à m'envier, t'inquiète pas va, siffla Kuroo en descendant son verre.

— Hm, quelqu'un à ton niveau, je suis surpris, il jeta un coup d'oeil à Oikawa et ajouta : « Il faut que vous veniez un peu plus, j'ai hâte de vous connaître. »

— Tu le regretterais, lâcha Kuroo.

— Autant que je regrette de te connaître ? se moqua Matsukawa.

Kuroo se renfrogna, il grimaça :

T'es pas censé bosser ?

Matsukawa sourit de plus belle, haussa les épaules et prit congé. Iwaizumi soupira, au moins, son intervention avait empêché une dispute entre les deux, ça lui évitait d'intervenir. Tanaka changea de sujet, surpris de savoir que Kuroo était chien, loin de l'image du type doux, agréable et facile à vivre que vantait l'horoscope. Ils finirent par débattre de l'utilité de l'astrologie, puis des fantômes, pour terminer par les âmes-soeurs, le tout entre plusieurs tournées.

N'ayant pas du tout envie de débattre de ce sujet-là, Iwaizumi s'éclipsa au toilette. Il se rinçait les mains quand la porte s'ouvrit de nouveau. Oikawa entra. Levant les yeux dans le miroir, il le reconnut aisément et soupira.

— Iwa-chan, je…

— Non, le coupa-t-il. Il s'essuya les mains et se retourna : « Ecoute, c'est ni le lieux, ni l'moment. Et honnêtement, j'ai pas du tout envie d'en parler. »

L'expression blessée d'Oikawa lui serra le coeur. Iwaizumi avala sa salive, il y était allé un peu fort sans le vouloir, mais franchement, il ne se sentait pas d'aborder le sujet. Sans laisser le temps à Oikawa de répondre, il quitta les toilettes. Il évita soigneusement le regard d'Hanamaki quand il en sortit, il était certain qu'il avait compris quelque chose et ça ne lui plaisait pas. Il ne put faire que quelques pas avant que Kuroo ne l'attrape.

— Besoin d'air !

Le tirant avec lui, ils se retrouvèrent sur la terrasse, entouré par le froid, de fumeurs et d'inconnus. Kuroo l'emmena près d'un coin.

— Tu sais que tu pourras pas m'éviter indéfiniment et t'essaies quand même d'le faire. Chapeau d'avoir tenu jusqu'ici, sourit Kuroo.

— J'pourrais t'éclater la tête contre la table et me barrer, tu l'sais et tu viens quand même m'emmerder, plutôt courageux d'ta part, rétorqua Iwaizumi, légèrement agacé.

Kuroo haussa les épaules.

— Tu m'aimes trop pour m'envoyer à l'hosto', maintenant la grande question à laquelle tu dois répondre c'est, il attrapa son ami par les épaules : « Putain d'bordel, la Diva, sans déconner ? Putain mais qu'est-ce que j'ai raté ?! »

L'expression d'Iwaizumi se crispa.

— Pourquoi t'es encore vivant et comptes parmi mes proches, déjà ?

— Parce que t'as besoin de quelqu'un comme moi à tes côtés, qui te dit la vérité au sujet de tes choix de vie, et que celui-là... mais merde, qu'est-ce que tu lui trouves ?

Iwaizumi se dégagea de sa prise, il se frotta les bras. Kuroo ne lui avait même pas pris sa veste, il sentait son nez geler alors que ça faisait à peine quelques minutes qu'ils étaient dehors.

— J'aimerais poser la même question à Tsukishima, et on est pas ensemble ! J'me pèle le cul, j'aimerais rentrer.

Kuroo bloqua quelques secondes, Iwaizumi n'avait été en couple qu'une seule fois. Il était incapable de simplement s'amuser avec quelqu'un et du jour au lendemain, il embrassait la diva mais en plus, n'était même pas avec ?

Profitant de son moment d'égarement, Iwaizumi passa à côté de lui. Kuroo lui attrapa le bras par réflexe, et lui entoura les épaules.

— Attends, mais t'es au courant que c'est genre… encore plus fou, là ?

Iwaizumi attrapa la main sur son épaule, se tourna à moitié et gronda d'une voix pleine de menaces :

— Kuroo, si tu m'lâches pas, que tu fermes pas ta gueule à ce sujet-là et que tu te tiens pas tranquille pour les trois prochaines semaines à ce propos, j'te brise les doigts.

— Les amis sont censés se parler de ça, mais si tu te sens pas d'le faire, tu pouvais juste le dire... murmura craintivement Kuroo.

— J'me sens pas de parler de ça.

Kuroo leva les yeux au ciel, se détacha et lui frotta les cheveux.

— Ok, ok, j'te fous la paix, mais t'as intérêt à m'tenir au courant à un moment !

Passant devant lui, il retourna à l'intérieur sans l'attendre. Iwaizumi resta dehors quelques minutes de plus. Il n'avait pas du tout envie d'y retourner et de fêter quoi que ce soit. Mal à l'aise pour Akaashi, il se secoua et se jura de faire l'effort. Il appréciait l'infirmier, il n'allait pas gâcher une fête, certes petite, mais une fête quand même et en son honneur. Il réfléchirait à tout ça demain, au calme.

Quand il revint à table, il eut la surprise de découvrir que la seule place de libre se trouvait à côté de Kuroo, les garçons ayant bougé entre temps pour une raison inconnue. Oikawa se trouvait face à cette place. Il grinça des dents, mais certain que Kuroo se tiendrait, s'assit sans piper mot.

Se glissant dans les conversations ambiante, la soirée coula sans encombre, comme l'alcool.

Il était presque minuit quand Tsukishima arriva.

Kuroo, au bout de la banquette, poussa Iwaizumi et attira Tsukishima sans qu'il ne puisse saluer quiconque.

Faisant fi de leurs camarades, il l'étreignit et lui dit à quel point il lui avait manqué. Akaashi jeta un drôle de regard à la scène, surprit, il savait Kuroo taquin, mais ne le connaissait pas tactile.

L'agacement fit place à la stupeur, Tsukishima lui donna un coup dans les cotes et le repoussa sèchement, il salua ses camarades, souhaita un joyeux anniversaire à Akaashi et s'assit sur un tabouret que venait d'apporter Hanamaki. Il commanda une limonade.

— Je te pensais plus patient, lança Tanaka à Tsukishima.

Pour éviter tout quiproquo, Tsukishima lâcha platement :

— Je suis patient, rétorqua-t-il : « Mais, on est coloc et il fait toujours ça quand il est… » il lança un regard noir à Kuroo avant de poursuivre : « Bourré. »

Nishinoya et Tanaka, dans l'excès, poussèrent un cris de stupeur et le noyèrent sous les questions.

— Depuis quand ? Où ?

— Eh mais c'est vrai, vous vous connaissiez avant que t'arrives à la caserne ! se rappela Nishinoya : « Vous habitez depuis le début ensemble ? Mais vous vous connaissez depuis quand au juste ? »

Kuroo grogna un « six ans » avant de récupérer son verre et de le finir d'une traite.

— Et on l'apprend que maintenant ? s'exclama Tanaka : « Et que vous êtes coloc' en plus ! »

— Kuroo passe sa vie entre chez Tsukishima et Bokuto, on peut pas vraiment dire qu'il vive vraiment quelque part, souffla Iwaizumi pour tenter de noyer le poisson. Il n'avait pas envie que Tsukishima boude pour les prochains jours.

— T'es jaloux ? se moqua Kuroo : « Si tu me donnais tes clefs, je pourrais venir aussi. »

— C'est bien pour ça que je le fais pas, rétorqua Iwaizumi.

La conversation partit sur une chamaillerie futile et sur leurs occupations pendant leur temps libre. Tsukishima leur lança un regard ennuyé et porta son attention sur Akaashi.

Oikawa se flagella mentalement. Trop obnubilé par Iwaizumi ces derniers temps, il avait été incapable de remarquer le couple que formaient Tsukishima et Kuroo, ce qui expliquait complètement la scène d'hier soir. À cette pensée, il serra les dents et vida son verre.