19/01

Bokuto décida que c'était une mauvaise idée, finalement. La soirée avait pourtant bien commencé, ses invités étaient arrivés et tous avaient commencé à discuter tranquillement. Jusqu'à l'incident.

Kuroo avait grignoté un abricot sec, Akaashi l'avait regardé et sourit.

— Il semblerait que tu aies toute confiance en tes intestins.

Kuroo s'était arrêté de mastiquer à l'instant même où la phrase avait été prononcée. Il avait finalement avalé le fruit et depuis, ils se fusillaient du regard. Mécontent pour Kuroo, moqueur pour Akaashi.

Bokuto les regarda à tour de rôle, tandis que Hanamaki et Matsukawa piaillaient, voulant connaître le fin mot de l'histoire.

Iwaizumi posa son téléphone, ce fut lui qui raviva les douloureux souvenirs.

— Kuroo est resté bloqué aux chiottes une journée entière.

— Parce qu'un enfoiré a verser du laxatif dans ma bouteille, gronda Kuroo : « Et c'est notre cher Akaashi qui a fait le coup. »

Ehonté, Akaashi lui sourit de plus belle.

Hanamaki siffla.

— T'as pas eu peur de lui causer des problèmes ?

— Je suis infirmier, et j'ai fait des études de médecine avant, justifia Akaashi.

— Rappelle moi de pas te mettre en colère, s'amusa Matsukawa : « Et qu'a donc fait notre petit Kuroo pour mériter cette peine ? »

Akaashi croisa les bras et toisa Kuroo, sans répondre.

— Une connerie, mais pour ma défense, j'avais pas toutes les informations.

— Mais maintenant tout va bien c'est d'l'histoire ancienne ! Pas vrai ? Bokuto leur adressa un grand sourire.

Akaashi se tourna vers lui et sourit en retour.

— Bien sûr, Bokuto, c'est de l'histoire ancienne.

— Parfaitement, grinça Kuroo.

Tsukishima leur lança un regard ennuyé.

— Bien que Kuroo l'ait totalement mérité, c'était peut-être un peu... Excessif, non ? Tu ne sais pas ce que ça fait de devoir s'occuper de ça, grimaça-t-il.

Outré, Kuroo se tourna et se jeta sur lui. Tsukishima tenta de le repousser, difficilement. Le tenant par la taille et presque allongé au sol, Kuroo pleurnicha :

— Pourquoi t'es si horrible ?

— Comment fais-tu pour le supporter ? Et depuis combien de temps, au juste ? demanda Akaashi en ignorant les jérémiades de Kuroo.

Tsukishima essaya une nouvelle fois de se dégager, il pinça le nez de Kuroo et plaqua une main sur sa bouche.

— Supporter, t'as bien choisi le terme, il jeta un regard noir à Kuroo : « Depuis combien de temps quoi ? »

— Vous êtes ensemble ? J'ai souvenir que vous vous connaissez depuis six ans, non ?

Surprit, Tsukishima relâcha Kuroo et remonta ses lunettes.

— Oui, depuis trois longues années.

Kuroo le plaqua au sol et bloqua les mains de Tsukishima dans l'une des siennes.

— Trois longues années, hein ?

Hanamaki soupira :

— C'est repartit…

Matsukawa retint un rire et se leva, il sortit sur le balcon pour fumer, tandis que Kuroo continuait de menacer son amant.

Bokuto laissa tomber sa tête sur les cuisses d'Akaashi. Il fourra sa main dans ses cheveux par réflexe, et lança :

— Supporter Kuroo pendant trois ans... Tsukishima, tu m'impressionnes.

— Akaashi, j'vais finir par me vexer, pesta Kuroo.

— J'essaie juste de comprendre comment tu as pu réussir à sortir avec lui, expliqua-t-il.

Tsukishima lança un regard à Kuroo. En proie à un débat intérieur, il hésita entre piquer son amant et subir ses chatouilles, ou le brosser dans le sens du poil et récupérer ses mains. Un sourire moqueur étira ses lèvres.

— Il m'a eu à l'usure, on ne peut pas lui ôter d'être persévérant.

Akaashi tenta de dissimuler son rire, vainement. Kuroo prit une grande inspiration, tiqua légèrement puis posa délicatement sa main sur les côtes de Tsukishima. D'un mouvement brusque, il le pinça, avant de le chatouiller.

Matsukawa rentra à ce moment-là et observa les deux énergumènes se livrer une bataille d'endurance.

S'asseyant dans le canapé, Hanamaki se plaça entre ses jambes.

— T'as pensé à parler de ton anniversaire ? demanda Matsukawa en lui embrassant la tempe.

— Oh ! Qu'est-ce que je ferais sans mon Mattsun, sourit-il : « Hey, un peu de calme les gars, j'organise une petite fête privée au bar le vingt-sept, vous êtes tous invités ! »

Il tapa dans la jambe à Iwaizumi, ce dernier releva les yeux de son téléphone.

— Toi et votre lieutenant aussi, on le veut dans la même pièce que Kuroo. Il était plutôt mignon en plus, à croquer.

— Fais gaffe à c'que tu dis, menaça gentiment Iwaizumi, il ajouta tout de même : « J'lui demanderai s'il veut venir. »

Son téléphone vibrant une nouvelle fois, il reposa les yeux dessus et ne vit pas Matsukawa et Hanamaki s'entre-regarder, puis sourire. Quelque chose se tramait, ils allaient pouvoir s'amuser la prochaine fois.

Tsukishima murmura quelque chose à Kuroo. Ils se toisèrent un instant, puis Kuroo soupira et le relâcha. Il s'assit par terre et ouvrit ses bras. Tsukishima s'y cala et Kuroo posa son menton sur son épaule.

— Vous voulez pas qu'on commande ? Va s'faire tard et après ce sera mort, proposa Bokuto.

Iwaizumi jeta un coup d'oeil à son portable. Un peu plus de vingt-deux heures trente.

— Pizza ?

Tsukishima haussa les épaules.

— C'est sûrement c'qu'on peut trouver d'plus simple à manger, approuva Bokuto.

Ayant l'habitude, ils choisirent tous en quelques minutes. Akaashi prit quelque chose de simple pour ne pas s'embêter, sous l'oeil curieux d'Hanamaki.

— Et si, en attendant, on faisait un « je n'ai jamais » ? proposa-t-il un grand sourire aux lèvres.

Kuroo se redressa légèrement, suspicieux. Un coup d'oeil d'Hanamaki vers Akaashi lui fit comprendre l'intention.

— Bières pour tout l'monde, alors ! ajouta-t-il.

Il en ouvrit une pour Akaashi et Tsukishima sans leur demander leur avis. Son amant pesta, il l'ignora.

— Je peux savoir ce que c'est, au juste ? demanda Akaashi.

— C'est simple, tu dis quelque chose que tu n'as jamais fait. Si quelqu'un l'a déjà fait autour de cette table, la personne doit boire une gorgée, facile, non ? expliqua Hanamaki.

Akaashi le sentait mal, mais il haussa les épaules.

— Dans ce cas là, je commence, lança Tsukishima, un poil agacé : « Je n'ai jamais couru après quelqu'un pendant trois ans. »

— T'es vache ! lança Kuroo.

Tsukishima lui jeta un regard noir et pointa sa bière du doigt.

— Et toi un abruti.

Parce qu'ils se connaissaient depuis six ans et se fréquentaient depuis trois, Kuroo était le mieux placé pour savoir que Tsukishima avait en horreur l'alcool et n'en buvait jamais.

Iwaizumi sourit, moqueur. Kuroo lui jeta un regard noir. Il grommela mais bu quand même et enchaina :

— Je ne me suis jamais tapé mon supérieur.

Narquois et heureux de sa petite vengeance, il sourit ouvertement à Iwaizumi. Le regard noir qu'il reçut l'amusa encore plus, mais Iwaizumi bu malgré tout.

Surpris, Akaashi fronça les sourcils. Hanamaki et Matsukawa se regardèrent une nouvelle fois, ils avaient enfin de quoi s'amuser avec Iwaizumi, ils ne s'en priveraient pas pendant la soirée, surtout pour la prochaine fête. D'un sourire, Matsukawa enchaina :

— Je n'ai jamais sauvé quelqu'un d'un incendie.

— Sérieux ? râla Iwaizumi.

Kuroo, le verre déjà à la main, reprit une lampée. Bokuto fit de même en soupirant. Akaashi les regarda faire. C'était un jeu qui paraissait innocent, jusqu'à ce qu'on se rende compte qu'en connaissant les personnes autour de la table, il était facile de les faire boire. Très sournois.

Hanamaki se tourna vers lui, il le fixa. Il savait pertinemment ce qui l'attendait.

— Je n'ai jamais... eu le luxe de me faire conduire par un chauffeur, souffla-t-il.

Akaashi soupira, prit sa bière et une but une gorgée. Ce fut le seul autour de la table.

— Iwaizumi ? continua Hanamaki.

— Je n'ai jamais vomit sur les pieds de mon instructeur, affirma-t-il, les yeux braqués sur Kuroo.

— J'te déteste, lâcha ce dernier.

— On regrette vraiment qu'il n'y ait pas de vidéo, affirma Hanamaki.

— Kuroo a vraiment fait ça ? chuchota Akaashi à Bokuto.

Bokuto hocha la tête :

— Et pas qu'un peu, pendant l'instruc' il a fait le mur pour aller à une soirée, il s'est pas fait choper, mais l'lendemain...

Son esprit ressassa la scène et Bokuto gloussa.

— Il avait vraiment une sale tronche.

— J't'entends, gronda Kuroo.

Bokuto l'ignora, se pencha un peu plus sur Akaashi et poursuivit :

— Première et dernière fois que j'le voyais vomir à cause de l'alcool.

— Bro', j'peux être horrible moi aussi…

— Akaashi, à toi, sourit Hanamaki pour couper court à la querelle.

Il fit mine de réfléchir, puis lança innocemment :

— Je n'ai jamais eu de rapports sexuels sur mon lieu de travail.

Tous les regards se braquèrent sur lui.

— Plus vicieux que ce que j'pensais, souffla Hanamaki, amusé.

— T'es affreux, ajouta Kuroo.

Mis à part Bokuto et Akaashi, tous burent autour de la table et le maudirent silencieusement.

— Bokuto, à toi !

Il prit un instant et s'exclama :

— Je n'ai jamais fait de saut à l'élastique !

Akaashi observa Bokuto. Il hésitait entre le trouver extrêmement gentil, ou niais. Tous présents essayaient de faire boire les autres, tandis que lui, voulait seulement jouer.

— Si pur, flatta Kuroo.

— Y'a que les fous pour essayer de faire du saut à l'élastique, railla Hanamaki.

— T'es qu'une lopette, se moqua Iwaizumi.

— Dixit le plus gay d'entre nous... soupira Matsukawa.

— À moins qu'entre temps, vous ayez eu une supérieur à la caserne et non que des supérieurs masculins, s'amusa Hanamaki.

— Un mot de plus et vos bouches ne pourront plus s'ouvrir pour les trois prochains mois.

Ses deux amis firent un « ouh » moqueur. Il sentit le regard curieux d'Akaashi, mais le remercia intérieurement de ne poser aucune question.

On sonna à la porte. Bokuto qui commençait à avoir sérieusement faim se leva en vitesse et trottina jusqu'à la porte d'entrée. Il réceptionna les pizzas, paya le livreur, retourna dans le salon et fit la distribution.

— T'as tenté quoi cette fois ? demanda Kuroo.

— Il doit plus lui rester grand chose à essayer, s'amusa Hanamaki.

Akaashi regarda à tour de rôle son petit ami et ses deux amis. Il jeta un oeil au contenu du carton de Bokuto et haussa un sourcil, intrigué.

— Vous avez jamais commandé ? s'étonna Tsukishima.

— Si, mais jamais de pizza.

— Accroche toi bien alors.

Devant le l'expression interloquée d'Akaashi, Tsukishima expliqua :

— Il a a coeur de tenter toutes les pizzas de la carte, et certaines sont... il pinça les lèvres et secoua la tête, attrapa son téléphone et le tendit à Akaashi : « Particulières. »

Bokuto arracha le téléphone des mains d'Akaashi, le verrouilla et l'envoya sur le canapé.

— Eh ! Vous êtes pas sympa ! C'était une chouette découverte la pizza au burger !

Du coin de l'oeil, Akaashi vit Kuroo mimer le fait de se faire vomir. Il esquissa un sourire et passa une main dans le dos de son amant qui grimaça :

— Par contre, plus jamais la pizza au sushi.

Ils débattirent un moment de la pire pizza qu'avait pu ingérer Bokuto.

—Mais puisque j'vous dis qu'elle est bonne ! Goutez !

Bokuto attrapa une part dans son carton et le tendit à Hanamaki et Matsukawa qui grimacèrent. Kuroo fit mine de vomir une nouvelle fois, Tsukishima refusa poliment malgré la grimace sur son visage. Les yeux plein d'espoir, Bokuto se tourna vers Akaashi. Il regarda la garniture, fit la moue et hésita. Face au regard insistant, il prit sur lui et croqua dans la part non sans appréhension. Les fruits de mer se mélangeaient étrangement bien avec la pizza.

— C'est surprenant, mais bon, dit-il une fois que sa bouche fut vide.

Plus courageux que ses amis, Iwaizumi attrapa une part dans la boite, prit une bouchée sous le regard attentif de l'assemblée.

— Ouais, ça passe, on a connu pire, lâcha-t-il.

— J'vous l'avais dit ! s'exclama Bokuto.

Ils le fixèrent tous, Kuroo lâcha :

— T'as aussi dit que celle au burger était bonne, c'était immonde. T'as des goûts bizarres, bro', faut t'y faire.

Bokuto bougonna qu'il « fallait bien ça pour être ami avec lui depuis tout ce temps » et se renfrogna pour la forme. Finalement, cette soirée était une assez bonne idée.