Bonjour et bonne année !
Je sais que le premier chapitre était très lourd, mais je voulais absolument poser le décor pour ceux qui ne connaissaient pas l'autre univers du cross-over. Cependant, celui-ci sera certainement bien plus léger sur l'estomac, puisqu'on commence enfin à se plonger dans l'action (les épées ne volent pas encore, mais ça viendra).
Donc, je vous souhaite une bonne lecture et rendez-vous le mois prochain pour la suite (en espérant qu'il y ait moins de timide dans les reviews)
Algol d. DarkWalker : Oh ! Un ancien ! Merci de m'avoir rassuré sur le premier chapitre, ton commentaire m'a fait super plaisir. / Je n'ai fait aucun des jeux dont tu parles, mais si la trilogie Vampire me fait de l'œil. Du moment que je fais pas d'histoire avec King Crusader, ça me va. J'ai déjà bien assez de pain sur la planche.
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La brune refaisait son chignon alors que Geralt s'époussetait en se relevant. Il ramassa la cape sombre et la tendit à la femme qui ne semblait pas avoir plus de la vingtaine. Il se doutait bien que cela pouvait être loin du compte. Lui-même avait l'air d'avoir à peine la trentaine et pourtant, il avait, d'après Eskel, plus du triple.
- Tu es Portgas, c'est ça ? se fit-il confirmer.
La brune remit une baguette pour garder ses dreads en place dans son chignon et reprit sa cape.
- Tu joues à quoi, de Riv ? C'est pas comme si tu ne me connaissais pas, ça fait presque quarante ans que j'hiberne à Kaer Morhen.
Donc, confirmation, les mutations faisaient bien de la jeune femme quelqu'un de plus jeune qu'elle ne l'était si elle en était à presque quarante ans d'hibernation à la citadelle des loups.
- J'ai perdu la mémoire. Mes souvenirs remontent aux dernières semaines.
La femme soupira en jetant sa cape sur son épaule et se frotta les yeux, dont le gauche était marqué par une étrange brûlure en demi-lune du côté de la tempe, lui mangeant tout le contour de l'œil.
- Je vois. Merveilleux. Eh bien, on va refaire la présentation et je vais te rappeler les règles d'or, vieux loup lubrique.
Elle se montra du pouce.
- Je suis Anabela D. Portgas. Règle numéro un, tu gardes tes mains pour toi. Règle numéro deux, tout commentaire déplacé sera puni par un de mes poignards dans tes bijoux de famille. Règle numéro trois…
Elle montra ses yeux avec deux doigts.
- Mes yeux sont là, pas sur mon buste ou sous ma ceinture. Donc, si tu regardes ailleurs, t'as tout intérêt de ne pas t'attarder. Capiche ?
- Bien compris, Anabela.
- Ah, et même si mon prénom complet est Anabela, je préfère l'usage d'Ann, mais pour toi, c'est Portgas. C'est enregistré ?
- Si tu me disais plutôt comment tu as obtenu un sauf-conduit pour réussir à entrer.
Ann haussa des épaules en se mettant en marche, saluant de la tête une femme très légèrement vêtue un peu plus loin qui attendait visiblement un client. Géralt lui emboîta le pas, légèrement en arrière, essayant de compter le nombre de poignards qu'avait son homologue de l'école du Chat sur elle. Parce qu'elle n'avait pas d'armes secondaires, en plus des glaives (lui avait une hache), mais des poignards et des dagues un peu partout sur son veston à manche courte de cuir, que ce soit devant ou derrière, sans parler des machettes le long de ses jambes.
- J'ai pas cherché à en obtenir un, expliqua-t-elle alors qu'ils prenaient l'escalier pour remonter des bas-fond. Je suis un chat, je vais où je veux, et ce ne sont pas les humains qui vont m'en empêcher. J'ai profité du couvert de la nuit pour escalader la muraille. T'es entré comment, toi ?
- Case prison, je me suis fait avoir par ce satané Mikul. Il m'a dénoncé comme un faussaire à son supérieur et je viens tout juste de regagner ma liberté.
Ann eut un reniflement moqueur alors qu'elle montrait le chemin à prendre de la tête à Geralt, le conduisant vers le quartier non-humain qui était signalé un peu plus loin par des arches rouges.
- J'y pense, mais pourquoi ne t'es-tu pas chargée de la Bête dans les faubourgs ? demanda le Loup Blanc avec curiosité.
- Parce qu'ils ont cherché sa colère comme des grands, donc, ils devaient s'en débarrasser seuls. Mikul est un garde corrompu qui se jette sur la moindre paysanne qui passe à proximité. J'ai trouvé la malheureuse Isla dans la crypte après qu'elle se soit suicidée suite son agression par lui. Haren est un contrebandier raciste qui ne s'intéresse qu'à l'or et aux femmes. Quant à Odo, ce bon à rien fainéant a assassiné son frère et accuse la sorcière Abigail de l'avoir poussé à le faire, avec sa magie. Si encore ça avait été une magicienne, j'aurai pu l'admettre, mais là, il s'agit d'une simple sorcière, sans compter que ce type a des Ekynoppes dans son jardin. On sait aussi bien l'un que l'autre que ces fleurs géantes carnivores ne poussent qu'à deux endroits. Sur les lieux d'un crime cruel et sur la tombe de la victime. On sait aussi que le frère de ce gros lard était soldat. Conclusion ?
- Il n'a pu l'avoir que par surprise ou dans son sommeil pour se retrouver ainsi avec des Ekynoppes dans son jardin.
- Et ce Révérend, là, celui qui cite les versets de l'Église du Feu Éternel pour tout et n'importe quoi. Celui qui ferme les yeux sur les horreurs des villageois, tu connais son crime ?
- Je sais qu'il fait du trafiques d'enfants avec la Salamandre.
- Ce soir, je vais lui trancher la gorge. Que Carmen dise que ça vaille pas la peine, je m'en fous, mais ce salopard va trop loin !
Geralt l'attrapa par le bras alors qu'elle accélérait le pas sous la colère. Il l'attira vers lui pour qu'ils soient face à face.
- Si tu n'étais pas au courant du trafic, dis-moi ce que tu sais sur lui. De toute façon, il est déjà mort. Je m'en suis chargé quand il a essayé de s'en prendre à moi et à la sorcière qu'il disait responsable de l'invocation de la Bête.
- Ah. Une bonne chose de faite. Abigail n'est pas toute blanche, mais elle n'a pas à servir de bouc-émissaire.
Ann se détourna, un peu plus calme, et reprit sa marche.
- Portgas, pourquoi tu es en colère contre le Révérend en particulier ?
- Savais-tu qu'il avait une fille ?
- Oui. Il l'a chassée de chez lui quand elle s'est retrouvée enceinte, de ce que Abigail m'a dit.
- Il s'agit de Carmen, elle est à la tête des prostituées du Quartier du Temple. Elle a perdu le bébé et je pense que c'est mieux ainsi.
- En quoi ?
- Parce qu'ainsi, elle n'a pas à se tracasser de savoir qui de Mikul ou de ses amis gardes en est le père suite à son viol. Tout ce que son père a fait, c'est détourner les yeux sur le crime et la jeter à la rue quand son ventre a commencé à s'arrondir. Aujourd'hui, même si elle se prostitue, elle a trouvé quelqu'un qui l'aime vraiment. Je sais pas qui est cet homme, mais j'espère qu'il prendra soin d'elle, avec ce qu'elle a traversé, elle en a bien besoin.
- Je vois.
- J'ai pas pour habitude de suivre la voie de tueur à gage des autres membres de l'école du Chat, mais la mort de Mikul est bien quelque chose que je compte rentabiliser.
- On nous paye pour tuer des monstres et protéger des humains, Portgas.
Ann se retourna à moitié vers Geralt.
- Quand des hommes se comportent ainsi, j'appelle pas ça des humains. Quoi, t'as jamais vu des mutants de ta vie, vieille bique !?
La vieille femme ainsi interpellée cessa de dévisager les deux sorceleurs avec écœurement et peur, pour décider qu'il valait mieux s'éloigner. Ann cracha sur le sol vaguement recouvert de pavés pour montrer son mépris et passa l'arche du quartier non-humain, ignorant les lampions à la porte des maisons qui s'allumaient en vert sur leur passage.
- Sinon, tu fais quoi ici, dans cette charmante ville en quarantaine ? demanda la femme.
- Tu connais la Salamandre ? demanda Geralt.
- Des gars avec des écussons de la Salamandre m'ont attaqué alors que je revenais du nord pour rejoindre Brokilion, il y a quelques semaines. Depuis, je cherche à savoir ce qu'ils me veulent et la piste m'a menée ici. Tu en as parlé tout à l'heure à l'aubergiste, tu sais quelque chose ?
Elle arriva devant une maison à l'apparence abandonnée et ouvrit la porte.
- C'est moi, annonça-t-elle.
Geralt avait déjà sorti le glaive d'argent qu'on lui avait refilé en sentant son médaillon s'agiter sur sa poitrine. Une femme se tenait dans la pièce. Certainement pas humaine. Elle était nue, avec une peau d'une pâleur cadavérique qui faisait ressortir ses longs cheveux couleur feu et ses yeux jaunes. Le reste de la couleur venait d'étranges plaques rouges sur ses mollets et sa poitrine, tout en formant des gants griffus pour ses mains.
- Bon retour ! salua joyeusement la créature.
Elle cessa de flotter devant une tour de livres qu'elle étudiait du regard auparavant pour se rapprocher des deux sorceleurs en légère lévitation à quelques centimètres du sol. Ann avait refermé la porte et faisait signe à Geralt de ne pas lever son arme. Le monstre flotta doucement jusqu'à l'homme, humant son parfum et surtout, montrant ses crocs et le sang dégoulinant encore de sa bouche.
- Bel homme, c'est mon repas ?
- Portgas, c'est quoi cette affaire ? gronda Geralt en levant légèrement le menton comme pour reculer son visage de la créature.
- Albina me couvre pendant que je suis ici. On a un accord. Je la détruis pas et elle m'aide. Lui, c'est Geralt de Riv. Un sorceleur lui aussi.
- Enchantée ! salua l'étrange femme avant de se tourner vers Ann. Tu as eu quelques visiteurs indésirables en ton absence. Encore ces sympathiques brigands avec toujours le même emblème.
- Merci de leur avoir fait comprendre que je n'étais pas là.
- Je n'ai pas éclaboussé tes livres, cette fois. Puisque tu es là, je sors, je reste néanmoins dans les environs pour mes passes.
La créature cessa de flotter pour prendre une apparence plus humaine et vivante, le sang mystérieusement disparu de son visage, arborant une tenue assez décolletée.
- Mes salutations à Carmen, lui dit Ann.
La fausse humaine offrit un clin d'œil aguicheur à Geralt avant de quitter la zone avec un déhanchement exagéré, refermant la porte derrière elle. Ann avait déjà rejoint la cheminée à quelques distances de là qu'elle alluma d'un geste avant d'attraper un lourd sac de voyage à proximité.
- Tu embauches une alpyre comme chien de garde ? se fit confirmer Geralt.
- Les seuls gars exsangues qu'elle a laissés derrière elle, outre les chiens de la Salamandre, ce sont des clients qui voulaient pas la payer. Le genre de truand que personne ne regrettera. Personne n'a mis de contrat pour sa tête, je n'ai aucune raison de m'en prendre à elle. Bon, tu me dis pourquoi tu les traques quand tu veux, ces gars de la Salamandre ou je te mets à la porte ?
Geralt laissa tomber son paquetage sur le sol à proximité et retira ses glaives de son dos pour les appuyer à côté de ceux de la femme, contre un mur sale dont le plâtre s'effritait. Il s'assit devant la cheminée et accepta la bouteille d'hydromel nain qu'elle lui donna.
- Le groupe de la Salamandre a attaqué Kaer Morhen dans le but de s'emparer de nos secrets de Sorceleur. Ils savaient où chercher et comment procéder. J'ai essayé d'intervenir, mais ils ont réussi à fuir et le novice Léo a été tué dans l'attaque. L'assaut était bien organisé, bien assez pour nous occuper sur tous les fronts à la fois. Si j'avais choisi de rester dehors avec Vesemir, pour m'occuper de la bête qu'ils avaient invoqué, ils seraient partis avec notre équipement aussi. Mais ils ont récupéré nos recettes et nos mutagènes malgré tout.
La femme but une gorgée de sa bouteille d'alcool, les yeux fixés sur le feu.
- Je me souviens de Léo, finit-elle par dire tout bas. Vesemir-jisan m'avait demandé de revenir cet hiver à Kaer Morhen avec une copie des instructions des mutations de l'école du Chat, pour les comparer avec les herbes qu'il y a dans votre laboratoire et les souvenirs de tout le monde. Il n'y a plus personne qui sache comment accomplir les mutations des Loups pour l'Epreuve des Herbes, il voulait essayer de remédier à ça en s'inspirant de la méthode des Chats.
- La méthode n'est pas la même ?
- Oh non ! La grosse majorité des sorceleurs de l'école du Chat sont des psychopathes, des sadiques et des fous. On termine notre formation en devenant sociopathe ou psychotique, si ce n'est les deux. L'entraînement reçu là-bas joue pas mal aussi. Vu qu'ils ont pas réussi à me briser, en dépit qu'ils aient mis la barre très haut dans mes Épreuves, je me suis carapatée à la première occasion et Vesemir-jisan m'a accueilli. L'aider à faire renaître votre école était une façon de le remercier.
Elle but une autre gorgée de sa boisson et tourna la tête vers son camarade masculin qui buvait aussi en l'observant en silence.
- Tu sais quoi, à l'heure actuelle, de ce groupe ?
- Bien peu, avoua Geralt avec un soupir. A leur tête, il y a le mage Azar Javed. Sa peau sombre indique qu'il est Zerrikanien.
- Maaa ! Un homme qui a pas perdu ses couilles devant les femmes féroces et puissantes qui règnent sur leur pays !? Amusant !
Geralt s'étouffa avec sa boisson alors qu'Ann éclatait de rire.
- Toi qui sais pas garder ton pantalon en place, tu t'offusques parce que je parle comme ça ? Mais où va le monde ! Non, honnêtement, la Zerrikani est une nation du type matriarcale, c'est rare qu'un homme prenne l'initiative de faire autre chose que s'occuper des champs ou des gosses. On doit avoir affaire à un homme avec une volonté d'acier.
- Et c'est un bon mage. Triss Merigold, une magicienne, était à Kaer Morhen au moment des faits et nous a dit que notre homme devait avoir de très bonnes connaissances magiques pour avoir réussi à canaliser l'énergie de notre Cercle des Éléments afin de concevoir un cercle de téléportation pouvant le conduire n'importe où sur le continent. Et avec lui, il a un tueur à gage du nom du Professeur.
- J'ai vu une prime à ce nom. Il est recherché dans plusieurs pays pour presque une vingtaine de meurtres, non ?
- Hmhm. Quand je suis arrivé ici, ils l'avaient déjà derrière les barreaux. Mais quelqu'un a payé sa caution via la banque Vivaldi.
Ann avait pris un livret en parchemin dans son sac et commençait à prendre des notes de ce que disait Geralt avec un fusain.
- Vivaldi a perdu le contrôle de sa banque, donc, il faut pouvoir obtenir des informations sur les nouveaux propriétaires, pointa Geralt.
- Ce qui explique le déménagement du nain dans le coin. Il est à quelques portes d'ici, marmonna Ann. La difficulté, du moins pour toi, est que la banque en elle-même est dans le Quartier Marchand qui, en plus de la quarantaine, est sous le coup de la Loi Martiale. Et excuse-moi de te le dire, t'es franchement pas discret.
- Parce que tu l'es plus, peut-être ?
- J'ai mes méthodes, vieux loup lubrique. Et toc !
Geralt essaya de ne pas se laisser aller à la frustration devant le rire de la femme.
Celle-ci se leva et se mit à faire les cent pas en continuant sa prise de notes sur ce qu'ils savaient de la Salamandre.
- Je sais aussi qu'ils s'intéressent à Kalkstein, lui dit-il.
- Kalkstein ? C'est logique, après tout, c'est un alchimiste reconnu, il doit avoir un bon équipement et de bonnes connaissances permettant de savoir exploiter correctement les mutagènes récupérés à Kaer Morhen. Autre chose ?
- On a un généreux donateur anonyme qui a mis la prime sur la tête du professeur. Il aurait un émissaire en soirée, à l'Ours Poilu.
- A voir, ça peut être intéressant. Quelque chose d'autre ?
- Berengar, un autre sorceleur de Kaer Morhen. Il aurait eu des ennuis avec la Salamandre. Suite à l'attaque, Vesemir voulait qu'on vous retrouve toi et lui, puisqu'il n'a aucune nouvelle des autres écoles.
Ann cessa ses déambulations, pensive.
- Je me souviens pas de l'avoir rencontré un jour, mais j'avais remarqué qu'un autre Sorceleur me précédait dans les faubourgs. J'y ai pas réfléchi plus que ça sur le moment.
- J'ai l'intention de poser quelques questions à Meis sur la Salamandre. Il était l'un des rares à pouvoir indiquer à ces gars que je devais descendre dans les égouts pour le Cocatrice. Et sur le chemin de la remonté, deux hommes de la Salamandre me sont tombés dessus. Il y a aussi un certain Thaler que je dois interroger.
- Thaler ? Le receleur ? s'étonna Ann.
De sa bouteille d'hydromel, Geralt montra son glaive en argent contre le mur
- J'ai perdu mes armes avant qu'on me retrouve. Vesemir avait un glaive d'acier en plus, mais pas d'argent. Celui-ci, c'est Vincent Meis qui me l'a fourni avant que je descende dans les égouts. J'ai pu obtenir du géôlier Jethro la provenance. Il a été saisi chez ce Thaler juste avant qu'on ne vienne me voir pour la bête. C'est un peu gros comme coïncidence, et je crains que ce soit l'arme de Berengar, puisqu'il est le seul qui manque à l'appel à ma connaissance et vu que tu as le tien.
La femme prit encore une fois des notes.
- On m'a aussi recommandé de rencontrer un certain Raymond, qui serait un détective qui habite à proximité du canal.
- Qui t'a fait cette recommandation ? s'enquit-elle.
- Un jeune chevalier de la Rose Ardente. Siegfried.
Elle hocha la tête et regarda les notes qu'elle avait prises.
- On reste ensemble ou tu veux qu'on fouille chacun de son côté ? s'enquit-elle.
- Comme tu veux, mais je préfère te garder à l'œil, que je ne rentre pas en devant expliquer à Vesemir comment tu t'es faite tuer.
- Tu viens de me donner une forte envie de te planter un de mes poignards dans tes parties, de Riv.
Et elle se leva souplement et s'épousseta en jetant un regard bien noir à son camarade mutant.
- On commence par qui ? demanda-t-elle.
- Je veux résoudre cette affaire avec Thaler d'abord. Puis je toucherai deux mots à Meis sur son implication dans la libération du Professeur, lui annonça Geralt.
Et il se leva à son tour. Tout comme sa camarade, il reprit ses armes, laissant son sac à sa place quand la brune lui assura qu'il ne risquait rien. Il la regarda ranger dans son gilet de cuir son carnet de notes avec son morceau de charbon, avant d'aller ouvrir la porte.
- Je peux te poser une question, Portgas ? demanda Geralt alors qu'ils quittaient le semblant de pied à terre de la femme.
- C'est pas déjà ce que tu fais ?
- Non, ça, c'est le préliminaire pour m'assurer que je peux encore parler sans que tu veuilles me séparer de mes attributs masculins.
Elle renifla, amusée, avant qu'elle n'envoie un geste de la main à l'apyre sous sa forme de plantureuse prostituée qui attendait un client à l'angle proche de la rue pauvre et sale du ghetto non-humain.
- Qu'est-ce que tu veux savoir ? s'enquit la brune en installant sa cape sombre sur ses épaules.
Rapidement, elle rabattit sa capuche sur son crâne pour masquer ses yeux qui l'étiquetaient clairement comme une mutante. Elle ne devait pas avoir encore réussi à se détacher de l'étroitesse d'esprit des humains si elle faisait tout pour masquer sa différence. Lui, malgré son amnésie, ne ressentait que de la lassitude devant l'époque raciste dans laquelle ils vivaient.
- De ce que j'ai vu, depuis que je suis revenu à moi, la mutation donne des yeux dorés voire ambrés aux sorceleurs. Est-ce une particularité des Chats de les avoir argentés ?
- C'est la seconde fois que tu me poses la question.
- L'amnésie ne m'aide pas.
- Je te dis juste que tu m'as déjà posé la question par le passé. C'est tout. Je ne te reproche rien, j'énonce un fait. Et pour répondre à ta question, à ma connaissance, je suis la seule personne, outre peut-être des magiciennes, à avoir les yeux de cette couleur. Avant que je ne devienne une sorceleuse, j'avais les yeux couleur cendres, avec un anneau couleur onyx juste autour des iris. Mais quand je m'énervais vraiment, mes yeux avaient tendance à prendre une teinte argentée, certainement à cause d'un talent magique latent ou je ne sais quoi. Quand, suite à la mutation qui aurait dû me donner les yeux de chats, on a réalisé que j'avais des iris d'argents, on a cru que la mutation n'avait pas marché dans sa totalité, alors, on m'en a remis une couche plus importante. Ça n'a pas changé la couleur pour autant, donc, je suis, même parmi les mutants, quelqu'un d'unique, comme tu l'es pour ta crinière blanche qu'on t'a donné parce que je crois que pour toi aussi, on y est allé à deux fois, de ce que m'a dit Vesemir-jisan.
- Merci pour ta réponse.
Ils traversèrent une des arches qui marquait la séparation entre le reste du quartier du Temple et le ghetto des non-humains. Ils slalomèrent entre les maisons de chaux aux toits de pierres ou de bois, prenant un chemin que Geralt reconnut comme la direction du donjon où il avait été retenu. Ann avait-elle décidé de commencer par Meis au lieu de Thaler ?
Ils contournèrent l'hôpital pour les victimes de l'épidémie, croisant des soldats en côte de maille décorée d'un blason bleu avec trois fleurs de lys blanche. Les gardes leur jetaient des regards méfiants, mais au moins, ils gardaient leur langue pour eux, ce qui n'était pas le cas des passants qui insultaient le Loup Blanc et ses mutations. Avant de passer l'angle et rejoindre la cour où la garde faisait des exercices d'entraînement juste devant les portes du donjon, la sorceleuse s'arrêta devant une porte de maison. Sans frapper, elle l'ouvrit et entra dans une immense pièce coupée presque en deux par des armoires et des étagères au-devant desquelles on avait installé un comptoir. Pour un quartier aussi pauvre, l'endroit était très riche. Les murs étaient recouverts d'un lambris propre et bien décoré et le sol, outre dans une large ligne directe menant du comptoir à la porte, était propre et avec de belles pierres. Même si les lieux étaient assez vides, l'occupant devait être très fortuné. Aussi, c'était assez bizarre de noter que l'homme derrière le comptoir était aussi petit, banal et pauvrement vêtu. L'homme devait faire tout juste un mètre soixante-cinq. Il avait une immense calvitie qui dévoilait une peau cireuse tendue sur un visage maigre et pointu. Un vieux manteau de cuir rapiécé lui servait de pardessus, masquant sa tunique grisâtre et son léger ventre. En entendant la porte, il releva le nez d'un objet qu'il examinait avec un monocle qui avait fait son temps. Il se redressa sur son siège et adressa un sourire carnassier à la femme.
- Tu m'amènes un nouveau client ?
- Je ne suis pas ici pour ce genre d'affaire aujourd'hui, Thaler, lui dit Ann en retirant sa capuche.
- Thaler. Je suis receleur. Je vends et j'achète, se présenta le petit homme en tendant une main à Geralt.
- Geralt de Riv. Vous faites dans quoi ?
- Tout ce qui vaut le coup. Et inutile de me vouvoyer.
L'homme n'était peut-être pas très recommandable, mais il était du genre direct et au moins, il n'avait fait aucun jugement ou commentaire sur sa mutation pour l'instant.
- Donc, parlons affaire. Qu'est-ce que ça sera ? demanda le receleur alors qu'Ann s'asseyait au bord du comptoir comme si elle était chez elle.
- Comment ça se fait que les gardes tolèrent ton commerce ? s'enquit Geralt.
Thaler et Ann s'esclaffèrent, comme s'ils partageaient une blague qui échappait au Loup.
- Il y connait rien ! ricana Thaler.
Le Chat Noir secoua la tête en continuant de rire.
- J'apprécie très peu qu'on se foute de moi, avertit le blanc.
Ann ignora la menace et continua de rire alors que le receleur faisait un effort pour se calmer. Malgré son sourire moqueur persistant, il se fit un plaisir d'éclairer la lanterne du sorceleur devant lui :
- La raison principale est confidentielle. Disons seulement qu'il faut savoir faire attention à sa vie. Ces enfoirés de la garde ont autant besoin de moi que les enculés de voleurs. C'est un vrai chef d'œuvre, sorceleur. Comme j'ai des affaires avec tout le monde, je suis intouchable.
- CQFD, sourit Ann.
Geralt la regarda. Par rapport aux sorceleurs de Kaer Morhen ou lui-même, elle était étrangement vivante et expressive, là où ils n'étaient plus que des créations quasiment dénuées d'émotions. Est-ce que c'était ça qui lui faisait dire que les Épreuves ne l'avaient pas brisée ? Peut-être. Peu importe, il avait des questions. Il la regarda se lever et récupérer le glaive d'argent dont il avait hérité pour le déposer devant le receleur.
- Sinon, Thaler, tu reconnais cette lame ? Paraît que la garde l'a récupérée chez toi. C'est une lame de Sorceleur, demanda la femme.
L'homme examina l'arme et la rendit à Geralt qui la remit dans son dos.
- Qu'est-ce que ça peut faire ? demanda-t-il.
- Un autre Sorceleur, Berengar, est venu en ville… commença Geralt.
- C'est pas son putain de coupe-coupe, grommela le vendeur en roulant des yeux d'agacement.
- Et pourquoi pas ?
- Parce que j'ai le reste des affaires de ton petit-copain. Le glaive, je l'ai eu ailleurs.
- Le reste de ses affaires ? s'enquit Ann en fronçant des sourcils.
- Ben ouais, comme le reste de ses merdes mais pas son épée, vous comprenez ? Par exemple, son caleçon dans lequel il a dû se pisser dessus ou quelque chose comme ça.
- Et tu les as obtenus comment ?
- L'entêtement est une marque de fabrique des Sorceleurs ? C'est un pauvre gars qui me les a refilés.
- Thaler, on s'en fiche du revendeur, on veut des infos sur Berengar, explicita Ann avec sérieux.
- Ben alors c'est pas à moi qu'il faut demandait ! Il travaillait avec Kalkstein ! Cette information, je la fais gratuite, pour le reste, c'est le tarif habituel.
- Très bien.
Ann fit apparaître quelques orins dans le creux de sa main.
- Qui t'a donné le glaive ?
Thaler eut un sourire et récupéra les pièces.
- Tu sais me parler, l'matou. J'ai acheté cette arme auprès d'un parieur de l'Ours Poilu.
- Tu peux le décrire ? demanda Geralt.
- Pas besoin, c'est le plus célèbre joueur de poker des environs. Un pro ! Un putain de magicien !
Ann déposa d'autres pièces sur le comptoir et continua ses questions :
- La Salamandre, ça te parle ?
- Des chieurs, ces reptiles. J'ai entendu parler d'eux mais pas la moindre putain d'idée de ce qu'ils veulent.
- Amphibien, intervint la voix froide de Geralt.
Le receleur le regarda avec un « quoi » perplexe. Pourquoi il lui parlait d'amphibiens celui-là ?
- Les salamandres sont des amphibiens, maintenant dis-moi si oui ou non tu bosses avec eux.
Vu le ton du Loup-Blanc, c'était clair qu'il saurait si Thaler mentait.
- Mollo, de Riv, reprocha Ann.
- Je bosse pas avec eux, grommela le receleur.
- Et on peut en être certain comment ? insista le blanc.
Ann se contenta de poser une main sur l'argent que Thaler voulait prendre.
- Tu l'auras quand tu répondras à sa question avec une preuve.
- T'es une garce, sale matou.
- Merci pour ces informations, Thaler, remercia la femme en descendant du comptoir et en rangeant l'argent.
- Toujours un plaisir, Chat Noir. Si y'en a bien une personne dans cette foutu citée qui sait comment ça marche, c'est bien toi.
- On reviendra si on a d'autres questions, annonça Geralt.
- Mais oui, c'est ça. Revenez avec de l'or.
Et le deux Sorceleurs s'en allèrent. La porte claqua dans leur dos et ils passèrent l'angle de rue menant à la cour où quelques soldats s'entraînaient.
- Tu fais souvent affaire avec les receleurs ? demanda Geralt.
- C'est à moi de le savoir et à toi de t'en montrer digne, de Riv. On y est.
Le donjon était là, sur la droite. Ils ouvrirent la porte et ils s'enfoncèrent dedans, descendant l'escalier sombre en colimaçon pour rejoindre l'immense salle avec sa cellule commune.
Le capitaine était encore à la table, même si la tête de Cocatrix avait disparu du dessus. Il restait tout de même une belle trace de sang sur le bois grisâtre du vieux meuble. Un peu plus loin, on entendait Jethro se foutre de la gueule de prisonniers toujours en cellule.
- Besoin de quelque chose ? demanda avec lassitude le capitaine en levant le nez du parchemin qu'il lisait.
- J'ai des questions concernant un groupe de criminels du nom de la Salamandre.
- Je connais, grinça le soldat en se levant de son banc.
Il contourna la table et vint se placer devant Geralt en croisant les bras. Il jeta un œil à Ann qui s'était appuyée au mur de pierre à côté de l'escalier, à moitié cachée dans l'ombre.
- Vous êtes ? lui demanda Meis.
- Le Chat Noir, Portgas D. Ann, répondit-elle.
- Une camarade, explicita Geralt.
- Comme si on avait besoin d'un second Sorceleur en plus en ville. Si ça vous intéresse, vous saurez qu'on offre une prime pour une plante meurtrière dans les marais, leur dit le soldat.
- Comment avance votre enquête sur la Salamandre ? demanda le Loup Blanc pour revenir au sujet.
- Soyez patients, j'aurais des informations dans la soirée, chers Sorceleurs.
- On peut aider de quelques façons que ce soit ?
- Ne vous aventurez pas du côté des entrepôts dans les bas-quartiers. C'est une affaire sensible où vos épées ne sont pas nécessaires… pour l'instant.
- L'entrepôt ? répéta Geralt.
Il allait ajouter un commentaire mais Ann se rapprocha un peu plus de la lumière de la cheminée, attirant l'attention des deux hommes.
- Une opération secrète ? devina la jeune femme.
- Exactement. Ce n'est pas le genre de chose où je peux me rendre avec une armée entière sur mes talons.
- Ce n'est pas prudent, pointa Geralt.
Vincent renifla narquoisement.
- Je ne suis pas un débutant et j'ai quelques tours dans mes manches.
- Je vois… commenta Ann.
Un sourire étrange, quelque part entre la fierté et la tristesse apparut sur ses lèvres.
- Je vous aime bien, capitaine Meis.
Le brun fronça les sourcils, rendant son visage à l'aspect prématurément vieilli encore plus dur.
- Comment ça ?
Geralt regarda sa collègue sans comprendre, mais celle-ci ne leur offrit aucune réponse.
- Peu importe, conclut le soldat. Profitez de votre séjour, et vous, de votre liberté, Geralt. Et peut-être demain je vous offrirai les couilles de Javed sur un plateau.
C'était clairement une invitation à le laisser tranquille. Les deux Sorceleurs le saluèrent de la tête et tournèrent les talons pour remonter l'escalier hors du donjon. Geralt remarqua que la brune porta un doigt à ses lèvres un bref instant en profitant de la pénombre pour masquer son geste qui restait parfaitement visible avec leurs yeux de chat. Le blanc hocha très légèrement la tête en réponse et ils sortirent en silence du donjon. Une fois dehors, Ann prit une ou deux notes mystérieuses sur son livret de parchemin avant de le ranger, cette fois, dans la besace à élixir qu'elle avait à sa taille. Geralt regarda autour d'eux, avant de montrer du nez les champs de blé de l'arrière-cour de l'hôpital qui était devant eux, juste de l'autre côté d'un petit muret de pierre. Ils s'y dirigèrent et disparurent dans les chemins qui parcouraient les carrés cultivés.
- C'est une claire invitation qu'il nous a faite, dit finalement Ann en allant s'asseoir sur une pierre au bord d'un des petits champs.
- C'est aussi un possible piège, fit remarquer Geralt.
- On a l'avantage d'être deux. Et, comme l'a dit Meis, j'ai moi aussi quelques tours dans mes manches.
- Je vais le suivre, décida l'homme. Tu couvres mes arrières ?
- Dois-je me sentir vexée d'être ainsi privé d'action ? Tu sais, je sais lire entre les lignes. Si tu doutes de ma capacité à manier une arme, on règle ça ici et maintenant. Tu seras surpris pour la seconde fois.
- Pourquoi tu inventes des sous-entendus là où il n'y en a pas ?
- Parce que je suis une femme dans un monde majoritairement masculin. Tu crois que mes oreilles me servent à quoi ? A la décoration peut-être ? Tu crois qu'on m'a ri au nez combien de fois parce que je suis une femme et que je manie les armes ?
Geralt n'avait pas envie de discuter. Vraiment. Cette femme avait tout l'air d'être têtue. Si elle voulait se mettre en danger, qu'elle s'amuse.
- Du moment que je doive pas expliquer ta mort à Vesemir.
- Homme de peu de foi. On s'attaque à quoi ? Le détective ? Kalkstein ? On suit l'affaire du glaive ? Ou en attend Meis ?
- Je vais éclaircir l'affaire du glaive. Suivant le temps que ça prendra, on pourra peut-être s'adresser à Raymond avant de retrouver Meis. On pourrait aussi gagner du temps. Pendant que j'interroge ce parieur, tu consultes Kalkstein.
- C'est bon pour moi. On se retrouve où ?
- Devant chez toi. Pour ton information, sache que la Salamandre a voulu faire du recrutement de force de notre homme.
Ann hocha la tête et se leva.
- A plus tard, de Riv.
Elle rabattit la capuche de sa cape sur son crâne et prit la route de la maison de l'alchimiste.
- Portgas !
La femme se retourna.
- Sois pas surprise si l'homme te propose une vivisection.
La brune le regarda comme s'il se foutait d'elle, mais préféra reprendre sa route.
.
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Ce fut un homme étrange, vêtu d'un long manteau vert sur une courte tunique qui vint ouvrir à Ann quand elle frappa à la porte. L'homme était grand et osseux, avec un facies maigre qui avait pourtant quelque chose de simiesque.
- Je peux vous aider ? demanda-t-il avec méfiance.
- C'est Geralt de Riv qui m'envoie, répondit-elle.
- Oh ! s'exclama joyeusement l'homme. Le Sorceleur Geralt répond à mon appel ! Entrez, entrez, ma chère ! J'avais justement besoin d'un homme comme lui.
Et il la fit entrer dans sa maison l'ameublement précaire, bien que l'odeur venant de l'escalier de la cave laisse supposer qu'il faisait des expériences en sous-sol.
- Vous êtes Kalkstein ? se fit-elle confirmer en détachant sa cape alors que son hôte refermait la porte.
- Tout à fait ! Et vous, quel est votre nom ?
- Portgas D. Anabela. Je préfère qu'on m'appelle Portgas.
- Et comment… oh… OH ! Grandiose !
Kalkstein allait certainement demander comment elle connaissait Geralt ou sa relation avec lui quand il s'était retrouvé face à face avec les pupilles d'argents luisant de la D. et clairement, si on prenait en compte les glaives, c'était la seule explication nécessaire sur qui elle était et donc, ses rapports avec le Sorceleur.
- Je n'ai jamais entendu parler de mutations de sorceleurs accessibles aux femmes ! C'est fascinant !
Il alla même jusqu'à prendre le visage de la femme entre ses mains pour mieux l'examiner.
- Malgré votre physionomie clairement féminine, vous avez des traits assez durs et anguleux, comme un homme. Et vos yeux… je doute même que ces magiciennes de la Loge aient eu l'idée de se doter d'iris de cette teinte, on dirait de l'argent liquide. C'est exceptionnel… Tout ceci est tellement fascinant, j'aimerai tellement vous examinez. Me feriez-vous le plaisir de me servir de sujet d'étude, ma chère madame ?
La façon dont elle retira les mains de l'homme de son visage voulait clairement dire « non ».
- Peut-être accepteriez-vous de me faire don de votre dépouille après votre mort, alors ? demanda avec espoir l'alchimiste passionnée. Son autopsie permettra de faire d'immenses avancées dans la science !
- Je veux qu'on brûle mon corps et qu'on jette mes cendres à la mer. Pour votre gouverne, même si c'est rare, les sorceleuses, ça existe. L'Ecole du Chat est, à ma connaissance, la seule qui s'en foute de ce que leurs membres ont entre les jambes. Et je crois même qu'on a déjà eu des elfes dans nos rangs. Si nous en avons fini…
Kalkstein avait clairement l'expression d'un enfant à qui on retire sa sucrerie.
- Vous vouliez voir de Riv à quel sujet ? s'enquit la brune en jetant sa cape sur son épaule.
Elle regarda autour d'elle et localisa un pauvre tabouret dans le vide intersidéral de la maison de l'alchimiste pour s'y asseoir. Immédiatement, Kalkstein retrouva le sourire et la passion.
- C'est pour une affaire fascinante ! Quelque chose qui pourrait changer l'avenir de l'alchimie ! Et c'est en lien avec votre profession en plus ! C'est l'ambition de toute une vie !
- Dîtes-en plus, encouragea-t-elle en l'écoutant d'un air éteint.
- Eh bien, il y a une tour dans les bois envahi par les marais qui longe l'Ancienne Wyzima.
- Avec une princesse au sommet et un dragon pour gardien ? Vraiment ? Aucun sorceleur s'y intéressera.
- Un peu de silence ! s'indigna l'alchimiste. Il est question d'une légende qui dit qu'un mage et alchimiste a construit cette tour, ce qui est tout bonnement fascinant ! Il n'est pas question de princesses ou de dragons, c'est tout simplement inintéressant.
- Et donc ?
- Le mage est mort il y a longtemps, la tour est donc tombée à l'abandon. Cependant, le pouvoir contenu entre ses murs attire et corrompt les créatures des environs. Fascinant, n'est-ce pas ?
- Une fabrique à monstres, donc.
- Exactement ! Je veux examiner cette source, Sorceleuse. Et écrire un papier à son sujet qui fera entrer mon nom dans l'Histoire ! J'aurais accès à des secrets qui ont été cachés de tous, dans cette tour, pendant des années et des années ! Tout bonnement fascinant !
L'homme sautait presque de joie sur place tant l'idée l'enchantait. Puis, la tristesse s'empara de son visage.
- Malheureusement, la tour est verrouillée. Je suis prêt à payer mille orins pour celui ou celle qui m'aidera à entrer dedans.
Mille orins ? Il ne devait pas être question de crocheter une vieille serrure. Sans parler qu'il s'agissait du laboratoire d'un mage.
- J'en parlerai à de Riv. En attendant, vous savez quoi de cette tour et de ce mage ?
- Bien peu. Mais je suppose que les anciens, parmi les habitants des marais, pourraient partager de vieilles histoires à ce sujet. Et certainement dans de vieux livres, aussi. Les sagesses écrites sont infiniment plus certaines !
- Je présume que vous n'avez pas les livres en question.
- Malheureusement non. Je pense que Les Portes Secrètes de Ransant Alavro pourrait être utile. Avec le traité alchimique Ain Soph Aur. Je crois qu'un nain a encore une copie du premier, mais le second, un écrit d'un gnome anonyme, est dit perdu. Mes expériences ne me laissent pas le temps de faire un jeu de piste.
- Très bien, je verrai avec mon collègue, mais en attendant, je veux que vous répondiez à quelques questions.
- A quel sujet ? Dîtes-moi, vos yeux d'argents, c'est un signe de mutation typiquement féminin ?
- Je suis la seule à les avoir.
- Fascinant…
- Ma question concerne un autre Sorceleur. Berengar est son nom.
Kalkstein perdit son air fasciné pour pâlir rapidement.
- On m'a dit qu'il travaillait pour vous.
Avec un soupir, l'alchimiste avoua tout, sans chercher à nier ou faire l'ignorant :
- J'espérais que Geralt n'en sache rien, par crainte de l'effrayer.
Ann garda le silence, attendant plus d'explications.
- Je l'ai embauché avant vous pour mener l'enquête sur la Tour des Marais. Je me suis dit que si vous l'appreniez, vous auriez refusé de m'aider dans ma quête.
- Vous l'embauchez et il disparaît… ça vous alarme pas ?
- C'est pour ça que j'espérais que vous et Geralt puissiez m'apporter votre assistance ! Peut-être que vous pourrez aussi découvrir ce qui est arrivé à Berengar ! Et comme vous serez deux, il y a moins de chance qu'il vous arrive quelque chose !
- Des soupçons ?
L'homme secoua la tête.
- Je ne suis pas très apprécié de la part de mes collègues hommes de sciences, ils auraient pu se débarrasser de lui. Et je ne suis pas non plus le seul à m'intéresser à cette tour. Cependant, il m'a laissé un parchemin, il pourrait peut-être vous aider.
Il descendit rapidement jusqu'à sa cave, Ann le suivant avec méfiance de par son Haki. De ses sens très développées, elle l'entendit fouiller en bas avant de remonter avec un parchemin qu'il lui donna. Elle le déroula et se massa le nez.
Des recettes. Des foutus recettes d'explosifs.
- Je reviendrai quand j'en saurais plus ou pour vous dire ce que de Riv et moi aurons décidé.
- J'attends votre prochaine visite, ma chère !
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La taverne était tout aussi bruyante que quand il l'avait laissée auparavant en partant à la poursuite de Portgas. Cependant, c'était assez simple, en dépit de la populace, de trouver le « magicien » dont avait parlé Thaler. Le joueur avait une bonne carrure et une belle bedaine, assis à une table juste pour lui et il s'amuser à lancer ses dés sur la table, même s'il n'avait pas d'adversaire.
- Je respecte ceux qui prennent des risques, lui dit l'homme quand Geralt vint s'asseoir devant lui.
- Ce glaive d'argent, ça te parle ? demanda le sorceleur en déposant l'arme sur la table.
- Pourquoi tu demandes ? s'enquit le parieur sur la défensive.
- J'ai pas le temps pour du bavardage.
- C'est bon, pas la peine de s'énerver.
Décidément, se balader avec deux glaives dans le dos aidait beaucoup à persuader les petits malfrats et magouilleurs de parler.
- Tu l'as eu comment ? demanda Geralt.
- Je l'ai gagné… à un jardinier, avoua le parieur.
Un jardinier ? Original.
- Et je peux le trouver où ?
- Il travaille dans les champs derrière l'hôpital de St Lebioda.
- C'était pas si difficile. Passe une bonne journée.
Et il remit le glaive dans son dos.
C'est là qu'il remarqua un homme portant un long tablier de cuir qui venait d'entrer par la porte de derrière. L'individu vint se mettre devant le comptoir, sur un tabouret, et se mit à attendre.
Ce devait être l'homme dont avait parlé Jethro.
Cela ne coûtait rien d'essayer.
Geralt se leva de sa place et alla à la rencontre de l'émissaire.
- Salutation voyageur, salua poliment l'homme.
- Bonsoir. J'ai entendu dire que vous achetiez des bijoux.
- Et en admettant que ce soit le cas ?
L'homme était clairement sur ses gardes et méfiant. Il ne lâcherait pas les informations ainsi. Geralt devait passer sous sa garde pour savoir qui le payait pour acheter des écussons de la Salamandre. Il montra une table vide dans un coin de la taverne bruyante.
- Je vous offre à boire ?
L'homme n'hésita pas longtemps.
- C'est bon pour moi.
Parfait.
Les deux hommes allèrent se mettre à la table et Geralt fit signe à la serveuse, très certainement la femme de l'aubergiste vu la façon dont celui-ci la surveillait. Bientôt, l'alcool coula à flots. Les bières s'enchaînèrent, pendant que le sorceleur parlait de tout et de rien, sauf des médaillons de la Salamandre, avec son compagnon de beuverie.
Rapidement, la voix de l'émissaire commença à devenir plus lente et alambiquée alors que l'alcool faisait son affaire, baissant la garde du pauvre homme. La résistance à l'alcool était l'un des traits de la mutation des sorceleurs qui était agréable à vivre.
- Aaaah… j'ai trop bu… admit enfin le messager avant d'être pris d'un hoquet alcoolisé.
- Je cherche du travail, lui dit Geralt. Tu saurais pas à qui je peux m'adresser ?
- Je bosse pour Leuvaarden, c'est un riche marchand. Il a toujours beaaaaaucoup de travail à proposer.
Leuvaarden, voilà un nom qui lui était familier.
- Merci, ça m'aide beaucoup.
- Tout pour mes amis ! sourit l'émissaire avec un sourire alcoolisé.
Geralt leva sa chopine en salut et la vida d'un trait, avant de la reposer. Il mit l'argent dans la main de la serveuse avant de se retourner pour partir. Il remarqua Ann qui entrait à son tour dans la taverne. Il la rejoignit alors qu'elle s'avançait vers le bar, mais elle lui fit signe de ne pas bouger. Elle s'adressa directement à la serveuse, la belle blonde très aguicheuse, et lui posa une question qui lui valut une réponse négative s'il en jugeait le mouvement de tête, mais elle n'en resta pas là. Une fois que la femme de l'aubergiste eut fini avec ce qu'elle devait dire, Ann la remercia et rejoignit son camarade et ils sortirent ensemble.
- T'es allé voir Kalkstein et Raymond ? demanda l'homme du duo.
La brune secoua la tête.
- Je suis allée voir seulement Kalkstein. Il a embauché Berengar pour enquêter sur une tour de magicien, dans les marais. Il lui avait demandé de l'aide pour l'ouvrir. Mille orins pour cette mission, informa Ann.
- Intéressant. C'est toujours ça de pris.
- Deux livres parlent de cette fameuse tour, alors, je suis allée au marché me renseigner, puisqu'il y a un libraire là-bas. De ce que le nain m'a dit, les livres en question ne sont plus édités depuis un bail, et sont donc très rare à trouver. Il chercherait à en obtenir un qui serait en possession de Vivaldi.
Geralt hocha la tête. Ils iraient voir plus tard le nain en question.
- Et toi, du nouveau ? s'enquit Ann.
- Oui et pour cela, on va devoir trouver un marchand du nom de Leuvaarden sur les quais. C'est lui qui paye pour les insignes de la Salamandre.
- Pourquoi donc un marchand s'intéresserait à ça ? A moins que ce marchand traficote dans des affaires pas très légales, il y a peu de chance que ce soit une affaire de rivalité.
- Leuvaarden est peut-être un radin pompeux, mais il a tout de même l'apparence de l'homme d'affaire bien sous tous rapport. Donc, s'il trempe dans ses affaires louches, il le cache très bien.
- Donc, on va le voir, c'est ça ?
- Oui. Et après, on avisera. Sinon, qu'est-ce que tu as demandé tout à l'heure ?
- J'ai demandé après le Boucanier. Si j'ai dit à Thaler que je me foutais du revendeur, c'est parce que tout passe par le grand patron avant de finir sur son comptoir. Il fait le tri sur ce qui est à garder ou à revendre, avant d'envoyer Coleman faire la vente auprès du revendeur. On aura une idée de pourquoi Berengar s'est débarrassé de ses affaires et d'où ça s'est passé. Seulement, il ne vient que très tard à la taverne, donc, va falloir attendre.
- Tu dois vraiment avoir l'habitude de traficoter avec des gens pas nets pour savoir ça.
- Tu serais surpris, de Riv, se contenta de répondre mystérieusement Ann. Sinon, le glaive ?
- Le gros lard l'a gagné au jeu contre un jardinier qui bosse à l'hôpital.
- Comment un jardinier aurait-il pu mettre la main sur une lame pareille ? s'étonna la femme.
- On le saura quand on le trouvera.
.
.
Pour accéder à l'embarcadère, les deux sorceleurs rencontrèrent une certaine difficulté : la garde. Et vu comment Portgas caressait le manche de l'un de ses poignards, Geralt était certain qu'elle se faisait violence pour ne pas les attaquer. Déjà qu'il commençait à se faire tard... Ils en avaient assez de courir à droite et à gauche, voilà que des gardes se montraient agaçants, alors qu'ils avaient autre chose à faire dans cette nuit tombante.
- Geralt ! Quelle bonne surprise !
Le Loup Blanc se retourna pour voir Siegfried venir à leur rencontre dans son éternelle armure de l'Ordre de la Rose Ardente.
- Siegfried, salua-t-il.
- Où allez-vous comme ça ? s'enquit le Chevalier.
- On rejoint l'embarcadère, on a des monstres qui nous attendent dans les marais.
- On ?
Ace se détourna de la garde pour faire face au chevalier en affichant un air neutre.
- Oh. J'ignorais que nous avions une magicienne en ville, s'étonna le blond.
- Je suis une Sorceleuse, pas une saloperie de magicienne manipulatrice de merde. Je suis le Chat Noir, Portgas D. Anabela.
- J'ignorais que l'on trouvait des femmes dans les rangs des sorceleurs, mes excuses pour la méprise, s'excusa le chevalier.
- Comme beaucoup.
Le blond tendit une main à l'adresse d'Ann qui la lui serra avec un sourire.
- De Riv m'a déjà parlé de vous, informa la jeune femme.
Le chevalier allait répondre quand il afficha un air surpris, puis douloureux, avant que la femme ne lui relâche la main. Siegfried plia et déplia sa main dans un bruit de métal.
- Sacrée poigne, complimenta-t-il.
- Merci, sourit innocemment Ann.
Geralt soupira en se massant le nez. Cette fille allait le rendre à moitié chèvre et il ne la côtoyait que depuis quelques heures.
- Donc, vous souhaitez rejoindre les marais ? reprit le chevalier.
- Exact, mais les soldats ne veulent pas nous laisser passer, informa le Loup Blanc.
- Le capitaine l'a interdit ! justifia l'un des gardes de la porte.
- Et pourquoi ? insista Ann.
- Ce sont les ordres du capitaine, demandez-lui, bougonna le soldat.
- Et si votre cher et tendre capitaine vous demande de baisser votre froc pour vous ramoner le fion, vous le ferez ? se moqua la sorceleuse avec un sarcasme dégoulinant.
Siegfried haussa un sourcil. Oui, l'une des choses que Geralt avait appris de Portgas, c'est qu'elle avait un langage aussi cru que les voyous des environs, si ce n'est plus, en plus d'être très émotive et prompt à l'agacement et la colère. Mais le chevalier préféra faire les choses autrement. Il s'avança, se plaçant entre les Sorceleurs et les gardes.
- Messieurs, ce n'est pas une façon de parler à un héros. Geralt a sauvé Wyzima de la terrible menace d'un cocatrix.
Les deux gardes se regardèrent, clairement hésitants
- C'est presque l'un des nôtres, insista Siegfried.
- Et la femme ? demanda l'autre garde.
- Portgas n'est pas une femme. C'est une sorceleuse, intervint Geralt. Elle rendra bien assez service à cette cité en faisant du nettoyage dans les marais avec moi, pour que vous la laissiez passer. C'est soit ça, soit elle vous ampute de ce qui fait de vous des hommes.
- Tu me sors les mots de la bouche, de Riv, sourit narquoisement la brune.
Nouveau regard entre les gardes et ils finirent par relever leurs hallebardes qui barraient la route auparavant.
- Merci pour ton aide, Siegfried, remercia le Loup Blanc.
- Ce fut un plaisir, assura le blond. N'hésitez pas à venir me voir.
Et le chevalier s'éloigna sous le regard pensif du Sorceleur. La rencontre avec cet homme restait encore une agréable surprise de son excursion dans les égouts. Jamais il n'aurait cru y rencontrer un chevalier de la Rose Ardente, encore moins à patauger dans la fange sans se plaindre. Il avait l'habitude de travailler seul, mais Geralt n'avait pas su résister à la curiosité de voir comment se battait un homme tel que lui. Et il s'en était très bien sorti… pour un humain. Et en échange, il leur avait montré sa gratitude par ce simple geste, ce coup de pouce pour passer au-delà de l'entêtement des soldats.
Ils arrivèrent donc sur l'embarcadère. C'était d'abord un long ponton de bois qui reliait le Quartier du Temple à l'Ancienne Wyzima, qui n'était plus qu'un ghetto où on envoyait les malades en phase terminale pour essayer de contenir la propagation de l'épidémie. Et comme on pouvait s'y attendre, la porte était lourdement gardée. Mais ce n'était pas pour ça qu'ils étaient là à une heure aussi tardive alors que les travailleurs regagnaient la ville. En contrebas du ponton on avait une petite pente herbeuse qui elle-même se fondait dans un quai en bois auquel quelques barques étaient attachées. Une table était dressée dans l'herbe, et c'était l'homme assis là, bien portant et richement vêtu d'un lourd manteau blanc cassé, qui les intéressait. Il était apparemment en train de s'apprêter à décoller.
- C'est lui Leuvaarden, je lui ai déjà rendu service en le croisant dans les faubourgs.
Ann hocha la tête et suivit le mouvement quand Géralt se dirigea vers l'escalier pour rejoindre la petite plage herbeuse, et ainsi, leur objectif. Quand ils furent juste à quelques pas de lui, l'homme leva le nez et fronça les sourcils en semblant reconnaître le Loup Blanc.
- Alors comme ça, vous avez réussi à entrer ?
- Il semblerait, répondit Geralt.
- Et qui est cette charmante demoiselle ?
Ann fit un effort surhumain pour ne pas arracher les yeux de l'homme quand il se mit à la reluquer sans la moindre honte.
- Quelqu'un qui n'apprécie pas qu'on la regarde comme un morceau de viande, mes yeux sont plus haut, rétorqua-t-elle.
- Portgas est une Sorceleuse, comme moi, informa Geralt.
- Oh !
L'homme déglutit légèrement. Cela le refroidissait énormément cette information. Ann repoussa légèrement sa cape et s'assit sur le bord de la table, dévoilant ses poignards sur sa cuisse découverte.
- On a cru comprendre que vous achetiez des écussons de la Salamandre, mais on voit pas vraiment pourquoi vous faîtes ça, attaqua-t-elle.
- Vous devez faire erreur, leur dit le gros marchand.
Il était inquiet, presque effrayé, clairement sur la défensive.
- Qu'est-ce qui vous effraie ? demanda Geralt. On est nous aussi à la poursuite de la Salamandre et on peut le prouver.
- Vraiment ? Apportez moi… disons, trois écussons et je vous croirais.
Geralt roula des yeux et fouilla ses poches. Il devait bien en avoir gardé un ou deux par-là.
- Portgas ? T'en as ? s'enquit Geralt.
- J'en ai deux sur moi que j'utilisais pour poser des questions, répondit la brune en les faisant apparaître entre ses doigts comme un tour de magie.
Le Loup Blanc finit par en trouver un autre. Sa partenaire lui laissa ses insignes et les trois disparurent dans la main du marchand.
- Alors ? Cette société secrète ? demanda Geralt.
A leur grande surprise, le marchand chercha une bourse d'or dans ses affaires et compta quelques orins qu'il commença à déposer sur la table.
- Je donne normalement vingt pièces par insigne, mais je vais faire une exception et vous donner dix fois le montant, leur dit l'homme.
- Pourquoi j'ai l'impression de me faire acheter ? T'as pas ce sentiment, toi, de Riv ? s'enquit Ann.
- Quelque peu, oui, approuva le blanc. Surtout que cela ne nous dit pas pourquoi vous payez pour leur mort.
- Ils ne sont pas bon pour les affaires, se justifia l'homme.
Les deux sorceleurs se regardèrent. La réponse était presque trop simple.
- Les affaires ? répéta Ann.
- Pour tous les types, appuya Leuvaarden. Ecoutez, il y a des forces qui dépassent votre imagination qui sont à l'œuvre derrière tout ça. Soyez heureux de ne pas connaître la vraie nature du monde.
La façon dont Ann souffla par le nez rejoignait parfaitement Geralt. Ils étaient peut-être des sorceleurs, mais ça ne faisait pas d'eux des idiots. Combien de fois lui-même avait été mêlé à la politique alors qu'il détestait ça ?
- Fais-le toi ou je vais lui en coller une, supplia à moitié Ann en se levant de la table pour s'éloigner de quelques pas.
Elle alla s'asseoir devant un feu de camp éteint et fit des exercices de respiration.
- Leuvaarden, on a bouffé tellement de conneries dans le genre de ton discours sur ta foutue importance et tout le bordel, que ce que tu racontes est loin de nous impressionner. On n'en a rien à faire de ces forces, nous, on veut les couilles de Azar Javed.
- C'est mon cas à moi aussi, assura l'homme d'affaire. Si vous y arrivez, revenez me voir et je vous récompenserai très généreusement. Et si vous détruisez la totalité de son organisation, je vous paierai à la hauteur de vos exploits.
- Ce ne sera pas simple, lui pointa Geralt. Puisque vous avez de l'influence, sachez que je reviendrai vous voir pour votre assistance le moment venu.
- Je vous aiderai si je le peux.
Ann se releva et rejoignit son compagnon.
- Je sais pas pour toi, mais pour moi, ça ressemble à un « cause toujours, tu m'intéresses ». On perd notre temps, ici, de Riv.
- On reviendra si on a d'autres questions, lui dit le Loup Blanc.
Ils avaient d'autres pistes à explorer.
