Merci à Sebferga pour sa review.

Bonne lecture !

Disclaimer: Le Seigneur des Anneaux appartient à J.R.R. Tolkien. Et Final Fantasy 7 à Square Enix.


Chapitre 8 :

La vérité

Au moment où Talion toucha les cheveux de Morwen, il ne fut pas le seul à recevoir des visions.

À son contact, Morwen se mit à rêver… mais cela ressemblait plus à un cauchemar qu'à un rêve.

Elle vit d'abord un elfe, assis sur un trône dans une salle aux murs de marbre argenté. Il avait un port noble et altier que renforçait le diadème posé sur sa longue chevelure noire argentée.

Ses yeux étaient d'un bleu incroyable, qui lui rappelait étrangement celui des yeux de Talion.

Aux côtés de ce seigneur elfe se trouvait une femme blonde, qui serrait tendrement dans ses bras une elfe plus petite, aux cheveux argentés. Les trois elfes se regardaient avec l'amour unissant une famille, quand la petite elfe tourna un regard méfiant vers l'entrée de la salle.

Morwen vit entrer… Aulendil ! L'homme s'approcha du trône, se mit à genoux devant le seigneur et lui tendit un magnifique marteau orné de symboles elfiques.

« Que voilà un magnifique présent ! » dit le seigneur elfe.

Le seigneur elfe se mit à discuter avec le nouveau venu, avant de se lever de son trône pour lui serrer la main.

La vision changea, Morwen se retrouva dans ce qui ressemblait à une forge. Le seigneur elfe avait enfilé une tenue de forgeron et s'occupait de façonner du métal brûlant avec le marteau. Aulendil apparut derrière lui, l'observant avec un air… malveillant.

Lorsque l'elfe eut fini son travail, il laissa son observateur s'approcher pour admirer le fruit de son travail : des anneaux. Tous en argent, ornés de ciselures et de pierres précieuses, ils brillaient comme de petites étoiles.

Aulendil s'approcha pour en examiner un entre ses doigts, puis il dit : « Toi seul peux accomplir une telle prouesse, Celebrimbor. »

Après cela, Morwen regarda partir cet homme sournois, puis Celebrimbor vaquer à des occupations plus bénignes dans une grande cité elfique. Jusqu'au jour où, alors qu'il forgeait une épée, il eut une vision.

Morwen la partagea avec lui : Aulendil se trouvait au cœur d'une espèce de volcan, sur une plateforme surplombant la caldeira. Il semblait occupé à forger un anneau. Sauf qu'il était différent de ceux de Celebrimbor : plus petit, en or et marqué de symboles elfiques que l'enfant ne put déchiffrer. À peine l'eut-il mis à son doigt qu'il se transforma. Au lieu d'un bel homme vêtu de blanc, il devint plus grand et entièrement caché sous une armure noire terrifiante.

Celebrimbor parut choqué par cette vision. Une belle femme elfe blonde apparut près de lui, l'air fort inquiet.

« Nous sommes trahis », dit la dame. « Son pouvoir irradie tel le feu, et causera la ruine de toute la Terre du Milieu. »

Les visions s'estompèrent, laissant Morwen seule dans le noir. Elle plaqua les mains sur sa bouche. Talion et le fantôme n'avaient pas menti. Aulendil était en réalité Sauron. Et il avait tenté de la manipuler, tout comme il avait berné d'autres victimes avant elle.

« Tu connais la vérité, à présent », dit une voix.

Morwen leva la tête et fut surprise de voir la dame réapparaître devant elle.

Jamais elle n'avait vu femme aussi belle. De longs cheveux blonds ondulés, une robe blanche dont les manches vaporeuses flottaient autour de ses bras, et un diadème argenté orné de fleurs dorées sur sa tête… Elle avait des yeux d'un bleu magnifique, avec des paillettes qui évoquaient une fleur ou une étoile.

« Vous êtes la dame qui a averti Celebrimbor ? » demanda timidement l'enfant.

La dame elfe lui offrit un sourire chaleureux, le premier auquel Morwen avait droit depuis son départ de Mirkwood.

« Mon nom est Galadriel de la Lothlorien. Je suis heureuse de pouvoir enfin te rencontrer, Morwen. »

« Ah bon ? Les elfes ont plutôt l'air de me fuir, ces derniers temps », dit la fillette avec amertume.

Ces mots effacèrent le sourire de la dame, tandis qu'une tristesse sincère brilla dans ses yeux.

« Je suis navrée pour tout ce que tu as vécu. Tu ne méritais pas cela. Je ne pensais pas que Thranduil en arriverait à de telles extrémités. »

« Et vous ? Vous n'approuvez pas ses idées ? Il semble penser que je suis une… aberration. »

La dame secoua négativement la tête et se mit à genoux devant Morwen.

« Mon miroir m'a appris ce qui t'est arrivé, bien avant que tu renaisses dans ce corps. Je suis en partie responsable de ton malheur. »

« Comment ça ? »

« Il y a longtemps, avant ta naissance en Terre du Milieu, j'ai affronté Sauron dans les ruines de Dol Guldur. Nous avons déchaîné nos pouvoirs, et cela a marqué la terre. La végétation s'est imprégnée de notre magie. Je n'ai hélas pas eu le temps de m'en rendre compte, car le combat m'avait gravement affaiblie. Sauron l'a découvert avant moi et a décidé de tenter une expérience. »

« Une expérience ? »

« Comme tu l'as vu dans tes songes, Sauron a trompé Celebrimbor et l'a convaincu de forger des anneaux de pouvoir, sous prétexte que cela aiderait les seigneurs de la Terre du Milieu à maintenir l'ordre et la prospérité dans leurs royaumes. Mais sur les terres du Mordor, dans les flammes de la Montagne du Destin, Sauron forgea en secret un maître anneau. Dans cet anneau, il déversa sa cruauté, sa malveillance et sa volonté de dominer toute vie. Un Anneau pour les gouverner tous… Mais de nombreux peuples se sont soulevés contre les armées du Mordor. Isildur, le fils du roi du Gondor, parvint à arracher l'Anneau à Sauron, ce qui l'affaiblit grandement. »

« Il n'a pas tué Sauron ? » s'étonna l'enfant.

« Sauron est lié à son Anneau, sa force vitale est enfermée dedans. »

« Alors… Isildur a détruit l'Anneau ? » demanda Morwen avec espoir.

« Non, l'Anneau fut perdu il y a des années. Personne ne sait où il est, aujourd'hui. L'esprit de Sauron le cherche, mais lorsqu'il a découvert la magie qui subsistait à Dol Guldur, il a chargé un de ses plus fidèles soldats, la Main Noire, de voyager dans d'autres mondes pour tuer des âmes et les enfermer dans des fleurs magiques, à Dol Guldur. Chacune de ces fleurs devait façonner un enfant dont le corps serait imprégné de ma magie et du Seigneur Ténébreux, pour servir de nouveau corps à Sauron. Sauf que l'expérience n'a pas abouti comme il le souhaitait. Les Valars se sont interposés et ont réussi à intercepter ton âme. Ils ont fait en sorte que tu conserves tes souvenirs de ton ancienne vie et que tu renaisses dans ton nouveau corps, à Dol Guldur. »

Morwen écarquilla les yeux. Ainsi, elle n'était que le fruit d'une expérience de Sauron ? Elle n'aurait jamais dû renaître, son corps seul aurait servi de nouveau vaisseau à Sauron.

« Il y a un détail qui me tracasse. Pourquoi cette Main Noire a-t-elle tué des gens nés à la même date ? » demanda Morwen.

« Le 29 février est une date qui ne se présente que certaines années. On juge qu'elle a des propriétés magiques. Les âmes nées ce jour-là sont plus… puissantes. Cela rend le sacrifice plus fort, ce qui renforce le pouvoir de Sauron. »

C'était donc ça ? Morwen doutait fort que le 29 février lui confère un quelconque avantage magique. Malgré ses pouvoirs dans cette vie-ci, elle se sentait toujours aussi… quelconque.

« Je n'aurais pas dû renaître », dit tristement l'enfant.

« Les Valars ont veillé à ce que cela se produise, pour empêcher Sauron de renaître. Non seulement ce corps était celui d'une fille, ce qui présentait déjà un problème pour lui, mais en plus ton âme est marquée par les Ténèbres et la Lumière. C'est pour cela que tes yeux ont deux couleurs différentes. »

Morwen porta les doigts à ses yeux, comme s'il s'agissait d'organes étrangers, qu'on lui avait greffés sans son accord. Elle considéra Galadriel d'un œil neuf. Cette femme avait joué un rôle dans sa vie, avant même qu'elle vienne au monde.

« Alors… Je ne suis pas vraiment… moi ? »

« Si, tu es toi. Sauron ne peut te voler ton corps. Mais si tu choisis d'embrasser sa cause, tu deviendras l'une de ses servantes. C'est cela que craint Thranduil, et c'est pour cela qu'au lieu de te convaincre de rester dans notre camp, il a jugé plus prudent de t'éliminer. »

Secouant la tête, Morwen se mit à faire les cent pas.

« Ce n'est pas juste ! Je ne savais rien ! Je… Enfin, jamais je ne ferais ça ! Je sais que les Ténèbres sont mauvaises, j'ai toujours été du côté des gentils. »

Galadriel lui offrit un sourire amusé.

« Je le sais, tout comme les Valars. C'est pour ça que je suis là. »

« Pourquoi n'êtes-vous pas venue me voir avant ? »

« J'ai essayé. J'ai envoyé des courriers à Thranduil lorsque tu as atteint l'âge de cinq ans, pour lui demander la permission de te rendre visite, ou bien que tu fasses un séjour dans mon royaume, où je t'aurais tout expliqué. Mais le roi n'a jamais répondu à mes lettres. Mon miroir m'a révélé qu'il les brûlait sans révéler leur existence à personne, pas même à son fils Legolas. J'ai également vu ce qui se passerait si je tentais de venir sans l'accord du roi. Il t'aurait fait éliminer discrètement, sans que j'aie le temps de te parler. J'ai dû attendre le jour où tu t'enfuirais avec le rôdeur pour pouvoir enfin te parler en songe. »

Fatiguée, Morwen garda la tête baissée. Elle n'avait plus envie d'être là, à présent. La vérité était plus horrible que tout ce qu'elle s'était imaginé.

« Qu'est-ce que je vais devenir ? » soupira l'enfant.

« N'aie crainte, j'ai envoyé quelqu'un pour t'aider. Tu le rencontreras à ton réveil. Vous avez beaucoup de choses en commun, je suis sûre que vous allez vite devenir amis. »

Morwen voulut lui poser d'autres questions, quand elle vit la dame se pencher pour poser un doux baiser sur son front. La fillette se sentit traversée par une vague de chaleur apaisante.

« Namarïe, Symbelmÿniel. »

L'enfant ne put lui demander ce que signifiait le dernier mot, car elle se sentit tomber dans le vide.

Dans un sursaut de panique, elle ouvrit les yeux et vit qu'elle était de retour dans la grotte où Talion, le fantôme et elle avaient élu domicile.

Un feu brûlait toujours au centre de la caverne, mais le rôdeur discutait avec quelqu'un que Morwen ne connaissait pas.

En voyant sa longue chevelure blonde et ses habits vert sombre, elle crut avec espoir qu'il s'agissait de Legolas, mais cet elfe était différent.

Il avait une aura beaucoup plus lumineuse, comme s'il renfermait en lui un soleil. Sentant le regard de Morwen, il tourna vers elle des yeux d'un azur pur et sans nuage. L'enfant eut le souffle coupé par sa beauté. Il était magnifique !

« Bonjour, fille de la fleur », dit l'elfe d'une voix mélodieuse.

Intimidée, Morwen répondit par un léger hochement de tête. Talion parut étonné par son absence de réaction et dit :

« Voici le Seigneur Glorfindel. Il vient de Fondcombe et affirme être venu pour toi. Il dit que tu étais au courant. Est-ce vrai ? »

Se rappelant les paroles de Galadriel, Morwen sentit l'espoir brûler en elle. Ce devait être lui, cette personne qu'avait envoyée la dame pour l'aider. Il dégageait le même type d'aura lumineuse qu'elle.

« Oui, c'est lui. »

Souriant, Glorfindel s'approcha d'elle et posa la main sur son cœur, avant de la poser sur sa joue. Touchée par cette marque de respect elfique autant que la chaleur de l'elfe, Morwen posa sa petite main sur sa joue.

« La dame de la Lorien m'a demandé de te donner ceci », dit l'elfe.

Il sortit d'une petite bourse à sa ceinture un pendentif. En le voyant, Morwen eut le souffle coupé. Doté d'une chaîne en argent, il représentait une fleur dorée en forme d'étoile, avec son centre un petit joyau doré éclatant.

« Il représente la fleur étoile-soleil, qui pousse sur la plaine de Cerin Amroth, en Lothlorien », lui révéla Glorfindel. « On l'appelle l'Elanor. »

« C'est magnifique ! » souffla Morwen.

En voyant l'elfe tendre le bijou vers son cou, l'enfant fut surprise. Pourquoi lui faire un tel présent ?

Devinant son trouble, Glorfindel expliqua :

« La dame a insisté pour que je te l'offre avant de t'emmener à Fondcombe. Elle veut que tu saches que pour elle, tu as ta place parmi les alliés de la Lumière. Ce bijou est une marque de sa confiance et un rappel de l'espoir qu'elle porte en toi. »

Bouleversée, Morwen laissa Glorfindel lui passer le bijou autour du cou. Elle prit la fleur-étoile entre ses doigts et sourit.

Merci, Galadriel. Promis, je vais me battre. Sauron ne m'aura pas !

« Hannon lae », dit l'enfant à Glorfindel.

Ce dernier lui sourit, puis parut intrigué.

« La Dame m'a aussi révélé que nous avions des choses en commun, tous les deux. Comme moi, tu aurais des souvenirs de ton ancienne vie. »

Surprise, Morwen écouta l'elfe lui expliquer que, dans une ancienne vie, il avait affronté un Balrog, une créature d'ombres et de feu. Il avait réussi à le vaincre, mais y avait laissé sa vie. Les Valars lui avaient proposé, à lui comme à tous les siens dans l'au-delà, de renaître sans ses souvenirs, mais Glorfindel avait refusé.

En cet instant, Morwen se sentit plus liée à lui qu'à quiconque depuis sa naissance en Terre du Milieu. Cet elfe comprenait ce que c'était que renaître avec les souvenirs et le poids d'une vie perdue trop tôt.

Tandis qu'elle mangeait du lembas apporté par Glorfindel, Morwen l'écouta discuter avec Talion.

« Puisque vous repartez avec la petite, je vous suivrai jusqu'à la sortie de la forêt, puis je reprendrai ma route de mon côté », dit le rôdeur.

Glorfindel accepta, mais Morwen fut étonnée.

« Vous comptez aller où ? »

Le fantôme apparut pour lui répondre sur un ton glacial : « Cela ne te regarde pas ! »

Morwen voulut lui répondre par une réplique cinglante, quand elle réalisa que son visage cadavérique présentait de nombreux traits en commun avec ceux du seigneur elfe de sa vision.

« Celebrimbor ? » dit-elle sans y croire.

Talion et le spectre la dévisagèrent avec surprise.

« Je ne t'ai pas dit son nom. Comment le connais-tu ? » demanda le rôdeur.

« J'ai fait un rêve. J'ai vu des bribes de votre vie. Comment vous avez forgé les anneaux, la trahison de Sauron… J'ai aussi vu votre famille. Je suis désolée pour vous. Ils avaient l'air gentils. »

Le fantôme resta silencieux quelques secondes, avant de lui tourner le dos et de disparaître.

Morwen craignit de l'avoir vexé, mais Talion lui offrit un sourire rassurant.

« Celebrimbor et moi devons poursuivre notre quête de la Main Noire de Sauron. Il a massacré ma famille et m'a maudit, tout comme Celebrimbor. »

« Vous comptez donc vous rendre au Mordor », dit Glorfindel.

« C'est cela. »

L'elfe lui offrit une expression désapprobatrice.

« Votre quête vous oblige à emprunter des chemins plus sombres que tous nos alliés. Vous risquez d'y perdre plus que le repos de votre âme, Talion. »

« Je n'ai pas le choix », dit le rôdeur.

« Vous pourriez venir avec nous. Galadriel pourrait peut-être vous aider, elle semble avoir de grands pouvoirs », dit Morwen.

« Je doute qu'elle puisse briser ma malédiction », soupira Talion.

« Pour briser une malédiction, il faut en connaître la nature exacte », dit Glorfindel. « Je doute que vous ayez trouvé le bon responsable, capitaine. »

Refusant d'en parler davantage, Talion sortit de la grotte. Morwen le regarda s'éloigner avec inquiétude. Elle ne connaissait pas le rôdeur depuis longtemps, mais il lui avait sauvé la vie et s'était montré gentil avec elle.

L'abandonner lui semblait injuste.

« Il faut vraiment qu'il s'en aille au Mordor, tout seul ? » demanda Morwen.

« Nous ne pouvons le forcer à nous suivre, Morwen. Et ta sécurité est importante pour le rôdeur, tout comme pour moi et la dame. »

« Alors, on va en Lothlorien ? »

« Non, c'est trop proche de Mirkwood. Je vais t'emmener à Fondcombe. Le seigneur Elrond, le beau-fils de la Dame, est déjà au courant et accepte de t'accueillir là-bas. Il a déjà élevé un enfant humain, Estel, et ne voit aucun inconvénient à faire de toi sa protégée. »

Curieuse, Morwen l'écouta lui parler de Fondcombe. Glorfindel y vivait depuis longtemps et adorait cet endroit. En l'écoutant lui décrire la vallée enchanteresse, ses immenses cascades et les magnifiques constructions de la cité, l'enfant eut un sourire rêveur.

Elle riait en écoutant Glorfindel lui narrer une farce des jumeaux d'Elrond, quand Talion rentra dans la grotte.

« La pluie a cessé. Nous pouvons y aller. »

Un cheval blanc les attendait dehors. Glorfindel dit à Morwen qu'il se nommait Asfaloth. Il installa l'enfant sur la selle, puis se mit derrière elle et prit les rênes.

Le cheval partit au pas. Le rôdeur les suivit d'un pas tranquille, son regard glissant sur les arbres autour d'eux, à l'affût du moindre signe de danger.

Morwen regarda autour d'elle et frissonna en voyant les toiles d'araignée gigantesques, que la pluie avait couvertes de gouttes. Cette vision aurait pu paraître enchanteresse, si les toiles n'étaient pas souillées de taches noires et de monticules évoquant des corps d'êtres vivants.

« On ne peut pas les aider ? » souffla Morwen, en voyant une forme ressemblant à celle d'un humain.

« Cela attirerait les araignées, et nous n'avons pas le temps de les combattre, hélas », dit Glorfindel.

« De toute façon, ils sont morts depuis longtemps », dit Celebrimbor, apparaissant près de Talion.

Morwen considéra le fantôme. Elle se demanda quel genre de malédiction pouvait obliger un fantôme à coexister dans le corps d'un humain.

D'autant que maintenant qu'il faisait plus clair et qu'elle prenait le temps de le regarder, l'enfant remarquait une marque au cou du rôdeur. Il avait eu la gorge tranchée, comme elle. Mais la plaie n'avait pas l'air d'avoir bien cicatrisé. La peau du rôdeur était pâle, trop pâle, comme si on l'avait vidé d'une grande partie de son sang. Et maintenant qu'elle y repensait, il avait refusé de manger le lembas que Glorfindel avait amené.

« Talion ? »

« Mmmmm ? »

« Vous n'êtes pas fatigué ? »

« Non, mais je te remercie pour ta sollicitude. »

Morwen fut tentée de lui poser d'autres questions, mais un regard de Celebrimbor l'en dissuada. Elle avait la désagréable impression que le fantôme devinait le cheminement de ses pensées, et qu'il n'apprécierait pas qu'elle fourre le nez dans ses affaires.

Ce spectre ne m'inspire pas confiance, pensa l'enfant.

Soudain, elle sentit Glorfindel se tendre dans son dos. L'elfe arrêta sa monture, puis dégaina lentement son épée.

Saisissant le message, Talion dégaina son arme et se mit en position.

Silencieuse, Morwen guetta avec eux le moindre signe suspect, quand l'elfe émit un juron.

« Des Orques ! »

Morwen capta un cliquetis métallique, puis des créatures hideuses jaillirent des buissons.

Jusqu'ici, elle n'avait entendu que des descriptions faites par Faelwen et quelques guérisseurs. Ils étaient bien plus hideux que ce qu'elle s'était imaginée : voûtés, la peau noire, des yeux allant du rouge au jaune maladif, des dents pointues souillées de sang séché et des armures faites avec des morceaux de métal noirâtre. Ils se jetèrent sur le rôdeur et le cheval.

Asfaloth se cabra, et Glorfindel se pencha pour faucher la tête de trois Orques avec son épée.

De son côté, Talion les frappait à coup d'épée, de pied et de poing. Le rôdeur se battait à une vitesse stupéfiante, presque aussi vite que la lumière. Parfois, Morwen voyait l'éclat du fantôme de Celebrimbor recouvrir son corps, comme s'ils étaient deux à se battre.

Soudain, elle sentit quelque chose enfoncer ses griffes dans sa cheville. Elle se pencha et vit qu'un Orque, blessé au flanc, avait rampé jusque près du cheval pour l'attraper.

Morwen se dégagea et lui donna un coup de pied au nez. Ce dernier émit un craquement horrible. L'Orque tomba de tout son long. Asfaloth lui piétina la tête d'un coup de sabot.

Bientôt, le groupe d'Orques fut vaincu. Talion entreprit de nettoyer son épée, quand le son d'un cor lui parvint.

« D'autres arrivent », dit-il sur un ton grave. « Partez, je vais les retenir. »

« Quoi ?! Mais vous n'allez pas rester les affronter tout seul ? » s'écria Morwen.

Le rôdeur lui sourit.

« Tout ira bien, petite. »

Glorfindel parut hésiter, avant de murmurer à son cheval d'avancer.

Morwen se contorsionna pour garder le rôdeur dans son champ de vision.

« Talion… »

« Sauron ne doit pas te retrouver. »

Celebrimbor se manifesta de nouveau près du rôdeur pour ajouter : « Si tu es vraiment du côté de la Lumière, alors tu dois accepter de partir. »

Morwen lança un regard furibond au fantôme.

« Vous êtes vraiment casse-pieds, vous ! »

Ces paroles firent glousser le rôdeur, puis il s'approcha pour donner un coup sur la croupe d'Asfaloth.

Ce dernier partit au petit trot, qui se changea vite en galop. Morwen n'eut d'autre choix que s'accrocher au pommeau de la selle, tandis que Glorfindel menait sa monture à travers la forêt.

Lorsqu'enfin ils franchirent la Porte des Elfes, Morwen ouvrit de grands yeux éblouis.

Devant elle s'étendait une immense étendue d'herbe verdoyante. L'air était bien plus frais et respirable que dans la forêt. Et le ciel bleu, moucheté de nuages, était immense !

Glorfindel maintint l'allure de son cheval pendant un temps qui parut trop long à Morwen. À force d'être secouée, elle ne sentait plus son corps.

L'elfe sentit sa fatigue et finit par ralentir l'allure. Ils arrivèrent bientôt en vue d'un petit bois. Glorfindel regarda autour de lui, puis descendit de cheval.

« Nous allons nous arrêter là pour la nuit. »

Quoi, c'était déjà le soir ? Morwen regarda le ciel et vit qu'en effet, le soleil était plutôt bas. Il ne tarderait pas à se coucher.

L'enfant glissa de la selle et s'étala de tout son long par terre. Ses jambes étaient tellement fourbues qu'elle pouvait à peine tenir debout.

Glorfindel émit un éclat de rire mélodieux, mais se garda d'émettre le moindre commentaire moqueur.

Maudissant son corps jeune et maladroit, Morwen se remit debout tant bien que mal.

« Je déteste être petite ! Autrefois, je n'étais pas si maladroite ! »

« C'est un des inconvénients lorsqu'on renaît. Notre esprit se souvient, mais notre corps doit tout réapprendre », dit Glorfindel.

En le voyant se déplacer avec grâce et souplesse pour ramasser du bois, Morwen douta qu'il eût rencontré les mêmes problèmes qu'elle dans son enfance.

Lorsque le soir tomba, le duo de voyageurs resta un moment silencieux, à contempler le feu de camp qu'avait préparé l'elfe.

Morwen joua avec son pendentif, regardant le métal briller à la lueur des flammes. Les elfes semblaient naître naturellement beaux et gracieux.

Silencieux, Glorfindel considéra l'enfant. Son œil doré semblait briller plus fort à la lumière du feu, mais le sourire admiratif sur son visage d'enfant lui donnait un air attendrissant. Il se demanda pourquoi Thranduil avait été si dur avec elle. Bien sûr, lui-même était conscient du danger que représentait l'Ombre, et il n'avait aucune pitié pour ses serviteurs. Mais il avait passé assez de temps avec Morwen pour voir qu'elle n'avait pas une once de malveillance. Certes, elle avait un regard trop âgé, qui contrastait avec la jeunesse de son corps, mais rien qui ne le mit vraiment mal à l'aise.

Le comportement du roi était inexcusable. Lorsque Morwen serait en sécurité, il verrait s'il n'y aurait pas moyen d'en parler à Legolas. D'autant que le prince voudrait sûrement avoir des nouvelles de la petite. D'après ce qu'il avait compris, il était l'un des rares à l'apprécier.

Un bâillement de Morwen le tira de ses songes. Il sortit une couverture d'un des sacs sur la selle d'Asfaloth et la donna à la petite. Cette dernière s'allongea en s'enroulant dedans, puis elle ferma les yeux.

Vigilant, l'elfe entreprit de monter la garde pendant son sommeil.

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Morwen était si fatiguée qu'elle s'attendit à dormir d'un sommeil de plomb.

Pourtant, son esprit se retrouva dans cette obscurité familière où elle avait déjà discuté avec Galadriel.

Sauf qu'au lieu de la Belle Dame de la Lothlorien, elle vit apparaître Sauron.

« Je vois que tu as quitté Mirkwood. Pourquoi t'es-tu éloignée ? »

« Vous savez très bien pourquoi… Sauron ! » cracha l'enfant avec tout le mépris possible.

Le sourire affable de l'homme disparut pour un autre plus dur.

« Depuis quand le sais-tu ? »

« On s'en fiche ! Pourquoi vous êtes là ? Si c'est pour me convaincre de vous rejoindre, vous perdez votre temps ! »

« Oh, vraiment ? Et pourquoi refuses-tu de me rejoindre ? Qu'ai-je fait pour mériter tant de haine ? »

« Euh… Vous voulez la liste ? »

Cette réponse parut surprendre un bref instant Sauron. Morwen reprit :

« Vous m'avez menti sur votre nom, vous m'avez piégée de façon à ce que le roi me surprenne dans son bureau. Vous saviez que je me ferais punir chez ses soldats, et je parie que vous vous doutiez qu'ils allaient m'emmener dans la forêt ! Vous espériez que je serais trop désespérée pour retourner au palais et que le seul endroit où j'irais, ce serait Dol Guldur. »

« J'avoue avoir misé là-dessus. Mais je ne comprends pas pourquoi tu t'obstines à rester fidèles à ces gens. Ils ont voulu se débarrasser de toi. Ils ont tenté de t'éliminer ! »

« Ils ne sont pas tous méchants », rétorqua Morwen avec calme.

Devant son air assuré, Sauron secoua négativement la tête.

« Tu n'es qu'une fillette naïve. Un jour, tu comprendras que ta place n'est pas parmi les Elfes, ni les Hommes ni aucun autre peuple de la Terre du Milieu. Toi et moi avons trop de choses en commun pour que tu puisses m'ignorer. »

« Nous n'avons rien en commun ! Fichez-moi la paix, j'en ai marre ! Sortez de ma tête. »

Avec un rictus narquois, Sauron se mit à lui tourner autour, avant de se pencher vers elle pour lui murmurer : « Tu ne peux pas m'échapper ! »

Sa main se posa sur son épaule. Morwen eut un frisson et voulut se dégager, quand sa poigne lui parut plus lourde et brûlante.

Elle se retourna et vit qu'au lieu de l'homme blond, Sauron avait pris la forme d'une espèce d'œil enflammé. Il était gigantesque !

Soufflée par la chaleur qu'il dégageait, elle tomba sur les fesses et se mit à reculer sur les mains.

« Je te vois ! » clama l'œil incandescent d'une voix rauque.

Affolée, Morwen porta les bras devant son visage et cria.

Lorsqu'une nouvelle poigne se fit sentir sur ses épaules, elle tenta de se dégager, quand la voix de Glorfindel lui parvint.

« MORWEN ! »

Haletante, en nage, Morwen ouvrit les yeux et vit le beau visage de l'elfe penché au-dessus du sien.

« Tu as fait un cauchemar », dit l'elfe.

Morwen regarda autour d'elle. Ils étaient à l'orée du bois, il faisait toujours nuit. Asfaloth broutait paisiblement de l'herbe.

L'enfant agrippa son médaillon et se sentit aussitôt mieux.

« C'était… juste un cauchemar ! » dit-elle pour se rassurer.

Soudain, Glorfindel se tendit, puis il courut jusqu'à son cheval pour tirer un arc et un carquois de flèches de la selle. Il regarda autour de lui, le visage levé vers le ciel.

Morwen ne comprit pas ce qui pouvait l'inquiéter, quand un cri aigu et atroce lui déchira les tympans. Asfaloth parut s'affoler. L'elfe lui saisit la bride d'une main, puis fit signe à Morwen de s'enfoncer sous le couvert des arbres.

L'enfant lui obéit et s'allongea de tout son long dans les buissons. Là, elle perçut un puissant battement d'ailes.

« C'est quoi ? » dit-elle dans un souffle.

« Chut ! » souffla l'elfe.

Lentement, Morwen leva la tête et discerna une énorme silhouette ailée passer au-dessus des frondaisons.

Glorfindel regarda autour de lui et parut contrarié. Ils étaient isolés, avec de grandes étendues à découvert autour d'eux. Mais ils ne pouvaient rester ici, ou la créature qui les avait repérés finirait par descendre pour rejoindre leur cachette.

Morwen sentit la panique la gagner. Quoi que fût la créature dans le ciel, elle semblait vraiment inquiéter Glorfindel. L'elfe avait du mal à calmer son cheval tout en restant aux aguets.

L'enfant agrippa son médaillon et ferma les yeux pour prier.

S'il vous plaît, Valars, aidez-nous !

Elle sentit soudain un souffle dans son dos. Inquiète, elle se retourna lentement, et vit avec surprise que ce n'était pas le monstre ailé, mais autre chose qui l'avait alertée.

D'abord, elle ne comprit pas ce que c'était, tant c'était lumineux et mouvant.

Puis elle réalisa que ça ressemblait à une espèce de trou noir. Des volutes de lumière bleue, violette, noire et argentée se mouvaient autour.

Sidérée, Morwen en oublia le monstre et se redressa pour mieux regarder ce phénomène.

Lentement, elle se leva et tendit le doigt vers cette chose.

« Glorfindel… »

« Silence ! » murmura l'elfe, qui lui tournait le dos.

« Mais il y a un… »

Elle fit un pas en direction de ce mystérieux phénomène pour souligner ses paroles, quand elle sentit le contact avec le sol disparaître.

Stupéfaite, elle vit son corps s'élever dans les airs, puis être aspiré à l'intérieur du trou.

Le monstre dans les airs fit un dernier cercle, avant de s'éloigner au loin.

Rassuré, Glorfindel se tourna vers Morwen, mais il vit avec stupeur qu'elle avait disparu, tout comme ce qui l'avait enlevée.

Inquiet, l'elfe appela son nom, le cria, puis enfourcha Asfaloth et se mit à scanner la zone autour du bois.

Bientôt, il dut se rendre à l'évidence. Elle avait disparu ! Mais comment était-ce possible ?

Soudain, la voix de Galadriel s'éleva dans sa tête.

« N'ayez crainte, Glorfindel. Les Valars ne l'ont pas abandonnée. »

« Ma Dame… Pardonnez-moi, j'ai échoué ! » pensa l'elfe, mortifié.

Il sentit plus qu'il n'entendit le rire de la dame dans sa tête.

« Non, émissaire de Fondcombe. Vous l'avez aidée à rejoindre le seul endroit où Sauron ne peut l'atteindre. »

« Que voulez-vous dire ? »

Il n'y eut aucune réponse. Glorfindel comprit que Galadriel ne lui en dirait pas plus. Elle avait sans doute même coupé leur discussion télépathique, jugeant qu'il n'avait pas besoin d'en savoir plus.

Avec un soupir résigné, il fit demi-tour et engagea lentement sa monture en direction de Fondcombe.

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Gaïa, Midgar

Cette traque dans les rues de Midgar était aussi épuisante que frustrante.

Cela faisait pratiquement trois jours que Sephiroth et d'autres unités de la Shinra inspectaient des zones de la ville, en quête du mystérieux meurtrier.

Beaucoup de signalements avaient été donnés, certains annonçant un nouveau meurtre ou le passage d'un homme très louche. Il avait fallu vérifier chaque coup de fil. Certains s'étaient révélés être des canulars, d'autres avaient été mis trop tard pour qu'on puisse remonter la piste.

À présent, le Première Classe se trouvait dans le secteur 5 des Taudis. Il avisa rapidement un cadavre au bas des marches du perron.

Il était froid et le sang avait noirci. Le meurtrier était passé par-là il y a déjà un bon moment.

Sephiroth regarda autour de lui et avisa un tas de détritus contre un mur. Il en tira une vieille couverture dont il se servit pour recouvrir le corps.

Encore un mort à signaler à la Shinra…

Il sortit son téléphone pour prévenir les autres membres de son unité, quand il sentit le sol trembler sous ses pieds. Un grondement familier, qui trahissait la présence de conduits Mako sous terre, lui fit deviner qu'il devait y avoir un problème technique.

Soudain, une explosion retentit, en provenance de l'église. Sephiroth s'empressa de franchir les portes et ce qu'il vit confirma ses soupçons.

Un conduit Mako avait explosé, ce qui avait détruit le plancher au niveau du chœur de l'église. Le liquide vert éclaboussait les murs et les bancs les plus proches. Il avisa un trou au plafond. Le geyser de liquide vert avait été si fort qu'il avait endommagé la toiture.

Bon, il faudra prévenir une équipe technique de s'occuper de ça, en plus, pensa le Soldat avec fatigue.

Il voulut faire demi-tour, quand il remarqua une forme étrange au milieu de la flaque de Mako. On aurait dit un corps humain…

Le Soldat s'approcha et réalisa qu'en effet, c'était bien un être humain.

Une enfant ?!

En veillant à ne pas entrer en contact avec la Mako, il se pencha et parvint à agripper un pan de la veste de la petite. Il la tira sans effort jusqu'à lui et la retourna sur le dos.

Elle était jeune, environ sept ou huit ans, avec de longs cheveux bruns. Que faisait-elle ici ? Sans doute s'était-elle retrouvée au mauvais endroit au mauvais moment. Le conduit avait explosé sous ses pieds, et elle avait pris le liquide de plein fouet.

Soudain, la petite gémit.

« Petite ? Tu m'entends ? »

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Morwen avait mal à la tête. Après avoir été aspirée par le vortex – apparemment, c'était le bon nom pour cette chose – elle avait vu des lumières défiler autour d'elle, puis eu la sensation de voler à toute vitesse à travers un vent glacial, avant d'atterrir dans un environnement complètement différent.

Elle avait juste eu le temps de reconnaître le décor d'une église avant de tomber dans une espèce de mare de liquide vert luisant.

Le choc avec le liquide avait été violent. C'était comme si elle avait plongé dans de l'eau parcourue par un puissant courant électrique. Elle avait perdu connaissance, jusqu'à ce que la sensation de l'électrocution diminue.

« Petite ? Tu m'entends ? »

Cette voix n'était pas celle de Glorfindel. Elle ne lui rappelait personne.

Avec effort, Morwen ouvrit les yeux et vit deux yeux de chat brillants posés sur elle.

Clignant des paupières, elle vit que leur propriétaire avait un visage humain encadré de longs cheveux argentés. Était-ce un elfe ? Elle en avait déjà vu quelques-uns avec des cheveux dont le blond pâle tirait sur l'argent, mais jamais à ce point !

Elle ouvrit la bouche pour parler, mais son corps en profita pour tousser, crachant un peu de ce liquide vert bizarre.

Elle tenta de se mettre sur le côté, mais son corps semblait glacé, presque anesthésié. Elle sentit à peine les mains de l'homme l'aider à se mettre en position pour mieux rejeter la substance.

« Tu as été exposée à une forte dose de Mako. Je dois appeler une équipe médicale de la Shinra. »

Mako ? Shinra ? De quoi il parlait ? Morwen ne put le lui demander, son corps avait trop puisé dans ses dernières forces.

Elle perdit connaissance, sous l'œil inquiet de cet inconnu.