Bonjour !

Ça y est, c'est le jour de sortie de Final Fantasy 7 Rebirth ! Pour fêter ça, voici un nouveau chapitre. Je vous souhaite une bonne lecture.

Disclaimer: Le Seigneur des Anneaux appartient à J.R.R. Tolkien. Et Final Fantasy 7 à Square Enix.


Chapitre 12 :

L'appât

Enfermée dans sa chambre, Morwen regardait au-dehors.

Le corps de l'homme avait été évacué, ainsi que celui du monstre tué. Elle ignorait où on les avait mis, et une part d'elle ne désirait pas le savoir.

Soudain, des éclats de voix lui parvinrent de derrière la porte.

Veillant à rester silencieuse, Morwen marcha jusque devant le battant et colla son oreille.

« C'est une mauvaise idée ! Impliquer des civils est trop dangereux », dit Genesis.

« Il a raison », renchérit Sephiroth.

Une troisième voix s'éleva, un peu plus âgée et autoritaire.

« Pourtant, il n'y a pas d'autres moyens. C'est la seule idée qu'ait approuvé le conseil de Banora. »

Morwen entendit presque le soupir agacé de Genesis. Qui pouvait donc lui donner tort et l'énerver à ce point.

L'enfant se pencha vers la serrure et regarda à travers. Elle vit Genesis, adossé au mur, regardant avec un air de défi un homme moustachu. Il portait un costume de qualité et une chaînette pendait sur le devant de sa chemise, sans doute celle d'une montre à gousset dans sa poche de revers.

« Vous avez contacté la Shinra ? » demanda l'inconnu à Sephiroth.

« Non, les lignes sont coupées. Les monstres ont fait trop de dégâts, nous ne pouvons passer que des appels locaux. »

L'inconnu secoua la tête.

« Dans ce cas, si vous n'avez pas d'autres idées, faites le nécessaire et nettoyez la ville ! Le festival doit reprendre, nous avons beaucoup de touristes cette année, notre économie en dépend. »

Genesis le fusilla du regard, tandis que l'individu quittait le couloir.

« Tu parles qu'il se soucie de l'économie de Banora ! Il veut juste qu'on fasse le ménage pour lui, parce qu'il a la trouille. »

« Bon, qu'est-ce qu'on fait ? » demanda Angeal. « On suit l'idée de ton père, Genesis ? »

« T'es dingue ? Jamais de la vie ! »

Morwen écarquilla les yeux. Cet homme qui agaçait tant Genesis était son père ? Bizarre, il ne lui ressemblait pas. Du peu qu'elle avait vu, il était brun et avait des traits massifs, tandis que Genesis avait un visage plus fin et noble.

Il tient peut-être plus de sa mère ? pensa l'enfant.

« C'est mal d'écouter aux portes, Morwen », dit Sephiroth.

L'enfant tressaillit. Parfois, elle oubliait les sens surdéveloppés de son tuteur. Il avait plus en commun avec les Elfes que les Hommes.

Penaude, la fillette ouvrit la porte et s'avança.

« Désolée, je vous ai entendus hausser le ton. »

« C'est rien », dit Angeal.

Morwen regarda Genesis. Il semblait toujours fâché.

« Ton père veut que les civils aident à chasser les monstres ? » demanda l'enfant.

« Non, il veut qu'on les utilise comme appâts. »

« Les monstres qui se manifestent lors de ce festival sont particuliers », dit Angeal. « D'après la légende, ils appartiennent à l'Armée des Ténèbres et se nourrissent des émotions des gens. »

« Leurs émotions ? » demanda Morwen.

« Oui : la colère, la haine, la peur… tous ces sentiments les rendent plus forts et leur permettent de se multiplier. On dit qu'ils peuvent les stimuler chez les humains, pour les affaiblir », dit Genesis.

« Ce serait pour ça que ce type se serait coupé les veines », comprit Sephiroth.

L'enfant repensa au cauchemar qu'elle avait fait en arrivant ici en hélicoptère. Les monstres en étaient-ils responsables ? Elle n'avait pas fait de cauchemar sur Tangadion et ses hommes depuis si longtemps !

« Alors… vous pourriez vous servir de moi ? » suggéra Morwen.

Les trois Soldats la regardèrent comme si elle était folle.

« Hors de question qu'on te mette en danger », dit Genesis.

« Tu dois rester ici en sécurité », renchérit Sephiroth.

Morwen leva la main avant qu'Angeal ait le temps d'ajouter quelque chose.

« Je crois que je suis sensible à leur pouvoir. J'ai fait un cauchemar sur mon… passé, au moment où on arrivait ici. »

Sephiroth plissa les yeux, tandis que les deux autres firent silence, attendant qu'elle en dise plus.

« Je persiste à croire que c'est une mauvaise idée », dit Genesis. « Et je ne dis pas ça seulement parce que c'est le chef de Banora qui l'a émise. »

Morwen les regarda tous les trois avec agacement. Elle n'avait pas du tout envie de rester ici et se mettre en danger, mais en même temps, l'idée de ne rien faire pour aider la faisait se sentir mal.

« Je peux m'arranger pour ressentir beaucoup de chagrin », renchérit l'enfant. « Jessie m'a filé quelques cours de théâtre pour m'aider à avoir l'air triste ou en colère. Je peux m'arranger pour émettre assez d'ondes négatives pour que vous puissiez tuer des monstres. »

« Si ça marche… on peut peut-être les attirer près d'une maison isolée sans mettre Morwen en danger ? » suggéra Angeal.

Genesis et Sephiroth parurent sceptiques, mais l'idée ne leur déplaisait pas entièrement.

Finalement, ils acceptèrent de quitter l'auberge pour tenter le coup.

Morwen courut chercher son téléphone et son cahier de dessins, puis elle suivit les trois hommes dehors.

Angeal les conduisit jusqu'à une maison en bordure du verger. Là, dans le salon, ils ouvrirent les rideaux et écartèrent les meubles pour avoir de la place.

« Bon, à toi, gamine », dit Genesis.

Morwen ouvrit le clapet de son téléphone et choisit de jouer en boucle une sonnerie qui évoquait une marche funèbre.

Puis elle tira un dessin de son carnet, qui montrait un chaton avec de grands yeux tristes essayant de grimper sur une table pour boire dans un bol de lait. Et dessous, on pouvait lire le texte : « Pas avant samedi ! »

Genesis jeta un regard sceptique à ses amis. En quoi cela pouvait être attristant ?

« Oh, mon Dieu… Regardez-le ! » gémit Morwen. « Il essaie de grimper, avec ses toutes petites pattes, mais il est si petit et affaibli par la faim ! »

Des larmes lui montèrent aux yeux. Soudain, une ombre se dessina devant l'une des fenêtres. Une figure de citrouille grimaçante apparut.

« Eh, ça marche ! Un monstre approche », dit Angeal.

« C'est vrai ? Chouette ! » s'écria Morwen en se tournant vers la fenêtre, toute contente.

Ce changement d'humeur parut affecter le monstre, qui s'éloigna de la maison.

« Non, non, non ! Regarde bien le dessin, Morwen », dit Genesis en la faisant pivoter vers le mur. « Pense à ce pauvre minou. »

« Oui… ? »

Angeal et Sephiroth regardèrent par la fenêtre et virent d'autres monstres venir vers eux. Ils firent signe à Genesis de continuer.

Ce dernier renchérit : « Oui, le pauvre est affaibli par la faim ! C'est trop haut, il ne va pas y arriver. Il va tomber, se faire mal et souffrir… »

« Aaaaaah ! C'est vrai… » dit Morwen d'une voix nouée par le chagrin.

Les yeux embués, elle lut le texte au bas de la page. « Pas avant samedi. »

« Et en plus, on est que… meeeeeercrediiiiiiiiih ! » cria l'enfant, en pleurs.

Aveuglée par les larmes, elle saisit à l'aveuglette un tissu, qu'elle croyait être un rideau, pour se moucher. Sauf qu'il s'agissait en fait de la chemise de Genesis. Ce dernier n'eut pas le temps de l'empêcher de se moucher, puis recula avec l'air dégoûté.

Au signal de Sephiroth, Angeal ouvrit la fenêtre. Son ami arma sa matéria Feu et lança des boucles de flammes sur les monstres.

Trois furent réduits en cendres, mais un quatrième parvint à se faufiler à l'intérieur de la maison.

D'abord immobile, il pivota doucement sa tête grimaçante vers Morwen et tendit ses tentacules vers elle.

La fillette parut soudain plus triste qu'elle ne l'était déjà. Ses joues perdirent de leur éclat, ses cheveux parurent plus ternes et toute lumière disparut de ses yeux.

Sephiroth tenta un coup de sabre, mais le monstre l'esquiva et s'éleva vers le plafond. Gorgé des émotions de Morwen, il prit du volume et ses tentacules se firent plus nombreux.

Genesis arma à son tour une matéria, quand deux copies du monstre apparurent aux côtés du premier.

« Bon sang, elle est trop triste ! Morwen, arrête, ne regarde plus le dessin ! » dit Angeal.

L'enfant tourna la tête vers lui, puis regarda les monstres et parut effrayée.

Bon sang, qu'est-ce qu'ils sont moches !

Prise de tremblements nerveux, elle se frictionna les bras, quand ses doigts entrèrent en contact avec la chaîne de son collier. Lorsque ses doigts touchèrent l'Elanor, elle cligna des yeux et parut se réveiller.

Elle regarda autour d'elle, puis saisit une chaise et la brandit devant elle en bouclier.

« Dégagez, sales monstres ! »

Peu ravis par ce changement d'humeur, les tentacules violets des monstres devinrent rouges, signe de colère.

Les trois Soldats n'attendirent pas et s'élancèrent pour les tuer. Ils parvinrent à en éliminer deux avec leurs épées, mais le premier, toujours plus gros, parvint à les esquiver pour se blottir dans un renfoncement du salon.

Morwen lança sa chaise vers lui et parvint à le toucher au flanc. La citrouille volante tomba au sol, à moitié sonnée.

Tandis que Genesis s'avançait pour l'achever, le monstre fit un tour sur lui-même, puis émit un flash qui balaya la pièce.

Touchée par le rayon, Morwen fut prise de tremblements, puis se tourna vers son dessin accroché au mur et se remit à pleurer.

« Eh ! Qu'est-ce qu'il y a ? » demanda Angeal en posant une main sur son épaule.

En larmes, Morwen pointa son dessin. Le chaton avait disparu du papier. À la place, il y avait une petite pierre tombale.

« Le petit chat est mort de faiiiiiiiiiiiiiim ! »

Ragaillardi par cette nouvelle vague de chagrin, le monstre prit du volume et s'envola par la fenêtre.

« Ouiiiiiiiin ! Le chaton… » gémit Morwen.

« Je savais que ce plan était pourri ! » grommela Genesis.

Morwen se roula en boule au sol. Sephiroth s'agenouilla devant elle pour lui tendre la main. Il dit quelque chose, mais elle ne comprit pas quoi. Car à travers le brouillard des larmes, l'image du Soldat changea pour celle de Tangadion.

En le voyant tendre la main vers elle, Morwen se recroquevilla davantage en gémissant.

« Non ! Pitié, Tangadion, me frappez pas ! Je jure d'être sage… »

Angeal et Genesis regardèrent l'enfant avec l'air perdu.

« De qui elle parle ? » demanda Genesis.

Sephiroth parut gêné, mais cacha vite cette expression pour une autre plus sérieuse.

« Quelqu'un qui l'a maltraitée par le passé », se contenta-t-il de répondre.

Il prit l'enfant ses bras. Bien qu'effrayée, elle n'opposa aucune résistance et se laissa ramener à l'auberge.

Une fois dans sa chambre, allongée sur son lit, Morwen s'empressa de se cacher sous les couvertures.

Elle entendit à peine les Soldats parler, tant elle était prise dans un cauchemar.

Elle n'était plus dans sa chambre à Banora, ni même sur Gaïa. Elle était de retour dans la Forêt Noire, allongée par terre sur le sol humide et boueux, entourée d'arbres infestés d'araignées.

Leur cliquetis résonnait en boucle dans sa tête, tandis qu'elle pouvait sentir l'odeur étouffante de moisissure qui saturait l'air.

Pitié, je veux rentrer chez moi !

« Chez toi ? Mais tu n'as plus de chez-toi ! » susurra une voix dans sa tête.

Levant la tête, elle vit que les jumeaux de Faelwen se tenaient devant elle. Ils étaient là, dans leurs armures en métal sombre et leurs tenues se fondant avec la végétation.

Ils la regardaient avec ce même sourire cruel qu'autrefois.

« Alors, petit monstre ? Tu n'es pas encore morte ? » dit Nostalion.

« Qu'attends-tu pour en finir ? » dit Nestarion.

Morwen ne put répondre. Elle se sentait anormalement faible et gelée de l'intérieur, comme si son sang s'était changé en glace.

L'image des jumeaux se brouilla, puis Tangadion réapparut.

En le voyant tendre le bras vers elle, Morwen rampa en arrière, tandis que le capitaine la saisit par la gorge.

Paniquée, Morwen sentit l'air lui manquer.

« Résiste, mon enfant ! » dit une voix, très faible dans sa tête.

Hein ? Galadriel ?

L'image parut se brouiller un très bref instant, laissant apparaître Sephiroth au lieu de Tangadion. La pression sur sa gorge se fit moins forte, avant que l'image de cauchemar ne revienne.

Morwen essaya de se débattre, mais plus elle résistait, plus les doigts de l'Elfe s'enfonçaient dans sa gorge.

Pourtant, en le voyant sourire, Morwen sentit quelque chose n'allait pas. Elle n'avait jamais vu Tangadion sourire depuis qu'elle l'avait rencontré.

« Ce n'est pas réel, Morwen ! Ne laisse pas le désespoir t'envahir ! »

Cette voix… Morwen la reconnut, c'était celle de Galadriel. Une douce chaleur à sa poitrine attira son attention.

Malgré la peur et la sensation d'étouffer, Morwen porta une main à sa poitrine et sentit la chaleur réconfortante du collier.

Aussitôt, l'illusion devint floue et elle sentit la pression autour de sa gorge disparaître.

Avec un cri effrayé, Morwen se mit en position assise sur le lit et vit que Sephiroth se tenait à son chevet. Il paraissait franchement inquiet, une expression qu'elle n'avait encore jamais vue de manière aussi flagrante sur ses traits.

Angeal et Genesis se tenaient derrière lui, tout aussi inquiets.

« Doucement ! Respire… » dit Sephiroth.

Incapable de parler à cause de sa gorge en feu, Morwen s'efforça de respirer jusqu'à ce la panique reflue.

Elle saisit à deux mains son collier et le colla contre son cœur en remerciant mentalement Galadriel. Que la Dame se soit réellement manifestée dans sa tête ou non, peu importe. Le cauchemar avait cessé.

Pourtant, une douleur inhabituelle aux poignets la fit baisser les yeux. Elle vit avec surprise que des écorchures sanglantes striaient sa peau.

« Que… ? » dit l'enfant, perplexe.

« C'est toi qui t'es fait ça », dit Genesis avec embarras. « On t'a entendue gémir sous les draps, et quand on les a retirés, tu étais en plein délire et tu semblais décidée à te scarifier. »

« Mais je… Il y avait Tangadion et les jumeaux ! Ils voulaient me tuer », protesta faiblement l'enfant.

Sephiroth lui adressa une grimace gênée. Morwen réalisa trop tard sa bêtise : les amis de son tuteur ne savaient rien de son passé chez les Elfes.

Refusant d'aggraver son cas, Morwen se tut. Sephiroth utilisa une matéria Soin pour refermer les écorchures, puis Angeal alla dans la salle de bains pour prendre un kit de premiers soins. Une fois qu'il eut bandé les poignets de l'enfant, les quatre amis se regardèrent avec fatigue et abattement.

Les monstres n'étaient toujours pas vaincus et ils ne savaient pas quoi faire.

Soudain, les lumières dans la pièce clignotèrent, puis cela cessa.

« Je crois qu'on ne peut rien faire d'autre, ce soir », dit Angeal. « On ferait mieux de dormir. »

Morwen était d'accord, d'autant qu'elle n'avait plus de forces. Toutefois, Sephiroth choisit de rester à son chevet pour la nuit, afin d'éviter qu'une autre crise survienne et qu'elle se fasse du mal.

L'enfant fut secrètement soulagée qu'il reste. Après ce qu'elle avait vécu, rester seule dans le noir l'effrayait.

Angeal et Genesis quittèrent l'auberge.

Morwen alla dans la salle de bains pour se mettre en pyjama, puis retourna se mettre au lit.

Une fois la lumière éteinte, ses yeux s'adaptèrent doucement à l'obscurité. Elle vit Sephiroth revenir dans la chambre et s'asseoir sur une chaise à côté d'elle.

En le voyant ainsi, l'enfant se demanda s'il allait rester en position assise toute la nuit, ou bien finir par s'allonger avec elle. Sans doute plus tard, quand elle dormirait et que lui-même aurait sommeil…

Cela ne la dérangeait pas, curieusement. Elle réalisa, une fois de plus, combien son esprit avait changé.

Bien que dotée de trente-cinq ans de souvenirs de vie antérieure, elle n'était nullement gênée ou embarrassée à l'idée qu'un adulte dorme avec elle.

C'est fou comme l'esprit s'adapte au corps qu'il occupe.

Elle regarda ses mains. Des mains d'enfant, aux doigts petits et fins…

« Tu as mal ? » demanda Sephiroth, intriguée par son manège.

« Non, je… je réfléchissais. »

Le Soldat plissa les yeux.

« Tu pensais à ta vie d'avant ? »

« Un peu. Et aussi à celle que j'avais à Mirkwood… Au fait, je suis désolée. »

« Pour quoi ? »

« Ce que j'ai dit devant Genesis et Angeal… Ils se posent des questions, maintenant. Ils vont t'interroger là-dessus, non ? »

« … Sans doute », dit Sephiroth en pivotant la tête vers la fenêtre.

Morwen le regarda plus attentivement. Sephiroth avait un don pour gagner un visage impassible. Mais à force de vivre avec lui, elle avait appris à déceler les signes et les gestes, même les plus infimes, qui laissaient deviner son humeur ou ce qu'il pouvait penser.

Il était gêné, il ne voulait pas qu'elle continue de parler de ça.

« Ce n'est pas juste que tu doives leur cacher des choses à cause de moi. »

« Peu importe, si cela t'évite de finir aux labos. »

Morwen fit la moue.

« Tu ne crois pas qu'ils pourraient être mis dans la confidence ? En plus, je… Je crois que Genesis m'a vue écouter les arbres, avant le festival. »

« Comment ?! »

Mal à l'aise, l'enfant se ratatina dans son lit.

« On jouait à cache-cache et je… j'ai pas réfléchi, j'ai utilisé mon pouvoir pour vérifier s'il était caché dans un arbre. »

Bien qu'il fasse noir, elle entendit clairement le Soldat soupirer.

« Je t'avais dit d'être prudente ! »

« Je sais, et je le suis en général ! Mais depuis qu'on est ici, dans cet endroit où la nature est plus présente… j'ai l'impression qu'une part de moi, que je croyais morte en Terre du Milieu, s'est réveillée. Je me sens plus proche de la nature. Je ne dis pas ça pour justifier mon erreur, seulement… tu ne crois pas qu'Angeal et Genesis garderaient le secret ? »

« On ne peut pas prendre ce risque. Rien ne dit qu'ils croiront la vérité. »

« Mais tu… »

Sephiroth tourna la tête vers elle. En voyant la sévérité dans son regard, elle ne put finir sa phrase.

« Tu ne sais pas ce qu'on inflige aux gens, dans les laboratoires. Hojo ne se contente pas de faire des expériences pour ses recherches, il adore faire souffrir ses cobayes. Il fait des choses… des choses qu'on ne ferait même pas à un animal qu'on envoie à l'abattoir. »

En entendant cela, Morwen se crispa. La douleur était nettement perceptible dans la voix du Soldat. Il lui avait confié avoir passé son enfance dans les laboratoires, et que même aujourd'hui, il devait y aller de temps en temps pour subir des injections et des traitements imposés par Hojo.

« Je refuse que tu vives ça », conclut Sephiroth sur un ton ferme.

Morwen baissa tristement les yeux. En effet, sans preuve, il serait dur de convaincre ses amis. Surtout Genesis, qui était d'un naturel borné et ne se laissait pas facilement influencer.

Pourtant, elle ne supportait pas l'idée qu'à cause d'elle, Sephiroth risquait de perdre ses deux meilleurs amis.

« Il faut que tu dormes », dit Sephiroth.

Morwen comprit que la discussion était close. Son médaillon serré au creux de son poing, elle ferma les yeux et s'endormit rapidement, tant les dernières épreuves l'avaient épuisée.

Mais au lieu de sombrer dans un sommeil sans rêves, elle se retrouva au milieu d'un endroit inquiétant.

Cela ressemblait à un désert. Le sol était recouvert de pierres noires, aux arrêtes pointues et tranchantes. Des colonnes de fumée s'échappaient de cavités autour d'elle, et le ciel était couvert de nuages obscurs.

« Ravi de te revoir. »

Morwen se crispa. Lentement, elle tourna la tête vers celui qui avait parlé.

Devant elle se tenait Sauron, sous son apparence de mage blanc. Il avait l'air calme et souriant, pourtant une lueur de jubilation malsaine brillait dans ses yeux.

« C'est… c'est un c-c-cauchemar », balbutia Morwen.

« Possible », admit le Maia déchû. « Mais nous sommes liés, tous les deux. Galadriel n'est pas la seule à partager une connexion avec toi. Et la nôtre est forte, surtout lorsque tu es inquiète ou effrayée. »

« Je n'ai pas peur ! » dit Morwen, piquée au vif.

« Mais inquiète, si. »

L'enfant serra les poings. En effet, elle ne pouvait nier qu'elle était inquiète… pour Sephiroth et la possibilité qu'il perde ses amis.

« Ton attitude me peine, Morwen. Pourquoi tant de méfiance, alors que je suis ton ami ? Tu ne veux pas me confier ce qui ne va pas ? »

« Arrêtez votre cinéma, vous ne vous faites aucun souci pour moi ! Vous appréciez cette situation, vous aimez que je sois troublée. Quel genre d'ami pourrait apprécier ça ? Est-ce que vous savez seulement ce qu'est l'amitié ?! »

Sauron détourna le regard.

« J'étais un Maia au service des Valars, autrefois », confia-t-il sur un ton songeur. « J'étais Mairon l'Admirable, et apprenti d'Aulë… mais ensuite, on m'a envoyé affronter Morgoth. »

« … Qu'est-ce qui s'est passé ? »

« J'ai tenté de le vaincre, mais il était trop fort. J'aurais pu être anéanti, mais au lieu de m'achever, il m'a proposé de le rejoindre. Je n'ai pas compris pourquoi celui que tous considéraient comme le mal incarné se montrait si généreux envers moi, surtout alors que je m'étais clairement opposé à lui. Il m'a dit qu'il ne m'en voulait pas, car les Valars étaient la véritable cause du problème. Ce sont eux, la vraie menace. »

Morwen éclata d'un rire moqueur en entendant ça. Sauron la fit taire en poursuivant :

« Ils m'ont envoyé l'affronter seul, alors qu'ils savaient que je ne ferais pas le poids face à lui. Les Valars, avec toute leur puissance et leur sagesse, auraient eu toutes les chances de le vaincre eux-mêmes, mais ils étaient trop lâches pour risquer leurs vies. Et à la place, ils m'ont envoyé, moi. »

La fillette sentit la colère monter en elle. Les poings serrés, elle fit « non » de la tête.

« C'est ça, votre excuse pour tous vos crimes ? »

Sauron haussa les sourcils, apparemment surpris par sa question.

« J'ai rencontré certains des Valars, et j'ai beau ne pas avoir toute votre expérience, j'ai senti qu'ils étaient bons. Ce qui vous est arrivé ne justifie pas tout le mal que vous infligez aux peuples de la Terre du Milieu ! »

« Au contraire, si. Ils sont fidèles aux Valars, ils les encouragent donc dans leurs crimes et doivent payer pour cela. »

Morwen regarda l'être qui n'avait d'homme que l'apparence, et dont le cœur était empli de noirceur. Inutile de tenter de le raisonner, il était sincèrement convaincu d'avoir choisi le bon camp. Que ce fût par peur que Morgoth le détruise ou qu'il ait vraiment perdu la foi envers les Valars, cela n'importait plus. Aujourd'hui, il n'était qu'une incarnation du mal. Il avait ordonné à la Main Noire de détruire sa vie et celle de milliers d'autres innocents, et il comptait bien poursuivre jusqu'à l'anéantissement du monde.

« Peu importe ce que vous mijotez, je ne vous aiderai jamais ! »

Un rictus inquiétant déforma le beau visage de Sauron.

« Que tu le veuilles ou non, tu m'aideras, Morwen. L'Armée des Ténèbres te ramènera auprès de moi, je leur ai demandé de ne pas refermer le portail avant de t'avoir capturée. Et alors, je récupérerai le pouvoir qui est en toi. Cela me donnera assez de forces pour poursuivre mon œuvre. »

Morwen se tendit. Avait-elle bien entendu ? L'Armée des Ténèbres était-elle vraiment de mèche avec lui ? Elle n'eut pas le temps de lui demander. L'image de Sauron et du désert noir se brouilla.

L'enfant se réveilla en sursaut et vit que la chambre avait changé. Les rideaux étaient ouverts, la lumière du soleil entrait par la fenêtre. Et Sephiroth n'était plus là.

Prise d'un mauvais pressentiment, l'enfant sortit de la chambre et se dirigea vers l'escalier pour descendre, quand des voix l'arrêtèrent. Elle reconnut Genesis et son père, Mr Rhapsodos.

« Vous ne vous êtes toujours pas débarrassé des monstres ? » dit le père.

« Non, ils sont plus nombreux que prévu. »

Morwen se crispa. La voix de Genesis était tendue, il semblait partagé entre le malaise et la colère.

« Quelle déception… Sephiroth aurait sûrement déjà tout réglé, si toi et ce bon à rien d'Angeal ne vous en étiez pas mêlés. »

En entendant ça, Morwen se tendit. Quoi ?! Comment osait-il dire de telles choses ?

« Angeal n'y est pour rien et je… »

« Tu as choisi seul de quitter Banora pour devenir Soldat. Tu prétendais pouvoir faire mieux que Sephiroth, et pourtant, regarde-toi ! Tu n'as d'un Première Classe que le titre, pas la puissance ni la gloire. »

Là, c'en était trop. Morwen descendit l'escalier. Les adultes se tournèrent vers elle. Enfin, elle put dévisager le père de Genesis.

C'était un homme grand et maigre, plutôt quelconque, avec une moustache et des cheveux brun sombre. Il n'avait vraiment rien en commun physiquement avec son fils.

« Ah, la fille de Sephiroth ! » dit l'homme sur un ton affable. « Bonjour, petite. Bien dormi ? »

Morwen fut tentée de lui cracher une insulte, avant d'opter pour une attitude plus mature.

« J'ai bien dormi, oui », dit-elle sur un ton froid.

« Ah… Tu as été blessée ? » nota l'homme en voyant ses bandages.

« Oui, mais votre fils et ses amis m'ont sauvée. Heureusement qu'ils sont là. Ça me surprend, d'ailleurs ? »

« Ah bon ? »

« Oui. J'ai entendu dire que vous étiez un homme riche et influent, vous devez donc avoir les moyens de participer à la chasse aux monstres et protéger les habitants de Banora. Pourtant, vous restez caché ici, à l'abri, pendant que les Soldats font tout le sale travail. »

D'abord choqué, l'homme lui lança un regard indigné.

« Qu'as-tu dit ? »

« Vous êtes sourd ? Remarquez, à votre âge, c'est pas étonnant d'avoir des problèmes d'audition. »

Genesis étouffa un gloussement, puis s'approcha de Morwen pour poser une main sur son épaule.

« Viens, il faut changer tes pansements », dit-il en l'entraînant à l'étage.

Une fois seuls dans la chambre, Genesis s'agenouilla pour se mettre au niveau de l'enfant.

« Si Angeal et Sephiroth étaient là, ils te diraient de ne pas parler comme ça aux adultes. »

« Je vois pas pourquoi je devrais faire l'effort de le respecter. Il est odieux ! »

Bien qu'amusé, le jeune homme émit un soupir ennuyé.

« C'est vrai… Mais évite ça, tout de même. Je n'ai pas envie que tu aies des problèmes à cause de lui, il est déjà bien assez… enfin, tu vois. »

Morwen baissa la tête en signe d'excuse.

« Désolée, c'est juste que… je sais ce que ça fait d'endurer ce genre de commentaire. »

« Ah bon ? »

« Oui… J'ai connu ça autrefois, avant de vous rencontrer tous les trois. »

Elle se mordit la lèvre, réalisant soudain qu'elle en avait encore trop dit ou pas assez. Elle vit Genesis la fixer en silence, attendant qu'elle poursuive, mais elle n'en fit rien.

Le Soldat lui saisit doucement le menton pour la forcer à la regarder dans les yeux.

« Tu peux tout me dire, tu sais ? Peu importe ce que tu as vécu par le passé, jamais cela ne te fera atterrir chez Hojo. »

Morwen lui rendit son regard, essayant de déceler une lueur de malice dans ses yeux, mais il n'en fut rien. Pour la première fois depuis leur première rencontre, le Soldat était sincèrement gentil et attentionné.

« Je… J'aimerais en dire plus », souffla l'enfant. « Mais je… j'ai peur. »

« Peur de moi ? »

« Non. Peur que tu ne me croies pas. »

Elle caressa sa gorge, là où l'épée de la Main Noire l'avait tranchée dans son ancienne vie.

« Moi-même, il m'arrive de me demander si tout ça est réel ou si je ne suis pas déjà morte il y a longtemps. »

Genesis lui prit la main et la serra fort dans la sienne.

« Tout ça est réel, Morwen. Je suis réel et je veux t'aider. »

« Je sais… mais… »

Les menaces de Sauron et son ignoble rictus revinrent hanter son esprit. Puis ce fut le tour de Tangadion et des jumeaux. Leurs mauvais traitements, leurs critiques et leurs menaces… Genesis sentit la petite main trembler dans la sienne et resserra son étreinte.

« Mais quoi ? » demanda-t-il doucement.

Morwen retira sa main et détourna le regard.

« J'ai peur… » dit-elle, incapable d'ajouter autre chose.

Comprenant qu'elle n'en dirait pas plus, Genesis la regarda un instant, avant de faire quelque chose qui la surprit au plus haut point : il tendit les bras et l'attira contre lui.

« Quand tu seras prête, parle-moi, d'accord ? Promis, je t'écouterai. Et Angeal aussi. »

Surprise, Morwen mit un instant pour comprendre ses mots, puis elle lui rendit son étreinte.

« Merci », dit-elle dans un souffle.

Genesis la relâcha, puis la laissa se rendre dans la salle de bains pour se changer.

Tandis qu'il attendait, son PHS sonna. Il l'ouvrit et vit qu'il avait reçu un message d'Angeal.

« Les monstres sont revenus en force, ils attaquent le village par l'est ! Assure-toi que Morwen est en sécurité et dépêche-toi de nous rejoindre. »

Genesis raccrocha et voulut, sortir, quand il se rappela la présence de Morwen. Il se dirigea vers le bureau et trouva du papier ainsi qu'un stylo dans un tiroir.

Il nota rapidement un mot pour qu'elle ne s'inquiète pas, puis il quitta la chambre.