EN THÉORIE

Attention : contenu sexuel dans ce chapitre et langage grossier


État de Washington, Projet Manticore, bureau d'Elizabeth Renfro, jeudi 16 juillet 2020, 7h05


ALEC

« Je frappe à la porte. J'attends qu'on me dise d'entrer. J'entre, je ferme derrière moi et je me mets au garde à vous. »

_ X5-494, au rapport.

_ Repos, soldat, dit Renfro sans lever les yeux de ses papiers.

« J'attends. La directrice de Manticore était une harpie sadique. Ce n'est jamais bon signe d'être convoqué dans son bureau. Je tourne et retourne dans ma tête tous mes souvenirs, à la recherche d'une faute que j'aurais commise. Elle se lève et vient se placer face à moi. »

_ Tu as fière allure, soldat.

« Je ne réponds rien. Elle aime faire des remarques déstabilisantes. »

_ J'ai décidé de t'inclure dans le programme de reproduction. Tu es, à présent, un mâle reproducteur.

« Pardon ? »

_ Comme tu le sais, un groupe de X5 renégats s'est introduit dans notre laboratoire de génétique, il y a quelques mois, et a fait sauter l'installation. Nous n'avons rien pu sauver. Afin de pouvoir continuer notre mission, nous avons un besoin vital d'embryons génétiquement améliorés. Nous avons donc choisi de faire s'accoupler les X5. As-tu entendu parler de cela ?

« Évidemment, vieille sorcière. »

_ Très peu, Madame, réponds-je.

_ Ta mission est de copuler quotidiennement avec la femelle que nous t'avons attribué jusqu'à ce qu'elle soit enceinte.

« On peut compter sur la directrice pour rendre dégoûtant un truc qui pourrait être sympa. Allez, 494, ça pourrait être cool d'avoir officiellement un plan cul dans l'enceinte de Manticore. »

_ On pourra quand-même te confier quelques missions ponctuelles de courtes durées et à courtes distances, ceci étant. Ta mission prioritaire est la copulation avec ta femelle. Une heure journalière de ton planning y est allouée.

_ À vos ordres, Madame.

« Elle ne parle plus et me regarde. Je regarde droit devant moi. Je vois le mur derrière elle et je fixe un point. Il est interdit de la dévisager ou de la regarder dans les yeux. Je ne parle pas non plus. Il est interdit de parler sans y avoir été invité. »

_ Je t'ai attribué la X5-452.

« Là, je craque. »

_ Madame ?

_ Oui, soldat ?

_ Demande permission de faire part de mon…

« Je cherche mes mots. »

_ Désaccord ? Demande-t-elle.

« Je n'ai pas le droit d'être en désaccord avec mes supérieurs. »

_ Ce n'est pas le terme que j'emploierai, Madame.

_ Et quel terme utiliserais-tu ?

« Alerte, 494, alerte ! Réfléchis avant de parler. »

_ Puis-je faire part de mon étonnement quant au choix de cette femelle, Madame ?

_ Vas-y, soldat. Fais-moi part de ton étonnement.

« OK. On y va pour un exercice d'équilibriste. »

_ La X5-452 n'est-elle pas l'un des soldats qui nous a trahi en 2009 ? Ne devrait-elle pas être aux arrêts ou exécutée ?

_ C'est effectivement une des traîtres de 2009.

« Et donc ? »

_ Pour ton autre question… Je répondrai que le simple fait de l'avoir capturée et de l'obliger à nous obéir est une punition bien plus efficace car plus… douloureuse pour elle.

« Et, elle sourit à disant ça. Quelle foutue sadique ! »

_ D'ailleurs, elle faisait partie du commando d'assaut qui a pris pour cible le laboratoire. Elle voulait arrêter le projet Manticore. J'imagine la tête qu'elle fera lorsque tu lui expliqueras la mission qui vous incombe à tous les deux…

« Attendez ? Parce que c'est moi qui vais devoir l'informer de ça ? »

_ Elle n'a pas été briefée, Madame ? Demande-je aussi neutralement que possible.

_ Elle le sera par toi. Tu es son mâle reproducteur à présent. Vous allez avoir… disons, une relation privilégiée.

« Une relation privilégiée ? »

_ Bien, Madame.

_ Nous lui avons fait passer un temps non négligeable en Psy-Ops, mais je pense qu'elle cherche juste à gagner du temps. Ses paroles ne trompent pas. Elle n'est pas fidèle au projet Manticore. Elle se retournera contre nous à la première occasion et cherchera de nouveau à fuir.

« Donc, vous m'envoyez chez l'ennemi. »

_ Il me semble que tu es l'un des soldats formés aux techniques d'approche et de persuasion par séduction.

_ En effet, Madame.

_ Il me semble aussi que c'est un domaine dans lequel tu es très doué.

« Ne pas répondre à la provocation. Elle sourit d'un air amusé. »

_ Tu as un physique très attirant pour la gent féminine. Utilise tes talents sur elle.

« Arrête de me reluquer, vieille peau. »

_ Oui, Madame.

_ Convaincs-la que son avenir est ici, à Manticore. Ou, si tu préfères, convaincs-la de rester pour toi, que tu es son prince charmant.

« Elle est sérieuse, là ? »

_ Ah, désolée. Ce n'est pas un terme que tu dois comprendre.

« Elle prend mon silence pour de l'incompréhension… Si, je sais ce qu'est un "prince charmant". Mais, je ne vois pas comment je pourrais faire avaler ça à une fille, encore plus à une traîtresse de 2009, tout en lui disant qu'on est obligé de baiser tous les jours pour qu'elle tombe enceinte et que c'est une sorte de punition pour elle. »

_ Fais-lui croire que tu es son grand amour. Elle a eu une relation à l'extérieur. Je sais qu'elle s'y accroche. Mais, je suis certaine que tu sauras te montrer suffisamment habile pour la détourner de ça.

« Fabuleux. Tout simplement, fabuleux. Je lui dis que les licornes existent tant qu'on y est ? »

_ Donc, tu devras copuler quotidiennement avec elle, la remettre sur les rails de l'obéissance et nous signaler toutes… infractions de sa part.

« Sérieusement, vous ne voulez pas que je sabote une centrale nucléaire ou que je m'introduise dans un sous-marin Russe ? En théorie, ce serait plus simple à faire. »

_ À vos ordres, Madame.

_ En même temps… Je doute qu'elle se montre coopérative. N'hésite pas à te montrer violent avec elle.

« Quoi ? Non, mais, vous avez picolé quoi avant de venir ? »

_ Elle a quitté Manticore il y a plus de dix ans. Elle n'a jamais terminé sa formation. Tu es plus fort, plus rapide et mieux entraîner qu'elle. Elle a bien sûr appris quelques petites choses dehors, mais tes résultats aux tests d'improvisation sont excellents. Je ne doute pas que tu prennes facilement le dessus sur elle.

« Ça vous arrive de vous entendre parler ? »

_ Bien, Madame.

_ Ou tu peux te simplifier la vie.

« Je la regarde d'un air interrogateur. »

_ Je ne comprends pas, Madame.

_ Tu l'attaques en premier. Tu la mets hors d'état de nuire et tu t'occupes de la copulation.

« Bordel ! Ça s'appelle un viol ça ! »

_ Oui, c'est une excellente idée, dit-elle de façon satisfaite. On doit lui faire comprendre qu'elle nous appartient. On va la détruire psychologiquement… Et, tu vas nous y aider, 494.

« Je ne peux rien dire de politiquement ou militairement correct à ça. Je me contente de faire un salut militaire et de me mettre au garde à vous. Elle est fière d'elle, cette salope. »

_ Ta mission commence cette nuit. Tu devras te rendre à sa cellule à minuit et tu as une heure pour faire ce qui doit être fait. D'ici que tu la retrouves, tu as quartier libre pour pouvoir préparer ta stratégie. Je veux un rapport demain matin.

_ Oui, Madame.

_ Rompez, soldat.

« Je sors, raide comme un piquet. Je marche lentement jusqu'à mes quartiers. Cette conversation m'a donné la gerbe. C'est une bonne chose que j'ai été convoqué avant d'avoir eu le temps de finir mon petit déjeuner. »

« Un viol… Je préférerais qu'elle me renvoie en Psy-Ops. Qu'est-ce que je raconte, moi ? Il n'y a pas moyen pour que je retourne en Psy-Ops. Ça fait des mois et des mois que je bataille pour être un bon soldat. Pour être le meilleur soldat. Et, comment ils me félicitent ? En me demandant de violer une fille ! Je suis certain qu'aucune fille ne mérite ça. Même pas une évadée de 2009. C'est la directrice Renfro qu'il faudrait envoyer en Psy-Ops. Elle est totalement cinglée. Elle a pensé à passer des tests comportementaux ? Je n'ai pas l'intention de lui obéir docilement sur ce coup-là. Mais, je ne peux pas ouvertement désobéir non plus. La X5-452 et sa rébellion me semblent bien sympathique d'un seul coup… Et voilà, je délire. C'est à cause d'elle et de ses copains s'ils nous ont serré la vis il y a onze ans. Et, c'est à cause d'elle si ce programme de reproduction existe. Et, pourquoi ce n'est pas elle qui irait en Psy-Ops ? Argh ! Je ne souhaite ça à personne non plus… sauf à Renfro. Mais pas à une évadée de 2009. Merde ! Je ne l'ai même rencontrée qu'elle est déjà en train de me pourrir la vie et de me prendre la tête. C'est qui cette nana ?! »

o0o0oOo0o0o

« Je reste allongé sur mon lit à réfléchir jusqu'à l'heure du repas. Mon cerveau est désespérément vide. Je n'ai pas faim, mais il faut que je mange. Un bon soldat est un soldat bien nourri. Je retrouve d'autres soldats au réfectoire. On y parle peu, comme toujours. Le copinage n'est pas vraiment le bienvenu ici. Mais, il y en a que j'aime bien. Je retrouve un brun, X5-510, et une blonde, X5-133, avec qui j'ai déjà travaillé en OpEx à la frontière entre le Kazakhstan et le Turkménistan. Je pose mon plateau et m'assois près d'eux. Ils me dévisagent. »

_ Ça va, 494 ? demande-t-il à voix basse.

_ Programme de reproduction, chuchote-je.

_ Ça n'a pas l'air de t'emballer… dit-il. Pourtant, d'habitude, tu es plutôt pour…

_ Je n'aime pas qu'on me force la main.

_ Tu sais, dit-elle doucement, ce n'est pas si mal. Nous, on y trouve du… plaisir.

« Je manque d'avaler mes pâtes de travers. »

_ Parce que vous en faites partie et vous êtes ensemble ?

« Elle a un sourire gêné et se plonge dans son assiette. Lui, je le regarde avec insistance. Il ne se détournera pas. »

_ C'est un peu bizarre d'en parler… dit-il.

« J'avais noté qu'ils étaient plus proches récemment. »

_ Ça renforce les liens ? Demande-je.

« Lui aussi sourit et se plonge dans son assiette. Comme ça doit être bizarre. Ils sont frère et sœur d'arme… En même temps, ce n'est pas comme si ça ne m'était jamais arrivé. Ça m'est même arrivé plus de fois que ça aurait dû. Mais, j'ai toujours choisi qui, quand et où. »

_ Tu la connais ? Demande-t-elle.

« Je dodeline de la tête. Mieux vaut taire le fait que ce soit une traîtresse. On pourrait dire que je fraternise avec l'ennemi. »

_ Elle est d'une autre unité.

_ Depuis quand c'est un problème pour toi ? Demande-t-il.

« Oui, depuis quand ? En théorie, je suis toujours partant pour une bonne partie de jambe en l'air. Cette fille me rend totalement débile. Et dire que je ne l'ai même pas encore vu. Je me comporte comme si c'était ma première fois. Pourquoi je flippe à mort ? »

o0o0oOo0o0o

« Le soir est là. Je marche dans le couloir pour aller à sa cellule. Je suis allé faire du sport à la salle d'entraînement. Je suis gonflé à bloc… en théorie seulement. J'ai le tract comme ce n'est pas permis. Allez, 494 ! Tu y vas ! Dans le meilleur des cas, tu passeras un bon moment. Dans le pire des cas… Et si elle ne me fait pas d'effet ? Ne panique pas ! Allez, 494 ! C'est rien. C'est juste physique. Mécanique. Tu sais comment te motiver mentalement pour assurer. Tu le fais et c'est bon. Si elle ne te plaint pas, tu pondras une excuse débile et on t'enverra au Kosovo ou un truc du genre. Qu'est-ce que je ne donnerai pas pour être sur une zone de guerre… Au moins, je saurai quoi faire. »

« Je m'approche toujours plus. J'aperçois Bob, l'un des gardiens avec qui je fais du trafic. Il est forcément au courant de la raison de ma venue. Fantastique. Il est bavard comme une pie. D'ici le matin, tous mes clients seront au courant. Je soupire. J'essaie de garder une expression neutre. Il sait où je vais. Il m'attend. Il regarde sa montre : minuit, le vendredi 17 juillet. Il m'ouvre la porte et j'entre. »

« Je regarde la fille. Elle est plutôt jolie. Elle me regarde avec des grands yeux. »

_ Ben ? Demanda-t-elle.

_ Quoi ?

_ Tu ressembles à une personne que j'ai connue.

_ Matricule est 494, dis-je en avançant un peu.

« Alors que je vais vers le fond de la cellule en essayant de ne rien laisser paraître de mon malaise, elle va vers la porte. »

_ Lui, c'était 493, dit-elle dans mon dos.

« Bordel ! J'avais oublié qu'elle faisait partie de l'unité de ce cinglé ! »

_ Ton jumeau, sûrement.

« Elle a dû le revoir depuis leur enfance et elle l'a reconnu en moi. »

_ 493. Ton ami le traître est devenu dingo ?

_ Comment tu peux le savoir ?

« Je la regarde me regarder avec de grands yeux interrogateurs. »

_ À cause de lui, on m'a observé pendant six mois. Pour savoir si c'était génétique.

« Ça y est. Elle me tape sur le système. Je m'avance vers elle. »

_ Il semble que dix ans dehors lui aient fait perdre la raison.

« On se tourne autour. Sa démarche est féline. Elle se croit impressionnante. Ça me fait sourire. »

_ Je crois plutôt que c'est cet endroit.

_ Si tu veux.

« Insolente, voilà ce qu'elle est. Elle m'agace à nouveau. »

_ Allez, finissons-en, dis-je.

« Je commence à enlever mon T-shirt. »

_ Qu'est-ce que tu fais ?

« À ton avis ? »

_ On nous a mis ensemble. Je suis ton mâle reproducteur.

_ Mon quoi ?

« Tu es sourde en plus de ça ? »

_ On est censé copuler tous les soirs jusqu'à ce que tu sois enceinte.

« Je balance de mauvaise grâce mon T-shirt sur la couchette. »

_ C'est écœurant.

« Non, sans blague ? »

_ C'est ta faute. Vu que tu as détruit la base de données de l'ADN, maintenant, ils ne peuvent plus implanter d'embryons bricolés.

« Elle m'agace à un point ! Je n'ai pas envie de faire d'effort pour être galant. »

_ Déshabilles-toi ! Ordonne-je.

_ Sors de ma cellule.

« Je ne demande que ça. Il faut en finir rapidement. »

_ On a reçu des ordres.

« Je commence à vouloir défaire ma ceinture. Et là, cette peste me file un coup de pied dans l'estomac. Et, je me retrouve le dos collé au métal froid de la porte. »

_ Non, mais, t'es malade ?

_ C'est le seul contact physique de j'aurais avec toi.

« Elle m'énerve. »

_ C'est quelque chose qui ne me plaît pas à moi non plus tu sais…

« C'est quoi ce regard ? Tu crois quoi ? »

_ Tu as passé la moitié de ta vie comme une clocharde. Tu pourrais me contaminer.

_ Tu peux te raconter tout ce que tu veux pourvu qu'on arrive à s'entendre.

« Elle attrape mon T-shirt et me le colle en pleine poitrine. Elle a l'air furax. Elle est marrante finalement. Je pourrais m'amuser à la faire tourner en bourrique. »

_ Très bien. Tu vas devoir te calmer.

« Elle me dévisage. Aha ! Tu ne t'attendais pas à ça hein, 452 ? »

_ J'avais choisi en option langage courant quand j'ai été pris pour les missions en solitaire.

_ Oui, pour des assassinats quoi ?

« Je remets mon T-shirt. »

_ C'est mon travail.

« Qu'est-ce que tu crois ? Il y en a qui ont dû travailler pendant que tu jouais dehors. »

_ Si tu veux me casser la figure, vas-y.

« J'entends Bob. Son visage apparaît dans la lucarne de surveillance. »

_ Il me lit des poèmes romantiques. Ça va me mettre en condition.

« A-t-on jamais vu plus mauvaise baratineuse que ça ? »

_ Tu n'as rien pour moi ? Me demande Bob.

« Je lui jette un coup d'œil. Au moins, elle a l'air de savoir que son excuse est nulle. Je fais passer le comprimé rouge entre les barreaux. »

_ Magnifique.

« Bob me paye, comme d'habitude. C'est un de mes clients les plus réguliers. Je sens qu'elle nous regarde faire notre petite transaction. »

_ Rends-moi service, donne ça à Vic.

« Je fais passer trois cigares dans l'ouverture. »

_ Il pourra me payer plus tard.

« Vic aussi est un client régulier. Il part du principe que les bons comptes font les bons amis. Je sais qu'il me payera. »

_ Pas de problème, me répond Bob.

_ Merci.

_ De rien.

« Bob s'en va. Je me retourne et je tombe sur le regard interrogateur de 452. »

_ Il adore les vitamines qu'on nous fait prendre le matin, dis-je pour répondre à sa question silencieuse.

_ Et, je ne te demande pas d'où viennent les cigares.

_ J'ai mes petites combines.

« Elle fait une grimace. Elle ne s'attendait pas à ça. Et oui, 452, je ne suis pas le modèle du soldat stéréotypé et sans âme. Je suis moi. Et, je suis suffisamment malin que tromper tout le monde… Je lui fais un grand sourire charmeur et elle me répond par une moue boudeuse. »

_ Alors… on fait quoi ?

_ Comment ça, "on fait quoi" ? me demande-t-elle.

_ On reste sur notre unique contact physique et tu repars en ré-endoctrinement ?

« Ça, c'est bas. J'en suis conscient. En même temps, c'est ce qui risque de se passer si elle ne coopère pas. Elle ne répond rien et ne bouge pas. »

_ Qui ne dit mot, consent ?

« Aucune réponse. Elle détourne le regard. J'ai même l'impression qu'elle rougit. J'approche. Je ne suis plus qu'à quelques centimètres d'elle. Elle ne bouge toujours pas. Je pose les mains sur ses hanches. Toujours rien. Je glisse les mains sous son T-shirt. Elle a la chair de poule. Lentement, je lève son haut et je lui enlève. Je le jette sur la couchette. Elle s'est laissée faire, mais ne me regarde pas. Elle a des petits seins, pourtant sa poitrine est pleine de promesses. Sa silhouette est gracile. Sa peau est douce. Elle est belle. Toutes les femelles X5 le sont. Mais, j'avoue, il y a un petit quelque chose de différent, un quelque chose qu'elle a en plus… Elle me fait envie. Je me penche à son oreille et je lui murmure :

_ N'aies pas peur. Je ne te ferai jamais de mal.

« Je l'embrasse dans le cou, juste en-dessous de l'oreille. Elle frissonne encore. Elle sent bon. Je ne m'en étais pas aperçu. Lorsque je m'écarte, elle me regarde droit dans les yeux. Je pourrais bien me noyer dans un tel regard. Renforcer les liens ? J'ai fait le premier pas. Mais, elle est visiblement exigeante. Et potentiellement dominatrice.

« Très bien, 452, je capitule pour cette manche. J'enlève mon T-shirt et il va rejoindre le sien. Elle me détaille. Elle aime ce qu'elle voit, je le sais. Je sais que je suis parfait. Puisque j'ai son attention, je continue. Je défais ma ceinture. J'enlève mes rangers. Je me sépare de mon pantalon et de mon caleçon en même temps. Elle a les yeux qui se baladent sur tout mon corps. Je sais qu'elle n'a rien à redire. Je desserre sa ceinture et son pantalon lui tombe aux chevilles, dévoilant une simple culotte en coton. Elle a de belles courbes. Je la caresse doucement. J'aime la sentir frissonner sous mes doigts. Elle n'a pas froid. Ce sont des frissons de plaisirs. Je suis doué à ce jeu. Mais, je veux des frissons de désirs à présent.

« Je me colle à elle. Je continue de la caresser. Avec ma bouche, j'embrasse son cou, son front, ses joues, son nez… Tout sauf ses lèvres. Je laisse monter son désir. Ce sera à elle de venir vers moi pour ça. Elle respire de plus en plus vite. Elle me caresse. Elle semble vouloir découvrir tout mon corps avec les mains, comme une aveugle le ferait. Elle parcourt chaque millimètre carré de moi. Elle est à la fois douce et avide. Je ne savais pas qu'une fille pouvait être les deux à la fois. Et, c'est finalement chez moi que le désir monte.

« Et son odeur ! Il n'y a ni parfum, ni huile ou produit de beauté ici. Le savon pour nos douches est insipide. Mais, du coup, je sais que l'odeur que je sens est la sienne, et exclusivement la sienne. J'aime son odeur.

« Je glisse une main dans sa culotte. Elle prend un peu appui sur moi et écarte légèrement les cuisses pour me permettre de glisser un doigt, puis deux en elle. Sa respiration se transforme en gémissements. Ses mains ne parcourent plus mon corps. Elles le connaissent à présent. Elles caressent mon intimité et elles sont douées. 452 tourne enfin volontairement le visage pour intercepter mes lèvres avec les siennes. Dès que je les ai vues, pleines et charnues, j'ai su que j'allais aimer les embrasser. Je ne m'étais pas trompé. Très vite, nos langues ont commencé à se découvrir mutuellement. Lorsqu'elle me mord la lèvre inférieure, je sais qu'elle est aussi prête que je le suis. Alors, je descends tout en l'embrassant dans le cou, sur la poitrine, sur le ventre…

« À mesure que mes lèvres descendent, mes mains baissent le dernier rempart cotonneux de son intimité jusqu'au sol. Je m'accroupis devant elle. Je lui ôte les rangers, le pantalon, la culotte, tout en l'embrassant entre les cuisses. Ses gémissements sont plus forts à présent. Du coin de l'œil, je vois tomber son soutien-gorge par terre. Ça me faire sourire car elle la fait de sa propre initiative. Elle me caresse la nuque et les épaules, puis me tire vers le haut. Nous nous enlaçons, tout en nous embrassant. Je sens ses tétons durcis contre moi, tout comme elle doit me sentir dur contre elle. Je passe les mains sous ses fesses et la soulève. J'aime le poids qu'elle fait. Elle enroule les jambes autour de ma taille. La couchette est à moins de deux pas, mais j'ai envie de la porter.

« Je l'allonge tendrement et me mets sur elle. Jamais je ne m'étais senti aussi bien entre les cuisses d'une femme. Je plonge la tête dans son cou et ses cheveux. Cette odeur ! C'est officiel, je suis un drogué : il m'en faudra toujours plus. Je la respire profondément. Elle cabre le bassin en gémissant. Elle a envie que je vienne en elle. »

_ Patience, 452.

_ Je m'appelle Max.

_ Comme tu voudras.

_ Il te faut un nom également, gémit-elle.

« Est-elle vraiment obligée de parler maintenant ? Je n'ai pas envie de parler. »

_ Mais, j'ai mon matricule, 494.

_ Hum, ça ne te va pas.

« Je ne comprends pas. Tant pis, qu'elle fasse ce qu'elle veut, tant qu'elle est à moi… »

_ Je vais t'appeler Alec, dit-elle tout bas.

_ Alec, répète-je.

_ Un nom parfait pour un arrogant.

« Ça me fait sourire. Alors, je lui réponds :

_ Je devrais m'y faire.

« Je recommence à l'embrasser pour l'empêcher de se remettre à discuter. Elle essaye de revenir à la charge, mais je lui occupe la bouche de ma langue. Je la contrains au silence. Je ne tiens plus, j'ai trop envie d'elle à présent… »

« Une seconde ? Il y a un truc qui cloche… Ne devrait-elle pas dire : "Tant mieux, parce que j'allais te proposer Dick, du gland" ?

« Attends une minute, Alec. Ça ne s'est pas déroulé comme ça ta rencontre avec Max. Tout ce qui vient de se passer n'est pas réel. Ce n'est plus un souvenir. C'est comme si… c'était un rêve… »


Canada, Colombie-Britannique, complexe Genetic Care, dimanche 20 mars 2022, tôt le matin


ALEC

Alec ouvrit les yeux en se réveillant.

« Et merde » pensa-t-il.

Il poussa un profond soupir. Il referma aussitôt les paupières. Il venait de faire un rêve érotique. Un rêve tout à fait convaincant à en juger par l'étroitesse de son pantalon au niveau de l'entrejambe. Il avait encore l'impression de sentir l'odeur de Max tout autour de lui.

« C'est quoi ce trip que je me paye ? »

Il ne faisait jamais de rêves érotiques. Ça, c'était pour les frustrés. Il était beaucoup de chose, mais sexuellement frustré, certainement pas. Et, pourquoi avait-il rêvé de Max ? Ça lui était déjà arrivé. Mais, il rêvait qu'elle l'engueulait, qu'elle le frappait, qu'il se rebellait, qu'il frappait en retour et qu'il lui mettait la raclée de sa vie. Il savait qu'il en était capable… en théorie. Mais, il ne lui aurait jamais mal. Au début, peut-être, lorsqu'ils ne se connaissaient pas. Mais plus maintenant. Même lorsqu'ils s'étaient battus, dans la cage, sous l'influence de Mia, l'agent secret Psy, amoureuse d'un type de la mafia, il ne l'avait pas réellement combattue. Il n'avait pas voulu la blesser. À présent, il se contentait de la laisser se défouler sur lui, parant juste le nécessaire pour éviter les blessures sérieuses. Ça n'avait rien d'érotique, jamais. Elle ne faisait rien pour ça. D'accord, elle était super sexy. Mais pas plus qu'une autre. Et, elle avait un caractère de merde. Beaucoup plus que plusieurs autres, même réunies.

o0o0oOo0o0o

Son dos était raide. Il lui fallut quelques minutes pour situer le contexte. Max et lui étaient en mission à la fois pour le Veilleur et pour Terminal City. Ils étaient dans le laboratoire secret et souterrain d'une compagnie pharmaceutique canadienne, dans les montagnes au sud-ouest du Canada, non loin de Fort Saint John. Ils avaient roulé en moto pendant plus de treize heures, dans un froid digne de l'air glaciaire.

La compagnie pharmaceutique avait réussi à se procurer des échantillons d'ADN transgénique de Manticore. Ils avaient l'intention de créer leur propre programme transgénique et de créer une armée privée à louer. Le Veilleur voulait éviter ça. Les scientifiques canadiens avaient l'intention de traquer des spécimens génétiquement améliorés, de les capturer et de les étudier en les disséquant. Ça, Terminal City voulait l'éviter. Par chance, le projet canadien était soumis à une forte contrainte financière. Avec l'échec public et officiel du projet Manticore, le gouvernement américain prenait cher. Le gouvernement canadien refusait formellement de se mêler de ce remix. Mais, les investisseurs privés ne manquaient pas. Cependant, avec un sabotage adéquat, la disparition des échantillons et des données, le projet s'écroulerait sans risque de reprise. Il fallait tuer ça dans l'œuf. C'était la mission.

La compagnie avait vraisemblablement des personnes cohérentes à sa tête qui avaient analysé des données. Comme les sabotages avaient toujours lieu la nuit et non le jour, l'effectif de gardes armés nocturnes était plus important que l'effectif de jour, qui n'était pas moins imposant. Alors qu'en général, c'était le contraire. Sauf que Max et Alec étaient au courant. Ils avaient pénétré de nuit dans le complexe, à la faveur de l'obscurité, sans attirer l'attention, loin des zones surveillées. Ils attendaient le jour pour passer à l'action.

Ils patientaient dans un cagibi à fournitures de bureau, qu'ils avaient fermés de l'intérieur. Ça devenait une habitude d'attendre, coincés ensemble, dans quelques mètres carrés. Ils avaient décidé de se reposer et Alec s'était endormi, à moitié assis, à moitié couché sur le dos.

Alec avait toujours les yeux fermés. Si Max découvrait qu'il avait une érection en pleine mission, elle lui ferait la misère. Il devait se concentrer pour se calmer. Il savait le faire… en théorie.

« Bon sang ! Pourquoi j'ai son odeur dans le nez ? Ça m'empêche de me concentrer ! » pesta-t-il intérieurement.

Ce n'était pas qu'il connaissait son odeur par cœur… En fait, si. Il la connaissait. Il avait déjà un ressenti accru de la présence de la jeune femme depuis plus d'un an et demi maintenant. Il n'avait eu besoin que de quelques mois après leur rencontre pour la connaître. Même les yeux fermés, si elle était dans la même pièce que lui, il savait toujours où elle était et à quelle distance de lui. Mais, il y était de plus en plus sensible. Leurs derniers rapprochements, plus ou moins volontaires, ces nuits à dormir ensemble avaient exalté ses sens. Et, il devait aussi s'avouer que cela lui avait plus plu qu'il n'aurait pu le dire. Il aimait sa présence et son odeur. À plusieurs reprises, il s'était surpris à la détailler…

« STOP ! » pensa-t-il.

Max était Max. Même si elle était, des fois, plus gentille la nuit, elle n'en était pas moins garce le jour. Et, elle était avec Logan. C'était un type bien, à défaut d'être cool et Alec le respectait. En même temps, il avait toujours trouvé que, malgré qu'ils soient ensemble et libres de tout virus, l'odeur de Logan n'imprégnait pas franchement le corps de Max. Peut-être que Logan est coincé sur tous les pans de sa vie, y compris dans le se…

« Alec ! Arrête de penser avec ta queue ! » s'ordonna-t-il. « C'est quoi ce délire ? Pourquoi je ne respire qu'elle ? La pièce est en recyclage d'air ou quoi ? ».

Il sentit une main se poser sur son genou gauche.

« Non, Max. Tu ne m'aides pas là… »

_ Donnes-moi encore cinq minutes avant de me réveiller, lui demanda-t-il, sans ouvrir les yeux.

« Même si je n'ai pas l'impression que cinq minutes ne me suffiront pas pour mettre mon soldat au repos… ».

La main de Max partit lentement de son genou, par l'intérieur de sa cuisse, et remonta vers l'aine. Alec se rassit brusquement et se cogna la tête. Il avait oublié qu'il était sous une étagère. La main de Max avait arrêté son ascension, mais elle était toujours posée dans l'intérieur de sa cuisse. Alec ouvrit les yeux, contrarié, prêt à engueuler Max, à voix basse, mais à l'engueuler quand-même.

Mais, ce qu'il avait sous les yeux le terrifia. Max le regardait intensément, un léger sourire était dessiné sur les lèvres, ses pupilles étaient dilatées, rendant son regard plus profond que jamais, elle avait quelques gouttes de sueur qui perlaient sur ses tempes, sa respiration était plus rapide qu'elle ne l'aurait dû. Il comprenait à présent son rêve et l'odeur persistante de Max. Il était enfermé dans une pièce de quelques mètres carré avec Max en chaleur.

Max se pencha pour l'embrasser. Il la stoppa, bras tendus, les mains sur les épaules. Il était presque sûr qu'elles allaient prendre feu.

_ Max, je crois qu'on a un problème.

_ Oui, dit-elle sensuellement. J'ai froid. Réchauffe-moi.

_ Il ne fait pas froid… du tout. Tes capteurs thermiques sont faussés à cause d'une trop forte charge phéromonale.

_ Ce n'est pas grave, dit-elle. Tu pourrais m'arranger ça…

_ Non ! Pense à Logan, répondit-il en retendant les bras. Vous recommencez tout juste à vous parler. Tu ne dois pas gâcher ça.

_ Je n'ai pas envie de Logan, là… C'est toi que je veux…

_ Non. C'est juste parce qu'il n'y a que moi ici.

_ En fait, je sens plein d'autres hommes chargés de testostérone ici. Mais, c'est toi que je désire.

_ Je suis flatté, vraiment…

_ Tu as eu plein d'autres filles. Tu ne veux pas m'ajouter à ton tableau de chasse ?

_ Non, ce n'est pas bien. Pense à Logan, vilaine fille.

Il avait voulu dire ça sur un ton autoritaire ou sévère, mais il en douta en voyant le sourire de Max s'élargir franchement. Elle susurra :

_ Quand je suis bonne, je suis très bonne. Mais, quand je suis vilaine, je suis encore meilleure.

« Putain de bordel de merde ! Est-ce qu'elle se rend compte de ce qu'elle vient de dire, de comment elle vient de le dire et de l'effet que ça fait ? » hurla-t-il dans sa tête.

_ Embrasses-moi, demanda-t-elle.

« Surtout pas ! Je vais devenir fou si je fais ça et je n'arriverai plus à résister. Je ne sais même pas comment je tiens, là ! Je suis déjà submergé de phéromones.»

_ Je ne crois pas que ce serait raisonnable. On est en mission et…

« C'est ça ! Je dois me focaliser sur la mission. »

_ On est en terrain ennemi, Maxie. Tu sais très bien que si on commence, on ne s'arrêtera plus.

_ J'y compte bien…

_ Tu es en chaleur, tu pourrais tomber enceinte.

_ Je sais mettre un préservatif sans utiliser mes mains… susurra-t-elle.

Alec fut assailli d'images de Max en train de lui mettre un préservatif sans les mains, utilisant uniquement avec sa bouche et ses lèvres charnues…

« Arrête, 494 ! N'y penses pas ! »

_ Tu as dit que tu n'étais qu'un homme et que tu ne pourrais pas me résister longtemps… Je le sens… tu as envie de moi…

_ Tu n'imagines pas à quel point, répondit-il.

« Ça y est. Je sais comment faire. Je vais la baratiner et comme son cerveau est déconnectée, elle se laissera avoir. »

Il s'approcha de son visage. Il pouvait presque ressentir la chaleur qu'elle irradiait.

_ C'est vrai. J'en meurs d'envie, chaton, si tu savais…

Elle soupira de désir.

_ Mais, je veux que nous deux ce soit mieux que grandiose. Regarde où on est.

_ On pourrait prendre notre entrée ici. Et, en rentrant, on ferait le plat et le dessert…

_ On n'arrivera pas à faire ça discrètement. On est trop… trop tout.

_ Alec… murmura-t-elle.

« Bordel ! Est-ce qu'elle se rend compte de ce que ça fait d'entendre son nom ainsi ! »

_ Je ne veux pas être interrompu, et encore moins risquer ta vie, mon amour. Ça me déchire de dire ça, mais il faut attendre.

_ Jusqu'à quand ?

Les mains d'Alec cédèrent et Max en profita. Elle fut assise sur lui en une fraction de seconde. Il eut tout juste le temps de tourner la tête et les lèvres de Max s'écrasèrent dans son cou. Mais, ce n'en était pas moins pire. Alec regretta de porter un col roulé car ça obligeait Max à l'embrasser sur l'arête de la mâchoire. Elle était beaucoup trop prêt de sa bouche.

_ Plus bas, je t'en supplie… dit-il.

Max descendit son col roulé d'une main pour l'embrasser et le lécher. Son autre main le parcourait avec un appétit certain.

« Mince. Je n'aurais pas dû lui dire ça. Elle est franchement plus habile qu'elle ne le laissait paraître dans la boîte de strip-tease pendant la mission de sauvetage de la petite sirène. »

Alec savait qu'il fallait qu'il trouve un moyen de la ramener à Seattle. Et, après ? Elle ne s'arrêterait pas pour autant. Comment faisait-elle avec ses chaleurs avec Monsieur le-bon-moment-ne-s'est-jamais-présenté-alors-qu'on-s'est-fréquenté-pendant-un-an » ?

« Le trou de cul de Darren, le gentil Eric… c'était qui l'autre déjà ? Rafer. Drôle de nom… ».

Il soupira, ou il gémit. Il n'en avait aucune idée. Il avait les mains sur elle et avait machinalement commencé à la caresser. Il aimait ce qu'il avait sous les mains. Max était à présent en train de lui faire un suçon dans le cou. Plus elle apposait sa marque et moins il avait envie de résister. Sa résistance ne serait bientôt plus qu'un lointain souvenir. Il n'avait d'ailleurs plus envie de lutter. Il était dans un état second lorsqu'il se rappela que la Boo de Max portait des foulards en ce moment pour cacher les multiples suçons de son nouveau crush.

_ Original Cindy ! S'exclama Alec.

Max se redressa d'un coup et le regarda avec un air sévère. Il devait emmener Max chez Original Cindy. Elle s'était vantée de pouvoir faire obéir Max au doigt et à l'œil pendant ses chaleurs.

_ C'est un fantasme, j'avoue, dit-il à Max.

_ Tu fantasmes sur une lesbienne ?

_ Quoi ? Non, je ne désire que toi, mon cœur. Mais, depuis que je vous connais toutes les deux, si… proches et fusionnelles, j'ai toujours eu envie de vous voir ensemble.

_ Je n'aime que les hommes.

_ Mais, tu le ferais pour moi, non ? Juste un tout petit effort pour moi ? Demanda-t-il en lui faisant les yeux doux. Je me disais que tu pourrais faire ce tout petit truc pour moi… Et, ensuite, je pourrais faire un petit truc pour toi…

_ Comme quoi ?

_ Je connais quelques petites choses qui doivent être interdites dans quarante-neuf états américains…

_ Une petite chose ?

_ En paiement de ta petite chose…

_ Et, ensuite ?

_ Et, ensuite, on pourrait faire les autres petites choses, ensemble.

Max se mordit les lèvres et le regarda d'un air malicieux. Elle était vraiment sexy.

_ S'il te plaît, Maxie chérie.

_ Interdites dans quarante-neuf états, tu dis ?

_ Et, je suis sûr qu'on pourra en inventer d'autres ensembles…

_ C'est d'accord !

Max se pencha pour l'embrasser, mais Alec l'avait vue venir et il plaça rapidement la main sur les lèvres de la jeune femme.

_ Avant tout chose, chaton, on doit se débarrasser de cette mission.

_ Tu as raison… concéda-t-elle.

_ Je risque d'être un peu ralenti à cause de… Je pourrais avoir quelques difficultés à me déplacer efficacement sur mes deux jambes… Disons que, tu me fais trop d'effet là…

Max sourit.

_ Oui, j'avais noté ça, dit-elle en bougeant le bassin sur lui, en excitant un peu plus son entre-jambe.

_ Max… Attention à toi !

_ Je suis une mauvaise fille. Il va falloir que tu me punisses…

_ J'y compte bien. Mais, on a d'abord une mission à finir et des petites choses à faire…

_ Occupes-toi des caméras et du système informatique. Je prends les gardes.

_ Je refuse que tu prennes les gardes !

« Oups, c'était sorti tout seul. Truc de mâle… ».

Max gloussa.

_ Mais, tu peux les rendre… impuissants… en leur cognant dessus. Si tu esquisses la moindre attention d'ordre intime sur l'un d'eux… Je te jure que je ne te toucherai plus jamais, dit-il en levant les mains en l'air.

Max hoqueta de surprise devant cette horrible menace.

_ On se retrouve devant la salle du coffre-fort, dit-elle très sérieusement.

Elle se leva et quitta la pièce comme une furie. Il sortit à son tour et respira l'air moins concentré en phéromones. Il entendait déjà les bruits de bagarre. Cet ultimatum avait eu un effet diabolique sur Max. Il pouvait en être fier. Alec eut presque pitié des gardes. Max leur était tombée dessus de façon impitoyable.

o0o0oOo0o0o

Loin d'elle et de ses phéromones, il avait réussi à se calmer. Ils avaient fini leur mission légèrement en retard sur le temps estimé, mais elle était pliée. Alec avait soigneusement gardé ses distances avec Max, tout en la provoquant pour qu'elle le suive. Il avait dit à Max qu'il était trop impatient de rentrer pour la voir avec Original Cindy et être enfin avec elle. Ils avaient roulé comme des fous pour retourner à Seattle.

Arrivés au checkpoint du Secteur 5, il l'avait défiée à la course de moto. Le vainqueur aurait le droit d'attacher le perdant. La Ninja de Max était puissante, et donc, rapide sur les lignes droites, mais dans le dédale des petites rues, la nervosité de la moto d'Alec lui donnait l'avantage. C'était bien parce qu'il était sûr de gagner qu'il avait fait ce pari. En théorie, si elle avait eu toute sa tête, elle aurait aussi compris qu'elle ne pourrait pas gagner et aurait refusé le pari… ou bien, elle avait envie d'être attachée…

Arrivé au bas de l'immeuble, avec moins d'une minute d'avance sur Max, il bondit de sa moto et entra dans le bâtiment. Il envoya l'ascenseur au dernier étage, pour qu'elle ne puisse le prendre, et monta les marches à grandes enjambées. Ses muscles étaient en feu. Mais, il devait à tout prix trouver la jeune femme noire avant sa poursuivante. Il avait eu un léger doute qu'en à la validité de son plan lorsqu'il réalisa qu'il y avait une possibilité qu'elle ne soit pas là. Fort heureusement, Original Cindy dormait dans son lit. Alec la secoua sans ménagement.

_ Cindy ! Réveille-toi vite !

_ Qu'est-ce que… Alec ?

_ J'ai besoin de toi ! C'est Max !


Seattle, appartement de Max et Original Cindy, dimanche 20 mars 2022, tard dans la nuit


ORIGINAL CINDY

Cette phrase fit trembler Original Cindy. Il était arrivé quelque chose à sa Boo. Elle se leva précipitamment et alluma la lumière. Alec, agenouillé près du lit, était à bout de souffle. Elle ne savait pas qu'il était possible d'essouffler un transgénique.

_ Elle arrive ! S'exclama le garçon avant d'enfouir son visage dans son oreiller.

_ Alec ! Qu'est-ce que tu…

Max entra soudainement dans l'appartement. Avant qu'elle ait pu ajouter quoi que ce soit, Max planta au gros baiser sur les lèvres de sa meilleure amie.

_ Max ! Qu'est-ce qu'il te prend ?

_ Alec chéri, il faut que tu me dises quelle est la petite chose que tu veux que je fasse…

_ Alec chéri ? Qu'est-ce qu'il se passe, Max ?

_ Chaleurs… gémit Alec dans l'oreiller.

Original Cindy comprit enfin l'absurdité de la situation. Elle envoya un crochet du droit à Max et lui ordonna d'aller prendre une douche glacée. Aussitôt que la transgénique fut dans la salle de bain, Alec se leva, ouvra la fenêtre et se pencha rapidement comme s'il voulait vomir. La jeune femme crut qu'il allait d'ailleurs tomber dans le vide tellement il était penché.

_ De l'air… soupira-t-il.

_ Alec, c'est quoi ce délire ? Pourquoi tu ne lui dis juste pas non ?

_ Parce que j'en suis incapable…

_ Ce n'est pas compliqué…

_ Pour un mâle X5, si.

_ Qu'est-ce que tu veux dire ?

_ Je suis sensible à ses phéromones. Elle secrète des phéromones, mon corps en secrète en réponse, elle réagit et en secrète d'avantage, et c'est encore plus dur pour moi. C'est un cercle vicieux… En théorie, un mâle X5 cédera toujours face aux avances d'une femelle X5 en chaleur. Je ne sais même pas comment je tiens le coup : ça fait plusieurs heures. Je ne pourrais pas résister encore longtemps. Et, tu ne devras pas seulement la gérer, elle, tu devras aussi me gérer, moi.

La jeune femme prit conscience des efforts d'Alec lorsqu'il s'était mis à trembler comme un junky. Empêcher Max sauter sur tous les individus avec un chromosome Y était une vraie difficulté. Mais, elle n'arriverait sûrement pas à les arrêter s'ils s'y mettaient tous les deux. Et, ils le regretteraient l'un comme l'autre. Enfin, peut-être pas lui.

Elle sut que Max était revenue lorsqu'elle vit Alec se figer. Elle se retourna pour voir Max en sous-vêtements. Elle connaissait son regard gourmand envers les hommes, lorsqu'elle était en chaleur. Mais là, elle était affamée. Elle avait le regard fixé sur Alec, elle marchait vers lui comme un félin qui avait repéré sa proie : déterminée et implacable. Avant que la jeune femme n'ait pu faire le moindre geste, avec une vitesse fulgurante, Max avait rejoint le jeune homme. Elle l'enlaça par derrière et ses mains allèrent directement sur l'entrejambe du X5, qui poussa un gémissement entre le désir et la terreur.

_ Il faut que tu te retournes pour nous regarder, susurra Max à Alec, avant de lui mordiller le lobe de l'oreille.

_ Nous regarder ? Demanda-t-elle.

_ Oui, répondit Max. Il a dit qu'il me ferait quelque chose d'interdit dans quarante-neuf États, si j'acceptais de satisfaire son fantasme de nous voir ensemble.

_ Il fallait venir ici. Il fallait que je trouve une raison qu'elle accepterait… gémit Alec.

_ Max ? Fit-elle.

Alors que Max tourna vers elle, la jeune femme noire lui envoya un direct du gauche. Surprise, Max lâcha Alec et recula. Alec avait enfin tourné les yeux vers les filles.

_ Chou ! Il faut que tu te calmes !

_ Pourquoi tu la frappes ? Demanda Alec.

_ Normalement, ça la calme… mais ça n'a pas l'air de fonctionner.

_ C'est à cause de mes phéromones… dit Alec.

_ Cindy, je t'adore, mais si tu continues à m'empêcher d'avoir MON Alec, je vais me fâcher contre toi, menaça Max.

_ C'est pour votre bien à tous les deux.

_ Il est à moi ! Il faudra me mettre KO pour m'arrêter. Et, tu ne pourras jamais…

_ Mais moi, si ! Dit Alec.

Il prit une bouffée d'air extérieur, bloqua sa respiration et se jeta sur Max. Ils se rendaient coup pour coup avec une rapidité et une violence qu'Original Cindy ne leur connaissaient pas. Alec prit le dessus. Ils s'écrasèrent sur la table basse qui céda sous leur poids. Alec, dont l'air avait été chassé de ses poumons par le choc, finit par inspirer de nouveau les phéromones de Max et la lutte au sol cessa aussitôt pour se transformer en préliminaires. Alec embrassait le cou de Max en la caressant, pendant qu'elle lui défaisait avidement le pantalon. Prise de court, Original Cindy attrapa la cruche d'eau sur le comptoir et versa le contenu sur les deux transgéniques.

_ Alec ! Mets la KO ! Ordonna-t-elle.

D'un geste rapide, il passa dans le dos de Max, et se mit à l'étrangler. Max essaya de lutter, mais il était couché sur elle.

_ Qu'est-ce que tu fais ? Cria-t-elle.

_ Laisses-moi me concentrer pour ne pas la tuer. Je veux juste l'asphyxier pour qu'elle perde connaissance.

Original Cindy regarda la scène horrifiée. Lorsque Max cessa de bouger, Alec la lâcha et roula à côté d'elle, totalement épuisé.

_ Elle est vivante ?

_ Inconsciente, soupira Alec. Mais, elle ne le restera pas longtemps. Il faut que tu me donnes de quoi l'attacher.

_ J'ai des menottes.

_ Parfait… Je te savais dominatrice, ajouta-t-il à voix basse, ce qui la fit sourire.

Alec menotta Max les mains dans le dos. Mais, au lieu de se lever, il enfuit son visage dans les cheveux de la X5 et commença à lui caresser le ventre. Original Cindy le frappa si violemment sur le crâne avec la cruche que cette dernière se brisa.

_ Alec ! Cria-t-elle.

_ Pardon… elle sent super bon…

_ Il faut que tu partes maintenant.

_ Je sais. Mais, il faut mieux l'attacher que ça.

_ Mieux que ça ? Elle est menottée.

_ Ça ne l'arrêtera pas longtemps. Le fil à linge, là, c'est du nylon ?

_ Oui.

_ C'est très résistant, en théorie. Passe-le moi, s'il te plaît.

Alec se mit debout, prit Max dans ses bras, l'emmena dans sa chambre et la posa délicatement sur son lit. Dans l'encadrement de la porte, Original Cindy l'observa faire. Il se redressa et regarda la X5 avec une tendresse qu'elle n'avait jamais vu chez lui. Elle se demanda où s'arrêtait l'effet de l'attirance des phéromones et où commençait autre chose. Elle lui tendit le fil et il l'attacha au lit en faisant de nombreux nœuds. Lorsqu'il eut fini, il caressa la tête de Max et l'embrassa doucement sur le front. Il sortit de la chambre et s'apprêta à sortir de l'appartement avant de se tourner vers Original Cindy.

_ Vu son état, je pense qu'il lui reste une trentaine d'heures à tenir.

_ Tant que ça ?

_ Il vaut mieux viser large.

_ OK.

_ Ne la libère sous aucun prétexte, surtout.

_ Je ne vais pas la laisser attachée si longtemps quand-même.

_ Il le faut. Elle essayera de te faire croire que ses chaleurs sont finies dès qu'elle se réveillera. Ne la crois pas. Comptes bien les heures.

_ Mais si…

_ À la fin du décompte, assures-toi que c'est terminé en lui proposant d'être avec toi pour satisfaire mon fantasme. Si elle est d'accord, tu peux être certaine qu'il faut encore attendre.

_ Elle se calmera une fois que tu seras parti avec tous tes trucs de mâle…

_ Non. Elle m'a dans le nez. Si tu la libères trop tôt, elle viendra directement me chercher et je ne résisterais pas. Vu mon état, il va falloir que je m'enferme au moins pendant les prochaines vingt-quatre heures pour ne pas péter un câble. Je l'ai aussi dans le nez, là.

_ Alec ?

_ Oui ?

_ Merci d'avoir fait cet… effort pour elle.

Alec eut un sourire amer.

_ Elle me détesterait s'il se passait quoi que ce soit entre nous… et elle se haïrait.

Alec partit de l'appartement sans attendre de réponse.

o0o0oOo0o0o

Original Cindy avait toujours vu qu'il y avait une certaine attirance entre les deux X5. Le rejet et la dureté de Max envers Alec avaient toujours été trop forts pour être anodins. Elle soupçonnait sa meilleure amie de se comporter ainsi pour ne pas apprécier la présence d'Alec, même si, avant, elle n'en comprenait pas la raison. Alec lui avait parlé de son frère jumeau qui avait grandi avec Max et qui était à présent mort. Mais, il devait y avoir autre chose pour qu'elle le rejette à ce point. Et ses derniers temps, Max avait enfin pris conscience de la présence d'Alec et elle se posait des questions sur ce qu'il lui faisait ressentir.

Alec avait toujours été volontairement provocateur envers Max. Mais, elle se doutait qu'il était plus secret qu'il ne le laissait paraître. Elle avait toujours eu du mal à cerner ses vraies intentions. Ce soir, elle avait vu un geste d'affection… Alec avait toujours soutenu Max, y compris dans des périodes totalement absurdes. Même s'il la taquinait au sujet de Logan, il avait toujours tout fait pour les aider. Elle se rendit compte qu'il voulait simplement qu'elle soit heureuse. C'était une vraie preuve d'affection. Pourtant, elle n'était pas certaine qu'Alec attende autre chose de Max. Par moment, elle pensait qu'il pouvait y avoir plus que de l'amitié du côté d'Alec. Mais, c'était impossible à dire : il était un maître dans l'art de cacher ses vrais sentiments.

Elle eut un petit pincement au cœur. Max était enfin avec Logan, mais ça n'allait nulle part. Quelque chose s'était brisé dans leur "relation". En même temps, il était clair qu'autre chose s'était mis en marche entre Max et Alec. Max devra, un jour, faire un choix… et il y aurait forcément un perdant… ou plus.


Seattle, appartement de Logan, lundi 21 mars 2022, 1h30 du matin


ALEC

Alec arriva tard chez Logan. Ou très tôt. Comme à son habitude, il entra sans frapper. Le journaliste était encore éveillé. Alec entra dans le bureau.

_ Tiens, dit Alec en tapotant l'épaule du journaliste avec la boîte de données volées.

_ Ah ? Salut. Je commençais à m'inquiéter. Je m'attendais à avoir de vos nouvelles plus tôt. Ça va ? Tu as une tête de déterré. Et, où est Max ? Il lui est arrivé quelque chose ? Demanda Logan soudain très inquiet.

_ Je l'ai déposée chez Original Cindy. Elle n'a rien. Elle est juste en chaleur, soupira Alec.

_ Oh… je vois… fit Logan sur un ton contrarié.

_ Ça sera fini dans une trentaine d'heures.

_ Je croyais… je croyais que ça lui passait une fois… qu'elle avait été avec quelqu'un.

Alec dévisagea Logan un instant sans comprendre. Puis, il sut. Logan croyait qu'il y avait eu quelque chose entre les deux transgéniques.

_ Tu sais, Logan, commença Alec. Malgré toutes tes suspicions, il n'y a jamais rien eu entre Max et moi.

_ Oh, je croyais…

_ Tu croyais mal, coupa Alec. C'est une amie. Et, j'ai suffisamment de respect pour vous deux pour combattre ses phéromones et les miens. Même si c'est dur et que ça m'a vidé de toute mon énergie.

_ Je…

Alec entreprit d'enlever son blouson et son col roulé.

_ Qu'est-ce que tu fais ? Demanda l'ordinaire.

_ J'ai son odeur partout sur mes fringues… c'est trop près de mon nez.

« Et, ça me donne envie de te cogner dessus » ajouta-t-il mentalement.

_ Pardon ?

Alec ne répondit rien.

_ C'est un suçon que tu as là ? Demanda Logan en remarquant la marque dans le cou du X5.

_ Par pitié, Logan, ne remue pas le couteau dans la plaie.

_ C'est juste que…

_ Sois sympa. Arrête de me mettre tous vos petits problèmes conjugaux sur le dos, continua Alec, à présent contrarié. Je ne suis pas le méchant de votre histoire.

_ Alec, je suis désolé.

_ Ouais, tu l'es. Débrouillez-vous sans moi. Je vais me pieuter. Bonne nuit.

Alec quitta l'appartement en claquant la porte sans attendre la réaction de Logan.


Seattle, appartement de Max et Original Cindy lundi 21 mars 2022, 2h15 du matin


ORIGINAL CINDY

Original Cindy avait suivi les conseils d'Alec à la lettre et n'avait pas détaché Max. Heureusement d'ailleurs. La transgénique avait effectivement essayer de la berner à deux reprises.

Après le départ d'Alec, elle avait recouvert Max pour qu'elle n'attrape pas froid au-dessus du lit. Inquiète de l'étranglement que lui avait fait subir Alec, elle avait préféré rester auprès de sa Boo. Elle s'assoupit. Elle fut réveillée moins d'une heure plus tard par un baiser de Max. La X5 se sentait parfaitement bien. Elle avait d'abord cru qu'Alec l'avait attachée pour jouer : ils avaient fait un pari. Le jeune homme avait gagné une course en moto pour rejoindre l'appartement. Mais, lorsque la transgénique avait compris qu'elle n'avait pas été attachée pour jouer, qu'Alec était parti et qu'elle ne serait pas libérée par Original Cindy, elle avait été infernale. La jeune femme noire avait fini par bâillonner la X5 qui criait à pleins poumons. Max était furieuse contre elle.

Pour la première fois, Original Cindy avait eu peur de sa meilleure amie. Elle avait été choquée en découvrant qu'elle était différente, mais elle ne s'était jamais sentie menacée. La Max en chaleur voulait son Alec et que lui. Et, pour ça, elle était prête à détruire tous les obstacles entre elle et lui, y compris son amie. Elle ne voulait pas entendre parler de Logan non plus.

La transgénique était moins regardante sur ses paroles lorsqu'elle était en chaleur et Cindy découvrit que la raison, pour laquelle Max parlait si peu de Logan ces derniers temps, était que ça n'allait pas du tout entre eux. Max ne lui avait pas tout raconté, loin de là. Rien n'allait plus depuis leurs vacances sans virus. Original Cindy garda pour elle le fait que, selon elle, cela faisait plus longtemps que ça. Le refuge "Alec" était forcément tentant.

o0o0oOo0o0o

Elle eut honte d'elle lorsqu'elle laissa sa meilleure amie, ligotée et bâillonnée, pour pouvoir dormir un peu avec des bouchons d'oreille. À son réveil, le matin, la colère de Max n'était pas retombée. Les nœuds d'Alec étaient efficaces. Mais, à force de tirer dessus, la X5 se blessait. Cindy voulut lui donner à boire et à manger sans la détacher, mais Max lui cracha les aliments à la figure. Alors, elle remit ses bouchons d'oreilles. Les heures passaient ainsi.

o0o0oOo0o0o

Le second matin, elle se réveilla alertée par le calme dans l'appartement. Elle se précipita dans la chambre de Max. Elle la trouva, toujours attachée et bâillonnée, avec des larmes sur le visage. Elle n'eut pas besoin de faire le test du fantasme. Elle savait que si sa Boo était honteuse au point de pleurer, c'était parce que les chaleurs étaient terminées. Pendant que Max prenait une douche, Original Cindy prépara le meilleur petit déjeuner qu'elle pouvait faire avec leurs maigres provisions pour remonter le moral de Max.

_ Pourquoi tu ne m'as pas dit que ça allait aussi mal avec Logan ? En plus, ça date d'avant la Saint-Valentin.

_ Ça n'aurait rien changé…

_ Concernant Alec, commença Cindy.

_ J'aime Logan, coupa Max.

La jeune femme eut l'impression de sa Boo disait surtout ça pour elle-même. La Max sans chaleur s'accrochait à sa relation avec l'ordinaire toute bancale qu'elle fut.

_ Je sais, chou. Je ne parlais pas de ça. Je me disais juste que… pour Alec, ça avait l'air, presque, douloureux de résister à tes avances.

_ Je lui en ai fait baver.

_ On aurait dit qu'il avait peur de toi par moment, plaisanta-t-elle.

_ Je l'ai vraiment terrifié… Si tu avais vu la façon dont il m'a regardé lorsqu'il a compris que j'étais en chaleur…

_ Au moins, cette fois, tu as gardé ta vertu, fit-elle, en essayant de voir le côté positif des choses.

_ Je ne sais même pas comment il a fait. En théorie, il n'aurait pas dû pouvoir résister.

_ C'est si dur que ça ? Tu disais que les mecs savaient gérer ce genre de trucs.

_ Les ordinaires, oui. Les phéromones n'ont aucun effet sur eux. Ils voient juste une nymphomane. Pour les X5… ça les contamine en quelque sorte. Ils se mettent aussi à fonctionner à l'instinct animal.

_ Toutes les femelles X5 ont des chaleurs et cherchent un mâle pour les satisfaire à ce moment-là ?

_ À ma connaissance.

_ Donc, il n'y a aucun gay chez les transgéniques ? Demanda Original Cindy.

_ Si. Il y a des couples à Terminal City. Les histoires de chaleur ne touchent que les X5.

_ Donc, aucun homosexuel chez les X5 ?

_ Je pense que si. Les chaleurs, c'est juste sexuel. Bestial et sexuel. Le sexe et l'amour sont deux choses différentes. Je crois…

_ Mais, même une femme lesbienne X5 voudra un mâle à un moment donné ?

_ Ouais, c'est ça… Mais, pas par choix.

_ Ça doit être dur à vivre. Comment vous faites à Terminal City ? Vous n'avez pas peur que ça finisse… en orgie de X5.

_ Alec a établi des règles pour ça.

_ Alec a fait des règles pour le sexe ? Sérieusement ?

_ Oui. C'est bizarre à dire quand on connaît son goût excessif pour les femmes.

_ Et, c'est quoi ces règles ?

_ Les femelles savent à peu près leur période de chaleur…

_ Sauf toi…

_ Merci de me le rappeler…

_ Et donc, les femelles savent, dit-elle pour relancer la conversation.

_ Elles doivent rester avec leur chéri le temps que ça passe. Si elles n'ont personne, elles peuvent demander à quelqu'un de les "soulager" en prévision. Si non, il faut qu'elles restent avec des femelles transgéniques qui pourront les contrôler.

_ Pourquoi Alec ne t'a-t-il pas emmenée chez Logan ?

_ Pour ne pas le tuer.

_ Pardon ?

_ Les mâles peuvent se battre entre eux pour avoir une femelle, comme le feraient des animaux. Alec a pu me résister à mes chaleurs, même si j'ignore comment. Mais, il n'aurait pas supporter de me voir avec un autre mâle. Ils se seraient battus. Alec est bien trop fort. Il aurait probablement tué Logan.

_ À ce point-là ?

_ Il va falloir que je rentre et que je m'excuse de lui avoir causer des problèmes. S'il n'avait pas été raisonnable pour nous deux… On aurait même pu se faire tuer pendant la mission… Je ne sais pas comment je vais dire ça…

_ C'est Alec. Tu ne disais pas que tu pouvais tout lui dire sans te sentir gênée ?

Max se mordit les lèvres.

_ Vas le voir et dis-lui simplement. Il comprendra.

_ Merci pour ton aide, ma Boo.

_ Avec plaisir, mon petit cœur.


Seattle, Terminal City, appartement de Max et d'Alec, mardi 22 mars 2022, 11h40


MAX

Max rentra dans l'appartement de Terminal City en fin de matinée.

_ Salut. Tu t'es enfin refroidie ? Lança Alec joyeusement de l'autre côté du bar, en faisant la vaisselle.

Max soupira.

_ Ouais. Et, je suis juste morte de honte, maintenant.

Elle alla s'asseoir sur le canapé, prit un coussin et enfouit son visage dedans. Elle sentit qu'Alec était venu s'asseoir près d'elle.

_ Tout va bien. Je ne t'en veux pas. Je sais pertinemment que je suis irrésistible, dit Alec.

Max lui donna un coup léger avec le coussin. Il se moquait d'elle. Bizarrement, cette boutade la fit sourire.

_ Je dois être sacrément repoussante alors ! Aussi sexy qu'une limace crevée ! Dit Max en plaisantant.

_ Non ! Contesta Alec sur le même ton qu'elle. Tu es très bien.

_ Dit le queutard qui n'a pas voulu de moi…

_ Tu aurais voulu qu'il se passe un truc ?

_ Non ! Bien sûr que non.

_ Bien sûr que non, répéta Alec.

_ C'est juste que… Je ne t'ai jamais vu dire non à une femme… D'abord, il y a eu l'épisode du chat et maintenant ça. Je ne dois pas être…

_ Tu es très attirante. Je t'assure.

_ Mouais…

_ Toujours pas convaincue ? D'accord. Je te fais une promesse dans ce cas.

_ Une promesse ?

_ Oui. Le jour où tu auras envie de coucher avec moi, simplement parce que tu en auras envie, toi, sans chaleur, sans instinct félin ou autre élément indépendant de ta volonté, on couchera ensemble et je te prouverai que c'est un domaine dans lequel j'excelle.

Max explosa de rire.

_ Quoi ? Demanda Alec.

_ Tu as une modestie à toutes épreuves !

_ Je n'ai jamais eu de plainte… dit-il d'une voix sensuelle.

Max riait tellement qu'elle commençait à avoir mal au ventre. Alec arrivait à la faire rire même dans un moment où elle n'en avait pas envie.

_ Et, tu fais souvent ce genre de promesse ? Demanda Max toujours hilare.

_ Non. Seulement pour toi, chaton, fit-il d'une voix suave.

Il joignit son rire à celui de la jeune femme.

o0o0oOo0o0o

Il leur fallu un bon moment avant de pouvoir retrouver leur sérieux.

_ En tout cas, je te remercie vraiment d'avoir résisté, dit-elle.

_ Pas de quoi.

_ Comment as-tu fait d'ailleurs ? Je veux dire… je ne savais pas que c'était possible. Surtout sur une période aussi longue, plusieurs heures, alors qu'on était que tous les deux.

Alec jeta sa tête en arrière, sur le dossier du canapé et regarda le plafond. Il avait l'air triste.

_ Disons que les mauvaises expériences sont formatrices, répondit-il.

_ Tu développes ?

Il ferma les yeux.

_ Juste après qu'on m'ait fait sortir de la section Psy-Ops, après la mission Berrisford, on m'a fait faire plusieurs missions en duo avec une X5 un peu plus âgée, 622. Elle avait plus d'expérience de terrain que moi. Elle devait m'enseigner des trucs et je devais la seconder. On s'entendait bien tous les deux. Elle était chouette. Un jour, on était en mission dans l'Idaho, rien de compliqué, et elle est entrée en chaleur. C'était la première fois que j'étais avec une fille. Malgré le côté improvisé, c'était bien. Le truc, c'est qu'après, on n'était plus vraiment concentré, ni l'un, ni l'autre. Elle a été abattue. J'ai fini la mission, je suis rentré, son corps dans les bras, et j'ai fait mon rapport… comme un bon soldat. Ils lui ont tout mis sur le dos. Ils estimaient qu'il était de son devoir de connaître ses périodes de chaleurs et de prévenir sa hiérarchie. Ils ont dit qu'elle avait mis la réalisation de la mission et la vie d'un autre soldat en jeu par incompétence. Et, que sa mort était méritée. Si tu avais entendu la manière dont ils parlaient d'elle…

_ Ce n'était pas de ta faute, dit doucement Max, comprenant ce qu'il ne disait pas à voix haute.

_ J'aurais dû repérer le tireur embusqué…

Il continuait à regarder le plafond d'un air absent.

_ Tu l'aimais ?

_ Non, dit-il froidement.

« Mais, tu l'appréciais. Tu l'appréciais suffisamment pour qu'elle te manque. Sinon, tu ne serais pas si triste. Et, on n'oublie jamais sa première fois… bonne ou mauvaise ».

_ Bon ! Dit-il en se redressant. Je vais au poste de commande.

_ Alec ?

_ Oui ?

« Pourquoi m'as-tu appelée "mon amour" à un moment ? »

Mais, les mots restèrent coincés dans la gorge de Max. Alec la dévisagea en penchant la tête sur le côté. À ce moment-là, Max le trouva particulièrement beau et cela la fit rougir.

« Ne t'emballe pas, Max. Ce n'était rien qu'un des petits noms qu'il aime donner aux femmes » pensa-t-elle.

_ Encore merci, dit-elle simplement.

Alec se pencha un peu plus et l'embrassa sur la joue. Elle aimait quand il faisait ça. Elle se souvenait parfaitement de ses lèvres sur la peau de son cou. Elle se souvenait parfaitement des caresses qu'il lui avait donné. Et, elle aurait voulu qu'ils reprennent là où ils s'étaient arrêtés, au sol, sur les débris de la table basse de l'appartement du Secteur 5.

Il ne s'était pas éloigné de son visage. Toujours penché sur elle, elle sentait sa respiration profonde à tout juste un centimètre de sa joue.

« Il doit me rester des phéromones » pensa-t-elle.

Alec finit par se redresser et s'éloigna d'elle.

_ Prends ton temps. Je gère.

Il attrapa négligemment sa veste et sortit. Max resta assise sur le canapé en tripotant machinalement le coussin, les joues toujours en feu.

Elle venait de découvrir une nouvelle pièce du puzzle "Alec". Elle comprenait de mieux en mieux son caractère et son comportement volage avec les femmes. La seule femme qu'il avait aimée, Rachel Berrisford, était morte suite à un accident causé par Manticore. Il se considérait comme responsable de son coma, puis de sa mort. La première fille avec il avait été, la X5-622, une fille qu'il avait appréciée, était morte. Là aussi, il se considérait comme responsable. Elle comprit qu'Alec ne voulait plus ressentir ça. Il avait choisi de ne plus aimer. Il avait choisi de ne plus apprécier sérieusement une femme. Alec était un survivant. Pour survivre, il ne devait plus souffrir. Pour ne plus souffrir, il ne s'engagerait plus jamais avec une femme. Étrangement, Max fut triste de ce constat.


à suivre

* à partir de maintenant, il y aura un chapitre chaque 1ier du mois*