Sailor Moon Altered Destiny
Chapitre 18 – Exposed (part 2)
Dans la salle d'attente, Minako reçoit un coup de fil. Sans le sou, Black Hole Records lui a prêté un portable afin de pouvoir la contacter facilement. Ils ne sont pas encore très communs en ce début de XXIe siècle alors elle met quelques secondes à comprendre d'où vient la sonnerie.
« Allo ?
- Mlle Aino ? Mme Minekura à l'appareil.
- Bonjour, comment allez-vous ?
- C'est plutôt moi qui devrait vous poser cette question. Vous faites la une sur toutes les chaînes. »
Minako reste silencieuse. Même si son amie est à présent saine et sauve, elle ne peut s'empêcher de craindre sa sortie de l'hôpital et les paparazzis qui vont faire leurs choux gras de sa santé.
« Je suis désolée d'enfoncer le clou de la sorte. Je m'inquiète vraiment pour votre amie et je n'ai pas voulu être indiscrète.
- Ne vous en faites pas. J'apprécie l'attention.
- Comment va-t-elle ?
- Elle vient de se réveiller. Sa convalescence va être longue mais elle est tirée d'affaire. Cette histoire nous a rappelé à toutes notre mortalité. »
Oui, et cela, Nemo compte bien dessus quand le moment sera venu mais avant cela, elle a des ordres à exécuter.
« Oh, quel soulagement ! Après ce qui est arrivé au petit frère de votre amie en 1990, cela a dû être un choc.
- Le frère de mon amie ? Plus rien n'est-il secret ?
- Malheureusement, non. »
Dans ce monde où Internet prend de plus en plus de place, la sphère du privé est de plus en plus étriquée. Malgré de bonnes intentions et une façon de faire différente de l'agence qui avait tenté de la recruter avant Black Hole Records, sa maison de disques entend faire son métier et faire un profit sur Aino Minako et la révélation de son identité. Ils veulent lui donner une vraie carrière, avec tout ce que cela importe, mais il est important de tirer également profit de Sailor Venus. Mme Minekura entend faire son travail de chef de produit en toute transparence et elle ne le lui a jamais caché.
« Votre honnêteté vous honore.
- Et votre professionnalisme tout autant, Minako. Je peux vous appeler Minako ?
- Vous pouvez.
- Très bien. Ce dont nous discutons est également l'objet de mon appel. J'ai beaucoup de pression de mes supérieurs pour sortir rapidement un premier single. Je suis consciente que vous souhaitez être aux côtés de votre amie mais j'ai cru comprendre au cours de nos derniers enregistrements et grâce à vos arrivées en trombe de dernière minute que vous pouvez vous téléporter. Souhaitez-vous venir enregistrer la fin de la chanson en laissant votre portable à vos amis et le numéro du portable que je mettrai à votre disposition dans les locaux de la maison de disques. Ainsi, vous pourrez rejoindre vos amis en quelques secondes si elles vous appellent. Je suis consciente du sacrifice mais je ne le ferais pas si je n'étais pas pieds et poings liés. »
Et ça, pour être pieds et poings liés, elle l'est. Elle a une mission à réaliser et elle doit réaliser quelque chose de très précis pour faire avancer le plan.
Minako part expliquer la situation à ses amis qui n'y voient aucun inconvénient. Cela lui permettra de penser à autre chose et de toute façon, elle doit aussi penser à sa carrière. Rester tous enfermés entre ces quatre murs ne fera pas récupérer Mako plus vite. Ils la contacteront immédiatement si quoi que ce soit se passe. Devant son regard coupable et sa tête fixant ses chaussures, Rei prend ses mains dans les siennes et essaie tant bien que mal de ne pas rougir ni trembler.
« Enregistre une magnifique chanson. On la fera écouter à Mako en avant-première. Tes producteurs te feront bien une fleur pour te remercier. »
Voyant que Minako n'est toujours pas convaincue, elle ajoute :
« C'est ta chance de lancer ta carrière. Fonce et sois heureuse. On est tes plus fidèles groupies ! Mamoru, donne-moi un M !
- M !
- ChibiUsa, donne-moi un I !
- I ! »
Une bonne partie de ses amies y passe et tous lui font un spectacle de majorettes sous les yeux éberlués des gens présents. Minako éclate de rire et se jette dans les bras de Rei qui ne peut se retenir de rougir cette fois-ci. Cela n'échappe pas au reste du groupe. Les trois ChibiUsa se donnent des petits coups de coude, attendries de voir que quels que soient les univers, certaines choses ne changent pas. Au moins, dans cet univers, elles ont une chance de pouvoir s'aimer… Si ce monde ne disparaît pas, bien sûr.
oOo
Minako contacte Mme Minekura pour lui confirmer qu'elle arrivera dans quelques minutes.
« Avant que vous ne partiez, je voulais vous demander une faveur.
- Je vous écoute.
- Nous souhaitons réenregistrer la piste de violon sur le morceau et lui donner un peu plus de vitalité. Nous avons du mal à trouver quelqu'un qui corresponde à nos attentes. Au risque de passer pour un vautour, j'ai vu les nouvelles à la télévision et j'ai pu voir que vous étiez avec Michiru Kaiou avant qu'elle quitte l'hôpital. Pensez-vous que vous pourriez lui demander si elle souhaiterait collaborer avec nous ? Elle pourra faire les arrangements qu'elle souhaite sur la chanson. J'ai pu la voir en concert il y a quelques années et elle correspond parfaitement au type de son que nous recherchons pour votre single.
- Je n'y vois pas d'oppositions. Ça dépend toutefois de Michiru. Elle a effectivement quitté l'hôpital avec sa conjointe et leur amie peu après notre arrivée. Cela veut dire que nous sommes cernées par les journalistes ?
- J'en ai bien peur. À l'intérieur comme à l'extérieur.
- Je vois. Je pars lui demander et j'essaie de venir avec elle dès aujourd'hui.
- Parfait, je vous remercie. »
Minako raccroche et se met en retrait pour contacter Michiru et lui transmet la proposition du chef de projet.
« Ma foi, pourquoi pas… J'arriverai peut-être à oublier ma peine pour Setsuna quelques heures en jouant du violon.
- Ok, je lui transmets. On en aura pour une bonne partie de la journée, non ? demande Minako.
- Oui, je pense. Je vais devoir composer sur le pouce, ça risque de prendre du temps. Je passe du coq à l'âne mais est-ce qu'il serait possible qu'Haruka et Hotaru viennent nous rejoindre en fin de journée. Nous partirons de là pour aller faire les papiers nécessaires pour l'entrée au lycée d'Hotaru.
- Je leur demanderai de les laisser attendre au rez-de-chaussée dans le petit salon. J'ai dû arrêter et annuler pas mal de sessions d'enregistrement alors je ne peux pas trop leur demander de faveur. Je doute qu'ils les laissent entrer dans le studio.
- Je comprends. L'important, c'est qu'elles soient dans les parages et je saurai qu'elles sont là et qu'il est temps d'arrêter. Plus rien n'existe quand je joue du violon, exceptée ma famille. Elles sont le meilleur des réveils et mon ancre pour reprendre pied dans la réalité. »
Minako sourit tendrement devant l'unité et l'amour sans bornes de Michiru et Haruka. Sans oublier Hotaru qui est comme une fille adoptive et Setsuna qui était comme une grande sœur. Il leur suffit d'être proche l'une de l'autre pour sentir leur aura respective. Elle ressentirait presque une pointe de jalousie face à son statut de célibataire endurcie. Il y a pourtant quelqu'un qui l'aime de tout son cœur mais elle n'est pas prête à voir et à entendre les sentiments de Rei.
Minako contacte Mme Minekura, qui semble ravie mais pour une toute autre raison. Nemo a en effet recruté un Daimon qui les attaquera dans le hall et volera le cœur pur de Minako, obligeant les trois Outer Senshi à se transformer. Les employés de la maison de disques, qui sont tous des monstres divers et variés sous couverture, excepté les deux ingénieurs du son, se chargeront des commérages auprès des médias avec un coup de pouce d'Omen et de son contact Kurogane. Quand Sailor Pluto réapparaitra, car, telle un cafard, elle réapparait toujours au moment le plus inopportun, il sera alors temps de révéler son identité.
Tout est en place pour le « coming out » des Outer Senshi.
oOo
Usagi revient dans la salle d'attente et aperçoit Ami, en retrait du groupe, en train de parler avec un interne.
« Ami, je pourrais te parler quand tu auras fini avec ce docteur ?
- J'avais terminé. Allons vers la machine à café. »
Les deux jeunes femmes partent à l'autre bout de la pièce pour que le groupe n'entendent pas ce qu'elles vont se dire. Elles passent devant les téléphones publics et se rendent à la machine à café.
« Tu veux quelque chose ? demande Usagi.
- Je veux bien un chocolat chaud à l'eau. J'en ai bu tellement quand ma mère était enceinte. Elle e a eu des complications et les relations avec mon père étaient tendues. Je passais beaucoup de temps avec un ami de mon père. J'ai même failli lui faire perdre son droit d'exercer… »
Ami ne pensait pas s'ouvrir de la sorte mais les mots sortent sans qu'elles puissent les arrêter. Usagi écoute et découvre une facette de son amie qu'elle ne connaissait pas.
« Et puis, on est revenus, exactement cinq ans plus tard… »
Usagi ne voit pas la larme qui coule et qu'Ami essuie rapidement.
« Tiens, je t'ai pris un café au lait, histoire de ne pas raviver de mauvais souvenirs. Mais c'est une soupe à la tomate qui est sortie…
- C'est… pas de chance. »
Toutes deux éclatent d'un rire nerveux puis recommencent à fixer leurs chaussures. C'est Usagi qui rompt le silence
« Je veux… Je voudrais que tu rencontres mes parents et que Shingo et toi leur annonciez votre relation.
- D'accord. Il est plus que temps. »
Usagi est surprise et par la réponse et par son contenu.
« Plus que temps ? »
- Ça fait un an que nous sortons ensemble. »
Au moins, l'honnêteté est de mise. Plus de cachoteries. Transparence totale, comme disait Mamoru.
« Très bien, Restons-en là sur le sujet, je pense que j'en sais suffisamment.
- Nous sommes sexuellement actifs. Tout comme toi et Mamoru. Nous sommes un couple à part entière. Je t'ai menti pendant si longtemps et j'en étais malade mais tu sais, je me sens tellement seule et il est la seule personne qui sait me faire sourire et me sentir belle et fière d'être moi. Pendant longtemps, vous avez été ces personnes mais nos vies ont pris une certaine direction et nous n'avons plus autant de temps à passer ensemble. »
Elle voudrait tellement ajouter que, lorsqu'ils ont vécu en boucle ce jour fatidique, elle a tenu le corps sans vie de Shingo dans ses bras un nombre incalculable de fois, et à chaque fois, ses sentiments pour lui n'ont fait que croître. Elle sait que si elle lui avouait cela, elle comprendrait. Elle aurait quelqu'un avec qui partager ses sentiments, quelqu'un qui saurait montrer de l'empathie. Mais elle ne peut pas car à la seconde où elle le ferait, leur ennemi sans nom saurait qu'elle voit au travers des ficelles de son plan et ce maigre espoir d'un jour le vaincre disparaîtrait. Il la tuerait également sans ménagement.
« Shingo n'est pas un remplacement. Je l'aime et je refuse de te mentir sur ma relation avec lui à présent. J'ai peut-être été forcée de te révéler son existence mais je pense que c'est en fait une bénédiction.
- Je n'irais pas jusque-là mais disons que c'est… un pas dans la bonne direction. »
Ami sourit et s'approche d'Usagi pour la serrer dans ses bras mais Usagi a un mouvement de recul.
« Ne brûlons pas les étapes. »
Usagi tend alors sa main et Ami n'a d'autres choix que de la serrer. Après quoi Usagi fait se cogner l'intérieur puis l'extérieur de leur main puis replie se main et tape le dessus et le dessous de la main d'Ami avant de mimer une explosion en faisant voleter se main jusqu'au visage d'Ami.
Ami éclate de rire alors qu'elles partent rejoindre leurs amis. Usagi avait raison.
C'est un pas dans la bonne direction.
oOo
Avant de partir rejoindre Michiru, Minako chuchote quelque chose à l'oreille d'Ami qui vient de les rejoindre et de Rei. Cinq minutes plus tard, tous les appareils photo, enregistreurs et autres caméras espionnes surchauffent et cessent de fonctionner, leur contenu définitivement perdu.
oOo
Quand Ami et Usagi sont passées devant les téléphones, leur esprit était bien trop occupé pour prêter attention à cette sexagénaire qui passait un coup de fil.
« Je suis bien au journal Nikkan Gendai ? J'ai une information à vendre sur Sailor Moon. J'étais dans les toilettes pendant qu'elle discutait avec son fiancé. »
Trop impatiente, elle n'attend même pas qu'on lui demande quoi que ce soit et révèle pot-aux-roses. Mamoru avait bien fait son travail mais il n'avait pas vérifié l'occupation des autres toilettes.
« Sailor Mercury sort avec le frère mineur de Sailor Moon !
- Intéressant, mademoiselle.
- Oh, vous me flattez, mais c'est madame. Madame Hirota. »
Évidemment que c'est madame, s'emporte mentalement Omen au bout du fil. L'ensemble de l'hôpital étant sous sa surveillance, elle a pu intercepter la conversation afin d'éviter que cette information ne se retrouve dans la presse à scandales.
« J'en prends bonne note. Je vais vous rappeler rapidement pour vous rencontrer.
- Mais attendez, je ne vous ai pas donné… »
Trop tard, elle a raccroché.
« …mes coordonnées. »
Elle cherche dans son portefeuille mais elle n'a pas assez de pièces pour rappeler. Dépitée, elle part rendre visite à son mari.
Comment cette femme n'a pas fait le lien entre leurs échanges et l'identité secrète de Mamoru lui échappe. Il doit vraiment y avoir une sorte de charme plusieurs fois millénaires qui les protègent et qui ne peut être brisé qu'en les voyant se transformer. Elle n'a pas le temps d'y réfléchir plus car elle doit toutefois s'occuper de ce problème. Durant la deuxième phase de leur plan, Umino s'occupera de faire rompre le couple d'Ami Mizuno mais en attendant, elle contacte le Néant pour savoir comment il souhaite qu'elle gère la situation.
« Je te téléporte un Daimon. Vole son cœur pur. On croira à un simple arrêt cardiaque. Tu sais ce qu'il te reste ensuite à faire. »
Le Néant téléporte alors le monstre. Et quel monstre ! Elle part à l'hôpital avec lui et le fait se passer pour une infirmière.
« Madame Hirota ?
- Oui.
- Je suis l'infirmière en charge de votre mari. Puis-je vous parler en privé ? »
Son mari essaie bien de lui dire que ce n'est pas son infirmière mais il est trop faible et la morphine rend son discours incompréhensible.
« Ne t'en fais pas, mon chéri. Je reviens juste après. J'ai trouvé un moyen de gagner de l'argent rapidement pour payer ton opération. Je reviens dans quelques minutes. »
Elle l'embrasse rapidement et quitte la pièce. Elle ne peut le voir mais il se met à pleurer à chaudes larmes, comme s'il sentait que quelque chose de terrible allait se produire.
oOo
L'infirmière conduit la femme dans une pièce vide.
« Entrez, s'il vous plaît.
- Dans le placard à balais ? »
Sans plus de réponse, on la pousse à l'intérieur. Le Daimon referme la porte et reprend son vrai visage. Elle utilise l'étoile noire sur son épaule pour extraire son cœur et utilise son autre main pour l'empêcher de crier. Une fois le cœur pur extrait, Omen apparaît. Mme Hirota s'écroule. Elle sera morte dans quelques minutes. Elle tente bien de ramper jusqu'à Omen mais se retrouve face contre terre au bout de quelques secondes, à bout de force vitale.
« Bon travail. On pensera qu'elle est venue pleurer sur son pauvre sort et que son chagrin l'a emporté. Je devrais les noter ces perles, j'ai un certain talent pour le mélodramatique. »
« Tu sais ce qu'il te reste ensuite à faire. »
Pour éviter qu'on ne fasse le lien entre le monstre et la mort de la femme, Omen détruit le Daimon.
« C'est fait, annonce-t-elle au Néant. Comment va faire Nemo maintenant que j'ai détruit le Daimon qu'elle allait utiliser pour son plan ?
- Comme dirait Sailor Moon : "Hé hé ! Oups !" Et puis, de toute façon, je m'en fiche, elle n'est plus mon problème. »
Il coupe alors la communication. Omen sourit. Il est à présent temps de détruire le cœur pur. Elle s'exécute mais active en même temps sa boîte à musique et laisse la poudre rose tomber dedans. L'énergie dégagée par cette pulvérisation en bonne et due forme devrait suffire à brouiller même les radars du Néant. Maintenant qu'elle sait qu'il n'est pas dupe, elle doit rivaliser d'ingéniosité pour renforcer les pouvoirs de son artéfact. Elle sait pertinemment que ces jours sont comptés. Avec le miroir des rêves qu'elle a collecté et le star seed d'humain qu'elle a broyé avant que la personne ne devienne un Phage, elle devrait avoir une chance de lui tenir tête le moment venu.
oOo
Après toutes ces émotions, Ami s'est assoupie sur un des sièges. Elle se réveille néanmoins en sursaut et croit voir Chibi Mercury dans le hall l'espace d'une seconde et l'entend lui révéler quelques informations.
« Sur la lune, Mamoru n'était pas lui-même. »
Vaseuse, elle se repasse le film de leur excursion sur l'astre mort et se redresse alors brusquement, comme si elle venait d'être réveillée en sursaut.
« Qu'est-ce qu'elle a voulu dire ? Il a vacillé sans comprendre pourquoi lorsqu'on est revenus sur Terre. Il a dit lui-même au temple Hino qu'il se sentait bizarre et que c'était comme reprendre le contrôle de son corps. Soit notre ennemi a ensorcelé Mamoru qui n'a pas ou peu de pouvoirs et il nous surveillait par peur qu'on en découvre trop ou alors, ce n'était peut-être pas Mamoru sur la Lune. Il l'aurait "remplacé" au moment où notre vigilance était moindre… Peut-être pendant les trajets aller et retour… »
Cela expliquerait pourquoi il a agi comme un bras cassé sur la lune et fait capoter l'attaque du quartet contre le monstre. Tous l'ont mis sur l'inversion de leur genre et leur âge qui a fluctué à plusieurs reprises et sur ses faibles pouvoirs mais ce n'était peut-être pas le cas.
Encore une fois, ses instincts sonnent juste et lui font froid dans le dos. Aucune d'entre elles ne s'est rendue compte de quoi que ce soit. Tout comme par le passé avec cette ennemie qu'elles ont découverte lors de leurs visions de leur vie antérieure au Silver Millenium. La haute vestale. Celle qui s'est faite passer pour la reine Béryl et a provoqué la guerre entre la Terre et la Lune. Elle avait le pouvoir de changer d'apparence et une capacité incroyable à tromper tout le monde, même les Sélénites avec de grands pouvoirs comme la reine. Cela voudrait dire que c'était elle qui était sur la lune. Elle pourrait être n'importe qui parmi leurs amis. Une collègue, une étudiante, un patron…
Comment la démasquer si elle ne peut pas faire part de ses découvertes à son groupe d'amis ? Serait-il possible de lui tendre un piège pour la forcer à révéler son identité ? Peut-être en… Ou bien en… Et puis… La fatigue finit toutefois par avoir raison d'elle et elle sombre alors dans un sommeil profond, ou tout du moins aussi profond qu'il puisse être dans une salle d'attente d'hôpital.
oOo
Minako arrive au studio d'enregistrement par la porte, accompagnée de Michiru.
« Ça me fait bizarre de ne pas me téléporter.
- Tu m'étonnes. Avant, nos ennemis avaient au moins la décence de nous attaquer environ une fois par semaine. Il y a une semaine, j'avais un concert et je me suis préparé à la dernière minute et je me suis téléporté dans ma loge au dernier moment. J'avais demandé à Haruka de faire mon maquillage pour que je me puisse répéter mes accords à blanc sans instrument. Je suis arrivée sur scène en ressemblant à une drag-queen. »
Minako éclate de rire.
« C'est tous les jours avec ce nouvel ennemi. On dirait qu'il ou elle veut nous avoir à l'usure.
- Oui, comme Bane avec Batman ! compare Minako.
- D'accord. »
Michiru et Minako restent deux personnes très différentes et si on enlève la musique, elles n'ont pas grand-chose en commun. Elles font donc leur reste du chemin en silence. À leur arrivée dans le studio, elles sont accueillies chaleureusement par les deux ingénieurs du son qui viennent leur serrer la main.
« Masato Yamashita. Enchanté de vous rencontrer.
- Je suis gay, bas les pattes. »
Minako est impressionnée. Elle l'a cernée tout de suite avant même qu'il ne mette les pieds dans le plat.
« Andy Shimizu. Ravi de vous rencontrer ? Je vous ai vu en concert à la Liquid Room, vous étiez fantastique.
- J'ai déjà accepté de travailler avec vous, vous pouvez ranger la brosse à reluire. Mettons-nous au travail. »
Michiru a toujours été froide, comme un mécanisme de défense, mais là, elle fait clairement du zèle. Les ingénieurs du son lui font écouter la chanson et isole ensuite la piste que la maison de disques veut réenregistrer.
« Je vois, commente Michiru après l'avoir écouté. Vous voulez quelque chose de similaire mais plus étoffé ou quelque chose de nouveau avec des arrangements complètement différents ?
- Nous n'avons pas d'idées arrêtées sur la chose. Tant que ça ne devient pas du death metal. vous avez carte blanche.
- Dans ce cas, puis-je passer dans la salle d'enregistrement et vous faire écouter ce à quoi je pense ? Vous me direz si ça se rapproche de ce que vous voulez.
- Allez-y. Le studio est à vous. »
Michiru s'exécute et joue ce qu'elle a en tête une première fois. Avant qu'ils n'aient pu dire quoi que ce soit, elle demande à Minako de venir chanter par-dessus pendant qu'elle joue le morceau une seconde fois.
Elle pose ensuite son instrument et croise les bras, fixant Andy et Masato. Très intimidé par son regard pour le moins intense, les deux jeunes hommes déplient lentement leur pouce levé vers le ciel, ou tout du moins le plafond, pour signifier qu'ils approuvent. Ils se comportent comme s'ils étaient face à un grizzli et qu'ils se déplaçaient très lentement pour ne pas provoquer l'animal.
Contre toute attente, l'expression et la posture fermée de la violoniste se transforme alors en un franc sourire.
« Je suis ravie ! J'avais peur que ça ne vous plaise pas. »
Les deux ingénieurs du son ont l'impression d'être à présent face à un animal sauvage qui vient de s'approcher et que le moindre mouvement brusque pourrait faire s'enfuir.
« C'est… très bien, Mlle Michiru ? tente Andy qui marche sur des œufs.
- C'est une affirmation ou une question ? répond Michiru par une autre question. Ce n'est pas à moi qu'il faut poser la question.
- Non, non, c'est parfait, tente de rattraper Masato. Vous pouvez nous jouer la suite ?
« Comment dire… Je n'ai que les mesures que je vous ai jouées… »
Il y a donc du travail mais aussi beaucoup de bonne volonté. Michiru a su montrer son professionnalisme et Minako l'est au moins tout autant. Avec l'aide des deux ingénieurs du son qui font de véritables prouesses, ils arrivent à étoffer les notes jouées par la violoniste en superposant les différents arrangements qu'elle joue afin de créer la mélodie qui accompagnera la version finale de la chanson.
Minako n'est pas en reste. Il lui semble qu'avec cette bande-son, elle a affaire à un nouveau morceau et qu'il lui semble comprendre pleinement la chanson pour la première fois. Ça reste de la J-pop sucrée et commerciale mais elle sait maintenant comment l'interpréter pour exploiter pleinement tout son potentiel et celui de la chanson.
Sa manière d'interpréter la chanson change donc en conséquence et il décide d'un commun accord de réenregistrer l'ensemble de la chanson, allant à l'encontre des directives de Mme Minekura qui souhaite que le single puisse sortir dans quelques jours. Cela veut donc dire qu'ils doivent avoir terminé à la fin de la journée pour présenter un produit fini et ne pas risquer de graves répercussions ou, dans le cas des deux ingénieurs du son, leur emploi.
Toutefois, soyons honnêtes. Ce ne sera jamais le single du siècle, probablement pas de l'année, ni même du mois car noyé dans la masse des nombreux singles de « Japanese Pop » qui sortent, sans compter les génériques de début et de fin des séries d'animation ou « anime ». Il gardera probablement à peine la tête hors de l'eau. Toutefois, une fois la deuxième partie du plan du Néant en marche, il deviendra un franc succès, un raz-de-marée, une obsession, lavant le cerveau des masses. Rien de plus normal pour l'industrie de la musique, non ? Toutefois, Black Hole Records va pousser le concept dans ses derniers retranchements.
Pour en revenir au moment présent, une chose est sûre, la complicité qui s'installe permet d'avancer à grands pas. C'est indéniable. Comme dans une bulle, ils ont l'impression d'être seuls au monde. Et en quelque sorte, ils le sont car ils sont les quatre seuls humains dans le bâtiment. De la secrétaire de l'étage à la femme de ménage en passant par la stagiaire qui leur apporte à manger et à boire, tous sont des reliquats de leurs combats passés qui ont survécu après que leurs « patrons » ont été vaincu par les Senshi.
Les heures passent à vitesse grand V. Ils en oublient même de manger ce que leur a apporté la stagiaire, une première pour Minako qui n'a rien à envier à Usagi en termes de compulsions alimentaires.
Vers 18 h 00, la secrétaire de l'étage frappe et entre.
« Mlle Tenoh et Mlle Tomoe vous attendent dans le salon du rez-de-chaussée. On m'a demandé de vous prévenir. »
Les ingénieurs du son attendent qu'elles aient fini d'enregistrer et font passer le message.
« Mlle Kaiou. Votre… petite amie et votre… hum… fille adoptive ? sont là. Elles vous attendent dans le hall du rez-de-chaussée, dans le petit salon
- C'est mignon. Pas la peine de marcher sur des œufs. Le mariage homosexuel n'existe pas dans ce pays. Haruka et moi avons opté par l'adoption de l'une par l'autre pour avoir une reconnaissance légale. Beaucoup de couples dans notre situation font la même chose. Nous avons obtenu la garde plénière d'Hotaru par son père qui n'a pas été reconnu compétent pour s'en occuper.
- Je… D'accord. Vous voulez arrêter là ?
- Minako ? On pousse encore trente minutes pour essayer de finir. Cela leur évitera de se faire virer et d'aller pointer au chômage pour avoir enfreint les ordres de leur supérieure sans avoir un produit fini à lui présenter ?
- Je suis d'accord. »
Les deux hommes, qui n'avaient pas réalisé cela, semblent tout à fait d'accord. Dernière ligne droite. Le regain d'énergie de la fin de journée/l'énergie du désespoir aidant, ils arrivent à terminer. Le produit n'est pas entièrement finalisé mais suffisamment abouti pour le montrer à Mme Minekura sans trop jouer avec le feu. Toutefois, dans ce métier, la prise de risque fait aussi partie du jeu.
La musicienne et la chanteuse rejoignent les deux hommes et après s'être félicités pour un travail bien fait et serrés la main, Andy et Masato leur expliquent qu'ils s'occupent de tout boucler car ils vont voir Mme Minekura qui va passer pour un débriefing éclair dans quelques minutes car elle est très occupée. Elles peuvent donc rentrer chez elles.
Minako passe aux toilettes et Michiru part calmement prendre l'ascenseur. Quand elle en ressort, son visage s'illumine quand elle voit sa compagne et celle qu'elle considère comme leur fille. Elle n'a pas l'habitude de montrer ses sentiments en public mais une petite voix lui dit de se jeter dans leurs bras, ce qu'elle fait, allant à l'encontre de ses instincts de préservation de ses relations amoureuses et parentales.
Haruka est surprise et ne peut s'empêcher de rougir.
« Vous m'avez manqué. »
Tout à son moment de tendresse, elle ne prête pas attention à la personne qui sort en courant de l'ascenseur et court vers elle.
« Mlle Kaiou ! Attendez ! Je suis Mme Minekura, l'imprésario. Je voulais vous rencontrer avant que vous partiez pour vous remercier. »
Elle se retourne et voit une jeune femme en tailleur bleu marine, les cheveux relevés en chignon, courir tant bien que mal vers elle en talons.
Le plan est en marche. Le monstre va apparaître et temporairement voler le cœur pur de Minako, forçant les Outer Senshi à révéler leur identité pour la protéger. Cependant, elle se rend vite compte que Minako n'est pas là, probablement encore à l'étage du studio d'enregistrement. Son monstre n'apparaît pas mais sa secrétaire sort de l'ascenseur. Elles échangent quelques civilités et sa subordonnée lui remet un dossier avant de faire apparaître une queue semblable à celle d'un scorpion avec laquelle elle la pique à l'épaule. Jamais un monstre de son niveau n'aurait pu percer sa peau. Il n'y a qu'une explication : le Néant a renforcé ses pouvoirs et Nemo est le dindon de la farce. Le poison, bien que déjà en train d'être rejeté par son organisme, a fortement perturbé ses pouvoirs et elle tombe à genoux en hurlant.
Le Néant la contacte alors directement dans son esprit, chose qu'il ne fait que très rarement et qui ne fait que confirmer ses craintes.
« Au fait, c'était ça le plan d'Omen pour faire sortir les Outer Senshi du placard. Enfin, pas sortir du placard dans ce sens-là… Ça, Neptune et Uranus l'ont déjà fait. Enfin, tu m'as compris. »
Perdue, elle regarde autour d'elle en essayant de garder la tête froide.
« Quelle est la suite du plan ? demande-t-elle à haute voix, provoquant l'incrédulité générale.
- Oh, pour toi, il s'arrête là. Comment dire ça dans des termes pleins d'amour et de considération ? Je te largue. Débrouille-toi. Ceci est mon dernier message. Adieu. »
Il est vrai que, comme ils n'ont aucun lien mental et sont déconnectés l'un de l'autre, cela n'a aucune importance si elle meurt ou si elles la capturent pour la questionner. C'est donc là que s'arrête son aventure mais elle ne tombera pas sans sortir les griffes.
Elle comprend bien qu'elle n'a pas et n'a jamais eu la force de les tuer car le plan n'en ait pas à la phase post-corruption du Silver Crystal et il a donc besoin de toutes les Senshi vivantes, excepté peut-être Sailor Pluto si elle ne revient pas d'entre les morts. Il lui a laissé assez d'énergie pour se battre comme un beau diable et c'est bien ce qu'elle compte faire.
De leur côté, les Outer Senshi réagissent au déploiement d'énergie et se transforment sans pouvoir le contrôler. Le trident de Sailor Neptune apparaît alors et crée une colonne d'eau autour d'elles.
« Qu'est-ce qui se passe ? demande Sailor Uranus à sa compagne. C'est toi qui a fait ça ?
- Non, je crois que ce sont nos pouvoirs qui se sont 'activés' pour nous protéger. Mon trident doit être en train d'essayer de nous montrer quelque chose. C'est généralement ce qui se passe quand j'ai une vision du futur ou du passé. »
Sailor Saturn décide alors d'aller secourir Mme Minekura mais Sailor Neptune la retient.
« Attends, il y a quelque chose qui cloche. Je crois que le loup est déguisé en agneau. »
C'est à ce moment-là que Minako sort de l'ascenseur et voit son imprésario à genoux sur le sol, blessée à l'épaule et se tenant le cœur, et à ses côtés sa secrétaire, Mimi. De la robe de cette dernière sort une queue de scorpion ensanglantée. Elle court vers la blessée. Elle s'agenouille vers elle.
« Je suis là. Je vais vous protéger. Venus Godd… »
Elle se repasse alors rapidement le film des trente dernières secondes dans sa tête et les pièces se mettent en place : l'aura malfaisante, oppressante et même suffocante qui ne vient pas de la femme-scorpion, la couleur du sang sur sa queue qui est noir et surtout ses trois amies transformées dans un lieu truffé de caméras de surveillance. Alors qu'un World Shaking la frôle et incinère la secrétaire, elle pose la main sur l'épaule de son agent, essayant de se convaincre de son innocence. Lorsqu'elle la touche, Nemo se met à hurler et Minako est violemment projetée contre le mur.
Elle se relève péniblement et époussette les morceaux de plâtre sur ses vêtements comme si de rien n'était.
« Elle vient de quelle partie de notre passé celle-là ? demande-t-elle, désabusée. Je ne la reconnais pas. »
Comme pour répondre à sa question, elle voit le visage de Kazuya changer à toute vitesse comme s'il n'avait plus le contrôle de qui elle est ou de ce qu'elle est.
Les pouvoirs de Sailor Neptune s'entrechoquent avec ceux de Nemo et ceux volés à Luna et trois personnes apparaissent : Mme Minekura, sa véritable apparence et la haute vestale. La véritable apparence rappelle les deux autres à elles mais le mal est fait. Son identité est dévoilée. Pas de peau de couleur, de difformités la faisant ressembler à un monstre sorti tout droit d'un tokutatsu mais une apparence humaine et pas une once d'humanité dans les traits du visage. Elles n'ont pas affaire à un sous-fifre et il leur est impossible de savoir s'il s'agit de leur ennemi ou d'un de ses généraux. Toutefois, une chose est sûre. Elle dégage une puissance incroyable et une aura effrayante et indéfinissable, un mélange de haine, de questionnement, de frustration et de colère, envieuse et profondément dégoûtée par la race humaine.
« Vous voyez ce que je vois ? demande Michiru.
- Oui, confirme Haruka. Je pense qu'on est arrivés au boss de fin de niveau. »
À suivre…
Après un gros passage à vide qui a dû vraiment se ressentir dans ce chapitre, je m'éclate à nouveau comme au premier jour. Je vais me faire plaisir dans les combats à venir, un peu comme Disney l'avait fait avec Power Rangers RPM à l'époque.
Miguel NOCHAIR
