Hello !
Ma régularité dans l'écriture revient doucement mais sûrement. Je ne sais pas si ça va durer, mais j'ai au moins rattrapé mon avance sur Paradis, donc je peux vous dire sereinement qu'on va (essayer de) repartir sur un rythme d'un chapitre par mois ! Je serais tellement heureuse de m'y tenir... Cette fic est loin d'être finie !
Un grand merci à ceux qui sont toujours au rendez-vous et enjoy !
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C'est rare que j'aie pas envie de sortir du lit à c'point-là. Et pourtant, c'est carrément le cas ce matin.
Enfin, ce matin... Il est midi passé quoi. J'crève de faim et les messages s'enchaînent sur mon portable qui arrête pas de vibrer sur ma table de chevet. J'ose pas les lire. Je sais d'avance c'que ça va être, de toute façon.
Et j'sais pas où est Ace. L'appart' est beaucoup trop silencieux depuis que j'me suis réveillé pour qu'il soit là. J'ai peur de prendre mon portable et que parmi la pluie de messages beaucoup trop gentils du genre « ça va mieux ? » de la part des copains, y'en a un d'Ace qui m'dirait « j'ai bougé, je sais pas quand je rentre. »
Ou « Je rentrerais peut-être jamais. »
Ou « Tu m'as terriblement déçu. J'aurais jamais pu croire que tu pouvais me trahir comme ça. »
Ou encore « Oublie moi et va faire ta vie avec ce connard de Torao de merde. »
J'relève la couette sur mon visage pour essayer de refouler les larmes qui montent. Je sais que j'me monte la tête tout seul. Ace est bien plus en furie après Torao qu'après moi, sinon il serait pas rentré avec moi hier soir. Sinon, il m'aurait pas chopé pour me coincer dans un câlin limite douloureux pendant c'qui m'a semblé être des heures. Sinon, il m'aurait pas fait l'amour comme il l'a fait après...
Ma main s'glisse par automatisme sur la peau de mon cou encore sensible. C'était beaucoup trop bizarre, hier. J'suis même pas sûr que j'y aie pris beaucoup plaisir, et d'autant plus après qu'il m'ait mordu à sang comme il l'a fait. J'ai pas encore été voir les dégâts, mais j'suis sûr que ça partira pas avant des jours et des jours. Comment j'vais faire pour cacher ça aux copains, moi...
Mon portable vibre encore et c'est juste absolument insupportable. Laissez-moi me noyer dans ma morve, mes questions et ma parano, bon sang ! J'veux juste être tout seul ! Me rendormir pendant des jours et que tout c'drama bidon ne soit plus qu'une histoire ancienne à mon réveil...
Encore une vibration et j'me redresse d'un bond rageur pour récupérer mon portable. La dizaine de notifs me donne juste envie de l'envoyer valser contre un mur, mais je prends quand même sur moi pour les regarder une par une.
Usopp [02:05] : Comment ça s'est passé le retour ?
Zorobro [02:23] : Appelle moi si t'as besoin.
Sanji [03:45] : Il faudraa vrament quon parle de tout ça luffy, on sinquiete tous là srx
Usopp [09:56] : ça va mieux ce matin ?
NamiLaChieuse [10:43] : Hey BG, t'es vivant ?
Choppy [10:59] : Coucou... Les autres m'ont raconté. Comment tu vas ? N'hésite pas à appeler si tu as besoin !
Robin [11:17] : Bonjour Luffy. Je sais que tu dois avoir autre chose à penser, mais la situation d'hier inquiète tout le monde. N'hésite pas à passer au Sunny si tu as le temps et l'envie, ou juste appeler sinon. Tu sais que nous sommes là pour toi. Prends soin de toi.
Ace [11:48] : Flippe pas jsuis en bas.
Torao [12:03] : Hey. Pas trop compliqué le retour ?
Usopp [12:24] : Tiens moi au courant mec, je m'inquiète...
Zoro [12:29] : Ça va ce matin ?
Évidemment, mon cerveau débile bloque surtout sur le message d'Ace. J'pousse un soupir soulagé, mais l'agacement prend le pas sur le reste. Je l'sais qu'Ace partirait pas comme ça... Il m'abandonnerait pas pour une connerie pareille, je le sais bien.
En plus, j'suis quasiment sûr que si j'avais pas réagi comme un bébé à pleurer toutes les larmes de mon corps sans raison, Ace aurait pas autant vrillé.
C'est totalement de ma faute, quelque part. Si j'avais repoussé Torao direct, ça aurait juste été plus simple. J'me serais pas posé un millier de questions. J'lui aurais juste dit que c'était mort et qu'il me convient très bien en simple pote et on serait passés à autre chose. Pas de larme, pas de crise, pas d'émotion qui explose pour je sais pas trop quelle raison à la mange-moi-l'nœud... Et pas d'Ace qui fait flipper tous mes potes de lycée parce qu'il menace de tuer Law en boucle, pas de potes qui font barrage pour l'empêcher de rentrer dans la maison, pas de menace d'appeler les flics s'il se calme pas, pas d'ambiance horrible sur le trajet du retour où on manque d'avoir un accident, pas d'Ace qui câble encore en rentrant et qui m'saute rageusement dessus...
Pas d'énième soirée fichue.
J'en ai marre.
J'sors enfin du lit pour me motiver à bouger. J'ai trop envie d'pipi, trop faim et une bonne douche pourra que me faire du bien. Ça sert à rien que j'reste juste au lit à déprimer.
J'jette quand même un coup d'œil en bas par la fenêtre de la cuisine et effectivement, j'y aperçois Ace sur les dalles avec mon skate. Il l'utilise définitivement plus que moi alors que c'est mon cadeau. J'suis nul jusqu'au bout.
J'prends quand même le temps de répondre aux copains le temps de m'avaler la moitié de la bouffe qu'on a dans les placards, histoire d'être bien calé pour la journée certainement infernale qui m'attend. Je leur réponds quasiment à tous que ça va et que j'les tiens au courant, qu'au pire on en parlera demain parce que pour le moment, j'ai juste envie d'être tranquille.
Par contre, j'sais pas trop quoi répondre quand j'arrive à Law.
Il a réagi incroyablement calmement hier. Il est resté de marbre tout du long face à Ace qui lui crachait les pires insanités à la tronche et il s'est même permis de se moquer un peu d'sa poire à un moment donné. Le mec pas trop suicidaire quoi. J'admire son calme olympien, et même celui d'ses potes. N'importe qui d'autre aurait vrillé et aurait appelé les flics sans préavis, mais eux ont attendu patiemment qu'Ace redescende et finisse juste par partir, veillant sur leur pote sans un mot. J'voyais même Shachi et Penguin échanger quelques blagues de temps en temps, comme si la situation était tout à fait normale.
Ils étaient bien les seuls. Tous nos autres potes savaient plus où se mettre... J'voyais Koby dans un coin qui m'envoyait des regards désolés - l'un des rares à avoir déjà rencontré Ace, il savait qu'il est du genre sang-chaud -, d'autres comme Bellamy ou Mikita qui nous jugeaient et se fichaient limite de notre tronche, ou encore d'autres comme Marianne ou Blue Gilly qui commençaient carrément à flipper et qui ont fini par partir...
J'espère que j'vais pas être trop le centre de l'attention demain au lycée...
J'finis par prendre mon courage à deux mains pour répondre à Torao. J'lui dois au moins des excuses d'avoir fichu sa soirée en l'air, après tout...
J'm'étonne qu'il me réponde presque aussitôt.
Moi [12:51] : Hey... Oui tkt, il a fini par se calmer. Jsuis vraiment désolé d'avoir ruiné ta soirée...
Torao [12:52] : Ne t'inquiète pas pour ça, des soirées on en refera. Ça a été quand même avec ton frère après ?
J'me mords la lèvre. « Ouais ouais ça a été Torao t'inquiète, si c'n'est qu'il m'a à moitié arraché le cou de rage en m'faisant l'amour et qu'il m'a limite fait peur, mais sinon, au calme ».
Bon sang.
Moi [12:54] : Il a fini par se calmer oui... T'en fais pas, c'est un nerveux, même s'il aurait pas dû réagir comme ça...
Torao [12:56] : Il a réagi comme il a réagi, c'est fait maintenant, n'en parlons plus. En tout cas, tu ne mentais pas sur le bro complex...
Moi [12:56] : Ouais... Si j'avais su...
Torao [12:57] : Ça serait plutôt à moi de dire ça... Mais tu es sûr que ça va ? Déjà que votre situation n'est pas très plaisante aujourd'hui...
Torao [12:58] : Excuse ma franchise, mais ça m'inquiète que tu sois sous la tutelle d'un gars qui peut péter des câbles pareils pour si peu.
Torao [12:58] : La violence au quotidien n'est pas normale, j'espère que tu en es conscient...
J'relis plusieurs fois son message, j'suis pas sûr de comprendre c'qu'il veut dire, là.
Il s'inquiète qu'Ace soit violent avec moi... ?
J'ferme mon portable brutalement et me lève d'un bond de la table du salon pour débarrasser mon petit déj'. Il est dingue. C'est pas parce qu'Ace est hyper protecteur avec moi que ça veut forcément dire qu'il est violent, c'est quoi ce raccourci bidon ?!
J'suis en train de devenir dingue. J'comprends qu'ils s'inquiètent, mais s'ils pouvaient JUSTE se mêler d'leurs affaires, ça me rendrait grandement service en fait... ! Ace a raison, il faut pas que j'les laisse faire. Ça part trop loin. Alors quoi, Torao va finir par envoyer les flics chez moi pour être sûr qu'Ace me tape pas dessus, maintenant ?
J'retiens encore mes larmes en enfilant mon blouson pour descendre le rejoindre, mais cette fois-ci, c'est de colère. Ils se concentrent tous juste sur les mauvais côtés d'Ace. Ils sont personne pour dire qu'il est peut-être dangereux pour moi. Moi, je sais très bien qu'il me ferait jamais le moindre mal. Jamais il lèverait la main sur moi. Il tient trop à moi pour ça, ça le tuerait de me faire du mal. Même mes parents peuvent en attester du paradis.
Arrivé dehors, j'l'observe quelques instants faire des figures en skate qu'il foire une fois sur deux. Il est toujours énervé, en atteste ses épaules crispées et le regard en coin qu'il m'envoie après m'avoir remarqué, suivi d'son ignorance royale quand il retourne à la planche.
… J'ai envie de le prendre dans mes bras. J'ai envie qu'il me serre contre lui et qu'il me dise qu'il est désolé d'avoir réagi comme ça, qu'il ne m'en veut pas, qu'il sait que je pensais pas à mal. Qu'on oublie tout et qu'on passe à autre chose...
Je voudrais qu'il arrive mieux à s'contrôler et que j'arrête de nous mettre dans des situations où il explose trop facilement, surtout.
- Tu vas rester planté là longtemps sans rien dire ? me crache-t-il au bout d'un moment en me tournant toujours le dos.
- ... C'est toi qui fais la gueule, je lui fais remarquer d'un air aussi boudeur qu'attristé.
Il soupire en récupérant le skate sous son bras et me fait enfin face. Son visage est complètement fermé, absolument pas avenant. Envolée la bonne humeur qui le poursuivait depuis quelques semaines bien agréables. J'ai l'impression de retrouver le Ace du Nouvel An qui aurait pu arracher le bras de Sabo pour taper Marco avec.
Il s'avance vers moi et m'attrape le menton sans douceur pour le relever et regarder mon cou.
J'ai pu constater dans le miroir un peu plus tôt que c'était tout aussi moche que c'que je pensais. Ça m'fait un énorme bleu qui a saigné et j'ai même une trace nette de canine. L'angoisse.
Ace soupire en me relâchant toujours aussi sèchement.
- T'aurais pas dû me laisser t'faire ça...
- Tu m'bloquais sous toi j'te ferais remarquer, bougonné-je. Comment j'aurais pu t'arrêter, vu comment t'étais énervé en plus...
- Oui, ça va ! Je sais qu'j'ai déconné hier ! Pas la peine de me le refoutre dans la gueule !
Et le voilà qui repart faire des figures en pestant. Il va tomber et rager encore plus, tu vas voir.
J'm'assois sur les marches en attendant qu'il daigne faire je sais pas trop quoi : se calmer ? Arrêter de faire la gueule ? Exploser un bon coup et oublier tout ça pour me proposer d'aller s'faire un Burger King et qu'on en reparle plus jamais ?
J'prends mes rêves pour des réalités.
Et il finit bien par tomber du skate, évidemment.
Il revient vers moi encore plus énervé et s'assoit lourdement à mes côtés. Le silence s'étire entre nous. Mal à l'aise, j'm'occupe en observant mon souffle faire des petits nuages de chaleur devant moi pour penser à autre chose. Je sais pas quoi faire d'autre. La tension entre nous est aussi pesante que déroutante... J'ai pas l'habitude qu'on s'fasse la tronche sans vraiment la faire. Ace m'aide pas. Je comprends pas ce qu'il peut bien se passer dans sa tête.
- ... Redis-moi encore pourquoi tu l'as pas repoussé tout de suite ?
... Bon bah j'ai ma réponse : il rumine toujours.
- J'te l'ai expliqué : parce que j'ai été surpris. Mon cerveau a mis trois plombes pour réagir...
- Mais pourquoi t'es parti seul avec lui dans sa chambre au préalable, putain ?!
J'enfonce ma tête dans mon blouson en fronçant les sourcils. J'lui ai déjà raconté toute la scène en détails hier dans la voiture, et encore une fois quand on est rentrés et qu'il tournait en rond dans l'appart comme un fauve en cage. Il veut que j'lui fasse un rapport écrit ou quoi ?
- J'sais pas moi. Torao c'est mon pote et il m'a proposé de voir sa chambre. 'Faut pas chercher, tu sais que j'aime bien fouiner.
- T'es con surtout. Et putain de naïf.
- Je pensais pas qu'il essayait d'me pécho ! me défends-je encore.
- T'aurais dû venir me demander mon avis ! feule-t-il en m'envoyant un regard furieux. Tu t'es juste barré là-haut sans m'le dire, putain ! Comment tu veux que j'me fasse pas des films après ça ?!
- Mais toi tu t'étais barré tout court... rétorqué-je, même si j'suis bien moins assuré que lui.
- Ses deux connards de potes m'ont fait vriller, j'te l'ai dit ! Et j'vois pas le putain de rapport, moi au moins j't'ai envoyé un message pour te prévenir !
J'remercie de tout mon cœur le voisin qui sort de l'immeuble au même moment et qui m'donne une accalmie. J'ai encore envie de chialer, j'en peux plus de cette ambiance. J'suis épuisé de me manger ses reproches et sa colère en boucle depuis hier...
- ... Pourquoi on a fait du sexe hier si tu m'en veux à c'point ? finis-je par pester dans ma barbe.
Il pousse un long soupir et s'affale sur lui-même pour planquer son visage contre ses genoux repliés.
- ... J't'en veux surtout d'avoir été naïf, mais je suis con de penser ça. La naïveté, c'est limite ta marque de fabrique...
- Et au pire y'a rien eu de mal... tenté-je encore pour sauver les pots cassés. C'est pas super cool, mais c'était qu'un bisou auquel j'ai pas répondu et Torao a bien compris que c'était mort...
- Ouais bah dans l'doute, j'veux plus que tu l'approches ni que tu lui parles, lâche soudainement Ace en relevant la tête pour fusiller l'horizon du regard.
J'bloque et écarquille les yeux.
- ... Quoi ? Mais j'ai pas envie d'arrêter de lui parler ! Il tentera plus rien, il a comp-
- J'M'EN BATS LES COUILLES QU'IL AIT COMPRIS, JE VEUX PAS QU'IL T'APPROCHE À PARTIR D'AUJOURD'HUI, C'EST CLAIR ?! SI JAMAIS J'LE REVOIS TOURNER AUTOUR DE TOI, TES PUTAINS DE POTES SUFFIRONT PAS POUR M'EMPÊCHER D'LE BUTER ! T'ES À MOI LUFFY, ET J'LAISSERAI PERSONNE T'APPROCHER D'CETTE MANIÈRE, SURTOUT PAS UNE ESPÈCE D'ÉMO ANOREXIQUE DE MERDE !
Il s'est relevé et repart faire des aller-retours sur les dalles en marmonnant des insultes pour lui-même.
… J'ai froid. Ça caille vraiment, j'vais pas dire le contraire. L'air est glacial depuis hier et Ace a même dû gratter la voiture pour qu'on rentre de chez Torao...
Mais pour le coup, j'crois que j'ai encore plus froid à l'intérieur de moi.
J'laisse des larmes silencieuses me tremper les yeux en regardant Ace faire les cents pas sans vraiment le voir. J'en reviens pas qu'il me demande vraiment ça. Torao est pas méchant et il est super compréhensif, il tentera plus jamais rien maintenant qu'on a mis les choses au clair, j'en suis sûr. Ace le saurait s'il arrivait à garder son sang-froid et qu'il avait juste été lui parler calmement hier. Torao est pas un pote dont j'suis méga proche, mais ça me ferait chier d'le perdre. J'vais pas juste arrêter de lui parler d'un seul coup juste parce qu'Ace me l'demande...
J'entends un bruit derrière moi et jette un coup d'œil par-dessus mon épaule, mais j'suis juste blasé de reconnaître Madame Jora qui a trouvé le courage d'ouvrir sa fenêtre pour faire sa fouine. Elle me fixe, observe ensuite Ace, et revient finalement à moi en ricanant.
- Ça ne va pas fort vous deux, hein... Quelle idée aussi de laisser des sales gamins dans votre genre sans adulte pour les surveiller...
J'serre la mâchoire et j'm'étonne moi-même de lui envoyer un doigt d'honneur comme toute réponse. Elle semble un peu surprise, mais Ace débarque à mes côtés pour en rajouter une couche.
- Rentre chez toi la vieille, où j'te jure que j'vais venir foutre le feu à ton appart' de merde en pleine nuit.
Elle blêmit sur place et j'pense que même moi, j'aurais fait dans mon froc de me la prendre dans les dents, celle-là. Elle nous envoie son expression la plus outrée et se met à marmonner dans sa barbe qu'elle va « appeler la police, ça ne va pas traîner », avant de refermer sa fenêtre d'un claquement sec.
Ace revient à moi et me fusille du regard.
- Pourquoi tu chiales encore... soupire-t-il, d'un ton toujours aussi énervé.
- ... J'peux pas juste arrêter de parler à Torao comme ça alors qu'on est dans la même classe... chouiné-je en reniflant. Tu veux que j'l'ignore... ? Que j'lui dise même plus bonjour ?
- Exact.
J'ose relever la tête mais j'croise qu'un regard aussi brûlant que déterminé.
Okay, le message est super clair : c'est pas une demande, c'est un fichu ordre...
J'grimace pour tenter de retenir encore des sanglots, mais quelque chose attire mon attention au-dessus de la tête d'Ace, alors j'lève le nez vers le ciel...
Il neige.
... La blague.
Ace suit mon regard et lève la tête aussi, probablement aussi surpris que moi de voir les petits flocons tomber délicatement sur nous. Le silence se fait encore plus assourdissant, mais étrangement, ça a quelque chose de reposant.
J'renifle pour essayer de chasser les dernières traces de chagrin qui m'étreignent encore la gorge, même si c'vide et cette panique persistent dans mon ventre. Ça nous offre une nouvelle accalmie. Une accalmie qui ressemble carrément à une sorte de...
De symbole.
C'est marrant, mais pour la première fois depuis longtemps, je sais exactement qu'Ace pense la même chose que moi malgré sa colère. Sa colère qui est d'ailleurs en train de redescendre tout à coup – enfin. J'le lis facilement sur ses traits qui se détendent à une vitesse spectaculaire.
Il finit par s'rasseoir lentement à mes côtés, épaule contre épaule. Il laisse le silence nous entourer paisiblement. On regarde la fine couche blanche recouvrir lentement les dalles en damier, laides comme c'est pas possible, mais qui nous ont pourtant vues grandir depuis toutes ces années, l'un comme l'autre.
J'suis sûr que comme moi, il repense à tous ces après-midi enneigés qu'on a passés ici quand on était petits. À toutes ces fois où la magie d'l'hiver maquillait complètement les dalles pour nous offrir seulement ce blanc apaisant à perte de vue. Aux dizaines de bonshommes et anges de neige qu'on a pu faire dessus. À nos concours débiles avec Sabo pour savoir qui arriverait à avaler le plus de flocons. Aux batailles de boules de neige géantes qu'on s'faisait avec tous les autres gamins du quartier.
De toutes les fois où Maman et Papa s'étaient joints à nous pour nous voir nous éclater avec un sourire aux lèvres.
Et surtout, de ces trois ou quatre dernières années où ils se désolaient en boucle qu'il ne faisait plus assez froid pour qu'il neige en hiver.
Tout comme nous, ils adoraient la neige. Et tout comme nous, elle leur manquait énormément.
- ... Papa et Maman seraient dingues s'ils nous voyaient aujourd'hui, pas vrai... ?
Ace met plusieurs longues secondes avant de réagir avec un petit pouffement cynique.
- Ils me tueraient. Ils me tueraient pour péter un plomb comme ça, pour te parler comme ça. J'imagine même pas la soufflante que j'me prendrais par Papa pour oser hurler comme ça sur son cadet adoré.
Un petit sourire se fraie un passage sur mon visage, à mon grand étonnement. Le moment est tellement bizarre. Aussi reposant que mélancolique, et aussi agréable qu'horriblement triste.
- ... J'dois t'avouer un truc, murmuré-je, comme si j'avais peur que ce que je dise ne l'énerve encore plus si j'parlais trop fort. Tu sais, je vois toujours Madame Hina, la psy du lycée...
Il ne réagit pas et continue de regarder droit devant lui d'une expression morne. Mais je doute pas qu'il doit pas trop aimer que j'le lui rappelle. J'continue, histoire d'arriver rapidement là où j'veux en venir.
- Ça me fait du bien d'la voir... Elle me fait relativiser sur plein de trucs... On parle souvent du fait que j'pleure beaucoup depuis... 'fin t'as compris. J'me rends compte que j'ai beaucoup plus de mal à gérer mes émotions qu'avant. J'me laisse submerger super vite... J'suis en train de me demander du coup si, au final, le fait que j'aie réagi aussi... stupidement hier... Ça vient pas de là...
Ace se frotte le visage et sa réponse doit être aussi peu audible que la mienne, d'autant plus étouffée par ses mains.
- Fort probable. T'étais plus autant un pleurnichard ces dernières années, que j'sache.
J'lui mets un coup de pied dans la cheville en réflexe, j'me reçois un coup de coude dans le bras en réponse. Aïe.
- ... Du coup, j'suis aussi en train d'me dire... Que si ça s'trouve, c'est pareil pour toi. T'y as déjà réfléchi ? Au fait que si tu t'énerves autant ces derniers mois, c'est à cause de tout ça... ? T'étais sur les nerfs de ouf quand tu gérais tous leurs trucs de paperasse, et même si ça s'est calmé après...
Il semble méditer sur c'que je dis, même si sa tronche m'indique qu'il est clairement pas convaincu par mon analyse du dimanche.
- ... Si, j'suppose que t'as étonnement raison, finit-il quand même par me répondre, à ma grande surprise.
Il me regarde et affiche une expression perplexe.
- Depuis quand t'es devenu un expert en psychologie de comptoir, au juste ?
- Je sais pas... Parler régulièrement avec Madame Hina me fait réfléchir sur plein de trucs auxquels j'avais jamais pensé avant... J'suppose que ça doit m'faire plus cogiter que j'le pense...
Il me fixe encore quelques secondes avant de regarder de nouveau devant lui. On rajoute rien. J'ai dit c'que j'avais à dire, et j'suis content d'avoir eu raison, pour une fois...
Ça excuse pas toutes nos conneries, mais on est encore visiblement sous le contrecoup de la mort de Maman et Papa, l'un comme l'autre. C'qui est plutôt logique, au final. Madame Hina me répète souvent qu'un deuil se fait pas en un claquement d'doigt. Que j'devrais pas m'étonner d'avoir envie de pleurer pour rien parfois. Que c'est normal que j'aie des sautes d'humeur, des envies bizarres, des coups de déprime, des réactions disproportionnées...
J'lui ai pas encore parlé du fait qu'Ace et moi on sort ensemble... J'me demande si j'devrais pas le faire, la prochaine fois. Elle sera sûrement compréhensive... Et elle m'aidera à m'apaiser sur le fait que le nouvel accrochage qu'il y a eu hier était p't'être pas vraiment de notre faute, à Ace, comme à moi...
- ... Je suis désolé Lu', souffle soudainement Ace en baissant la tête, comme si le poids du monde s'abattait sur ses épaules. J'aurais pas dû réagir comme ça et t'afficher devant tout le monde... Et je devrais pas t'en vouloir alors que t'as repoussé ce con, même si t'as eu de la latence... Au final, je t'imagine bien paniquer comme un crétinus et pas savoir quoi faire sur le coup... C'est totalement toi, j'devrais le savoir pourtant.
J'tire une moue pas vraiment convaincue, même si j'suis quand même extrêmement soulagé de l'entendre s'excuser.
- ... Je suis pas un crétinus, marmonné-je en faisant semblant de bouder.
Il relève la tête vers moi et m'offre un grand sourire peiné. Un sourire magnifique et tellement rayonnant que mon cœur rate un battement, mais affreusement peiné.
- Si, tu l'es. Tu l'es parce que tu me laisses faire...
Il s'approche de moi, très près. Trop près. Son souffle chaud vient me réchauffer le visage et mes yeux tombent malgré moi sur ses lèvres, l'envie de les dévorer montant d'un coup.
Et j'ai aussi envie de me moquer complètement que quelqu'un puisse nous voir à cet instant, pour être honnête.
- Ne me laisse pas te faire du mal comme ça... me chuchote Ace, sa bouche frôlant la mienne. J'perds beaucoup trop la tête quand ça te concerne, tu sais. T'es le centre de mon univers. J'tourne plus rond si t'es pas là... Alors, si quelqu'un menace de t'enlever à moi, j'suis incapable de réagir calmement...
- Mais personne pourra jamais m'enlever à toi Ace, chuchoté-je de la même manière tout en caressant sa joue fraîche. 'Faut pas que tu flippes pour ça... Toi aussi t'es l'centre de mon univers... Comment j'pourrais te trahir et prendre le risque de t'perdre... ?
Son sourire m'avale en entier. Son bras passe autour de mes hanches pour me rapprocher de lui et je réponds à son baiser comme un affamé en quête d'un peu d'amour.
J'mens pas quand j'dis ça... J'serais perdu sans Ace. Il est presque tout c'qu'il me reste aujourd'hui, et j'suis bien rassuré de savoir que c'est la même chose de son côté.
On finit par se séparer et on décide d'un commun accord de remonter avant de s'transformer en bonhommes de neige gelés pour de bon. On sera beaucoup mieux à continuer notre réconciliation au chaud. Il va récupérer le skate qui a roulé un peu plus loin quand j'lui fais remarquer qu'il resterait quand même le bonhomme de neige le plus sexy de tout l'pâté de maison, et ça le fait marrer.
Il se marre encore plus après que j'aie reçu violemment un truc glacé à l'arrière du crâne et que j'me tourne vers lui dangereusement.
- Ace... Tu sais pourtant que j'te défonce en bataille de boules de neige, ricané-je machiavéliquement, maintenant qu'il est bien plus chill.
- Ben ramène-toi pour me l'prouver alors, microbe, me cherche-t-il de son sourire canaille qui m'fait tomber.
C'est parti pour une bataille glacée et mortelle qui va nous valoir un bain brûlant, des chocolats chauds et sûrement un fichu rhume, alors.
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Je m'en veux. Je m'en veux tellement.
Mon regard n'arrête pas de se poser par automatisme sur la marque bleutée dans le cou de Luffy en me demandant en boucle comment j'ai pu me laisser guider par la colère à ce point. Les seules fois où je me suis permis de lui faire volontairement mal dans nos vies, c'était quand on se battait. Je lui ai déjà mis des raclées mémorables, mais c'était fraternel avant tout, donc ça ne compte pas.
Mais hier soir... J'ai vraiment voulu lui faire du mal. J'ai voulu le marquer. Lui rappeler qu'il était à moi, et à personne d'autre. J'ai voulu lui apprendre ce qu'il en coûtait de s'éloigner de moi d'une quelconque façon, lui faire comprendre comme la vision d'un autre qui le touche et qui le fait sien m'a fait un mal pas possible. La simple image persistante derrière mes yeux de cet enfoiré de gothique qui l'embrassait m'a fait perdre la moindre miette de rationalité.
J'aurais pu tuer ce fils de pute s'ils ne m'avaient pas retenu, j'en suis certain.
Et maintenant que ma colère est enfin complètement retombée grâce à ce rappel à l'ordre un poil trop surnaturel provoqué par cette foutue neige, je me rends compte comme j'ai déconné.
Le portable de Luffy a vibré plusieurs fois ce matin. Usopp l'a appelé dans l'après-midi et ils sont restés un bon moment au téléphone, certainement parce qu'ils étaient tous inquiets et peut-être même suspicieux. Moi qui voulais garder absolument notre secret enfoui, j'ai vraiment merdé de A à Z. Ma réaction d'hier était déjà disproportionnée venant d'un petit ami, mais alors venant d'un frère... J'ai affiché Luffy devant la moitié de son lycée, sérieusement ébranlé notre secret aux yeux de ses potes, me suis comporté comme un enfoiré avec lui en rentrant, lui ai presque forcé la main en le prenant comme un prédateur enragé pour être certain de marquer mon territoire... Après que je me sois plié en excuses en réalisant l'ampleur de la violence dont j'avais fait preuve envers lui, il m'a assuré qu'il était bien consentant sur le coup, mais quand même... Ça ne pardonne pas mes actes.
Mais putain... J'ai eu tellement la haine. Tellement peur, aussi. Peur à l'idée que cet enfoiré lui eût fait du mal, vu comme il pleurait comme une fontaine quand on l'a retrouvé avec Usopp.
On s'est expliqués bien plus calmement après notre bataille dans la neige qui nous a bizarrement fait du bien à tous les deux, et c'est mieux comme ça. Je préfère largement nous voir confortablement installés dans notre canapé sous un plaid, devant la télé, Luffy qui m'utilise en oreiller et moi qui joue avec ses cheveux par automatisme, qu'en guerre froide parce que je suis incapable de gérer ma colère.
C'est étrange à dire et j'ai la haine de donner du crédit à une connasse de psy, mais Luffy et elle ont raison : ça fait seulement trois mois. Personne n'irait totalement bien au bout de trois petits mois après être devenu subitement orphelin. J'ai tendance à étouffer le deuil au fond de moi, me forcer à penser rapidement à autre chose quand mon regard se pose inconsciemment sur les photos de famille, les bibelots de Makino ou le bureau de Dragon quand je vais dans leur chambre... Mais le fantôme de leur présence rôde toujours. Invisible, insidieux, puissant.
Je déteste toujours autant ce putain d'appartement, et c'est encore pire maintenant. Tout me les rappelle. Même le simple fait de voir Luffy allongé sur le canapé de tout son long de cette manière. J'entends clairement la voix de Dragon qui résonne en râlant un « et où est-ce que je m'assois maintenant, Luffy ? » pendant que Makino se moque doucement derrière.
Est-ce que c'est aussi pour cette raison que j'ai encore plus peur qu'avant qu'on ne m'enlève Luffy... ? Est-ce que le deuil et la solitude sont en train de me rendre peu à peu encore plus taré et instable que je ne l'étais déjà... ? Qu'importe si c'est le cas au fond, tant que Luffy n'en paie pas les pots cassés. M'arranger pour être certain qu'il ne s'éloigne pas de moi, très bien. Mais pas aussi frontalement. Pas aussi violemment. Pas en faisant de lui un dommage collatéral de ma colère alors que ce n'est pas vraiment de sa faute.
Par contre... J'espère de toute mon âme qu'il va m'écouter et ne plus approcher de ce "Torao". Je veux bien prendre sur moi, ravaler ma rage et essayer de me contrôler, mais je jure tout de même que je le bute si je le revois tourner autour de mon petit frère. La pulsion soudaine de proposer à Luffy de revenir le chercher à la sortie du lycée pour m'en assurer me démange comme jamais. Mais je sais d'avance que ça sera un grand non, alors je me fais violence et ferme ma bouche. Je sais qu'il a besoin de ce moment privilégié avec Usopp et Chopper, il me l'a bien expliqué quand il bataillait pour que je le lui rende. Une partie de moi le comprend, même si la partie principale la refuse tout bonnement.
Je me rends bien compte que je suis toujours là à penser très sérieusement qu'il n'a besoin que de moi et juste de moi, mais c'est faux. Il a besoin de ses potes, je le sais. Il a besoin des appels réguliers de Garp qui nous fait comprendre qu'il s'inquiète et qu'on lui manque en nous gueulant dessus. Il a besoin des visites surprises de Shanks qui nous submerge avec sa bonne humeur inébranlable et ses sourires putain d'apaisants. Il a besoin des visios qu'on fait avec Sabo qui nous raconte ses déboires d'étudiant épuisé. Et il a même certainement besoin des rares messages de Betty pour lui demander des nouvelles, je suppose.
Pas comme moi qui arrive à survivre juste avec lui à mes côtés, même si la solitude n'en reste pas moins pesante par moments.
Mais je gère mieux que lui.
Ou du moins... Je le croyais.
... Peut-être que je devrais revoir un psy moi aussi, après réflexion...
- On éteint la télé ? me demande subitement Luffy en relevant la tête vers moi. J'regarde pas vraiment et j'ai l'impression qu'toi non plus...
Je lui souris et lui obéis après avoir hoché la tête. Une pression sur la télécommande plus tard et le silence retombe dans l'appartement.
Le tic-tac de l'horloge parvient immédiatement à mes oreilles. Bruit insupportable au possible depuis que j'ai facilement 15 ans, et encore plus depuis que Makino et Dragon ne sont plus là. Ce simple petit bruit me donne la même impression qu'un coup de poing dans le bide qui me mettrait K.O. sur-le-champ. Il a tendance à me foutre la nausée, à simplement me donner envie de hurler pour le palier ou à m'arracher les oreilles pour ne plus l'entendre.
Mais à cet instant... Je me rends compte qu'il est juste reposant. Ça doit bien être la première fois que j'ai cette sensation étrange. Mon cerveau carbure toujours à mille à l'heure, comme à son habitude quand je n'ai pas de THC dans le sang pour le calmer, mais ça ne me donne pas le même sentiment de panique et de trop-plein que d'habitude. C'est simplement... agréable. Agréable de ne pas avoir tous les sens constamment en éveil, pour une fois. Mes oreilles sont au repos, mes yeux aussi vu que la simple lumière des guirlandes du sapin de Noël - qu'il faudrait qu'on se décide à ranger un jour - ne suffit pas à bien illuminer la pièce. Il y a simplement mon corps et celui de Luffy enlacés. Sa chaleur bienvenue qui se fond avec la mienne sous le plaid, ses doigts qui caressent ma peau sous mon t-shirt d'un geste distrait, ses yeux perdus sur le vide du plafond qui s'attardent parfois sur moi par à-coups.
Les miens qui viennent se perdre sur la baie vitrée pour regarder la neige qui continue de tomber dehors.
- ... Tu vas encore devoir gratter demain, me rappelle-t-il d'une voix lasse en suivant mon regard. Quoiqu'si ça s'trouve, ils vont fermer les écoles si les routes sont gelées...
- Rêve pas, ils doivent déjà être en train de saler.
- Ouais... À mon grand regret.
Je rigole doucement et me plie en deux pour déposer un baiser dans ses cheveux, avant de les caresser d'un geste tendre.
- Tu sais comme j'adorerais qu'tu sèches tout le temps les cours pour rester avec moi... Mais faut que t'aies ton bac, sinon on sait tous les deux que l'année prochaine sera insupportable pour toi.
- Je saiiis... soupire-t-il en roulant sur lui-même pour se mettre à plat ventre sur mes genoux, la tête soutenue par ses poings et le regard toujours fixé au dehors. J'arrive pas à m'motiver à bosser...
- Et je te comprends à cent pourcents... murmuré-je avec un sourire en redessinant les courbes de son dos du bout de mes doigts. Papa avait dû me menacer de m'envoyer en séjour chez le Vieux pour que j'me mette à réviser en Terminale, tu t'souviens ?
- Shishishi et comment... ! C'était trop marrant d'te voir disparaître en courant dans ta chambre dès qu'il disait qu'il allait l'appeler pour lui dire de venir te chercher... C'était une bonne carotte, mais ça marcherait pas avec moi, rajoute-t-il avec une moue.
- Il faudrait en trouver une autre pour toi... réfléchis-je, mon doigt tirant sur son sous-pull pour dénuder son épaule, histoire que mes lèvres échouent dessus pour la couvrir de baisers aériens.
- ... Donc, 'faut que j'trouve une idée pour me faire flipper, c'est ça... ? J'crois que j'vais te laisser gérer hein...
Je ris contre sa peau, avant de planter délicatement mes dents dans sa chair et la lécher après lui avoir arraché le petit gémissement sexy que je recherchais.
- Je serais aussi perdant si je te menace d'une grève de sexe, alors j'te le propose même pas... Une grève de bonne bouffe, peut-être ?
Il se retourne brusquement pour me fixer, l'air grave, pendant que je lui rends son regard tout en continuant mes baisers légers avec un sourire amusé.
- ... C'est-à-dire ?
- C'est-à-dire... Plus de viande tant que tu révises pas ?
- Non, Ace ! Tu peux pas faire ça ! couine-t-il et je pouffe de rire.
- Si, je peux. On va donc partir là-dessus. Et sur un resto de ton choix si je juge que t'as assez bien travaillé.
Sa grimace de dégoût n'a pas de prix et il s'affale sur moi comme un désespéré pour gémir de malheur.
- Pourquoi j'ai parlé d'ça, moi...
- Parce que t'es un minimum sérieux et c'est très bien Lu', lui réponds-je avec une petite claque sur ses fesses qui part toute seule. T'es plus sérieux que ton aîné, j'suis fier de toi de ne pas avoir suivi mes traces.
- Hmpf. Qu'tu m'aides à réviser marcherait bien aussi, maintenant qu'j'y pense...
Il me jette un coup d'œil par-dessus son épaule et je m'amuse à le deviner légèrement lubrique.
- Tu pourrais être mon prof particulier...
- Ah oui ? T'aimes bien ce genre de jeu... ? susurré-je en venant mordiller son oreille, ce qui le fait plus rire qu'autre chose. Tu devrais pourtant pas me lancer là-dessus, j'aurais plus envie d'te sauter dessus que d'te faire vraiment réviser...
Il se retourne de nouveau sur le dos pour me faire face et prend mon visage en coupe pour m'embrasser. Bonheur total.
- À toi d'être sérieux, alors. Il paraît que c'est pas légal pour un prof de s'taper son élève, tu sais !
- Niveau légalité et bonnes mœurs, j'crois qu'on est plus à ça près toi et moi... ricané-je contre sa bouche.
- Shishishi, pas faux !
Il m'embrasse de nouveau et je passe mes bras autour de lui par automatisme pour le coller un peu plus à moi. Ma faim de lui vient me titiller le bas ventre – pour changer -, mais il semble s'évertuer à rendre notre échange chaste. Je lui concède volontiers et calme mes ardeurs, j'imagine qu'il en a bien besoin.
Et il a raison. Ce moment doux nous fait un bien fou, j'en suis persuadé. Le simple écho de ses baisers légers sur ma joue. Sa respiration paisible à mon oreille. Son corps lové tout contre le mien. Nos esprits sur la même longueur d'onde. La paix qui est enfin revenue entre nous.
Le tic-tac de l'horloge et la neige qui tombe toujours au dehors…
Tout est parfait.
- ... Je t'aime, Luffy.
Il ne me répond pas. Il ne me répond plus depuis qu'il a réalisé que cette affirmation avait un sens bien plus profond de mon côté que du sien. Je suppose qu'il a peur que sa réponse soit prise pour une déclaration de niveau équivalent à la mienne. Mais je ne m'en formalise pas. Je sais qu'il m'aime déjà bien plus que n'importe qui en ce monde. Ça a presque toujours été, et ça sera certainement toujours.
Je me repais donc de son sourire contre ma peau comme seule réponse : ça me suffit. Après tout, je ne lui demanderais jamais de m'aimer comme je l'aime.
Tout simplement parce que je suis persuadé que c'est totalement impossible.
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- Avril Lavigne – Innocence -
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Y'avait urgemment besoin d'un moment de sérénité avec les frangins, je crois. Même s'il est un peu doux-amer, j'espère qu'il vous a plu et vous a fait le même bien qu'à moi au cœur de la tempête de drama qui n'arrête pas de secouer cette fic dans tous les sens x)
