Hello tout le monde !
On est déjà au moins d'octobre, ça passe beaucoup trop vite... J'espère que vous avez à peu près survécu à votre rentrée pour les concernés, et je vous souhaite bon courage pour cette fin d'année qui peut en déprimer plus d'un. (cc je suis le positivisme incarné)
On retrouve les mugis en pleine crise "Ace", ce gros arc de l'angst absolu continue et j'espère que vous y survivrez... Perso j'ai adoré écrire ce chapitre et le suivant. J'ai conscience qu'ils sont très longs et qu'ils tournent peut-être un peu en rond par moments, mais ce sont des passages qui me tenaient à coeur d'écrire. Et puis, surtout... petite apparition d'un perso hyper tertiaire, mais qui me fait beaucoup trop rire ici. J'espère que je vous ferai aussi un peu marrer avec iel... x)
Enjoy !
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J'regarde le paysage défiler derrière les vitres de la voiture de Sanji, l'estomac vide et complètement tordu, la nausée au bord des lèvres, les yeux qui bataillent pour retenir les larmes qui menacent d'les noyer et moi avec.
La main de Robin est chaude dans la mienne. Elle me la serre avec force et son regard est aussi tourné vers l'extérieur. Sanji et Usopp sont à l'avant, l'habitacle est silencieux comme un cimetière, y'a que l'autoradio qui fait tourner une station qu'j'entends à peine, vu comme le son est bas.
Et il pleut. Pas beaucoup, de la vieille bruine nulle et déprimante, mais c'est assez pour m'saper un peu plus le moral.
J'jette parfois des coups d'œil dans l'rétroviseur droit, devant moi, pour constater qu'Usopp ne perd pas son expression glaciale, tellement éloignée d'son lui habituel. J'ai une peur bleue qu'il m'en veuille à tout jamais. Qu'il arrive jamais à me pardonner qu'Ace aie failli blesser sa mère par ma faute. J'sais pourtant qu'aucun des trois présents ici ne l'pense et les regards insistants de Robin avant qu'on prenne la voiture me l'ont encore une fois prouvé, mais j'arrive pas à m'ôter cette idée d'la tête. J'me sens coupable. Coupable de pas savoir gérer Ace, coupable d'le laisser faire des trucs comme ça, j'en sais rien...
Coupable de sortir avec lui... ? Ce qui, dans l'cas contraire, le pousserait pas à péter des câbles pareils ? J'crois que j'me voile la face. Il aurait été fou d'la même manière si on était encore juste frères. C'est lui qui est juste... Trop...
Bon sang.
La voiture s'arrête et j'vois Sanji jeter un œil à Usopp. Celui-ci prend une grande inspiration.
- ... Merci Sanji.
- C'est normal. 'Faut bien que je rentabilise mon permis de temps en temps.
Usopp lui renvoie un p'tit sourire tordu, auquel Sanji répond pourtant d'bon cœur. Puis, il se tortille pour se tourner vers moi. Son regard est moins dur qu'un peu plus tôt, plus triste... Mais ça empêche pas mon cœur de s'serrer un peu plus.
- Luffy... J'espère que ça va aller pour toi en rentrant. N'hésite pas à appeler si y'a un problème...
J'suis surpris d'entendre ça, tellement surpris. Mais pas autant d'le voir se contorsionner pour passer le haut d'son corps à l'arrière et me prendre maladroitement dans ses bras. Mon envie de pleurer redouble. J'le sais pourtant, qu'Usopp est pas quelqu'un de rancunier et qu'il doit être la dernière personne au monde à réagir injustement... Mais quelque part, j'trouvais ça vraiment normal qu'il m'en veuille.
Mais il m'en veut pas. Au contraire, son câlin m'prouve qu'il s'inquiète certainement pour moi...
- Ne t'en fais pas, lui chuchote Robin en passant une main dans sa nuque. Sanji et moi allons nous occuper de Luffy. Va t'occuper de ta mère, Usopp...
Il me lâche et hoche la tête avec une expression pincée. Il la serre brièvement dans ses bras à son tour, enchaîne avec Sanji et sort enfin sous la pluie morne.
Sanji lâche un long soupir dès que la portière claque et qu'on le voit s'éloigner dans la direction de son immeuble au petit trot.
- Bon... À ton tour, Luffy.
Il redémarre et prend la direction d'mon propre immeuble, à trois minutes de là. Mon ventre se tord un peu plus et les doigts d'ma main, que Robin a récupéré, écrasent les siens. Certainement douloureusement, mais elle fait pas d'commentaire. Parfaite qu'elle est.
Sanji arrête de nouveau la voiture et j'lutte contre moi-même pour pas lâcher un gémissement de désespoir.
- ... Est-ce que tu veux qu'on monte avec toi ? me propose Sanji en se tournant à l'arrière.
- ... J'pense que c'est une mauvaise idée... balbutié-je difficilement tellement j'ai la gorge serrée. Il va encore plus vriller s'il vous voit...
- Nous pourrions toujours attendre en bas le temps que tu nous dises que tout va bien... ? propose Robin. Zoro et Nami peuvent rester seuls tranquillement encore un moment, je pense ?
- Cette feignasse de Marimo va certainement ronfler encore une bonne heure, répond Sanji en roulant des yeux. Et Nami a l'habitude de dormir chez moi, donc elle se débrouillera... Ils verront mon mot, ils ne s'inquiéteront pas.
Mes yeux brouillés d'eau salée fixent le dos du siège devant moi, incapables de s'lever pour affronter mes deux amis. Mais je sais qu'ils attendent une réponse. Et au fond, j'sais aussi qu'ils vont m'attendre en bas jusqu'à c'que je leur envoie un message pour leur dire que tout va bien. Ils vont pas me laisser comme ça. T'façon, mon attitude est pas anodine, j'pense. J'suis dans un état de nervosité lamentable et ils ont pas beaucoup l'habitude de m'voir comme ça. Même ces derniers mois, ouais. En général, ces derniers temps quand j'craquais, c'était surtout à la maison, avec Ace qui veillait sur moi...
J'ravale encore un gémissement de douleur et m'décide à bouger dans un sursaut de courage. Sinon j'y arriverais jamais. J'lâche la main de Robin et ouvre la portière dans la foulée, sans un mot. J'ai la gorge trop serrée pour ça.
- Dix minutes, Luffy ? m'appelle Robin d'une voix forte. Ça serait bon ? Si dans dix minutes nous n'avons pas de nouvelle de ta part, nous montons... ?
J'm'arrête et ose enfin la regarder. Quelques secondes passent avant que j'hoche lentement la tête, toujours incapable de parler. J'referme la portière derrière moi en priant intérieurement qu'ils seront pas forcés d'faire ça. Y'a pas de raison, pas vrai... ?
Et concrètement, y'avait pas de raison qu'ils s'inquiètent autant pour moi et qu'ils en viennent à me proposer ça, à la base.
Une fois, j'suis pas rentré à la maison de la nuit sans avoir prévenu Papa et Maman... J'avais dormi au Sunny et j'avais oublié d'leur envoyer un message. J'me suis réveillé avec quelques appels en absence, j'suis rentré et j'me suis pris une petite soufflante par Papa sous l'regard inquiet de Maman... Mais c'était tout. Deux heures et la promesse que je les inquiéterai plus jamais d'cette manière plus tard, c'était déjà oublié.
Pourquoi, avec mon frère, mon mec, la personne avec qui j'suis le plus complice au monde, qu'j'aime tellement, qui m'aime p't'être encore plus en retour, pourquoi... Pourquoi ça devrait être dix fois plus compliqué que cette fois-là ? Cette situation est pourtant jamais arrivée, mais j'suis persuadé que ma vie se joue en montant ces fichus escaliers jusqu'à mon étage.
Encore pire que cette fois où j'étais rentré de chez Usopp après l'histoire du suçon, avant qu'on s'mette ensemble, j'ai jamais autant appréhendé de rentrer chez moi.
... En fait, si. Une fois, je l'ai plus appréhendé. Ce jour-là, où Ace est venu m'chercher pour la première fois au lycée. Et qu'on savait très bien tous les deux que l'appartement serait vide à notre arrivée et qu'il le resterait à tout jamais.
Quelque part au fond de moi, j'lui en veux tellement de me rappeler cet horrible souvenir.
Mes mains tremblent quand j'enfonce la clé dans la porte, mais j'suis qu'à moitié surpris de la retrouver déverrouillée. La surprise est déjà plus violente quand j'entre et que mes yeux s'déposent à l'intérieur.
... Bon sang.
En temps normal, ma première pensée aurait été d'me dire qu'on a été cambriolé. À l'image de toute ces scènes dans ces films d'action où les méchants de l'histoire retournent l'appartement du héros pour retrouver la clé USB qui contient des données ultra secrètes qui peuvent détruire le monde, j'sais pourtant qu'il y a rien à trouver, ici. Comme je sais pertinemment qu'c'est pas des cambrioleurs, puisque la télé est toujours là, bien en place.
Elle est bien la seule. J'm'avance un peu dans le salon et j'constate que la table basse, fracassée au bout d'la pièce contre la baie vitrée, a perdu un pied. La baie vitrée qui est d'ailleurs fracturée, génial. L'horloge est brisée au sol, la bibliothèque et tous les livres sont à terre, c'est un boxon monstre.
Mais au-delà d'ma peur et de mon désespoir, j'ai soudainement un autre sentiment qui naît en moi en voyant quelques bibelots de maman en miettes sur le sol, ainsi que son fauteuil retourné.
... De la colère.
J'serre les dents et mes larmes se libèrent enfin pour rouler sur mes joues, silencieuses. Le mélange d'émotion est infâme. J'ai jamais connu ça auparavant. Le tremblement de mes membres est toujours là quand j'redresse lentement le fauteuil pour le remettre sur ses pieds. Heureusement, il a rien. Contrairement à tous les petits hiboux mignons en porcelaine que Maman aimait tellement.
J'préfère pas m'attarder sur eux, ça me retourne le bide comme jamais. J'fais volte-face, jette un œil mécanique au portrait de nous quatre qui trône au-dessus du canapé. J'regarde le Ace de 16 ans en ayant quelques vagues insultes qui me traversent l'esprit à son égard.
Ça doit être la première fois de ma vie que ça m'arrive. Bon sang.
J'essaie d'éviter d'observer l'état du mur de l'entrée qui a été marqué de traces de débris divers et, surtout, qui a gagné un nouveau trou. Est-ce que ça m'étonne ? Pas du tout. En revanche, mon pied écrase quelque chose que mon inconscient identifie tout de suite, et j'suis étonné de découvrir le portable d'Ace au sol. J'me baisse pour le ramasser, l'incompréhension me gagnant, mais tout s'éclaire quand j'allume l'écran et que j'constate dans quel état il est.
Okay. Il l'a fracassé contre le mur et n'a donc pas pu m'appeler, ni répondre à mes messages. Très bien, tout s'explique. C'est parfait. Merveilleux. Il a donc été emmerder la mère d'Usopp en plein milieu de la nuit à cause de sa propre connerie.
Il est donc réellement un gros con jusqu'au bout.
J'me blinde pour avancer dans la direction des chambres, me rappelant que j'ai pas toute la journée devant moi : Sanji et Robin attendent. J'prends mon propre portable après avoir délaissé celui d'Ace, histoire de leur envoyer un message pour les prévenir que j'le cherche. L'appart' est drôlement silencieux pour le moment : soit il dort mais ça serait étonnant qu'il se soit pas réveillé en m'entendant rentrer, donc il cuve après s'être bien déchiré la tronche hier soit...
... Putain. C'est le seul mot qui m'vient en tête quand je découvre ma chambre. Ma mâchoire se serre un peu plus, mes larmes redoublent, pourtant toujours discrètes. Autant j'pouvais plus ou moins avancer dans le salon, ici, j'pourrais pas mettre un pied devant l'autre pour atteindre ma fenêtre. Tout est saccagé, toutes mes affaires sont à terre. Mon placard est vidé, mes tiroirs sont retournés, mes feuilles de cours sont éparpillées ici et là.
Pourquoi… ? Il cherchait un truc... ? Quoi ? Ça n'a aucun put- de fichu sens... !
Déjà un peu moins mou, un peu plus guidé par la colère et un sacré seum, j'passe dans la pièce d'à côté. Sa chambre a morflé un peu aussi, elle était pas autant en bordel la dernière fois que j'y suis allé y'a quelques jours : j'sais qu'il l'avait rangée pour installer son banc de muscu à la con. J'ai une montée violente de stress quand j'me dirige vers la dernière chambre, prêt à lui arracher les yeux s'il a réservé le même traitement à la chambre de Papa et Maman. Fort heureusement, non, elle est intacte. Intacte, mais vide aussi. J'retourne à grandes enjambées dans la cuisine, - inutile, j'le sais, mais au moins j'serais sûr à 100% -, elle est vide aussi, intouchée aussi, ainsi qu'la salle de bain.
Il est donc pas là. Et il a pas son fichu portable sur lui.
Revenu dans l'entrée, j'jette un œil au support du téléphone fixe qui a été amputé d'sa partie principale y'a quelques semaines, après qu'Ace l'ait jeté contre un meuble, ainsi qu'à son portable pété qu'j'ai reposé sur le canapé. Tout ça parce que ce gros nerveux est incapable de contrôler ses nerfs et s'sent obligé de déglinguer des trucs pour extérioriser. Les gens normaux font pas ça, bon sang. J'en ai eu des violentes colères dans ma vie moi aussi, mais jamais j'me suis vengé sur le mobilier. Ni sur rien du tout, en fait. Dans ces cas-là, au pire, tu hurles un coup et tu attends qu'ça passe. Ace, lui, ce crétin d'Ace : il frappe. Les murs, les objets, les gens. Tout est bon pour lui servir de punching-ball. Et aujourd'hui, c'est l'appartement d'mes défunts parents adorés qui en ont fait les frais. La dernière chose à laquelle j'aurais voulu qu'il s'attaque.
Et tout ça pour quoi... ? Juste parce qu'il a pété les deux seuls objets qui auraient pu lui permettre de régler ça calmement avec moi... ?!
Pfff, pourquoi j'me mens à moi-même... ? Vu sa colère clairement visible sur ce tableau de désolation, jamais on aurait pu régler ça d'une manière calme. Il m'aurait encore hurlé dessus, reproché certainement d'être parti sans lui, j'suppose ? Il pouvait pas juste m'le dire quand j'me préparais, au lieu de m'envoyer chier en faisant la tronche quand j'ai voulu lui dire au-revoir ?! On est sûrs que c'est moi l'cadet qui a 17 ans, ici... ? Parce que des fois, j'ai vraiment un fichu doute !
Les membres toujours tremblants, mais de colère pour de bon, j'arrache une page des post-it de l'entrée et lui écris un mot aux lettres vacillantes, pour le prévenir qu'il a qu'à se trouver un téléphone pour m'appeler, mais que j'rentre pas tout de suite après avoir vu ça. Que j'sais pas quand je vais rentrer tout court, d'ailleurs. Parce que j'lui en veux.
J'me relis même pas, le mot doit avoir aucun sens, mais j'ai l'réflexe de retourner dans ma chambre et de tenter de rassembler des fringues dans un sac. Et, dans un autre élan, j'prends aussi mes cours pour lundi. J'ai aucune idée d'où j'vais aller, j'ai aucune idée de comment ça va s'finir, mais j'm'en fous, sur le coup. J'ai juste envie de l'envoyer s'faire voir, lui et ses colères de merde. Il a pas le droit d'être autant en colère pour des conneries pareilles. J'voulais juste passer une soirée avec mes amis pour décompresser, c'est rien ! S'il câble juste pour ça, juste parce que j'ai le malheur de le laisser tout seul une simple petite soirée de rien du tout, c'est lui qui a un problème, pas moi... !
Mes larmes se transforment en torrent et mes sanglots éclatent enfin. J'repense aux mots de Madame Hina en refermant mon deuxième sac.
« Son instabilité ». « Sa violence ». « Je veux juste que tu te poses les bonnes questions, Luffy ».
... Elle avait tellement raison. Depuis le début. Elle cherchait pas à nous séparer et elle me disait pas tout ça parce qu'on est frères, non. Le problème, c'est pas qu'on soit frères...
Le problème, c'est bien ça.
J'balaie encore le salon du regard en reniflant bruyamment : il est bel et bien là, le problème. J'ai perdu mes parents il y a cinq mois et mon frère adoré est... Comme ça.
Ça m'détruit.
J'ai un sursaut qui m'sort de ma triste contemplation quand mon portable vibre dans ma poche. Sanji. J'décroche, il me demande si ça va, j'lui indique simplement que j'redescends pour les rejoindre. J'suppose que le message est clair et j'fais bruyamment claquer la porte de mon appartement derrière moi. J'la verrouille même pas. J'm'en fous, ça pourra jamais être pire que ça l'est déjà. T'façon, dans l'état actuel de la pièce principale, s'il vient à un débile l'idée de nous cambrioler, il va certainement s'dire qu'il a été devancé et il fera demi-tour sans s'poser de question.
J'dois avoir l'air stupide avec mon sac de cours et mon sac de sport rempli de quelques affaires sur les épaules, ma morve au nez, ma gorge qui enchaîne des sanglots pitoyables et mes sourcils pourtant froncés dans une expression certainement proche de la haine. Mais pour c'que j'm'en fiche. J'traverse la bruine et j'balance mes sacs sur la banquette arrière de la voiture de Sanji avant d'm'y engouffrer à mon tour, sans un regard pour eux devant. Ils me posent pas une seule question, mais j'sens leurs yeux sur moi.
J'suis capable de donner qu'une seule réponse à leurs questions silencieuses : mes pleurs qui explosent bruyamment.
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Mon estomac me prouve encore qu'il est vraiment à l'épreuve de tous les drames quand j'me retrouve à déglinguer le p'tit déj que m'a préparé Sanji, une heure plus tard. J'me noie encore un peu dans ma morve en avalant mes œufs au plat et l'ambiance est nulle à la table, avec Zoro et Nami à moitié réveillés et surtout déjà soulés de c'qu'il se passe. Ils m'jettent des coups d'œil blasés depuis que Sanji et Robin leur ont fait un topo d'la situation. Le méga fun.
- Nouvelles d'Usopp, annonce soudainement Sanji, sur son portable alors qu'il fume tranquillement à quelques mètres de nous, adossé au plan de travail. Sa mère était contente qu'il rentre et ça va mieux...
Il marque un blanc en continuant à lire le message, qui a l'air bien long. J'aperçois ses sourcils se froncer de plus en plus. J'me ratatine un peu plus dans mon assiette en reniflant bruyamment.
- ... Ça va mieux, et ? insiste Zoro d'un air impatient.
- ... Il est en colère, explique le blond d'un ton plus doux que j'l'aurais pensé, mais j'soupçonne au petit regard en scrèd qu'il me lance qu'il cherche juste à me ménager. Sa mère l'a rassuré sur le fait qu'elle ne jugeait pas ça gravissime, mais il me dit qu'elle lui a paru dans un état alarmé qui le retourne...
J'avale difficilement ma bouchée et Nami soupire dans sa propre assiette. Usopp doit être celui de mes potes que je connais le mieux, j'comprends donc où il veut en venir : il sera pas prêt à pardonner ce coup-là. D'ici à ce qu'il veuille confronter Ace pour obtenir au moins des excuses de sa part, y'aura pas loin...
J'préfère même pas imaginer un tel échange. Ace lui rirait au nez, fier comme il est. J'suppose que ça va être à moi de lui mettre la pression pour qu'il fasse pas encore plus son crétin qu'il l'a déjà fait... Bankina méritait pas ça, aussi « peu grave » que ça soit dans les faits...
Nan, j'dis n'importe quoi : c'était grave. Effrayer une femme aussi gentille que Bankina, qui vit et galère seule avec son fils unique, qui a toujours été un amour avec moi depuis toutes ces années... J'espère vraiment qu'il va réaliser à quel point c'était pas cool. J'lui trouverai pas d'excuse, cette fois-ci. Il a intérêt à aller lui demander son pardon et lui promettre qu'il s'approchera plus jamais d'elle, un point c'est tout.
- Bon... siffle Nami qui commence à débarrasser la table. On attaque ? On a assez attendu, non ?
J'hausse un sourcil, me demandant de quoi elle parle. À qui elle parle, aussi.
- ... Est-ce que le moment est approprié ? demande doucement Robin, comme si elle comprenait totalement de son côté.
- Il est parfait, tranche Zoro. Il ne peut pas être aussi stupidement parfait, même. De toute façon, j'comprends même pas pourquoi vous vouliez attendre à l'origine.
Ses yeux noisette orageux s'déposent sur moi. Et il me lâche plus. Okay, j'crois que j'ai compris le message...
- ... Usopp m'appelle, nous indique Sanji en se redressant du plan de travail pour s'éloigner et décrocher. Ouais ?
J'entends pas la suite. Nami range nos assiettes et couverts dans le lave-vaisselle comme si elle était chez elle, et j'arrive à m'en étonner malgré qu'ça soit pas du tout l'moment. J'sais, pourtant, qu'elle vient souvent se réfugier chez Sanji quand l'ambiance est trop tendue chez elle. J'sais que Sanji l'a déjà ramassée en pleurs plusieurs fois. Elle profite du fait qu'ils sont à dix minutes à pied l'un de l'autre pour utiliser cette maison comme refuge quand son beau-père dépasse les bornes. Mais aujourd'hui, j'en viens à m'demander à quel point ils sont proches, tous les deux. Elle agit comme si elle-
- Luffy, focus, gronde Zoro en me fusillant du regard. Tu sais très bien qu'on va parler de toi.
J'me mords les lèvres. Comment il fait pour m'connaître par cœur à ce point, bon sang... ?
- Zoro... commence doucement Robin, de sa voix douce mais tranchante. Je sais que tu es très sensible à toute cette histoire, mais rappelle-toi de ce qu'on avait dit...
- J'vais chercher Usopp, dit Sanji en revenant, dans un soupir. Il veut participer à la conversation.
- À la bonne heure... râle Nami en roulant des yeux. Et on fait quoi, en vous attendant ?
- J'en sais rien ? répond-il nonchalamment en haussant les épaules. Vous avez qu'à regarder la télé ?
Il prend sa veste et se tire sans un mot de plus, nous plantant là. Tellement de balekouillisme dans son attitude, il m'envoie du rêve parfois. J'entends Nami marmonner en refermant le lave-vaisselle, Zoro qui se pince l'arête du nez pour je sais pas trop quelle raison, et Robin qui tend la main vers moi pour me caresser doucement le bras, de son regard beaucoup trop chou d'amour pour être honnête.
J'suis content de l'avoir de mon côté.
D'autant plus en constatant que l'ambiance pourrie repart de plus belle, maintenant qu'on s'retrouve que tous les quatre et avec Zoro et Nami qui m'donnent l'impression qu'ils ont envie d'm'arracher la tête. Mais Nami s'enfuit rapidement pour annoncer qu'elle va prendre une douche et Zoro bat en retraite aussi pour « sortir prendre l'air » dans l'jardin. Tant mieux, j'suppose... Pour l'instant, c'est plus réconfortant d'me retrouver seul avec les grands yeux de Robin qui me couvent d'amour et d'inquiétude.
Du coup, on finit sur le canapé, moi planqué dans ses bras, complètement glué à elle. Et j'me retrouve encore perturbé de la douceur maternelle qu'elle met dans chacun de ses gestes. Sa joue qui se pose sur mes cheveux, comme pour me protéger. Ses doigts qui glissent dans ma nuque et dans mon dos comme pour m'apaiser... Et ses chuchotements à peine audibles pour me réconforter quand j'me remets à sangloter.
- Vous... Vous le savez depuis longtemps... ? arrivé-je à lui demander au bout de longues minutes.
- Quelques jours... Du moins, pour les autres. Navrée de te le dire, mais de mon côté, j'ai de sérieux doutes depuis la soirée du Nouvel An.
Mes petits sanglots se transforment soudain en ricanement amer et elle redouble ses caresses réconfortantes.
- Je ne m'étais donc pas trompée... ? s'assure-t-elle.
- Nan... On est ensemble depuis Noël. Et j'ai même pas envie d'te demander comment tu l'as compris... m'amusé-je un peu, parce que ça m'étonne pas du tout d'elle.
- Juste un peu d'observation... souffle-t-elle vaguement.
Le silence retombe alors qu'elle renforce sa prise sur moi. J'ai l'impression qu'elle cherche à m'dire qu'elle m'en tient pas rigueur. Qu'elle m'en veut pas du tout de le leur avoir caché...
Contrairement à Zoro et Nami, hein ?
J'ai tellement pas hâte que Sanji et Usopp ne rentrent...
Ma peur éclate pendant une fraction de seconde en entendant la porte d'entrée s'ouvrir, juste en face. Mais on s'redresse brusquement avec Robin en voyant Ivankov et l'vieux Zeff rentrer, surpris.
- Eh bien oui, il y a encore du monde ! s'exclame joyeusement Iva. Bonjouuuuuur mes loulous !
- B-Bonjour... ! balbutié-je en les fixant comme un idiot tout en m'essuyant rapidement les yeux, dégoûté qu'ils me voient dans cet état.
- Bonjour, les salue poliment Robin. Navrée, nous sommes encore là...
- Pas grave... marmonne Zeff en me jetant quelques coups d'œil.
J'baisse la tête pour essayer d'planquer mon visage rougi et probablement boursoufflé de tous les côtés comme j'le peux, mal à l'aise.
- Oh, Luffy-boyyyyy ! s'exclame soudainement Iva. Qu'est-ce qui t'arrives, chéri ?! Montre-moi ta tête !
J'me fais attraper la tronche avec brusquerie l'instant d'après et j'me sens rougir de plus belle.
- N-nan mais je... Ça va, j'vous jure...
- Tant de mensonges venant d'un si mignon jeune homme ! Je vois bien que tu ne vas pas, chéri ! Raconte donc à Tata Iva ce qui t'arrives... !
L'intention est la même que celle de Robin dans l'fond, mais bon sang, me retrouver la tronche collée dans les pecs dénudés d'Ivankov avec ses bras qui m'étouffent de toutes ses (grandes) forces, ça donne pas vraiment l'même résultat. J'ai plutôt envie d'crever, sur le coup. Autant de honte que... Ben, parce que j'ai plus d'air ? Au secours ?
- Laisse-le tranquille... râle Zeff en pénétrant dans la pièce après avoir rangé ses affaires. C'est pas à toi qu'il va parler de ses problèmes, la diva.
- Mais petit chouchou d'amour qui n'a même plus ses parents ! Il a besoin d'adultes responsables autour de lui ! Tu ne penses pas à ça toi, gros butor !
J'jure que j'ai envie d'me défendre parce que j'déteste que les adultes me prennent en pitié du fait que j'sois orphelin, mais aussi fortiche que j'sois devenu avec le free-fight, j'arrive pas à m'dégager de sa prise d'un millimètre, bon sang d'bois... !
- Madame Ivankov... ? l'appelle doucement Robin en gloussant à moitié. Je crois que vous allez nous le tuer d'amour.
- On ne tue jamais les gens avec de l'amour, ma chérie ! annonce-t-il gaiement en me relâchant enfin, et j'prends une grande inspiration en revoyant la lumière du jour. Et tu es ?
- Robin, se présente-t-elle avec un sourire en me récupérant doucement pour me ramener vers elle (merci Rob', merci). Je suis la colocataire de Zoro et Brook.
- MAIS OUI ! hurle Iva en se redressant d'un bond, toujours beaucoup trop enjoué. Sanji-boy m'a tellement parlé de toi, petite merveille ! Et il n'a pas été avare en compliments ! Raviiiii de te rencontrer ENFIN !
Ils se serrent la main tous les deux et Robin me tient de manière protectrice contre elle, probablement pour pas qu'Iva essaie d'me récupérer.
- Qu'est-ce qui arrive donc à cet amour de garçon ? insiste-t-il quand même.
- Bonjour Zeff, bonjour Iva, intervient Nami en débarquant à son tour de l'étage. Rien de bien grave, ne vous en faites pas... On gère.
- Tsss. La dernière fois qu'une bande de blancs-becs m'a dit qu'ils géraient, je me suis retrouvé avec trente minutes de retard sur mon service... grogne Zeff en allant s'affairer dans la cuisine. Salut le Marimo.
Zoro revient à son tour du jardin et j'l'aperçois montrer les crocs à Zeff au surnom, comme un réflexe. J'savais pas que le vieux l'appelait aussi comme ça, c'est marrant tiens. Nami nous rejoint avec Robin, elle salue Iva et commence à lui causer, avec un sourire un peu figé. D'mon côté, la menace violette écartée pour le moment, j'me suis détaché de la prise de Robin pour essayer d'me recomposer une tronche potable. C'est certainement peine perdue vu le regard amusé que Robin m'envoie, mais j'aimerais éviter de trop passer pour un pauvre gamin au bout d'sa vie devant les darons de Sanji, quand même...
Nami et Robin continuent de papoter poliment avec Iva, toujours beaucoup trop enjoué au point qu'il me donne le tournis, pendant qu'j'vois Zoro et Zeff prendre des nouvelles en s'grognant à moitié dessus dans la cuisine. Ça n'a aucun sens c'qu'il se passe, tout à coup. J'me sens tout groggy d'mon côté. Y'a deux minutes, je pleurais toutes les larmes de mon corps en me pissant dessus à l'idée de la future conversation affreuse qui allait m'attendre avec les copains, et me voilà à écouter l'beau-père de Sanji parler joyeusement chiffons avec mes deux potes.
J'avais pas hâte de revoir Usopp, mais j'suis finalement soulagé de les voir rentrer tous les deux quelques minutes plus tard, avec Sanji.
- J'espère que ma cuisine n'est pas en bordel, gronde Zeff en le voyant arriver.
- Bonjour à toi aussi, vieille momie, maugrée-t-il. Je croyais que vous rentriez plus tard ?
- Zeff-d'amour avait mal à la gambette ! explique Iva, les poings sur les hanches, pendant que l'concerné s'enfuit dans l'jardin en râlant de plus belle. Et nous ne pensions pas que toute ta jolie bande serait encore là ! Mais tu sais Sanji-boy, je suis raviiiiii de les voir ! Tu devrais les ramener plus souvent, si tu veux mon avis ! Surtout petit Luffy-chéri qui est tout tristounet ! Allez, on va s'assoir et vous allez tout me racont-
- Nan, le coupe Sanji, cinglant. On monte et tu vas rester en dehors de ça, la glue. (Il nous jette un œil et fait volte-face) Ramenez-vous.
Nami et Zoro ne se font pas prier pour le rejoindre dans les escaliers. Robin salue tout d'abord Iva qui montre clairement qu'il boude, les bras croisés sur son torse, et elle suit les autres en m'emmenant dans son sillage, sa main dans mon dos. Arrivés dans l'entrée, elle est imitée par Usopp qui a beaucoup perdu de sa colère, de c'que j'en lis sur son visage. Il a maintenant une expression plutôt attristée au contraire, et sa main qui remplace celle de Robin me réchauffe bien plus le dos que c'que j'aurais pu le penser. Dans un élan d'affection, j'l'attrape par les bras et le hisse sur moi. Il glapit mais se laisse faire en marmonnant que j'suis chiant, pas vraiment sérieux. Au contraire, j'sens son sourire dans mon cou et ça m'en arrache un à mon tour.
Comment j'ai pu imaginer à un seul instant qu'il allait m'en vouloir, sérieusement... ?
On arrive rapidement dans la grande chambre de Sanji, dans laquelle il est déjà installé, adossé à son bureau. C'est définitivement sa position préférée, en fait. Il préfère toujours rester debout, au contraire de Nami qui grimpe sur son grand lit pout s'y affaler, rapidement imitée par Zoro qui a l'air d'être motivé à piquer une sieste. Robin s'assoit gracieusement au bout du lit, et leurs quatre paires d'yeux se rivent sur moi et Usopp, toujours plantés en plein milieu de la pièce, à pas savoir quoi faire de nos dix doigts.
J'le sens mal à l'aise dans mon dos et j'comprends pas pourquoi.
C'est pourtant pas lui qui va passer d'vant le juge, dans quelques instants.
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- Marron 5 – Misery -
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Le chapitre se termine peut-être d'une manière impromptue... Mais encore une fois, problème de découpage : vaut mieux que je m'arrête là plutôt que de couper pendant la grande conversation qui nous attend x)
