Il fut surpris d'apprendre qu'elle se déplaçait à vélo. Il imaginait que chaque ministre avait son propre chauffeur ou au moins une voiture luxueuse. Pas elle, visiblement. Elle proposa de prendre un vélo en libre service mais quand il lui dit qu'il était garé devant le ministère, elle accepta d'aller chercher sa bicyclette. Elle lui avoua ne pas être rassurée dans le désert de grattes ciel, une fois l'effervescence de la journée passée. Il se doutait que bien peu de choses l'effrayaient et il se sentit privilégié d'avoir confiance.

Le silence les enveloppa, chacun un peu anxieux de se séparer. Quel était le protocole de nos jours? Devaient-ils se dire au revoir d'un signe de la main? Était-il trop tôt pour s'embrasser? Se serrer la main lui apparaissait absurde, peut-être une accolade? La tension d'un cran quand Bill repéra son véhicule. « Tu te déplaces avec ça? » Demanda Laura en pointant le pick-up.

« Oui, pourquoi? » Il voyait bien qu'elle semblait ne pas être contente mais il ne comprenait vraiment pas quel était le problème.

« Tu sais qu'un VUS consomme environ deux fois plus qu'une voiture de petite taille, alors imagine ton engin! » Dit-elle, agacée. Elle haïssait les hommes qui pensaient nécessaire de prouver leur virilité par une grosse cylindrée. C'était mauvais pour la planète et elle était persuadée que s'ils avaient besoin de ça pour s'affirmer, c'est qu'ils étaient mauvais au lit, aussi.

Il l'étudia scrupuleusement. Ils avaient passé une excellente soirée et il ne voulait pas gâcher cela pour des principes écologiques. Il ne souciait pas des voitures, et pas vraiment de l'environnement non plus, il devait bien l'avouer. « C'est pratique. » Offrit-il.

« Mmh. » Répondit-elle, absolument pas convaincue.

« Où est ton vélo? » Changea-t-il de sujet. Elle le pointa du doigt, il l'accompagna, attendit qu'elle le détache. « Puis-je? » Il prit l'antivol et le glissa dans le panier du vélo. Tenant le vélo d'une seule main et son amie de l'autre, il le fit rouler jusqu'à son véhicule. D'un bond, il sauta dans la boite du pick-up et l'ouvrit. Il redescendit à côté d'elle, lui fit un sourire satisfait et hissa le vélo sur le plateau. « Tu vois, pratique. Maintenant, je peux te raccompagner et même mettre les sièges chauffants. »

Elle rit, il s'en tirait bien. Elle lui donna une petite tape sur le bras, il le méritait quand même. Une bonne chose qu'il ait du charme! Elle ne se serait pas assise aussi facilement sur ses principes sinon. Il rit également et passa son bras autour de ses épaules, l'attirant contre lui, un peu pour se réchauffer, un peu pour chahuter. Quand leurs regards se croisèrent, ils n'avaient soudainement plus envie de rire. Ils se souriaient, s'observaient. Le temps était suspendu. Elle se lècha les lèvres, par anticipation, sans même s'en rendre compte. Il relâcha ses épaules et déplaça sa main contre sa joue. Du pouce, il lui caressa la pommette. Il descendit lentement son visage vers celui de la femme dans ses bras, lui permettant de reculer si elle le souhaitait. Elle n'en fit rien. Elle leva le menton, tendant ses lèvres vers lui. Elle remarqua alors qu'ils faisaient presque la même taille. C'était parfait pour s'embrasser. Bill posa délicatement ses lèvres contre celles de Laura. C'était doux, tendre, presque chaste. Il s'apprêtait à reculer quand il sentit une main glacée se poser sur sa nuque. Il entrouvrit les yeux un instant et croisa un regard malicieux et demandeur. Il ferma les paupières et, le sourire aux lèvres, s'exécuta.

Cette fois-ci, il la sentit répondre. Elle pressa ses lèvres plus fermement contre les siennes. Il sentit sa langue, timide, caresser sa lèvre inférieure. Il entrouvrit la bouche et la laissa faire. Le baiser était à l'image de leur soirée: intime, délicat, absolument parfait. Il la sentit soupirer dans sa bouche et eut besoin de la sentir encore plus proche. Il la saisit par la hanche et elle s'étonna encore une fois par la largeur de ses mains. Tout en lui criait mâle et virilité mais il embrassait si délicatement. Il n'était pas comme ses derniers amants, il ne semblait pas voir cela comme un mal nécessaire. Non, il l'embrassait pour le plaisir d'embrasser.

Elle se recula, à contre-cœur. Elle joint leurs lèvres une dernière fois en remerciement, en promesse. Elle n'avait pas besoin de dire quoi que ce soit, ils s'étaient compris. Elle enfourcha son vélo qu'il venait de lui rendre. « À dimanche?! » C'était autant une question qu'une affirmation.