Il vit l'hésitation et l'appréhension dans ses yeux. Il considéra un instant lui proposer de retourner dans la cuisine. Il craignait cependant que repousser l'échéance ne leur crée encore plus d'anxiété. Ils étaient si bien partis! Il ne se souvenait pas d'avoir connu ce genre de passion depuis les premières années de son mariage, plus de vingt ans auparavant. Aussi intense et intéressant que ce soit, il ne voulait pas d'un coup rapide sur le bord du comptoir, pas pour leur première fois. Il voulait prendre le temps de découvrir son corps et ce qu'elle aimait. Il voulait la faire gémir, lui donner du plaisir. Il voulait que ce soit à l'image de ce qu'ils avaient commencé à bâtir: un moment de complicité, de partage, emprunt de respect. Il voulait par-dessus tout lui donner envie de recommencer. Il savait qu'avec l'âge le désir changeait, s'étiolait. Il savait, se doutait, qu'il ne lui donnerait pas d'orgasme ce soir. Il savait qu'ils devraient apprendre à plus se connaitre, corps et âme, pour cela. Ça ne le dérangeait pas, au contraire. Il était patient. ça ne l'empêchait pas de vouloir faire en sorte que l'expérience soit inoubliable.

Il l'embrassa langoureusement, sans se presser. Il caressait sa langue, aspirait ses lèvres entre les siennes avant de les mordiller. Elle mit un peu de temps à répondre, à se remettre dans l'ambiance, il le sentait bien. Il y mit tout son coeur, toute son énergie et fut récompensé par de longs « Mmh » soupirés contre sa bouche. Quand il n'eut plus aucun doute quant à son consentement, il quitta sa bouche et partit à l'exploration de son corps. Elle n'était pas avare en soupirs et gémissements, ce qui l'encouragea dans son entreprise. Il embrassa son cou, ses épaules avant de descendre vers sa poitrine. Il alla lentement, très lentement, précédant sa bouche par ses mains, lui offrant l'opportunité de battre en retraite si elle le souhaitait. Elle soupira de plus belle et il sut qu'elle n'avait aucun doute, seulement de l'anticipation.

Elle n'avait pas fait l'amour depuis si longtemps. Depuis le décès de son mari, elle avait couché avec quatre hommes mais n'avait rien partagé d'aussi intime avec aucun d'entre eux. Ses émotions étaient à fleur de peau. Elle avait si bien appris à les ranger au fond d'une boite pourtant. La douceur et la révérence avec laquelle il caressait son corps la faisait se sentir vivante et aimée comme elle ne l'avait pas été depuis bien longtemps. Elle sentit les larmes monter à ses yeux dans un mélange d'anxiété, de gratitude et d'émerveillement. Elle voyait bien qu'il prenait soin de lui faire plaisir, vraiment plaisir. Il ne cherchait pas à appliquer des techniques qu'il avait éprouvées avec d'autres femmes. Non, il cherchait à découvrir ce qu'elle aimait, elle, Laura Roslin. Et ça, ça l'excitait plus que tout.

Il glissa lentement en elle, son regard fixé sur le sien. Il avait été surpris, et très excité, de voir à quel point elle avait envie de lui. Il ne pensait pas ce degré d'humidité possible pour une femme de son âge et s'en enorgueillit. Il s'arrêta, une fois complètement en elle, voulant à la fois profiter de cette sensation unique et lui laisser le temps de s'ajuster. Il l'embrassa sur le nez, elle lui sourit lascivement. Elle enroula ses bras autour de sa nuque et ondula son bassin, lui laissant savoir qu'elle était prête. Il commence à bouger lentement, très lentement au-dessus d'elle. Il caressa sa cuisse, remonta le long de sa hanche pour modifier légèrement l'angle de leurs corps. Elle soupira profondément et laissa rouler sa tête sur l'oreiller, le plaisir évident sur son visage.

Il avait l'impression de renouer avec un amour perdu depuis longtemps tout en découvrant une nouvelle personne. Il la connaissait sans la connaître, du déjà-vu dans la nouveauté. Il n'avait qu'à suivre son intuition pour savoir ce qui lui plaisait et déplaisait. C'était déconcertant de facilité. Il ne croyait ni au destin ni à la réincarnation mais à cet instant présent il était persuadé d'avoir été marié avec elle dans une autre vie et de lui avoir déjà fait l'amour des centaines de fois. Comment aurait-il pu savoir sinon qu'elle détestait qu'on lui touche les oreilles? Que ses seins étaient si érogènes? Il leva la jambe de Laura plus haut contre sa hanche, augmentant la friction entre leurs deux corps, lui faisant pousser de petits cris de plaisir. Comment pouvait-il savoir exactement comment elle aimait faire l'amour? Comment pouvait-il savoir que cette position lui procurait indéniablement de long et doux orgasmes? Ou que s'il voulait la faire crier d'extase il devait la prendre à quatre pattes?

Il avait connu beaucoup de femmes dans sa jeunesse, et quelques-unes depuis son divorce. Il avait toujours dû travailler fort pour leur donner du plaisir. Il n'avait jamais eu de pressentiment comme cela pour aucune de ses conquêtes précédentes. Il ralentit le rythme, ce qu'elle adorait. Il vit son visage se contorsionner de plaisir et il cessa de penser. Intuition ou non, il allait faire jouir cette femme et en savourer chaque secondes.

C'était exactement l'opposé de ce qu'elle aimait. Elle préférait les hommes passionnels et, même si elle ne le dirait jamais à haute voix, le sexe un peu brutal et autoriraire. Bill était tout l'opposé. Il était doux, tendre, enveloppant. Il allait et venait en de longs mouvements. Elle était déconcertée par ce changement de cap. C'était peut-être cela l'amour, pensa-t-elle. Avait-elle déjà fait-cela? Même avec Marc? Elle soupira. Il l'entrainait inexorablement vers un abysse de bonheur. Elle ne luttait pas, il semblait connaître son corps et ses envies mieux qu'elle-même. Il semblait anticiper ses désirs les plus intimes avant même qu'elle sache qu'ils existent. « Oh mon Dieu! » Ne put-elle s'empêcher de gémir. Il venait de changer l'angle de quelques millimètres et c'était exactement ce qu'il lui fallait. Elle cessa de penser et se concentra sur le merveilleux homme au-dessus d'elle et sur les vagues de plaisir qui déferlaient dans son corps. Elle se laissa complètement aller et, d'une voix rauque, gémit son plaisir encore et encore. Et encore!