EDIT : étant donné que la fin de mon histoire a pas mal évolué depuis que j'ai écrit cette intro j'ai remanié des bouts de dialogue dans cette intro. Pas dit que vous remarquiez la différence, mais je voulais quand même le préciser : Si votre souvenir est un peu différent, vous n'êtes pas fous !
Est-ce que je poste cette intro à une heure indue parce que j'ai oublié de la publier avant que la Crevette ne rentre à la maison, et que c'était la course après pour manger et aller aux claquettes ? Vous n'avez pas de preuve ! Enfin, à défaut de la poster à une heure logique, je la publie le bon jour, y'a du progrès, non ? ^^°
En tout cas, ça y est, on entame la septième partie ! C'est un peu intimidant de se dire que j'attaque la fin de cette si longue histoire (même si bon, on ne va pas se le cacher il reste beaucoup à écrire). Evidemment, les personnages ne sont pas au bout de leurs peines, de grands événements vous attendent et j'ai TELLEMENT hâte d'écrire et de partager tout ça avec vous ! Vous n'imaginez pas à quel point ! XD
La partie 6 était très dure à écrire (et à lire) alors je voulais vous remercier d'avoir continué à suivre cette histoire même après qu'elle ait pris un tournant très sombre. Sans vos reviews, j'aurais jeté l'éponge depuis longtemps devant la taille de l'histoire ! ^^° Bref, je voulais vous remercier pour vos petits et grands messages. J'espère que vous aimerez la suite, et je m'arrête avant d'avoir un blabla plus long que mon introduction. Bonne lecture !
Septième partie : Résurgences
Le parc du château était aussi grand que vide. Il y avait des arbres, oui, de l'herbe, mais tout était carré, propre et vide… quelques insectes, oui, des oiseaux ici et là… Mais quand je repensais à l'île de York, ici, c'était comme une forêt morte, sans animaux, sans imprévus. Au début, ça m'amusait d'aller y courir, de tester l'ampleur de mes pouvoirs en escaladant, en frappant et transmutant tout ce que je trouvais, puis, jour après jour, ce silence, cette impression de ne déranger personne avait finit par me faire peur.
Ce n'était pas naturel.
Je m'étais réfugié dans les grands couloirs de la maison de chasse, tout aussi vides et mornes. Plus loin, il y avait le grand château, mais je n'avais pas le droit d'aller là-bas. Il y avait des humains, des gens qui ne devaient pas me voir. Alors, je restais ici, avec les autres. Les « comme moi ».
Les Homonculus.
Quand l'Armée m'avait retrouvé dans une ville du Nord, conduit jusqu'à Central et ramené à eux, j'étais heureux de retrouver ceux de mon sang, des gens qui me comprendraient, qui partageraient ma colère. Quand j'avais raconté ce qui s'était passé depuis l'évasion, comment Edward était parti, comment Izumi s'était travestie, comment elle m'avait traînée dans les montagnes, et comment j'avais découvert ce que j'étais réellement en avalant la pierre rouge, ils m'avaient félicité d'être parti, de l'avoir tuée.
Je ne l'avais pas tuée.
C'était les loups.
Quand je repensais à son corps allongé dans la neige rougie, au milieu des cadavres de loups, je me sentais encore plus en colère sans trop savoir pourquoi.
Ce n'était pas parce que je m'étais senti seul. De toute façon, je n'étais plus seul maintenant.
Depuis que j'avais mangé la pierre, des voix dans ma tête sifflaient comme le vent dans les branches par une nuit de tempête. J'avais envie de frapper, envie de hurler, envie de mordre. J'avais chassé et tué des bêtes à mains nues pour me nourrir, au milieu de la neige et des rochers, jusqu'à ce que quelqu'un me retrouve et m'amène à un village, puis en ville.
Izumi m'avait abandonné, oui. Une première fois en me jetant dans la tempête de la porte. Une deuxième fois en mourant comme un vulgaire gibier au milieu des montagnes du Nord, m'abandonnant au milieu de rien. Elle m'avait trahie, et elle avait été faible… mais c'était terminé.
Je n'étais plus seul maintenant : il y avait Pride.
C'était chez lui que je vivais, dans une partie cachée de son domaine. Je ne le voyais pas souvent, il était très occupé, mais il avait cette grande moustache qui s'ouvrait sur un grand sourire : Pride riait beaucoup, même si son œil était froid.
Enfin, il riait beaucoup jusque là… Mais durant ses visites plus récentes, il avait l'air très sérieux.
La dernière fois, Sloth était là aussi.
Elle était belle, elle était douce comme une Maman. Une fois, elle m'avait serré dans les bras, et j'avais eu l'impression que les voix qui criaient dans ma tête s'étaient arrêtées un instant.
Mais elle ne venait pas souvent et ça me rendait triste.
Parfois, il y avait Lust et Gluttonny. Ils étaient toujours ensemble, tous les deux, je ne savais pas trop pourquoi. J'aimais bien Glutonny, il était gentil comme un enfant, et il partageait souvent ses repas avec moi. Lust, elle, me regardait toujours avec un sourire en coin, et je ne savais jamais ce qu'elle pensait de moi. Je me disais quelquefois qu'elle ne m'aimait pas, mais je n'en étais pas sûr. Elle pouvait se montrer très gentille, un peu caressante, mais souvent, elle ne me parlait pas du tout.
Et puis, il y avait Envy. Avec ses cheveux longs, son sourire narquois et ses coups, je savais à coup sûr qu'il ne m'aimait pas. Depuis que nous étions allés à Lacosta pour attraper Alphonse et que nous avions échoué et perdu sa trace, il me frappait souvent. Il disait que c'était de ma faute, que j'étais un avorton qui ne servait à rien.
Je ne savais pas ce que voulait dire avorton, mais je devinais que ce n'était pas quelque chose de gentil.
Je n'étais pas seul, il y avait toujours au moins l'un d'entre eux, pas trop loin, pour s'occuper de moi. Parce que j'étais un « bébé Homonculus ». Les autres étaient vieux, très vieux pour certains. Moi, je ne savais pas grand-chose, je ne comprenais pas grand-chose. J'étais sans doute un peu bête.
Pourtant, je faisais de mon mieux. Quand on nous avait envoyés à Lacosta, j'étais fier. Quand j'avais appris que nous allions retrouver Alphonse, j'étais impatient. J'avais envie de le frapper, de lui crier dessus. Comme Envy le faisait avec moi.
Puis nous nous étions battus, et nous avions perdu. Edward n'était pas là, Alphonse avait disparu, Winry et l'autre fille aussi. Nous n'avions personne à ramener comme promis à Mère. Alors, après avoir cherché sans trouver, nous étions rentrés, tous les quatre, Lust, Gluttony, Envy et moi, dans un silence lourd. Glutonny avait une mine inquiète, Lust ne souriait plus, et Envy était en colère contre moi — encore plus que d'habitude.
Je n'étais pas seul, mais ce n'était pas facile du tout.
Heureusement, il y avait Mère.
Quand nous la reverrions, tout irait mieux. Elle se pencherait pour me serrer dans ses bras, et je pourrai me pelotonner sur ses genoux pendant qu'elle discuterait avec les autres. De toute façon, moi, je ne comprenais rien à ce qu'ils racontaient et j'avais renoncé à écouter.
Je pensais à tout ça en traversant ce parc qui me faisait penser à une grande boite vide, en route vers la maison de Mère.
— Là ! Je vois la maison ! m'exclamai-je en tendant la main vers le mur de pierre rouge.
— Ta gueule l'avorton ! répondit Envy en ponctuant son ordre d'un coup de pied qui me fit voler contre un tronc d'arbre. Je suis pas d'humeur à t'entendre piailler.
— Arrête, Envy, souffla Lust. Il n'y est pour rien.
— Ça, c'est toi qui le dis. Après tout, il était copain avec les moucherons, avant qu'on le récupère.
— Le moucheron t'a quand même mis une belle déculottée, non ?
— Et toi, on peut parler, non ? À t'effondrer comme une merde, tu crois que tu as fait quoi ?
— C'est toi qui me l'as dit, on ne peut rien faire face à nos propres ossements.
— Ouais.
— Je n'avais jamais vécu ça, avoua Lust à mi-voix, comme pour elle-même.
Ses yeux s'étaient éteints, et elle semblait s'être détachée de la conversation.
— Veinarde, lâcha Envy entre ses dents.
— C'est quoi des ossements ? demandai-je.
— Tous les os. Les os de ton ancien corps.
Je clignais des yeux et l'Homonculus me regarda d'un air dépité.
— Tu n'as pas d'ancien corps, alors c'est normal que ça te paraisse étrange… fit Lust.
— La meuf qui te servait de mère a utilisé le cadavre de ton ancien toi pour sa transmutation, et quand elle a vu que ça avait merdé, elle t'a benné à travers la porte.
— Ne parle pas comme ça, Envy.
— Bah quoi, c'est ce qui s'est passé ! fit-il en haussant les épaules. C'est quand même un comble que le seul Homonculus qui n'ait pas cette faiblesse soit aussi le plus couillon. Même Glutonny réfléchit plus que lui, sérieux !
— Même ? demanda Glutonny en lâchant l'os qu'il rongeait.
Au fil de la discussion, nous arrivions aux portes de la maison de chasse. En passant la porte de la maison, je me sentis à la fois soulagé d'être rentré et mal à l'aise.
Cette maison, c'était chez moi, maintenant.
C'était aussi de longs moments de silence et d'ennui. Des coups, parfois. Envy était peut-être celui qui me parlait le plus. Ça ne me plaisait pas vraiment.
Mais quand j'entrai dans le salon et que je vis la silhouette familière de Mère assise dans le grand fauteuil vert, je sentis mon visage s'illuminer et me précipitai vers elle.
— Mère ! Nous sommes rentrés !
Je n'attendis pas sa réponse pour me précipiter dans ses bras. Elle m'enlaça et me caressa la tête, mais c'est aux autres qu'elle parla.
— Vous êtes partis à quatre, et vous n'avez même réussi à faire prisonnier deux adolescents, dont une qui ne manie même pas l'Alchimie ? C'est très décevant de votre part.
— Nous sommes désolés, Mère.
Envy, si en colère d'habitude, parlait d'un ton presque contrit, comme s'il s'attendait à être frappé comme il me frappait quelquefois.
— C'est dommage… répondit Mère d'un ton détaché. J'aurais bien aimé pouvoir me charger d'eux un par un, lui, son frère et la petite péronnelle qui les accompagne. Enfin, ça peut attendre, il y a plus important.
Elle se leva, et je glissai des genoux à contrecœur. Je réalisai seulement à ce moment-là que Pride et Sloth étaient là aussi, assis face à elle.
— Il y a du nouveau ?
— Toutes les pièces du plan sont enfin en place. J'ai le fou qu'il me manquait, annonça Mère avec un sourire en coin. Je vais partir avec Pride pour orchestrer l'exécution finale. Gluttonny, tu viendras aussi, tu pourras m'être utile. Un pisteur comme toi pourra m'aider à vérifier qu'aucun rat ne vient fouiner aux alentours. Je ne pense pas que les frères Elric soient en position de faire quoi que ce soit, mais d'autres personnes pourraient nous mettre les bâtons dans les roues, alors autant être prudents, n'est-ce pas ?
— Je peux venir aussi ! s'exclama Envy.
— Et moi ! Moi aussi, je veux venir ! m'exclamai-je.
— Vu la situation et les résultats récents, je pense qu'il vaut mieux que vous restiez ici. Envy, tu sais que tes ossements sont en sa possession, et Lust n'est plus à l'abri.
— Mais enfin, Mère ! s'indigna Lust. Nous avons tant travaillé pour ça ! Nous voulons voir ce jour promis arriver !
Ma main s'était perdue dans les jupes de Mère, et je serrai très fort le pli de tissu qui me tombait sous les doigts, comme pour l'empêcher de partir. Je n'arrivais pas à écouter attentivement, ils parlaient de choses que je ne connaissais pas, que je ne comprenais pas et je savais que personne ne prendrait la peine de m'expliquer.
— Ce jour sera suivi d'un autre, plus important encore… et Sloth pourrait avoir besoin de votre aide pour contrôler la suite des événements, vous ne croyez pas ?
— Et moi, qu'est-ce que je peux faire ? tentai-je malgré tout.
Si j'étais des leurs, je devrais pouvoir les aider, au moins un peu. C'était ce que je me disais. Pourtant, quand tout le monde baissa vers moi des yeux ronds, je compris que j'étais le seul à penser ça.
Mère s'agenouilla et sa large robe se froissa dans un froufrou plein de douceur tandis qu'elle plantait ses yeux bruns dans les miens.
— Je compte sur toi pour rester ici et obéir aux autres Homonculus. Ton âme est trop jeune et instable pour le moment, mais tu verras, avec le temps, tu comprendras mieux ce genre de choses. Quand je reviendrai de voyage, je t'expliquerai ce qui s'est passé. Mais pas maintenant, il est trop tôt, tu comprends ?
Je ne comprenais pas, et pourtant, quand elle planta ses yeux dans les miens, je réalisai que si, je comprenais, qu'elle avait raison, et que je pouvais lui faire confiance.
Après tout, c'était Mère.
Elle parla encore un peu avec les autres, alors que je m'écartais docilement, puis elle enfila son manteau, prit sa valise et nous salua. Elle me serra dans ses bras quelques secondes, salua les autres d'un geste de main, et repartit.
Et je fus de nouveau seul.
Je ferai tout pour que tu sois toujours avec Al, ou Izumi, ou Sig, ou Winry, d'accord ?
Ces mots remontèrent dans ma gorge, puis je me souvins d'Edward qui m'avait roué de coups il y a longtemps, d'Izumi dans son drap de neige rougie, et d'Al. Al qui m'avait tué.
D'accord, je m'étais relevé quelques secondes après, et Envy l'aurait sans doute tué pour de bon si Mère l'avait toléré.
Tout ce qui importait, c'était qu'Alphonse m'avait trahi, deux fois au moins. Et puis il avait eu le tort de s'opposer à Mère.
Alors pourquoi cette colère que j'avais à chaque instant me faisait un peu plus mal quand je repensais à tout ça ?
Je secouai mes épaules pour chasser ce souvenir dans un frisson et me rappelai que je n'étais pas seul. Les autres Homonculus étaient là. Je devais aider Sloth. Elle allait repartir, elle aussi, mais elle aurait sûrement besoin de moi. Et je serai là, pour l'aider, la protéger, avec mon corps sans faiblesse et mon Alchimie corporelle que personne d'autre ne pouvait faire.
Il fallait juste que je m'occupe en attendant.
Je fis le tour des pièces du bâtiment, comme je l'avais déjà fait cent fois, me fis crier dessus par Envy, encore. Je tentai de répondre à ses coups, mais il savait mieux se battre que moi, et je roulai au bout du couloir.
Les gens immortels ne savaient pas retenir leurs coups.
Puisqu'il n'y avait rien de mieux à faire, je sortis. Pas dans le parc trop vide, non. Dans la cour. Tout aussi vide, mais ça me semblait moins anormal. Il y avait des pavés et une vigne vierge qui recouvrait le mur de la maison.
Il y avait aussi une petite fille, avec des tresses et de grands yeux très bleus et très vides. Elle me regarda sans bouger, accroupie dans la cour, les bras entourant ses genoux. Je la regardais aussi. Son regard vide me rappelait le parc sans animaux, et je devinai qu'elle n'était pas normale.
J'avisai un ballon un peu dégonflé et donnai de petits coups de pied pour le faire rouler jusque devant elle. Elle me regarda faire, sans parler, sans bouger, puis son regard alla de moi à la balle, puis de la balle à moi. Je sentis un frisson remonter le long de mon dos sans savoir pourquoi. Il y avait quelque chose de contre nature chez elle, mais quoi ?
Enfin, de toute façon, moi non plus, je n'étais pas normal. Même pour un Homunculus.
— Je m'ennuie, lâchai-je. On joue ?
Je lui lançai la balle, qui roula devant elle et la dépassa, tandis qu'elle la regardait s'éloigner d'un œil vague. Je me sentis terriblement déçu.
— Tu n'as vraiment que ça à foutre pour t'occuper de cette dégénérée ?
Je relevai la tête et vis Envy qui se moquait de moi, accoudé à la fenêtre de l'étage. J'étendis mon bras pour lui envoyer un coup de poing, mais il l'esquiva en rigolant.
— Tu me diras, cette chose sera peut-être une adversaire à ton niveau.
Il partit en riant, me laissant en rage. Je donnai un coup de pied de toutes mes forces dans le ballon qui alla s'écraser contre le mur, un peu plus flasque qu'avant, puis me tournai vers la petite fille qui m'observait en penchant la tête.
— Et toi, tu n'es pas en colère contre lui ? Tu n'as pas envie de le frapper ?
Elle bougea légèrement, sans que l'on puisse appeler ça une réponse.
Son silence m'énerva, alors je partis chercher la balle et la posai devant elle.
— Tiens, tu peux la frapper.
Comme elle ne semblait pas comprendre, je décidai de lui faire comprendre, par mes mots et mes gestes, ce que j'espérais de sa part. Cela prit du temps, mais je n'avais que ça, du temps. Je frappai la balle à de nombreuses reprises, lui faisant signe de m'imiter.
Au bout d'un long moment, elle se releva lentement, puis donna un petit coup de pied. La balle partit sur le côté et ne roula pas bien loin, mais c'était un début. Je la remis devant elle, et elle recommença. Encore et encore, de plus en plus fort. Je ne savais pas pourquoi, mais la voir donner ces coups de pied me réjouissait. Quand son coup fut assez fort pour rebondir contre le mur, je bondis avec un petit cri de joie en la félicitant.
— Bravo, tu as réussi ! On joue encore ?
Elle ne répondit pas, mais j'avais l'impression que, malgré ses yeux sans vie, elle avait presque souri.
