Chapitre publié le 29 mai.
Chapitre 31 : Le message
Seules les lumières blêmes des écrans jetaient un éclairage dans la salle obscure. Rien ne bougeait. Tout était calme. Le silence était seulement troublé par des bruits électroniques émanant de temps à autres de l'énorme ordinateur installé dans un coin, dont les multiples écrans étaient parcourus par des milliers de données tout aussi incompréhensibles les unes que les autres. C'était un endroit isolé du monde, isolé de ses réalités, dans le silence et l'obscurité.
Une haute silhouette sombre était installée devant l'ordinateur. Elle n'en avait pas bougé depuis plusieurs heures et était si immobile qu'on aurait pu la croire morte. Mais il n'était pas mort. Il surveillait son monde, sans relâche, avec une irritation et une impatience croissantes. Quiconque aurait pensé pouvoir passer sous son regard à son insu s'en serait mordu les doigts.
La silhouette finit, sans doute succombant au poids de la fatigue qui parvenait bel et bien à s'infiltrer dans ce corps impassible, par bouger légèrement et un soupir s'échappa dans les ténèbres. Des yeux jaunes qui, eux, n'avaient pas fléchi, se plissèrent avec mécontentement, sans cesser de fixer l'écran sur lequel une masse de données, désespérément statiques, s'affichaient autour de la silhouette d'un jeune garçon aux cheveux hérissés.
Il avait eu de la chance de retrouver ces installations dans les vestiges de son ancien palais. Elles étaient même quasiment intactes : il ne lui avait pas fallu beaucoup de peine pour les remettre en marche. Il retint un petit rire. L'Organisation ne savait pas ce qui les attendait.
Du moins si son plan parvenait enfin à son terme. Il posa son regard sur le bout de sandwich posé à même la table, délaissé depuis des heures, puis le jeta dans la poubelle voisine. Depuis sa... mésaventure dans le domaine des Ténèbres, il n'avait plus retrouvé un appétit d'humain et se contentait de manger seulement par nécessité quand il sentait l'épuisement le rattraper.
DiZ reporta son regard sur les signaux qui bipaient doucement. Toujours les mêmes depuis des jours, des semaines maintenant ! Il sentit la colère et l'impatience, qui ne quittaient jamais totalement son cœur, se manifester à nouveau et parcourir ses veines froides. Tout cela à cause de cette Simili... Ah, qu'il haïssait avoir à se reposer sur ceux de son espèce ! Même si celle dont elle venait était une Princesse de cœur (ce qui ne rendait l'existence de Naminé que plus absurde et contraire à toutes les lois de la nature), il détestait ça. Il lui tardait d'être enfin délivré de la présence de cette chose.
Ses réflexions furent interrompues par l'arrivée inopinée de Riku. DiZ ne bougea pas, ne montra pas le moindre signe qu'il était conscient de sa présence, mais il l'avait bel et bien senti, même si Riku était entré sans un bruit, comme s'il s'était simplement matérialisé hors des ténèbres. Il sourit intérieurement de sa comparaison.
DiZ jeta un regard en coin vers le jeune homme. Malgré l'obscurité de la pièce, il le voyait parfaitement. Après ce qu'il avait connu, après tout, l'obscurité n'avait plus de secret pour lui. Riku avait le visage fermé, comme d'ordinaire, les lèvres serrées en une ligne mince et les yeux dissimulés par le bandeau noir qu'il avait décidé de porter, mais DiZ, qui commençait à le connaître, saisit aussitôt l'hésitation dans la posture de son allié.
« Quelque chose est arrivé ? » demanda DiZ sans transmettre la moindre chaleur dans sa voix.
Peut-être l'air frais de cette pièce souterraine avait eu raison de lui.
Riku prit une seconde de trop pour répondre, ce qui le mit aussitôt en alerte. Riku ne venait pas seulement le prévenir qu'il repartait en expédition.
« J'étais dans ma chambre », commença-t-il.
Sa chambre ? Ah, la petite pièce tout au fond de l'aile ouest. On pouvait à peine appeler cela une chambre. Un carré de parquet, un matelas et une commode poussiéreuse, et même pas de lumière. Elle avait dû être utilisée comme débarras, à en juger par les balais, seaux et cartons entassés dans les coins. DiZ soupçonnait qu'il avait choisi cette pièce isolée pour se faire oublier.
« Continue.
-Je crois que j'ai vu quelque chose. Dans le reflet de la vitre. C'était si fugace que je n'en suis pas certain, mais...
-De nouveaux visiteurs ? »
Oh, ce n'était pas un trop gros problème, mais ça n'en restait pas moins irritant. Si ces enfants de la ville voulaient bien se tenir à l'écart de ce manoir censé être abandonné...
Riku secoua la tête.
« Non, pas comme ça. Je parle d'images dans le reflet. Des images envoyées, comme un...
-Comme un message, tu veux dire ? » compléta DiZ en se tournant à moitié vers lui.
Oui, il avait entendu parler de ce genre de tours de passe-passe. Envoyer des messages par l'intermédiaire d'une surface renvoyant des reflets. Une étendue d'eau, une fenêtre, un miroir... tout ferait l'affaire. C'était plus facile que de contacter directement quelqu'un par la pensée, comme cela permettait de fixer les images sur un support matériel dénué de vie. Néanmoins, c'était inquiétant. Car la personne qui aurait réussi cela serait quelqu'un doté de grands pouvoirs magiques... et qui serait au courant de leur présence ici.
« Tu penses que quelqu'un essayerait de nous contacter ? Serait-ce le Roi ?
-Non, répliqua Riku, l'air lugubre. Ce n'était pas le Roi. J'espère vraiment me tromper, mais je crois que c'était Naminé.
-... pourquoi ferait-elle cela ? C'est absurde traverser le couloir est devenu trop difficile pour elle ?
-DiZ. Je crois qu'elle a dit qu'elle n'était pas là. Elle serait coincée quelque part, ailleurs, très loin d'ici, et demande à ce qu'on vienne la chercher. »
DiZ sentit une bouffée de colère lui monter au visage. Il se leva, les yeux menaçants. Elle s'était à nouveau enfuie ?! Cette petite... !
« Où est-elle ? ordonna-t-il.
-Dans sa chambre, répliqua Riku à sa grande surprise et confusion. J'ai vérifié.
-Alors...
-Je crois que cette Naminé est...
-Une imposteur ? Ça expliquerait son comportement étrange, certes, murmura DiZ pour lui-même, mais comment serait-ce possible... En es-tu bien sûr ?
-Je ne sais pas. Et si ce n'était pas Naminé qui avait envoyé ce message ?
DiZ réfléchit. Ce que disait Riku semblait complètement ridicule, mais...
« Que t'a-t-elle montré d'autre ? s'enquit-il en s'avançant lentement.
-... Je crois qu'elle a essayé de me dire où elle se trouvait, mais je n'ai pas compris. C'était très flou, et ça n'a duré que quelques secondes.
-Oui, communiquer sur une aussi grande distance... Ce n'est pas étonnant.
-Tu penses vraiment que Naminé est emprisonnée quelque part et que celle-ci est une... fausse ?
-C'est ce que nous allons découvrir tout de suite. »
Il se redressa de toute sa hauteur, bloquant de sa stature la lumière émanant des écrans.
« Riku, va chercher Naminé, ordonna-t-il. Cette plaisanterie a assez duré. Il est temps d'y mettre un terme.
-... Très bien. »
DiZ le dévisagea de ses yeux jaunes qui ne dévoilaient aucune émotion.
« Comprends bien que, si cette fille est une espionne, elle a eu accès à des secrets qui ne doivent sortir d'ici sous aucun prétexte. Et il est fort possible que notre ennemi soit plus dangereux qu'elle n'en ait l'air : si elle a pu venir jusqu'ici, faire disparaître Naminé et prendre sa place sans que je ne remarque rien, alors elle dispose de grands pouvoirs. Je te recommande de ne pas prendre cette situation à la légère. »
Xion n'avait pas bougé de la fenêtre. A part une ou deux fois, quand des besoins essentiels s'étaient fait pressants : elle avait rapidement avalé quelque chose sans même en sentir le goût, était passée aux cabinets, mais elle n'avait qu'un souvenir flou des événements les plus récents.
Depuis qu'elle avait été ramenée au manoir par Riku, elle... elle était longtemps restée entravée par la colère et le découragement. Que devait-elle faire ? Tenter une autre évasion ? La dernière fois, elle avait failli atteindre son but seule son inattention et la malchance avaient causé son échec. Mais non, soupirait-elle. Les autres devaient se méfier maintenant. Ils ne la laisseraient pas partir aussi facilement.
Qu'elle soit ici ou avec l'Organisation, elle n'était jamais réellement libre.
Elle ne comprenait pas ce qui se passait. Elle avait parfaitement entendu : Roxas et Axel avaient parlé d'elle comme si elle venait de les quitter. Alors ? Qu'est-ce que cela signifiait ? Tout comme elle était devenue une certaine Naminé, quelqu'un d'autre avait-il pris sa place ? Mais comment ? Pourquoi ? Toute cette histoire la dépassait.
Elle avait fini par prendre une décision. Ou plutôt, sa décision d'origine s'était trouvée renforcée. Elle allait retrouver Axel et Roxas. Et ils mettraient les choses au clair. Quand elle les aurait retrouvés, elle espérait, elle saurait ce qu'elle aurait à faire.
Elle devait seulement faire attention, et mettre toutes les chances de son côté. Et tout se passerait mieux, cette fois-ci.
Un bruit vers la porte attira son attention. Celle-ci s'était ouverte sans qu'elle s'en aperçoive. Le nouvel arrivant demeurait sur le seuil, encore voilé par l'ombre du couloir. Xion observa les traits indéchiffrables de Riku, essayant de percer à jour ses intentions. Que voulait-il maintenant ? Il semblait plus lugubre que jamais. Elle soupira intérieurement et se prépara à le lui demander, mais il la devança.
« Je suis venu te chercher », annonça-t-il d'une voix neutre, prudente.
Allons bon. Elle soutint son regard, ce qui n'était pas si facile, même avec ses yeux bandés. Elle espérait paraître aussi défiante qu'elle le souhaitait.
« Naminé... où qui que tu sois. Suis-moi. Et ne fais rien de stupide. »
Toutes ses résolutions s'effacèrent de son esprit glacé.
« On sait... que tu n'es pas elle. »
Naminé reposa son carnet sur ses genoux. Le message qu'elle avait rédigé, un entremêlement de dessins dans un foisonnement de couleurs, s'étalait sur les pages. Elle n'avait plus qu'à attendre, elle supposait, et à prier pour que son plan marche.
Les minutes s'écoulèrent. Sa chambre demeurait la même. Si elle s'était attendue à voir Riku apparaître sans crier gare, elle ne pouvait que s'estimer déçue. Avait-il au moins reçu son message ? N'ayant pas la moindre idée d'où il se trouvait à cet instant, elle avait lancé son message vers lui, plutôt que vers un lieu en particulier, ce qui s'était avéré bien plus compliqué. Elle n'avait en toute honnêteté pas pensé y arriver. Mais il semblait qu'elle ait réussi à l'envoyer, du moins en partie. Son message avait-il seulement atteint sa destination, c'était une autre histoire.
La jeune fille se rassit plus confortablement. Elle ignorait le temps qu'il lui faudrait pour la rejoindre.
Au bout d'une heure sans que Riku ne se manifeste, cependant, elle décida que c'était perdu. Elle soupira, pas réellement attristée. Seulement un peu déçue. Elle n'avait pas vraiment escompté que son plan fonctionne, du moins pas aussi rapidement. Mais ça ne faisait rien. Elle avait un autre plan, un plan qui s'était formé dans son esprit plein d'espoir après avoir entendu Ifalna.
C'était en effet la guérisseuse qui lui en avait donné l'idée. Elle qui se languissait de ne pouvoir se souvenir de son fils disparu, qui avait laissé un trou non comblé dans sa vie. Elle donnerait tout pour retrouver ses souvenirs perdus et Naminé, hé bien, elle aimerait tant l'aider. Pourquoi pas après tout ? Peut-être en avait-elle la possibilité...
Si elle ne pouvait pour le moment redonner ses souvenirs à Sora, et ainsi permettre à tous de se souvenir de lui, alors peut-être pouvait-elle rendre leurs souvenirs de Sora à ceux qui l'avaient connu, et ainsi, peut-être, permettre au jeune garçon de se souvenir d'eux. Qui sait ? Rien ne disait que ça ne pouvait marcher...
Le cœur un peu plus léger, Naminé tourna une nouvelle page, prit son crayon et se remit au travail.
« Alors que va-t-il se passer maintenant ? »
Sa voix résonna dans la salle sombre et silencieuse, et elle eut drôlement conscience de chaque inflexion dans ses mots. Peu lui importait.
Riku la regarda, impassible comme toujours, du moins d'après ce qu'elle pouvait discerner dans la semi-obscurité. Parfois, elle avait envie de lui arracher cet air de son visage, mais à cet instant, elle se sentait seulement incroyablement lasse.
« Nous allons devoir comprendre qui tu es et comment tu es arrivée ici, répondit-il, et nous allons devoir prendre une décision. En attendant, tu vas être enfermée dans une dimension virtuelle, pour que tu ne puisses pas t'enfuir. »
Xion hocha la tête, et cessa de l'écouter. Hé bien, voilà qu'elle pouvait dire adieu à ses plans, à ses projets d'évasion et de retrouvailles, songea-t-elle avec amertume. Il y avait toujours quelque chose, cependant, qui la perturbait.
« Comment est-ce que tu as su ? » demanda-t-elle à mi-voix sans le regarder, le menton dans les genoux.
Elle n'en avait vraiment pas la moindre idée. Elle songeait vaguement qu'ils avaient fini par percer à jour son déguisement... Ce n'était pas vraiment improbable, mais ils ne s'étaient doutés de rien jusqu'à présent...
La réponse de Riku, pour cette raison, la surprit.
« Naminé – la véritable Naminé – a réussi à nous faire parvenir un message il y a peu, dit-il. Et, vu ta réaction quand je t'ai confrontée, j'ai été forcé de réaliser que nos soupçons étaient fondés. Mais elle n'a pas pu nous dire où elle se trouvait à présent. C'est pour cela qu'on aimerait savoir cela, pour commencer. »
Xion lui jeta un coup d'œil puis renfonça son menton dans ses genoux en soupirant. La croirait-il si elle lui révélait qu'elle était aussi perdue que lui ?
« Nam... Qui que tu sois. Où est-elle ?
-Je n'en sais rien. »
Il se contenta de la dévisager sans changer d'expression et la jeune fille soutint son regard, le défiant de l'accuser de mentir.
« Qui t'a envoyée ?
-... Je ne sais pas », répéta-t-elle en fronçant les sourcils.
Il parut pris de court un bref instant puis ses traits se durcirent.
« Tu sais, il serait plus simple pour tout le monde que tu nous dises tout ce que tu sais. Ça ne t'avancera à rien d'essayer de protéger ceux qui t'ont laissée te débrouiller ici. C'est l'Organisation, n'est-ce pas ? Je sais qu'ils sont versés dans l'art du clonage. »
Xion laissa échapper un grognement et se recroquevilla davantage, entourant ses genoux de ses bras comme si cela pouvait la protéger. Elle enfouit son front dans ses genoux, et ferma les yeux. Elle n'avait même pas envie de lui répondre. De toute manière, il ne la croirait pas.
Quelques longues secondes s'écoulèrent dans le silence. Elle se demanda distraitement s'il avait fini par laisser tomber et décidé de la laisser tranquille. Peut-être qu'il était parti ? Puis, il prit la parole d'une voix légèrement plus douce.
« Dis-moi au moins... qui es-tu ? Quel est ton vrai nom ? »
A cet instant, Xion pesa sa réponse avec soin. Elle pouvait choisir de ne pas se donner cette peine et de ne rien en dire quoiqu'il ne soit guère sage de refuser une fois encore de parler, mais risquer de le mettre en colère la laissait de marbre. D'un autre côté, elle était sincèrement curieuse de voir sa réaction face à la révélation de son identité...
Finalement, elle décida de lui porter un dernier coup, tant qu'elle le pouvait encore. Comme une tentative de rébellion, le mieux qu'elle puisse faire de là où elle en était.
Alors elle releva la tête et regarda Riku droit dans les yeux.
« Je suis Xion. »
Elle eut l'occasion de savourer la surprise qui s'affichait sur le visage du jeune homme pendant une ou deux secondes avant qu'il ne se reprenne. Mais sa voix demeurait déconcertée quand il lui demanda :
« Xion ? Mais... pourquoi ? Comment ? Que fais-tu ici ?
-Je n'en sais rien ! » Soudain prise d'une envie folle de hurler, Xion ne fit aucun effort pour se contenir quand sa voix sauta brutalement dans des volumes élevés. « J'en sais rien ! Je me suis réveillée un jour dans cette maison, et je n'ai aucune idée de comment ou pourquoi ! Je ne sais pas pourquoi ton amie a disparu ! Je sais pas pourquoi je me suis retrouvée avec son apparence ! Pendant tout ce temps, j'ai essayé de m'en sortir ! Je voulais juste retrouver mes amis, mais il a fallu que tu viennes tout gâcher ! »
Elle continua de hurler pendant un moment, déversant toute la rancœur accumulée ces dernières semaines sur le visage inflexible de Riku.
« ... Depuis combien de temps... ? dit ce dernier d'une voix hésitante quand elle se tut enfin en toussant, la gorge brûlante.
-Quelques semaines, parvint à marmonner Xion d'une voix rauque, soudainement très lasse. Enfin je crois. Je sais pas. Ne vous inquiétez pas, je n'ai touché à rien et je n'ai rien dit à l'Organisation. Mais te fais pas d'illusion, ils doivent être au courant. Je pensais que tu étais responsable au début, mais c'est sans doute la faute de l'Organisation.
-Je vois..., murmura Riku qui paraissait plongé dans ses réflexions. Ils t'auraient donné l'apparence de Naminé et t'auraient laissée là... Je ne savais pas qu'ils étaient capables d'une chose pareille. Mais dans quel but ? Pourquoi ne pas simplement investir cet endroit s'ils nous avaient repérés ? Et si c'est le cas, … alors Naminé doit être avec l'Organisation. »
Il s'interrompit et porta une main à son menton.
« Est-ce que c'est vraiment un coup de l'Organisation ? Je ne comprends pas pourquoi ils n'auraient pas profité pour attaquer depuis tout ce temps. Et puis, les autres de l'Organisation te cherchaient. Ils ne savent pas que tu es là... A moins que seul leur chef soit au courant ? Non, et si cela faisait partie du plan de Naminé ? Peut-être qu'elle a découvert quelque chose pendant que j'étais en expédition... Mais pourquoi ne pas en avoir parlé avant de... Parce qu'elle pensait que DiZ ne la laisserait pas faire... ? »
Xion avait cessé d'écouter son monologue et s'occupait en triturant distraitement la lanière de sa sandale.
Il lui adressa soudain à nouveau la parole :
« Qu'est-ce que tu sais, alors ? Est-ce que tu sais... ce qu'il se passe ici ?
-Vaguement, répondit Xion en haussant une épaule, ses lèvres s'inclinant en un sourire triste. Je sais pour Sora.
-... Bien sûr. C'était prévisible. Alors... ?
-Je sais qui je suis, maintenant.
-... Alors tu as découvert la vérité.
-Oui », murmura-t-elle.
La pâle lueur émanant d'un groupe d'écrans quelque part sur sa droite dansait avec les ombres sur le visage de Riku, dessinant des changements d'expression qui n'existaient sans doute pas.
« Je comprends pourquoi tu fais tout ça, maintenant », ajouta-t-elle malgré elle.
S'étaient-ils tout dit à présent ? Maintenant qu'il savait qui elle était, n'allait-il pas l'obliger à... A quoi ? A rendre à Sora ce qu'elle lui avait pris ?
« Sora est trop naïf, dit-il brusquement. Il ne voudrait certainement pas que les choses se passent comme ça...
-Oui... Il a toujours été comme ça.
-Oui. » Ses traits se durcirent à nouveau. Ou peut-être étaient-ce un effet des ombres. « C'est pour ça que je suis obligé de prendre les choses en main. Pour son bien. Et il n'est pas seul concerné. Si nous laissons l'Organisation... »
Il s'interrompit brusquement et Xion ne comprit pas immédiatement pourquoi. Il lui fallut quelques instants pour apercevoir DiZ qui traversait la pièce en direction de l'ordinateur sur sa droite. Elle ne l'avait même pas entendu, encore moins vu, arriver.
DiZ jeta à peine un regard dans sa direction sans changer d'allure, et se renfrogna.
« J'ai terminé les dernières vérifications. Il est temps de la mettre dans le programme.
-Serait-il possible d'attendre un peu ? s'enquit Riku qui suivait ses mouvements du coin de l'œil. J'aimerais encore lui parler.
-Tu plaisantes ? répliqua sèchement l'homme qui n'avait pas l'air d'avoir envie de rire. Il est bien trop dangereux de la laisser libre une seule seconde de plus. Je ne tiens pas à ce qu'elle nous file encore entre les doigts. Après cela, ajouta-t-il en s'asseyant sur le siège dans un craquement de tissu rêche, il nous faut impérativement retrouver Naminé. Je suppose que cette imposteur n'a pas voulu dire où elle se trouvait...
-Elle a dit qu'elle ne le savait pas. »
DiZ émit un petit ricanement étouffé.
« Et ne me dis pas que tu l'as crue aussi facilement... Je pensais que ton expérience t'avait endurci, mais tu es encore trop naïf, parfois.
-J'en suis certain. Je pense qu'elle dit la vérité. Elle ignore vraiment ce qu'il se passe.
-... Hmph. Pense ce que tu souhaites. »
Riku n'ajouta rien. Xion lui jeta un regard soupçonneux. Pourquoi ne la dénonçait-il pas ? Pourquoi ne révélait-il pas à DiZ qui elle était vraiment, ce qu'elle venait de lui dire ?
Les claquements secs de touches pressées rythmèrent un temps indéfini avant que DiZ ne reprenne la parole sans bouger de sa position.
« Une fois qu'on en aura terminé, Riku, tu vas devoir repartir à la chasse de l'Organisation. Cette fois, ce ne sera pas pour les observer. Il va nous falloir des réponses. Il serait trop dangereux de nous infiltrer dans leur forteresse aussi tôt, mais...
-Entendu... Peut-on être certain que l'Organisation soit en cause, cependant ?
-A ton avis ? Qui d'autre veux-tu que ce soit ? Je te rappelle qu'elle a essayé de les rejoindre il y a peu. Si tu n'étais pas arrivé à temps, tout notre plan aurait volé en éclats. D'ailleurs, je pense qu'il va falloir songer à nos défenses. Si l'Organisation a connaissance de cet endroit, alors il faut par-dessus tout que ce sous-sol leur reste et inconnu et inaccessible. »
Le silence retomba. Xion se blottit contre le mur et ferma les yeux. Elle sentait le regard de Riku sur elle, mais elle n'avait plus rien à lui dire.
Si, il y avait une toute dernière chose qu'elle tenait à dire.
« Je n'ai jamais essayé de retourner à l'Organisation, murmura-t-elle entre ses dents. Je voulais juste revoir mes amis. C'était juste ce que je voulais.
-... C'était ce que tu avais l'intention de faire ? »
Xion releva les yeux vers Riku, qui n'avait toujours pas bougé, immobile au milieu de la pièce.
« Tu n'as pas envie, toi aussi, de revoir les tiens ?
-... Bien sûr que si.
-Alors j'espère que tu les retrouveras », laissa-t-elle échapper encore en reposant son menton dans ses genoux. Elle avait presque envie de dormir. « Si tu vois mes amis, s'il te plaît, laisse-les tranquille. »
Ses amis et Riku étaient ennemis. Il y avait peu de chance qu'il accepte, surtout maintenant qu'il était déterminé à retrouver Naminé supposément kidnappée par l'Organisation, mais au moins, elle aurait essayé.
Elle espérait quand même, tout au fond d'elle-même, qu'elle aurait l'occasion de revoir Roxas et Axel. Elle ne leur avait même pas dit au revoir.
