Avant que vous ne lisiez ce chapitre, je tiens à m'excuser pour son retard. J'ai eu un peu de mal à l'écrire donc je l'ai remis à après les deux semaines de vacances que j'ai pris fin décembre pour les fêtes (je me suis bien reposé, merci).

Malheureusement, à peine deux jours après (le jour du réveillon du Nouvel An, rien de moins), je suis tombé malade. Ce n'était heureusement pas le Covid. Cependant, j'ai été HS pendant quelque temps. Un peu plus d'une semaine pour être totalement remis. C'est pour cela que vous n'avez le chapitre que maintenant.

Encore une fois désolé et bonne lecture.

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Check Mate DxD

Chapitre 116 : Il est question des Enfants/Kodomo ni tsuite

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Hermione lut l'article jusqu'au bout, en tremblant.

« Hariel… » dit-elle à nouveau à son ami.

« Ça aurait pu être moi… » murmura-t-il d'une voix éteinte.

Hermione sentit son cœur se serrer. Oui, bien sûr que ça aurait pu être lui. Hariel lui avait raconté comment l'avaient traité les Dursley pendant les 5 ans où il avait été à leur charge. Elle aurait dû se douter qu'une telle attitude face à la magie puisse se trouver ailleurs. En pire.

Elle se rendait compte à présent à quel point elle avait eu de la chance. Ses parents étaient anglicans, mais non pratiquants ce qui fait qu'à aucun moment leurs convictions religieuses ne les avaient poussés à éprouver des sentiments négatifs à l'encontre de leur fille Sorcière. Cependant, elle aurait dû savoir que ce n'était pas le cas pour tout le monde.

Elle avait déjà des chiffres. Près de 30 % des Sorciers qui naissaient en Grande-Bretagne chaque année venait de parents Sapiants. Le fait en revenait principalement à l'isolationnisme qui avait provoqué un appauvrissement du pool génétique et donc une diminution des naissances. Mais toujours est-il que sur ces 30 %, les chances que ceux-ci naissent dans des familles avec des convictions religieuses incompatibles étaient grandes.

Mais ils ne devaient pas être les seuls dans ce cas. D'après ce que lui avait dit Hariel, les Dursley n'étaient pas vraiment croyants. D'autres personnes pouvaient donc se retrouver effrayées en apprenant que leur enfant était un Sorcier et pouvait avoir des comportements violents.

Hermione jeta à nouveau un coup d'œil à l'article. Non, c'était différent. Les parents du jeune David Wilson ne savaient pas qu'il était Sorcier. Ils étaient juste les témoins impuissants de phénomènes inexpliqués qui se passaient autour de leurs enfants. Et comme tous les humains, ils pouvaient finir par prendre peur, se montrer brutaux ou même faire des erreurs.

Parce que c'était là, à son avis, le vrai problème, l'ignorance. Encore une fois, Hermione avait eu de la chance. Avant qu'Hariel ne leur parle de ses pouvoirs, ses excès de Magie Accidentelle étaient trop discrets pour que ses parents les aient remarqués. Mais qu'est-ce qu'il se serait passé s'il n'y avait pas eu Hariel ? Ou alors Eleanor, qui avait été la première au courant et qui l'avait soutenu ? Qu'est-ce qui se serait passé si elle s'était mise à faire des choses étranges et que ses parents n'ont su ce qui lui arrivait que quand le professeur McGonagall est venu en personne leur révéler la vérité ? Hermione voulait croire en ses parents, mais une petite voix dans son esprit lui disait qu'après tout, ils étaient humains.

Non ! Elle devait absolument se sortir ça de la tête. Ce n'était pas ce qui s'était passé. Elle avait eu Eleanor. Elle avait eu Hariel. Et ses parents avaient également été avec elle. Pour elle, tout était allé pour le mieux au final… Tout comme pour Hariel.

« Mais ce n'était pas toi » lui dit-elle finalement. « Ce n'est pas toi qui es mort dans un placard sous l'escalier, c'est lui. Toi, ton pouvoir t'a protégé et grâce à lui, tu as trouvé une famille. Arrêté de penser au pire, car ce n'est pas ce qui s'est passé. »

Hariel leva les yeux vers elle et la fixa pendant quelques instants avant de hocher la tête.

« Oui, tu as raison » dit-il. « Inutile de revenir sur ce qui ne s'est pas produit. Et inutile aussi de revenir sur ce qui s'est produit. C'est stérile. »

Il prit le papier des mains d'Hermione et y jeta un nouveau coup d'œil.

« Par contre, ce que je peux faire, c'est empêcher que ça se produise à nouveau » dit-il.

« Comment est-ce que tu veux faire ça ? » Demanda Hermione. « Tu ne peux pas contrôler toutes les familles d'Angleterre pour voir si elles ont un enfant magique et si elles le traitent bien. »

« Tout seul, non. Mais avec l'aide du Monde Sorcier… »

Le regard de la jeune femme s'éclaira alors.

« Tu veux faire passer une loi » dit-elle.

« Ce sera le premier acte politique du Prince. Et si je n'arrive pas à le faire passer maintenant, je pourrais toujours recommencer quand je serais Roi. »

« Pourquoi ne pas attendre alors ? »

Hariel ramassa quelque chose sur la table près de lui. C'était une image du petit garçon. Probablement celle qui devait servir à illustrer l'article. C'était une photo de classe. Il était censé sourire, mais quiconque pouvait voir que son sourire était faux. Elle avait dû être prise entre le moment où sa famille avait commencé à le martyriser et celui où ils l'avaient retiré de l'école.

« Il y a peut-être d'autres David Wilson en Angleterre et on ne le sait peut-être même pas… » dit-il d'une voix triste. « Je ne veux pas me dire que certains sont morts parce que je voulais attendre que ce soit plus facile de leur porter secours. »

« Tu as besoin d'aide ? » Demanda Hermione en lui rendant la photo.

« Tu as une révolution à mener à l'école, non ? Ça aussi c'est important. Ceux qui sont ici seront peut-être ceux qui travailleront plus tard à sauver d'autres David Wilson. Il vaut mieux qu'ils aient un esprit plus… éveillé. »

Hermione soupira.

« Très bien » dit-elle. « Mais n'hésite pas à me demander de l'aide si nécessaire. »

« Et réciproquement. Même si je vais m'occuper de ça, j'aurais toujours le temps pour Ed et aussi pour t'aider toi. »

« Alors ? » Demanda Hermione. « Quel est le programme ? »

« Discussion avec les Chevaliers sur la marche à suivre, rassemblement d'informations puis mise en place d'un projet de loi précis. Le mieux serait de pouvoir le présenter assez rapidement sans bâcler le travail. »

Il jeta un regard en coin à son ami. Il ouvrit la bouche, hésita quelques instants, la referma. Il lui fallut encore quelques instants de réflexions pour pouvoir parler à nouveau.

« Durant ces réunions, nous allons devoir parler de personnes… comme toi. »

« Comme moi ? »

« Des enfants nés de parents Sapiants. Même si je fais confiance aux Chevaliers, ils sont également très compétents donc ils vont forcément se poser la question de savoir si… »

« Si quoi ? »

« S'il ne valait pas mieux retirer les enfants magiques de leur famille non magique d'office. »

Hermione frémit. Ne plus voir ses parents lui serait insupportable, mais elle savait que c'était une solution logique.

« Bien sûr, je sais que c'est la voie de la faciliter et je refuse que cela soit fait, mais si le problème est soulevé, est-ce que tu veux être présente pour soutenir tes parents ? Je ne suis peut-être pas le meilleur pour défendre les tuteurs Sapiants d'un enfant magique… »

Hermione réfléchit. Est-ce qu'elle le voulait ? Évidemment. C'était ses parents. Ils avaient été exceptionnels avec elle quand ils avaient appris pour la magie. Mais la question était plutôt, est-ce qu'elle avait besoin de le faire ? La réponse était évidente. Non.

« J'ai toute confiance en toi pour être impartiale dans les discussions » dit-elle. « Je te connais et je connais ta probité. Si tu veux que je témoigne, je le ferai, mais sinon, je te laisse faire. C'est ton boulot. Moi j'ai déjà le mien. »

Hariel sourit. Oui, c'est vrai. Ils avaient du travail en perspective.

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C'est pour cela qu'il n'attendit même pas le samedi suivant pour organiser la réunion avec ses Chevaliers. Afin de leur laisser le temps de lire l'article, il leur envoya un message seulement le lendemain matin pour le soir. Normalement, il avait un dîner intime (pas plus de 30 invités) chez l'un des directeurs de service du Ministère à ce moment-là, mais il s'était fait porter pâle.

Le groupe habituel se retrouva donc une nouvelle fois dans le salon de Simeon Randall-Delûte avec cependant un ajout exceptionnel : Rota Skeeter. En effet, en tant que « lanceuse d'alerte », Hariel avait besoin de lui demander quelques précisions. Notamment comment elle était entrée en possession de ces informations.

« Parce que, autant que je sache, depuis que je suis dans le Monde Magique, je n'ai jamais entendu parler de ce genre de cas » précisa-t-il. « Je veux dire, ce serait si exceptionnel que ça ? Pas que je veuille que ce soit monnaie courante, mais si les Sorciers se sont cachés des Sapiants, il y avait quand même une raison. Donc aux endroits où les deux Mondes sont proches l'un de l'autre, ce serait naturel qu'il y ait des frictions. »

« J'ai fait quelques recherches aux archives du Ministère » intervint Baldwin Shaklebolt. « Ou du moins, j'ai essayé. Il n'y a aucun service spécifique ou de documents pour ce genre d'affaires. »

« Forcément puisque ces enfants ne sont pas encore identifiés comme Sorciers » dit Kelsey Prewett.

« Donc ça veut dire que nous ignorions son existence ? » Demanda Rutherford Urquart. « Impossible puisque Miss Skeeter l'a bien trouvé, elle. »

Tout le monde se tourna alors vers la journaliste. Tout comme Simeon, les Chevaliers étaient assez méfiants à son encontre à cause de sa réputation. Le regard avide qu'elle avait lancé sur l'assemblée (qu'elle rencontrait pour la première fois) à son arrivée n'avait pas aidé à la faire paraître plus sympathique. On la sentait prête à sortir carnet et plume pour écrire un article. Mais elle avait promis donc elle ne pouvait rien faire.

« Allons, je ne vais pas dévoiler mes sources… » dit-elle avec un grand sourire éclatant.

« Rita. La vie d'enfants est en jeu » dit Hariel avec un regard sérieux.

Puis son retard s'éclaira et ses lèvres s'étirèrent en un rictus rusé.

« Et puis, sans ce point de départ, nous ne pourrons pas travailler sur ce projet de loi qui permettra de souligner les manquements du Ministère. Chose qui pourrait s'avérer être le scandale du siècle. »

Bien évidemment, l'appât était énorme et visible. Hariel le savait et Rita, bien sûr, le savait également. Cela ne l'empêcha cependant pas de le gober tout rond. Après tout, un scoop pareil pouvait effectivement devenir le scandale du siècle.

« Très bien » dit-elle finalement. « Je vais vous le dire. Mais ce n'est que pour les enfants. »

« Oui. Bien sûr. Pour les enfants » lui répondit Hariel qui n'était pas dupe.

« Il se trouve qu'il m'arrive d'entretenir des rapports disons… particuliers avec l'assistante du Directeur du Service des Usages Abusifs de la Magie. »

« Quoi ? Mafalda Hopkrik ? » Demanda Spencer Bradley avec étonnement.

La femme était connue pour sa grande probité et son amour inconditionnel des règles et procédures. Il la voyait mal s'épancher sur qui que ce soit, surtout à quelqu'un comme Rita Skeeter.

« Et ces rapports particuliers vous amènent à obtenir des confidences sur l'oreiller ? » Interrogea Hariel.

« Allons ! Pour qui me prenez-vous ? » S'indigna alors Rita. « Nous ne le faisons pas forcément dans un lit. »

Sa réflexion provoqua une série de toussotements gênés et de regards consternés. Hariel, cependant, ricana. Il ne fut pas le seul, car Dianthea Greengrass fit de même.

« Eh bien quoi ? » Demanda effrontément Rita. « On ne peut pas m'en vouloir de donner de ma personne pour obtenir des informations. »

« Et donc, ces informations ? » Dit Hariel pour revenir à leur sujet.

« Et bien, c'était surtout des ragots sans grandes importances sur des interventions du Bureau de la Magie des Mineurs dans diverses banlieues Molles… Sapiantes à travers l'Angleterre. »

Hariel était concentré sur le sujet. Cela ne l'empêcha cependant pas de noter qu'elle n'avait parlé que d'interventions dans le monde Sapiant. Cette affirmation lui rappelait un problème d'inégalité qu'il avait remarqué depuis déjà bien longtemps. Les élèves de Poudlard n'avaient, en théorie, pas le droit de faire de la magie en dehors de l'école. Toutefois, ceux qui habitaient dans un foyer Sorcier, en particulier dans le Monde Magique, n'avaient aucune crainte de voir débarquer un hibou de ce bureau à chaque mouvement de baguette. Au contraire de ceux vivant dans le Monde Sapiant.

Cela voulait donc dire que les premiers pouvaient s'entraîner pendant l'été et que les autres non. Le Cœur Magique étant un muscle, il avait alors plus de chance de s'atrophier chez les seconds plus que chez les premiers.

« D'ordinaire, elle n'entre pas trop dans les détails, juste assez pour me permettre de fouiner » reprit Rita. « Cependant, il y a quelques jours, elle était assez bouleversée… et communicative que d'habitude. »

En disant ces mots, Rita ne se départit pas de son indifférence habituelle aux malheurs des autres. Toutefois, Hariel n'était pas n'importe qui et il discerna parfaitement certains micros expressions sur son visage. Sa relation avec Mafalda Hopkrik n'était vraisemblablement pas qu'intéressée. Il ne savait pas si elle l'aimait, mais certains sentiments étaient en jeu.

« Elle a dit comment le Service a été mis au courant ? » Demanda-t-il.

« Apparemment, ils ont reçu une alerte de Magie Accidentelle particulièrement forte » répondit Rita.

« Ils doivent probablement faire une enquête quand ils reçoivent un signal en zone Sapiante » proposa Rutherford. « Ils ont dû voir que l'adresse n'était pas celle d'un élève et y sont allés. »

« Une minute ! » Intervint Aaliyah Shafiq. « Si ce n'était pas l'adresse d'un élève de Poudlard, alors comment ont-ils su pour l'utilisation de la magie ? »

Le silence s'installa dans la pièce. Aucun ne savait comment le Service des Usages Abusifs de la Magie faisait vraiment pour détecter son utilisation frauduleuse. Apparemment, personne parmi eux n'y était lié de près ou de loin. Ils n'étaient donc pas au courant de leur fonctionnement interne. Un manque qu'Hariel se promit de combler rapidement.

« Hypothèse » dit-il alors. « Le SUAM a la capacité de repérer la magie pratiquée en territoire Sapiant sur tout le territoire. »

« C'est une hypothèse qui se tient » approuva Rutherford.

« Dans ce cas, pourquoi les familles ne sont contactées qu'au onzième anniversaire de l'enfant ? » Demanda Cassiopée McMillan.

« Parce que c'est à ce moment-là que leur nom est inscrit dans le Livre des Admissions de Poudlard » répondit Rutherford.

« Le quoi ? » Demanda Spencer.

« C'est un recueil de tous les élèves qui sont venus à Poudlard depuis sa fondation » expliqua l'érudit. « Tous les Sorciers Britanniques y sont inscrits par la Plume d'Acceptation. C'est elle également qui rédige les adresses sur les enveloppes des lettres de fournitures destinées aux élèves. »

Il est vrai qu'Hariel s'était toujours demandé d'où venait une telle précision dans la localisation de l'endroit où habitaient les élèves. Il était heureux que les charmes sur l'orphelinat où il était censé résider fonctionnent, car c'était là qu'elles étaient envoyées (avec la mention exacte de la chambre qu'il était censé occuper). Il se sentait assez satisfait d'avoir berné un Sorcier avec ces protections, mais si c'était un artefact magique ancien, c'était encore plus satisfaisant. Il se demandait cependant ce qui aurait été inscrit sur sa lettre s'ils vivaient toujours chez les Dursley quand il avait eu onze ans. « Harry Potter, dans le placard sous l'escalier… » ? Cela aurait été… tellement pitoyable. Et en même temps, il se demandait si quelqu'un, en lisant ces mots, serait venu le sauver. Mais en pensant à cela, Hariel se secoua. Non, encore une fois, cela n'avait pas été le cas. Il était sauf et dans une famille heureuse.

« Je n'étais pas du tout au courant de ça » dit Spencer. « Je croyais que c'était parce qu'avant cela, c'était plus difficile pour les enfants de garder un secret donc on leur disait au dernier moment. »

« Peu de gens savent pour le Livre ou la Plume » expliqua Rutherford. « Et c'est vrai que l'importance du Secret est souvent évoquée quand on parle de l'âge de la divulgation. »

« Sauf que nous avons la preuve qu'il est possible de détecter la Magie bien avant onze ans » dits Baldwin.

« Peut-être pas » intervint Aaliyah. « Peut-être qu'ils ne peuvent capter que les signaux les plus puissants. Ce serait pour cela que certains enfants nés de parents Sapiants passeraient inaperçus. »

« Sauf que des excès de Magie Accidentelle peuvent être violents puisqu'ils réagissent aux sentiments des enfants. Si l'un d'eux est maltraité, alors la Magie qu'il invoque doit être puissante et donc déclencher plus d'enquêtes. Pourquoi ce n'est pas fait ? »

« Peut-être que ça l'est » dit Hariel.

L'implication de ses paroles plongea la pièce dans le silence. Si des enfants maltraités avaient des épisodes de Magie Accidentelle puissants et que des investigations étaient menées sans que personne ne soit au courent, cela voulait peut-être dire que le Service enterrait les dossiers.

« Je ferais des recherches plus approfondies pour être sûres » dit Baldwin.

C'était lui qui avait les accès les plus importants au Ministère. Si quelqu'un pouvait trouver des informations dans leurs Archives, c'était bien lui. Hariel, en attendant, s'adresserait à Adilicia Lenn Mathers pour d'autres renseignements. Contrairement aux Sorciers, les Magiciens avaient des contacts parmi les autorités Sapiantes. Si la Présidente de la Société Magique de la Goetie était de son côté alors il pourrait obtenir des dossiers de Police sur des morts d'enfants ainsi que ceux des Services Sociaux sur ceux ayant été abusés. Parmi eux devaient se trouver des Sorciers et s'ils pouvaient les recouper avec les renseignements que pouvait leur ramener Baldwin, ils tenaient les premières lignes de leur argumentation afin de promulguer leur Loi David Wilson sur la Protection de l'Enfance.

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Viktor prit son téléphone portable, l'alluma, et ouvrit directement sa liste de contact. Il fit glisser les noms sur son écran jusqu'à celui qu'il cherchait. C'était assez simple, il n'avait pas énormément de numéros.

« Oui, Viktor ? » Dis la voix à l'autre bout du fil.

« Je te dérange Hariel ? »

« Et bien… »

Son Maître avait l'air préoccupé. Viktor se demanda si c'était finalement une bonne idée de l'appeler. Il avait entendu dire par les autres qu'il s'était lancé dans un projet un peu ambitieux.

« Je peux rappeler plus tard si tu veux. »

« Non ! Non. Vas-y. Je t'écoute. Au fait, comment se passent tes recherches ? »

« C'est à ce sujet que je t'appelle. »

Se demandant par où commencer, il décida de faire les choses dans l'ordre. Il parla des Archives, de ses recherches infructueuses puis il aborda le sujet de son père.

« Et comment tu te sens ? » Lui demanda Hariel.

« Je ne sais pas vraiment » soupira Viktor en passant sa main dans ses cheveux.

Il avait pris l'habitude de les couper assez court quand il jouait au Quidditch. C'était plus pratique pour voler. À présent qu'il avait arrêté, il les avait laissé pousser. Il ne savait pas encore trop comment il les voulait, mais au moins il aurait de la matière pour sa réflexion.

« En fait, je crois que je me suis enterré dans mes recherches pour éviter d'y penser. »

« Et qu'est-ce que ça a donné ? J'imagine que tu as repris toutes les archives. »

« Oui. Mais je n'ai rien trouvé. »

« Si elle est étrangère, c'est plutôt normal… » soupira Hariel. « Tu sais d'où elle vient ? »

« Non. Et connaissant mon père, je ne suis même pas sûr qu'il lui ait demandé. »

« Son nom paraît Scandinave » fit remarquer Hariel.

« Donc je devrais aller fouiller les archives danoise, suédoise, finlandaise, islandaise et norvégienne ? »

« Si tu n'as pas d'autre choix… »

Viktor soupira. Il allait répondre quelque chose quand il entendit un bruit d'inspiration dans le combiné. Comme si son interlocuteur hésitait à lui dire quelque chose.

« Oui ? » Demanda-t-il.

« Tu devrais… tu devrais essayer la bibliothèque du Château Tepes dans les Carpates Roumaines. »

« Chez les Vampires ? » Demanda Viktor surpris. « Pourquoi chez eux en particulier ? »

« J'ai… un pressentiment » répondit Hariel.

« Un pressentiment ? »

« Écoute, depuis mon voyage dans le temps, j'ai décidé de toujours suivre mes pressentiments puisqu'ils sont le résultat de l'écho d'une future capacité divinatoire. Donc oui, quand tu m'as parlé de ton problème, j'ai tout de suite pensé aux Vampires Tepes alors c'est sans doute que tu trouveras un indice là-bas. »

« Très bien » acquiesça finalement Viktor.

De toute façon, ça ou autre chose… cependant, ce qu'il n'avait pas prévu, c'était la vitesse avec laquelle Hariel lui obtint une audience avec la Reine Valéry. À peine une heure après avoir raccroché, Hariel était apparu sur le seuil du chalet de sa tante pour venir le chercher. Viktor avait alors rapidement fait ses bagages et dit au revoir à Petrana. Quelques secondes plus tard, les deux Démons étaient arrivés en Roumanie, face à un immense château de film d'horreur. Devant les grandes portes, une petite jeune femme aux cheveux blonds et aux yeux rouges les attendait.

« Hariel ! Quel plaisir de vous revoir ! » S'exclama-t-elle en s'avançant pour le prendre dans ses bras.

« Le plaisir est partagé, Valéry. Vous le savez bien. »

La Reine des Vampires Tepes sourit puis se tourna vers le compagnon de son ami.

« Et vous devez être Viktor Krum, je présume » dit-elle. « L'un des nouveaux Serviteurs d'Hariel. »

« Votre Majesté » répondit celui-ci d'une voix qu'il espérait ferme et en inclinant la tête.

Rencontrer cette femme était presque aussi impressionnant que de rencontrer l'un des Satans. Cependant, comme à chaque fois, ce qui le frappait le plus, c'était l'aisance avec laquelle Hariel se comportait avec les puissants. Certes, le Souverain des Démons était son oncle. Mais Valéry, elle, n'était pas quelqu'un de sa famille. Et pourtant, Hariel se comportait avec elle comme avec Sirzechs.

« J'ai fait préparer une chambre pour vous dans l'aile des invités » lui dit ensuite Valéry.

« Je vous remercie votre Majesté » lui répondit-il. « Vous avez toute ma gratitude. »

« Nul besoin. Ce n'est qu'un petit service que je rends à un vieil ami. Pour ce qui est de vos recherches, une fois installé, vous serez libre de vous rendre à la bibliothèque. Il reste encore du temps avant le petit déjeuner. »

« Le petit… » commença Viktor en clignant des yeux de surprise.

Pourtant, ils étaient en milieu d'après-midi. Cependant, il se souvient rapidement qu'il avait affaire à des Vampires. Le repas du soir était pour eux le premier de la « journée ». Il hocha donc la tête et remercia la Reine.

Alors qu'il s'apprêtait à suivre un domestique chargé de le conduire dans ses appartements, il se retourna une dernière fois vers Hariel et Valéry. Ceux-ci étaient à présent trop occupés à deviser gaiement. Bien entendu, Viktor avait entendu parler du lien qui les unissait tous les deux. Il savait qu'ils s'étaient rencontrés quand Hariel avait près de huit ans. Cependant, ce n'était que deux ans auparavant qu'ils avaient vraiment sympathisé, pendant les évènements provoqués par Rizevim Lucifer. C'était à ce moment-là que le Démon avait manipulé l'ancien Roi Tepes, le père de Valéry, afin de voler le Sacred Gear de cette dernière. Toutefois, cela avait été un mal pour un bien. En effet, l'Artefact avait eu pour effet de ronger son âme et ses émotions petit à petit. Un poids en moins sur ses épaules, elle avait pu se rétablir et éprouver à nouveau.

Toujours est-il que Victor ne resta pas bien longtemps dans la chambre qui lui avait été attribuée. Il se contenta de poser sa valise sur le lit avant de demander au Vampire qui l'avait amené de le conduire à la bibliothèque. L'homme ne fit aucun commentaire et le mena rapidement à destination. En y pénétrant, il se rendit compte qu'elle était presque exactement comme il s'était attendu à ce que ressemble la bibliothèque d'un vieux château.

Des étagères massives en bois sombre formaient un dédale inextricable. Le seul endroit un peu aéré se trouvait devant l'immense foyer d'une cheminée. À cet endroit-là, il y avait quelques gros fauteuils confortables ainsi que des tables de travail. Viktor resta quelques instants figé face à ce décor à la fois lugubre et grandiose en se demandant par où il devait commencer.

« M. Krum, je présume » dit une voix tout proche de lui.

Viktor sursauta. Il tourna la tête et se retrouva nez à nez avec un homme à la posture raide qui le toisait de ses yeux rouges. Son visage était dépourvu de la moindre ride et pourtant il paraissait assez âgé. Ses cheveux courts, noirs avec du blanc aux tempes, étaient impeccablement coiffés en arrière.

« On m'a prévenu de votre venue » dit l'homme. « Je me nomme Albeyric. Je suis le gardien de ces lieux. »

Le bibliothécaire en somme. Lui aussi ressemblait beaucoup à l'idée dont Viktor s'était fait du responsable de la bibliothèque d'un vieux château.

« Bonjour, Monsieur Albeyric » répondit poliment Viktor. « Je vous remercie de me permettre d'accéder à votre domaine. »

« Pas que j'ai eu le choix en la matière » renifla l'homme. « Dites-moi donc le sujet de votre recherche. »

« Inutile de vous déranger. Je peux très bien… »

« Personne ne farfouillera dans nos collections sans que je soit présent. Me suis-je bien fait comprendre ? »

Viktor déglutit et acquiesça. Le regard du Vampire était inquiétant. On aurait dit qu'il était prêt à fondre sur lui à la moindre page pliée. Le jeune Démon se demandait si sa résistance hors du commun suffirait contre un tel adversaire. Les Vampires avaient tendance à devenir plus fort avec l'âge. Et celui-ci semblait déjà assez ancien.

« Je cherche des renseignements sur ma mère » dit-il finalement. « Ou plutôt sur la lignée de ma mère et leurs capacités potentielles… »

« J'espère que vous avez un nom à le donner » dit Albeyric sur un ton légèrement méprisant.

« Oui » répondit Viktor en essayant d'ignorer la pique. « C'est Svalinn. »

« Cela me dit quelque chose… » murmura le Vampire en se frottant le menton.

Il commença à se diriger vers les étagères et Viktor lui emboîta le pas.

« Restez ici » lui ordonna alors l'homme.

Viktor sentit une légère contrainte dans mes mots du bibliothécaire. Mais elle n'était pas assez forte pour qu'elle lui fasse le moindre effet. Cela ne l'empêcha pas de demeurer là où Albeyric l'avait abandonné. Celui-ci ne fut cependant pas très long et, quand il revint, il était déjà en train de feuilleter un épais volume. Sur la couverture, Viktor put voir le titre : « Les Souverains Perdus ».

« Bahamut… Typhon… » marmonna-t-il. « Ah ! Voici ! »

Il posa alors le livre sur une table près de Viktor. Celui-ci se pencha et lut le titre du chapitre que lui montrait Albeyric.

« Svalinn, le Dragon Bouclier qui protège les Mondes de la brûlure du Soleil »

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Hermione sentit sa pièce vibrer dans sa main. Elle ouvrit sa paume moite de sueur et jeta un coup d'œil sur la surface métallique. Les gravures gobelines s'étaient effacées pour laisser la place à un message :

« La voie est libre. Tu peux y aller. »

Les mots d'aspects cryptiques ne l'étaient pas pour la jeune fille. Elle savait très exactement ce que ça voulait dire. Qu'Ombrage et sa brigade étaient dans une autre partie du château et que s'il leur prenait l'envie de revenir, ceux qui lui avaient envoyé ce message s'occuperaient de les retarder ou, au pire, la préviendraient pour qu'elle agisse.

Faire confiance aux Jumeaux Weasley était assez risqué, mais elle ne regrettait pas son choix. Avec leurs assortiments de blagues, elle était certaine qu'Ombrage n'avait aucune chance et grâce à la Carte des Maraudeurs, ils sauraient très exactement si elle et sa clique ainsi que Rusard et Miss Teigne (devenus les alliés de la femme crapaud malgré le mépris qu'elle avait pour eux) se dirigeaient vers elle. Elle avait donc le champ libre.

Soufflant une dernière fois, elle fit apparaître une chaise et grimpa dessus. Quelques élèves se trouvant déjà autour d'elle la virent faire et la regardèrent avec surprise. On était entre deux cours. Certains flânaient dans les couloirs pour retarder le moment de retourner en classe. Il n'y avait qu'une vingtaine de personnes, mais c'était bien suffisant pour une première fois.

« Nous sommes pris en otage » dit-elle alors d'une voix forte.

Les autres étudiants tournèrent la tête dans sa direction et un silence choqué s'installa dans la pièce.

« Nous sommes pris en otage » répéta Hermione. « Interdiction de se rassembler. Interdiction de s'habiller différemment. Et quoi ensuite ? Interdiction de penser ? Je crois que c'est le but recherché. Je crois que c'est ce que veut Ombrage, nous empêcher de penser par nous-même. Car si on faisait ça, on se rendrait compte que ce qui se passe ici n'est pas normal. »

« Ça… ça suffit ! » S'exclama alors un jeune homme.

Il s'agissait de Lewellyn Altman, le Préfet-en-Chef cette année-là.

« Si tu continues, je serais dans l'obligation de te retirer des points » poursuivit-il.

« Et bien, fais-le » dit nonchalamment Hermione. « Je suis Préfète, je peux très bien me les rendre moi-même si nécessaire. Ou m'en enlever, quelle importance ? Nous n'en sommes plus au point où ce système ait une quelconque utilité. Il s'agit de notre avenir. Il ne peut et ne doit pas être décidé par quelques points. »

« Non, mais par nos notes, si » dit une fille, une Serdaigles, comme Hermione. « Tout ce qu'on a à faire, c'est étudier et avoir de bonnes notes. Le reste est sans importance. »

Des murmures approbateurs commencèrent à se faire entendre.

« Sans importance ? Vraiment ? » Reprit Hermione. « C'est sans importance qu'on nous empêche de recevoir un enseignement de qualité ? C'est sans importance que nos propres camarades deviennent des bourreaux dans un système inique qui bafoue nos droits ? Et est-ce que c'est sans importance que ce même système use et encourage l'usage de la violence et de la torture ? Vous savez ce qui est arrivé à Dean. Tous, vous le savez, mais vous ne voulez pas le voir. De la même façon que vous voulez ignorer ce qui se passe durant les soi-disant retenues d'Ombrage. »

À ces mots, certains des élèves présents baissèrent la tête. Hermione pouvait les voir frotter nerveusement le dessus de leurs mains. Certains portaient des manches longues, d'autres de discrets pansements et d'autres encore des glamours pour dissimuler magiquement les plaies.

« Mais… mais c'est le règlement » dit l'une des victimes. « On ne peut pas désobéir au règlement… »

« Même si le règlement en question est injuste voir illégal ? » Demanda Hermione.

Des chuchotements se firent entendre dans le couloir.

« Oui ! Illégal ! » Répéta Hermione. « C'est ce que j'ai dit. Nombre de ces décrets sont totalement illégaux ! »

« Mais ils viennent du Ministre ! » S'exclama quelqu'un d'une voix paniquée.

« C'est vrai, c'est le Ministre lui-même qui les a édictées » acquiesça Hermione, « et c'est encore plus grave ! Le Ministre n'est pas tout puissant. Lui aussi est soumis à la loi, comme tout le monde. Il a le droit d'éditer des décrets, mais pas si ceux-ci vont à l'encontre des lois de ce pays. »

Cela s'appelait la hiérarchie des textes. Dans un même État, plusieurs instances pouvaient édicter des textes réglementaires. Cependant, pour éviter qu'ils ne se contredisent, une structure avait été établie. Ainsi, les lois d'un pays ne pouvaient pas entrer en conflit avec la Constitution de celui-ci. De la même façon, les décrets, qui étaient émis par le dirigeant, ne pouvaient l'être avec ces mêmes lois. C'était ça qui était illégal.

« Vérifiez notre législation ! » Reprit Hermione. « Vérifiez nos lois ! Il nous est permis de nous rassembler par ces lois. De même, il est interdit de faire souffrir autrui par ces lois. Peu importe que le Ministre donne son accord. Il n'en a pas le droit ! »

Hermione sentit alors à nouveau la pièce vibrer dans sa main. Elle y jeta un coup d'œil.

« Elle arrive. Tu as 2 minutes. »

« Je vais devoir m'arrêter là pour aujourd'hui » dit-elle finalement. « Vous pouvez me dénoncer si vous pensez que c'est ce qu'il faut faire. Si vous pensez que c'est ce qui est le mieux pour vous. Ou alors vous pouvez ne rien dire et réfléchir à ce que je vous ai dit. Si vous ne me croyez pas, vérifiez. Ça ne coûte rien. Au contraire, cela vous apportera beaucoup, car grâce à cela, vous pourrez prendre une décision éclairée. Le choix est le vôtre. »

Quelques minutes plus tard, ce fut une Ombrage furieuse talonnée par sa Brigade Inquisitoriale qui déboula dans le couloir. Mais celui-ci était vide. Vide à l'exception d'une chaîne posée en plein milieu.

0o0o0

Hariel soupira doucement en voyant les grandes portes face à lui. Il était nerveux. Cela lui arrivait rarement, mais aujourd'hui il avait de quoi. Après tout, ce n'était pas tous les jours qu'on se présentait pour la première fois au Parlement de son pays. Alors qu'il avait évité de prendre ce genre de responsabilités jusqu'à maintenant, cette fois, il ne pouvait pas reculer. Il devait parler à la chambre. Ce pour quoi il se battait était trop important.

Trois semaines. Il ne leur avait fallu que trois semaines pour créer un projet de loi complet et concret et obtenir de le faire passer devant l'organe législatif de l'Angleterre sorcière. Sans doute un record. Mais Hariel se doutait que son influence n'y était pas pour rien. Qu'importe. Si cela pouvait faire avancer les choses, alors il n'allait certainement pas se gêner.

C'était également pour cela qu'il tenait à s'exprimer lui-même. Certes, selon lui, une loi adoptée à cause du prestige de celui qui la présente plutôt que par la conviction profonde de l'utilité de cette loi était presque une imposture. Cependant, il y avait urgence. Après tout, il était question des enfants.

« C'est impressionnant n'est-ce pas ? » Demanda une voix à ses côtés.

Hariel tourna la tête. Simeon se tenait près de lui.

« Disons qu'à présent j'ai quelques scrupules de vous avoir imposé ça pendant quatre ans » répondit Hariel.

« Quelques un seulement ? » S'exclama l'avocat faussement outré.

Hariel ricana.

« Au moins, maintenant, vous êtes déchargé de ce fardeau » dit-il.

En effet, si Hariel participait à cette réunion, c'est qu'il avait officiellement revendiqué ses titres. Il n'était plus l'Héritier Pendragon-Emerys, mais le Seigneur Peindragon-Emerys, Chef des Maissons Pendragon, Emerys, le Fay, Nimueh, Poufsouffle et Serdaigle. Cela ne changeait pas beaucoup de choses pour lui puisqu'il était déjà Seigneur de ses autres Maisons. Cependant, cette prise de fonction voulait également dire qu'il n'avait plus besoin de Régent et donc que Simeon Randall-Delûte redevenait un simple avocat et non plus un membre par substitution du Magenmagot.

« Je pense que ça me manquera presque » dit-il.

« Si vous voulez, une fois sur le trône, je peux nommer votre lignée à un poste à la Chambre » lui répliqua Hariel sur un ton taquin.

« J'ai dit "presque" » grogna l'homme.

Hariel ricana à nouveau.

« Il est temps, Votre Altesse » dit alors Fiermont Crane en s'approchant.

« Souhaitez-moi bonne chance » dit Hariel à son avocat.

« Vous n'en aurez pas besoin » répondit celui-ci.

Le jeune Prince eut un léger sourire avant de se tourner une fois de plus vers les grandes portes. Délaissant son plus vieil allié Sorcier, il pénétra alors dans la chambre.

0o0o0

« À vos places, je vous prie ! » Dis la voix puissante de Dumbledore magiquement amplifiée. « La séance du 20 décembre, dernière de l'année 2015, va commencer. »

Hariel, lui, était déjà installé à sa place, assis entre Fiermont Crane et Linea Mautière de la même façon que Simeon l'avait fait durant plus de quatre ans. Nerveux, il triturait les pages du dossier qui se trouvait sur ses genoux.

« À l'ordre du jour » reprit le vieux Président du Magenmagot, « le Prince Pendragon-Emerys, qui nous rejoint aujourd'hui, va nous présenter son projet de loi. »

Il prit un dossier semblable à celui sur les genoux d'Hariel et le montra à l'assemblée.

« Il s'agit d'un Projet de Loi David Wilson pour la protection des enfants magiques. »

Montrer ledit dossier n'était que pour la forme. En effet, tous les membres du Magenmagot en avaient déjà reçu une copie. Ce n'était pas l'usage, mais Hariel estimait qu'il valait mieux que ses confrères prennent connaissance de son projet par avance. Cela permettait de gagner du temps. Habituellement, tout Sorcier présentant une loi le faisait directement lors de la réunion. C'était à l'avis d'Hariel un manque total de logique. Tous les tenants et aboutissants d'un texte législatif pouvaient tenir dans un dossier comme celui qu'il avait rédigé. Autant donc, le donner à lire par avance.

Certes, cela donnait également à ses adversaires les moyens de dresser une contre-offensive. Cependant, une bonne argumentation et une préparation impeccable servaient justement à appuyer son propos et à faire pencher la balance en leur faveur. C'était l'une des choses qu'Hariel pensait instituer après son couronnement. Il voulait des procédures judiciaires normalisées et claires afin d'harmoniser les débats. Certes, il fallait laisser de la place pour des cas d'urgence. Après tout, le but de l'administratif et des procédures était d'aider à rendre les processus plus faciles et non pas à les compliquer.

« Donc, à présent et sans plus attendre, je laisse la parole à Son Altesse le Prince afin qu'il nous présente son projet. »

« Je vous remercie, M. Le Président du Magenmagot » répondit Hariel.

Il espérait que sa voix magiquement amplifiée ne trahissait pas le dégoût qu'il ressentait pour l'homme. Cela faisait longtemps qu'il jouait le jeu, mais il suffisait d'un seul moment d'inattention pour ruiner des années d'efforts. Dumbledore lui-même en était le parfait exemple même s'il n'était pas encore au courant que le beau château de cartes qu'il construisait s'était déjà effondré.

« Je pense qu'il est inutile que je vous présente mon projet dans les détails » reprit-il en s'adressant à l'assemblée. « Chacun d'entre vous a reçu en prévision de cette réunion une copie de mon projet de loi. Je suis sûr que vous l'avez tous au moins parcouru. »

Même s'il était convaincu que certains l'avaient lu avec plus d'attention que d'autres. Ses adversaires (Lucius Malefoy en tête) notamment.

« Ceux qui sont au fait de la presse, en particulier du Sketter, doivent déjà être au courent de la raison pour laquelle ce projet de loi est nommé David Wilson. Il le doit à ce jeune Sorcier mort avant même de savoir qui il était, tué par la peur et l'ignorance. Ce décès est un drame absolu, surtout pour notre communauté déjà réduite où le moindre petit élément est important. »

C'était un fait. La société Sorcière britannique était en sous-population. Comme beaucoup de collectivités magiques dans le monde. Ils ne pratiquaient pas le recensement donc un décompte précis serait difficile. Cependant, Hariel estimait la population sorcière d'Angleterre à à peine plus de 500 000 individus. Ce n'était rien par rapport aux plus de 67 millions de britanniques sapiants. Le moindre enfant était donc précieux.

« Toutefois, notre société n'a pas protégé David Wilson comme elle aurait dû le faire. Qui sait combien d'autres Sorciers comme lui sont encore dans la nature à souffrir de l'incompréhension et de la peur de leurs proches ? Combien sont déjà morts ? Combien d'autres mourront encore ? Moi je dis que plus aucun d'eux ne doit mourir et c'est le but de cette loi. Protéger les enfants Sorciers. Quel que soit leur âge. »

« Mais comment prévoyez-vous que nous puissions protéger des enfants dont nous ne sommes même pas conscients de l'existence ? » Demanda quelqu'un. « Avant qu'un élève soit invité à venir à Poudlard, avant que son nom apparaisse dans le Livre des Admissions, nous ignorons tout d'eux et il n'existe aucun moyen de les trouver. »

Normalement, il était interdit d'interrompre une personne présentant un projet de loi avant que celui-ci n'ait fini. Cependant, Hariel avait sauté cette partie. Ils étaient donc déjà en plein débat. Un débat qui allait s'annoncer assez rude.

« Ce n'est pas tout à fait vrai » répondit Hariel. « Nous disposons déjà des moyens nécessaires pour repérer l'utilisation de la magie sur tout notre territoire. C'est de cette façon que nous gardons le secret. Tout enfant Sorcier à des épisodes de Magie Accidentelle, épisodes qui sont enregistrés par le SUAM, le Service des Usages Abusifs de la Magie. »

Et comme toute manifestation de Magie dans le monde Sapiant, cela donne lieu à une enquête. Sauf que selon les investigations que Baldwin Shaklebolt avait menées dans les Archives du Ministère, ces enquêtes n'étaient pas très poussées. Si à l'arrivée des agents il n'y avait pas de signes visibles de l'utilisation de la magie, ils se repliaient. Dans le cas contraire, ils sonnaient l'alarme et des équipes d'interventions étaient envoyées pour réparer les dégâts et surtout effacer les souvenirs. Or ils n'enquêtaient pas forcément sur la cause de l'alerte. Si le responsable était un Sorcier, ils l'arrêtaient. Si c'était un objet, ils le confisquaient. Toutes investigations supplémentaires nécessaires étaient alors confiées à d'autres services comme celui de Détournement de l'Artisanat Moldus ou même les Aurors quand il s'agissait de poursuivre un criminel. Cependant quand la cause était un enfant, il existait un vide juridique important ou plutôt un paradoxe.

C'était ce paradoxe juridique qui était à l'origine du problème. Tout enfant magique était considéré comme Sorcier et était par la même protégé contre l'oubliette. Toutefois, la loi du Secret Magique interdisait de révéler son existence avant 11 ans (pour éviter qu'ils ne révèlent accidentellement leur monde). Donc, ces enfants étaient considérés comme Sorciers, mais sans avoir le droit de savoir qu'ils étaient Sorciers. De même, d'après la loi, le statut des familles Sapiantes dans la loi magique dépendant de celui de l'enfant. Ils avaient ainsi les mêmes droits et devoirs en ce qui concerne le Secret. Cela voulait alors dire qu'ils étaient protégés par la loi qui les empêchait d'être oubliettés. Mais en même temps, ils n'avaient pas le droit de connaître l'existence de la Magie avant les 11 ans de leur enfant.

« C'est de cette incohérence que découle une grande majorité des problèmes » reprit Hariel. « Nous avons affaire à des parents qui ne comprennent pas la situation, ce qui peut les amener à abuser ou blesser les enfants magiques. Bien entendu, le cas de David Wilson est assez extrême et tous les parents ne se retournent certainement pas contre leur enfant à cause des phénomènes étranges qui se passent autour d'eux. Mais nous ne devons pas oublier que cela peut arriver. Il me semble donc que nous avons le devoir de rectifier les choses et de nous adapter afin de rassurer les familles et de permettre à ces enfants de vivre plus convenablement. »

« Donc vous pensez qu'il suffit de parler aux parents de la Magie pour qu'ils ne se retournent plus contre leurs enfants ? » Demanda une femme. « C'est un peu utopique, vous ne trouvez pas ? »

« Bien entendu que c'est utopique. Et cela ne me serait jamais venu à l'esprit. C'est pour cela qu'il nous faut pouvoir garder un œil sur eux. Enquêter sur les parents, les tester, les jauger pour savoir s'ils sont aptes à s'occuper d'un enfant magique après avoir été mis au courant de notre secret… et dans le cas contraire de leur retirer l'enfant. »

« Donc vous… vous suggérez d'arracher des enfants à leurs parents ? » S'indigna quelqu'un.

« Si ça peut leur sauver la vie, oui, certainement » répondit Hariel sur un ton péremptoire. « Bien entendu, ce ne serait qu'une situation extrême. Avant d'en arriver là, nous pouvons les guider, les éduquer à accepter la magie. »

« Et à qui proposez-vous de confier une telle tâche ? Il n'existe aucun service ayant les moyens de s'occuper de ça. »

« Dans ce cas, il nous faudra le créer » dit Hariel comme s'il s'agissait d'une évidence. « Il nous faut un Service ministériel dédié aux enfants, à leur bien-être tant physique que mental. Il est d'ailleurs étrange qu'un tel service n'existe pas déjà. Nous préoccupons-nous donc si peu de nos enfants ? »

« Est-ce que vous sous-entendriez que nous puissions maltraiter nos enfants ? » S'indigna un homme.

Hariel le connaissait. C'était un fidèle de Lucius Malefoy.

« Peut-être. Tout est possible » répondit Hariel. « Pourriez-vous jurer que ce n'est pas le cas ? Sur votre Magie ? »

« Je… » balbutiai l'homme.

Mais il n'ajouta rien de plus.

« C'est ce que je pensais » commenta Hariel.

« Très bien, mettons que nous retirions des enfants à leur famille. Magique ou non » intervint quelqu'un d'autre. « Qu'en faisons-nous après ? »

« N'y a-t-il donc aucune famille de sorciers qui se dévouerait pour s'occuper d'un enfant supplémentaire ? » Demanda Hariel. « Placer un enfant dans une famille d'accueil aidé par quelques fonds subsidiaires est déjà un bon début. Mais ce n'est pas la seule solution bien sûr. Il y a aussi la possibilité de créer des orphelinats Sorcier. »

Des chuchotements se firent entendre dans la salle. Mais quand Hariel reprit la parole, tous se turent.

« J'ai été surpris qu'il n'y ait pas d'établissement permettant d'accueillir les orphelins ici, en Angleterre » dit-il. « Surtout après la guerre qu'il y a eu. Combien d'enfants se sont retrouvés orphelins à cette période et que leur est-il arrivé ? »

La plupart avaient été pris en charge par des membres de leur famille encore en vie. C'était le cas pour Susan Bones ou bien Neville. À l'époque, personne ne s'était soucié qu'Augusta Longdubat soit trop vieille pour s'occuper d'un nourrisson. Neville était avec sa famille, alors quelle importance à leurs yeux. Et il n'était même pas question de tous ces enfants dont on avait perdu la trace après la guerre faute de personnes qualifiées pour les rassembler et s'occuper d'eux.

« Vous rendez-vous compte que même Hariel Potter, le Survivant, est obligé d'être dans un orphelinat Sapiant, un endroit où personne n'a le droit de connaître le secret de la Magie et qu'il n'a donc aucun tuteur pouvant prendre soin de lui et le défendre ? Est-ce comme cela que l'on traite notre Héros ? »

Bien entendu, toute cette histoire de Héros et de Survivant était à gerber aux yeux d'Hariel. Mais il savait que c'était un bon moyen de faire réagir les Sorciers. La culpabilité était une arme et il avait bien l'intention de s'en servir.

0o0o0

La réunion se termina plusieurs heures plus tard. Les principaux points de la loi avaient été discutés. Cependant, il faudrait encore du temps pour que des votes soient effectués. Chacun des plus petits articles serait disséqué puis soumis à l'approbation du Magenmagot. Tout article qui serait refusé devrait soit être reconduit, soit être modifié.

Le chemin était donc encore long avant que cette loi ne soit adoptée et mise en application. Fort heureusement, le caractère urgent du problème avait été accepté et, sur demande du président, le Ministère allait lancer une commission d'enquête sur le sujet et des mesures correctionnelles provisoires seraient prises pour permettre de régler la situation. L'un des premiers serait le rapatriement, dès l'été, de tous les enfants Sorciers en orphelinat Sapiant afin de les placer dans des familles d'accueil. Ce n'était pas beaucoup, mais c'était déjà un premier pas aux yeux d'Hariel.

Malheureusement, alors qu'il savourait sa victoire tout en se préparant aux futures batailles juridiques à mener, des nouvelles graves venant du Makai l'obligèrent à revoir ses projets. Finalement, ses prochaines batailles seraient plus proches que ce qu'il ne l'avait imaginé et elles ne seraient certainement pas juridiques.

Trihexa s'était réveillé.

À suivre…

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Ce chapitre est un peu plus court que les autres (en plus d'être en retard). Désolé. J'espère qu'il vous plaira tout de même.

Le titre fait référence au livre « la Conférence des Animaux » de Erich Kästner. L'histoire raconte comment les animaux du monde, devant l'imbécilité de la guerre et les souffrances des enfants, décident de se rebeller et d'aller à l'ONU. La phrase « Il est question des enfants » est donc leur devise principale. En 2010, un film d'animation, Animaux et Cie, s'inspire de ce livre. Il n'est alors plus question véritablement des enfants, mais de l'écologie.

La façon dont Hermione fait son discours avant de s'enfuir est inspirée d'un film « Kids in America », qui parle d'un groupe de lycéen qui milite contre leur proviseur et sa politique interventionniste et en totale négation des libertés individuelles. Ce n'est pas un grand film, mais il est intéressant et se laisse voir.

Comme vous l'avez vu à la fin, les prochains chapitres se dérouleront dans le Makai et seront l'occasion de combats assez épiques et de scènes encore plus épiques en particulier pour nos personnages… mais je ne vous en dis pas plus.

En tout les cas, n'hésitez pas à me laisser des commentaires et je vous dis à dans deux semaines.