Chapitre 2 : Un peignoir trop petit


6h30 – QG de Marineford – Etage 3 – Chambre 37.

Bp Bip Bip Bip Bip Bip…. !

Je me retourne dans mon lit, écrasant mon visage dans mon oreiller pour étouffer le bruit strident de mon réveille-matin. Mais mon doux coussinet n'atténue pas cette sonnerie que je déteste tant. Cette sonnerie qui t'indique chaque matin qu'il est temps de passer dans la salle de bain pour te rendre agréable à observer et conforme aux attentes aux autres collègues. Pff. Je ne dis rien moi aux collègues quand ils ont l'œil vide, le regard hagard su le plafond et la barbe non rasée… Alors pourquoi moi, élément féminin de la base de Marineford, devrais-je être présentable ?! C'est du sexisme j'vous jure ! Bref.

Je me redresse lentement dans mon plumard et éteint péniblement cet objet du diable tandis que je fais basculer mes jambes en dehors du lit. Je renifle légèrement pour retenir la morve qui menace de s'écouler de mon nez comme chaque matin où je passe d'un environnement chaud et bouillant à celui de l'hiver glacial en-dehors de ma couette. Je pose les pieds par terre, attrape mes serviettes sur mon armoire et pars dans la salle de bain, trainant des pieds comme chaque matin. Je me répète au cas où vous n'auriez pas compris. Bref x2. Je me déshabille de mon pyjama licorne une pièce que je jette sur la poignée de la porte avant de me glisser dans la douche. Je prépare l'eau pour la réchauffer et enclenche le jet d'eau directement sur ma tête. Mais malheureusement, contrairement à mes attentes, l'eau est glaciale.

- PUTAIN DE M******* !

J'éteins le jet d'eau à l'aveugle tandis que l'eau gelée continue de couler sur ma tête, mouillant mon corps frêle grelotant. Je tremblote dans ma douche, serrant mes bras autour de ma poitrine en pestant.

- Chaudière à la con ! Je suis toujours la première à prendre ma douche ! Il doit rester de l'eau chaude à cette heure, bon dieu !

Je prends le pommeau de douche et le braque vers le mur pour tester la température de l'eau. Je réactive le jet d'eau et attend quelques secondes pour voir si l'eau chauffe. Mais après 20 secondes, aucun changement. Je remets le pommeau d'eau à sa place puis quitte la cabine de douche pour m'habiller de mon petit peignoir bleu marine doux à souhait. Je l'attache fermement autour de ma taille à l'aide de ma ceinture puis je prends sous le bras mes serviettes et mes habits de travail. J'enfile mes petits chaussons de velours blanc et quitte mes appartements, jetant un coup d'œil dans le couloir. Personne à l'horizon. Je marche rapidement jusqu'aux douches collectives au bout du couloir. C'est la cinquième fois dans le mois que la chaudière de mon étage tombe en panne. Et on est obligé de faire nos toilettes dans les salles de bain communes. Là, où chaque gradé a eu le droit à un bizutage de la part des anciens. Donc ce n'est pas l'endroit où on aime retourner volontairement.

D'un pas rapide et silencieux, j'arrive devant la porte et la pousse doucement pour y entrer. Un nuage de vapeur me frappe au visage et je me fige tandis que l'information monte au cerveau. Quelqu'un a déjà pris ces aises. Qui peut être levé à cette heure précise ? D'habitude, je suis la première. Faisons comme si rien n'était, qui que ce soit. Je m'avance jusqu'à un casier et dépose mes affaires en vitesse avant de filer dans une cabine, juste cachée à l'aide de mes serviettes. Je m'enferme dans une cabine éloignée de celle d'où provient la vapeur et enclenche avec satisfaction le jet d'eau chaud cette fois-ci. Je commence à me débarbouiller la peau, le visage à l'aide de quelques produits, qui moussent sur ma peau.


~ Quelques cabines plus loin ~

- Ooh que c'est bon ! soupire une voix grave en sortant de sa cabine.

Une immense silhouette sort d'une des cabines, le corps dégoulinant d'eau et encore recouvert de mousse. Il se frotte les yeux pour évacuer les traces de produits qui viennent lui troubler la vue. Il s'avance à tâtons jusqu'aux casiers où il prend ses affaires maladroitement. Kizaru se tamponne le visage à l'aide de la première serviette, la tête ailleurs et encore endormi malgré la douche. Il baille à s'en décrocher la mâchoire et attrape le peignoir qu'il enfile péniblement comme s'il était devenu étrangement plus petit. Sans chercher à savoir pourquoi, il s'attache le peignoir autour de sa taille puis il prend le reste des affaires dans le casier avant de repartir vers le réfectoire, sifflant le Chant de la Marine, joyeux.

De mon côté, je finis ma petite toilette, arrête le jet d'eau de ma douche, l'ensemble des muscles détendus et l'esprit apaisé. Je prends ma serviette que j'ai mis en hauteur et commence à me sécher le corps et les cheveux. Je l'enroule autour de ma taille et continue de sécher mes cheveux à l'aide d'une autre serviette tout en me dirigeant vers mon casier. Et là, stupeur. Mes affaires ont disparu. Je me stoppe dans mes mouvements et regarde autour de moi, paniquée. Quel malandrin de soldat serait capable de me faire une blague aussi infligeante ?! J'ai entendu quelqu'un partir il y a quelques instants mais ce n'est pas l'étage des petits soldats ! Qu'ai-je pu bien faire à un collègue pour qu'on me vole mes affaires ?! Je ne vais pas sortir en serviette humide dans les couloirs maintenant ! Il est bientôt 7 heures et les soldats traînent pour les plus matinaux ! Et la dernière chose que je souhaite, c'est une réputation de chaudasse au sein de la base de Marineford ! Je regarde dans les autres casiers et je me fige en voyant des affaires dans un casier annexe au mien. Je m'approche lentement pour être certaine de ne pas rêver et prend délicatement les affaires teintes de jaune poussin. Mes doigts se resserrent autour du peignoir jaune quand je comprends la Manoeuvre voulue, ou non par l'idiot qui me sert de supérieur hiérarchique dans cette base.

- Bordel. Il est vraiment aveugle sans ces immondes lunettes !

A contre cœur, je me défais de mes serviettes et enfile le peignoir, bien trop grand pour ma taille de vice-amirale et serre la ceinture autour de ma taille. Je m'avance et m'observe, le visage fatigué et les cheveux humides me collant au visage et tous emmêlés tandis que le peignoir jaune traîne misérablement au sol comme une robe trop longue. Je ne m'attarde pas sur les détails et je quitte la salle de bain commune et marche aussi vite que je peux vers les appartements privés de Kizaru. Cet idiot ! Je vais lui passer un savon ! Malheureusement pour moi, je croise le chemin de plusieurs soldats qui me font de gros yeux ronds en voyant ma tenue et la couleur du peignoir. J'en entends plusieurs siffler en me croisant mais je les ignore pour marcher encore plus vite. Après quelques minutes de marche athlétique, j'arrive devant la lourde porte de ses appartements, et sans attendre, je frappe intensément plusieurs coups sur la porte. Mais personne ne me répond. Je peste à voix basse et regarde autour de moi à l'aide de mon Haki de l'observation pour le rechercher. Je ressens ma présence… AU REFECTOIRE ! Je pousse un gémissement de douleur quand je comprends que je vais devoir me montrer devant plus de monde que prévu pour soulever le GROS malentendu. Je ne traîne pas d'avantage dans le couloir et rebrousse chemin pour aller dans le réfectoire, sous le regard très appréciateur de mes soldats. Mentalement, je retiens les soldats et leurs soldats et je rentre en furie dans le réfectoire.

La table des haut-gradé est quasi-complète avec l'amiral en chef Sengoku, Garp, Tsuru, les trois amiraux et quelques vice-amiraux venus en repos à Marineford. Tous regardent Kizaru avec de gros yeux, ou plus sur sa tenue…. Féminine et peu conventionnelle. Je vois le visage de Sengoku se figer en m'apercevant que c'est moi qui porte le peignoir de Kizaru, et que lui, par conséquent…

Je rougis en imaginant les questions que ce malentendu grossier suscite cet échange de peignoir. Je prends mon courage à deux mains et m'avance d'un pas décidé jusqu'à la table commune sous le sifflet admirateur des soldats et tapote gentiment sur l'épaule de Kizaru en train de siroter son café matinal, tout en lisant le journal. Il relève les yeux, surpris d'être dérangé si tôt et pivote son corps en ma direction. A ma vue, son sourire d'idiot s'agrandit. Je connais ses pensées perverses envers moi et ses méthodes de drague vulgaire qu'il tente chaque jour espérant que je tombe dans ses bras.

- Chesca-Chaaan, roucoule-t-il. Puuis-je t'aider de bon maaatin ?

- Amiral, veuillez me rendre MON peignoir que vous m'avez « emprunté » aux douches communes. Vous êtes décidément ridicule avec ça… !

- Toon peignoooir ? s'étonne-t-il.

Il baisse les yeux et remarque, qu'en effet, son torse velu est à la vue de tous et qu'il n'est pas de la même couleur que celui qu'il porte habituellement. Il relève les yeux et remarque que je porte le sien, trop large pour mes frêles épaules. Notre échange est suivi avec intérêt par mes collègues qui ne ratent pas une miette. Je soupire agacée.

- Soulevons immédiatement ce malaise.. Il ne s'est RIEN passé avec l'amiral Kizaru et moi. L'amiral Kizaru a simplement oublié sa vue en sortant du lit ce matin et il a confondu mon peignoir et mes affaires en sortant des douches communes. J'ai dû m'y rendre après une énième panne de notre chaudière…

- Oooh ! glousse Kizaru. Je m'engaaage à te le rendre. Tu peeux garder le mieeen si tu veux !

- Sans façon, amiral. Je l'attends propre et plié à mon bureau avant ce soir. J'en ferais de même pour le vôtre. Sur ce, bonne journée !

Je tourne les talons pour fuir le réfectoire à tout prix. Mais en m'éloignant, j'entends Kizaru chuchoter pour moi-même, tout en respirant longuement.

- Finaaalement, je vais peut-être le gaaarder. Ce seeera notre seecret. J'aaaime cette odeeeur de lavaaande, Chesca-Chaaan.