Scorpius aimait beaucoup les pyjamas de soie. On lui avait toujours dit que même pour dormir, il était nécessaire d'être habillé dignement. Dans ces moments-là, son père ajoutait toujours la même anecdote concernant Karl Lagerfeld – son père adorait les créateurs de mode moldu, mais jamais il ne l'avouerait publiquement – qui, paraît-il, se glissait dans ses draps tout habillé – bien habillé évidemment – afin qu'en cas de décès en plein sommeil l'on ne puisse le retrouver vêtu inélégamment. Son amour des belles choses l'empêchait donc de supporter les immondes pyjamas qu'étaient en train d'enfiler ses nouveaux camarades.

— Potter ! Si tu oses enfiler ce tee-shirt troué, je te tranche la tête. J'aurais pas à te trouver un coiffeur comme ça. Il faudrait aussi que t'ailles voir un tailleur digne de ce nom.

Le petit blond qui jusque-là ne s'en prenait qu'audit Potter lança un regard au reste de leurs camarades de dortoir.

— Ça vaut pour vous tous d'ailleurs ! Comment un sorcier digne de ce nom peut-il supporter de dormir dans des guenilles ?

Potter, Villiers, Faulkner et Thomas le regardaient comme s'il leur avait parlé de ce tueur en série qui tue des petits bébés canard en Suède avant de leur découper la glotte. Ils pourraient tout de même essayer d'égaler ses standards.

Oh non. Oh non, putain. Ce gros con. Ce gros con de merde. Ce gros con de connard de merde de Potter junior et son foutu tee-shirt dégueu troué de partout. Et trop grand en plus – mais étant donné la taille de l'avorton, il ne devait exister de fringues à sa taille.

— Potter ! Enlève cet immondice qui ne devrait pas avoir le droit de porter le nom de tee-shirt !

Potter soupira.

— Tu veux voir mon cul aussi tant qu'on y est ? Je sais pas, peut-être que mon bas de pyjama t'offense lui aussi.

Le con de petit avorton de merde.

— Enlève ce truc moche. Sa laideur m'offense. Et y a la tête de ma tante dessus : je l'ai assez vue pour pas qu'elle m'emmerde aussi à l'école.

Pourquoi fallait-il que Potter porte un tee-shirt édition limitée des Jeux du sort sur lequel était imprimé le visage d'Elladora Lestrange. Son sourire se moquait allègrement de lui ; sans doute qu'elle, on ne lui avait pas envoyé un petit pois dans la gueule le soir de la rentrée. Sans doute que son père et elle avaient déjà des laquais ; sans doute que les premières années de Serpentard les adulaient, les respectaient et leur léchaient les bottes.

— Tu connais Ella Lestrange ?

— Et toi tu connais Harry Potter. Génial. Pas besoin de faire cette tête, tu ressembles à un augurey constipé.

Le première grande épreuve que lui imposait l'école : supporter des imbéciles. Scorpius n'était pas habitué à être entouré d'enfants. Les amis de ses parents amenaient de temps à autre un marmot braillard, mais la socialisation s'arrêtait à quelques parties de Quidditch – parties durant lesquelles il est difficile d'avoir des conversations profondes grâce à cette chose formidable qu'est le vent. Il avait passé beaucoup plus de temps avec les adultes de la maisonnée qu'avec des sorciers de son âge, et il se dit que ça ne lui avait pas manqué.

— Elle est comment en vrai ?

Le petit pote Potter avait les yeux brillants. Sans doute qu'un Sang-pur détestant toutes choses moldues auraient ressemblé à ça devant la promesse de rencontrer Voldemort.

— La plus grande casse-couilles ayant foulé cette terre. Le fléau de mon existence. La punition que Merlin m'a envoyé pour les viols collectifs auxquels j'ai participé dans une autre vie. Sinon, je peux te parler de mon autre tante, Daphné. Elle, elle est sympa.

— T'as déjà vu les Jeux du sort en concert ?

Le pauvre petit. Il était tellement coincé dans son mode fan qu'il n'arrivait plus à articuler des pensées cohérentes. Quoique, Scorpius ne l'avait pas entendu articuler grand-chose depuis la Répartition. La petite chose était peut-être un peu perturbée : le fils de Harry Potter à Serpentard, c'était tout de même pas banal. Ça devait lui avoir coupé la chique.

— C'est toi le fan, moi j'ai autre chose à faire qu'aller écouter de la musique de sauvage chez les Moldus.

Et il répondait à cet abruti… Le seul couillon avec lequel il avait pu échanger quelques mots. Les autres l'avaient simplement regardé bizarrement quand il avait poussé sa petite gueulante. On n'aimait visiblement pas beaucoup les descendants de Mangemorts entre les murs de Poudlard. Il les pendrait tous !

Après une bonne nuit de sommeil. Pis ils seront peut-être moins con le lendemain matin. Ses camarades se rendront bien compte de sa grandeur, celle-ci ne sera que plus mise en valeur quand ils n'auront plus que leur tête roulant à ses pieds à lui.