Assis autour de la table de la terrasse. Emma observait sa demi-sœur avec amusement. La petite se délectait de sa glace au chocolat avec entrain sans se soucier du liquide qui recouvrait peu à peu son visage. Elle jeta un œil à son frère qui rigola doucement.

« Pourquoi vous rigolez ? demanda-t-elle la bouche pleine.

- Pour rien ! Ça a l'air bon en tout cas…

Incapable de répondre, Suzanne se contenta d'acquiescer avant de replonger dans son cône glacé.

- N'empêche, les pizzas aussi étaient pas mal… observa Jules.

- Carrément ! Rien à voir avec celles qu'on a à Sète.

- Vous allez toujours à la même ?

- Ouais… Mais c'est parce que c'est pratique, ils livrent à la maison.

- Hum… Ça me manque un peu quand même… lança Jules nostalgique. J'ai l'impression de jamais vous voir et de louper plein de choses…

- Ah bah c'est sûr qu'on ne s'ennuie jamais chez maman… C'est toujours animé !

- Bah moi je m'ennuie depuis que vous êtes partis… objecta Suzanne d'un ton boudeur.

- On vient souvent quand même…

- Ouais ! Mais c'était mieux quand je pouvais jouer tout le temps avec Éloïse…

- C'est pareil, Éloïse j'ai l'impression de tout louper…

- T'es loin Jules, c'est normal. Culpabilise pas ! Chacun à sa vie…

- Mais des fois je me dis qu'il faudrait que je rentre… Regarde l'accident de maman, j'étais pas là pour l'aider !

- Mais arrête, tu vas pas te sacrifier pour nous non plus. T'as fait ta vie là-bas… C'est comme ça… Et puis t'inquiète pas pour maman, elle est très bien entourée. Surtout depuis qu'elle est enfin avec Antoine…

- Hum… Alors elle était comment cette glace ? demanda Jules à sa demi-sœur pour dévier la conversation.

- Elle était trop bonne ! répondit la petite le nez plein de chocolat.

- Va t'essuyer Suzanne, t'en as partout ! ordonna gentiment Emma.

- Toute façon je vais aller jouer dans ma chambre… expliqua-t-elle avant de disparaître à l'intérieur de la maison.

- En fait, je me pose de plus en plus de questions… osa Jules.

- De quoi ?

- Je sais pas… J'ai l'impression d'avoir fait le tour là-haut. Je me dis parfois qu'il est peut-être temps de rentrer en France. Bon peut-être pas à Sète mais, je m'imagine bien dans une grande ville. Genre Paris… Ou Lyon, capitale de la gastronomie.

- Réfléchis bien ! C'est pas une décision qu'on prend à la légère.

- Je sais…

- Et n'en parle pas à maman. Va pas lui donner de faux espoirs, d'accord ?

- Ouais… acquiesça-t-il difficilement. »

La jeune brune osa un franc sourire avant de quitter sa chaise pour enlacer son frère par le cou. Évidemment qu'elle serait heureuse de le retrouver plus souvent mais, Emma ne voulait pas l'influencer pour le laisser libre de sa décision. Elle le secoua gentiment avant de lancer l'activité rangement et vaisselle. Voilà qui était bien moins fun que la dégustation des pizzas… Jules souffla avant d'aider sa sœur, non sans pester contre l'absence des jumeaux qui avaient tout laissé en plan avant de s'enfuir ballon en main sur la plage. Et une fois l'activité ménage terminée, les deux Renoir s'affalèrent sur le canapé où Emma entreprit le zapping de la télévision. Télécommande en main, les chaînes défilaient, poussant la brune à se plaindre du manque de programmes accessibles depuis la TV de l'hôtel. Dépitée, elle finit par l'éteindre lorsque les jumeaux débarquèrent au salon, essoufflés.

« P'tin le terrain de foot est super bien ! lança Martin avec engouement.

- Vous suez de ouf… observa Emma presque écœurée.

- Bah ouais ! Y a une chaleur… Les parents sont pas rentrés ?

- Pas encore, non…

- Y a une ambiance de dingue dehors là ! Vous voulez pas qu'on sorte faire un tour ? On a le temps nan ? Ils passent toujours des plombes au restau.

- Là maintenant ? demanda Jules. Eh ! J'vous rappelle que j'ai 5 heures de décalage horaire dans la tronche moi hein !

- Nan mais allez ! On a pas 50 ans sérieux… On peut au moins sortir se promener nan ? Rien n'empêche de boire un verre au bar ? força Léo avec l'appui de son frère.

- Et Suzanne t'en fais quoi ? demanda Emma rationnelle.

- Elle prendra une limonade ! On va pas en boîte… Juste boire une verre ! »

Peu enjouée, Emma finit par acquiescer et suivit les jumeaux à l'étage. Ils débarquèrent sur un palier remarquablement silencieux et poussèrent la porte de la chambre qui s'ouvrait sur une pièce inanimée. Au milieu, le petit lit de la petite était habité par une âme profondément endormie. L'aînée esquissa un sourire avant de remettre la couverture sur son corps et refermer la porte.

« Bon bah… problème réglé nan ? lâcha Léo.

- On va quand même pas la laisser là toute seule ?

- Ça vaaaaaa ! Elle ronfle comme un sonneur là… Elle en a pour la nuit !

- Forcément, avec le décalage horaire, elle est crevée… C'est comme s'il était 1h du mat' chez nous là… remarqua Emma en regardant sa montre.

- Bon, on fait quoi ? demanda Jules depuis le rez-de-chaussée.

- On va faire un p'tit tour vite fait et on revient, y en a pas pour longtemps…

- Toute façon la porte fermée à clé, peut rien lui arriver…

- Ouais… concilia Emma avec inquiétude.

- Let's go Mojitos ! clama Martin en éclatant de rire avec son frère. »

. . . . .

De l'autre côté du littoral, le repas aux chandelles touchait à sa fin. Appuyé contre le comptoir, Antoine était en train de régler la note tandis qu'à côté, Candice jeta un œil sur son téléphone qui laissait apparaître un message sur leur groupe familial. Amusée, elle osa un rire discret et le tendit à Antoine qui s'approchait d'elle.

« T'as vu la photo ? demanda-t-elle en rigolant. Regarde l'état de ta fille !

Il rigola doucement face à Suzanne remplie de chocolat.

- Elle sait pas manger une glace ! C'est dingue ça… rétorqua-t-il en rigolant.

- En tout cas, ils ont l'air de passer une bonne soirée…

- Ouais !

- Est-ce qu'on prolongerait pas un peu la nôtre alors ? osa Candice en enserrant sa taille.

- Qu'est-ce que tu proposes ?

- On va se balader ? proposa-t-elle en montrant le petit chemin jusqu'à la plage.

- Ouais ! Ça évitera que les choses tournent mal cette fois… rappela-t-il sourire aux lèvres.

Candice rigola doucement, se remémorant leur première soirée en Corse.

- T'avais quand même bu TOUTE la bouteille de champagne, mon amour…

- Oui bah désolé… Je commençais un peu à m'ennuyer moi…

- Mais je pensais que tu dormais !

- Et bah non ! Mais tu vois, ce soir on ne se sépare pas, comme ça… on est sûrs que tout se passe bien !

- Hum… acquiesça-t-elle en enserrant sa taille de son bras droit. »

Et c'est Antoine qui porta leur marche jusqu'à la plage. Heureusement, la promenade était éclairée, permettant aux deux amoureux de fouler le sable sans angoisse. Et seuls leurs pas parlaient, laissant le couple avancer dans un silence naturel et réparateur jusqu'à ce que Candice ose prendre la parole.

« C'est bien que les enfants s'entendent comme ça… Quand je repense aux enfants de Max... C'était pas la même histoire…

- Ça se passait mal ?

- Ils passaient leurs journées à s'hurler dessus. Dès qu'il y avait une connerie, ils s'accusaient les uns les autres… Et puis moi, ils me détestaient !

- T'as de la chance alors, parce que Suzanne t'adore.

- Je sais ! Et moi aussi je l'aime bien cette petite. Même si j'avoue qu'au début, c'était plus compliqué… Finalement, je suis contente que vous soyez venus vivre à la maison.

- Ouais ! Nous aussi, on est contents, confirma-t-il en embrassant sa joue.

- Oh ! T'as vu ?! Y a de la musique là-bas… observa-t-elle en montrant une paillotte au loin.

- Musique créole visiblement… sourit-il.

- On va danser ? proposa-t-elle en l'entraînant par la main.

- Oh non, Candice…

- Mais allez ! Tu m'emmènes jamais danser en plus ! se plaignit-elle d'une moue enfantine.

- Mais j'ai horreur de ça, tu sais bien…

- Mais on se met là-bas, regarde y a personne ! répondit-elle en commençant à se dandiner. Personne pour observer ton petit déhanché très très sexy…

- Tu te moques…

- Pas du tout… Je le pense ! lança-t-elle sensuellement en enlaçant son cou. »

Candice explosa de rire en s'accrochant à son cou alors qu'Antoine s'amusait désormais à la faire tourner sur le sable. Enfin ce si rigide commissaire se laissait aller, mais toujours à l'abri des regards d'autrui… Et la blonde se délectait du moment, fièrement accrochée à sa taille pour s'harmoniser avec un zouk endiablé qui résonnait sur cette plage quasi déserte. Et pardessus ces sonorités musicales s'entendait un rire cristallin, le genre qui révélait tout le bonheur du moment passé en charmante compagnie…

Mais de l'autre côté du littoral, l'heure n'était clairement pas à la fête. Réunis dans le salon, les enfants semblaient plutôt préoccupés à gérer un problème de taille. Léo se frottait la tête, envahi par une culpabilité monumentale. Et sa sœur tentait de rassembler ses esprits pour retrouver un semblant de lucidité.

« Qu'est-ce qu'on fait ? demanda Martin.

- Bah on a pas le choix… On les appelle !

- Mais ils vont nous tuer là…

- T'as une autre idée ? C'est la merde là ! s'époumona Jules.

- On a qu'à gérer ça entre nous…

- C'est pas comme si on essayait depuis vingt minutes ! cracha la brune en s'emparant de son portable.

- Putain ! maugréa Léo. »

Mais l'ambiance musicale camoufla sans difficulté les vibrations de leur téléphone… enfin de son téléphone à elle du moins, puisque visiblement Dumas avait oublié le sien dans le salon. Et eux, continuaient de s'amuser sur la plage. Antoine se délectait du rire de Candice et intérieurement, la blonde remerciait ces quelques cocktails d'avoir déridé son cher et tendre. Alors elle en profitait, sans retenue, jusqu'au moment où le petit groupe remercia son auditoire. La fin de soirée s'annonçait alors, entraînant une moue boudeuse sur ce visage angélique qui se réfugiait désormais contre son partenaire.

« Allez… commença-t-il contre ses lèvres, On y va !

- Hum… acquiesça-t-elle en ramassant difficilement son petit sac posé au sol. Ça va, on est pas loin !

- Ouais… confirma-t-il en attrapant sa main dans la sienne.

- Mais tu sais que tu danses très très très bien, en fait !

- Bien sûr… ironisa-t-il.

- Si j'te jure ! On y retournera demain voir s'ils sont encore là !

- Ouais… On verra… Et d'ailleurs tu m'as pas dit, c'est quoi le programme pour cette semaine ?

- J'en sais rien… J'ai envie d'improviser… J'ai vu que y avait plein de balades à faire… Y a la plage aussi… La piscine…

- Du repos c'est bien aussi !

- Et des câlins… chuchota-t-elle à son oreille. Plein de câlins…

Amusé, Antoine resserra son étreinte autour de sa taille.

- Hum ! Ça, ça peut se faire ! acquiesça-t-il en embrassant sa joue à nouveau.

- Les enfants ont déjà prévu une journée plage demain…

- Bien sûr ! À peine arrivés que Suzanne avait déjà gonflé toutes ses bouées avec les jumeaux !

- Bah oui… Évidemment, puisqu'ils n'ont absolument pas prévu de les lui laisser.

- Hein ?

- Ah nan mais tu les connais pas toi ! Ils vont lui piquer ses bouées et partir au fin fond de l'océan avec…

- Eh bah j'en connais une qui va bien râler alors … plaisanta-t-il.

- D'ailleurs ça a l'air super calme chez nous ! observa-t-elle en jetant un œil à leur villa plus loin. Tu crois qu'ils dorment ?

- Il est 23h30… Quand même !

- Mais avec le décalage horaire on sait jamais…

- Ah ?! Nan moi je suis en pleine forme… tenta-t-il d'une voix suave.

- Oh… Intéressant… »

Candice interrompit leur marche juste avant de prendre le petit chemin en bois qui les conduisait jusqu'à l'entrée de leur logement. Surprit, Antoine s'arrêta à son tour et se retrouva rapidement attiré jusqu'à elle qui s'empressa d'embrasser ses lèvres avec ardeur. Le message était passé… la soirée se continuerait vraisemblablement dans leur chambre, toujours bien cachés des regards indiscrets. Alors après une proposition insidieuse, Antoine éclata de rire en l'entraînant jusqu'à la grande porte jaune qui faisait office de frontière entre leur bulle nocturne et la réalité. Il l'embrassa à nouveau contre la paroi en bois avant de l'ouvrir doucement, sourire aux lèvres.

« Salut ! lâcha Antoine tout sourire alors qu'Emma était livide.

- Ça va ? s'étonna Candice en rigolant. C'est quoi ces tronches là !? »