Bonjour/Bonsoir à tout le monde,

Déjà oui, ce chapitre aurait dû arriver en juin, et je suis désolée de publier aussi tard. J'avoue qu'après le dernier chapitre qui était assez long, je m'attendais à avoir plus de retour, et c'est un peu décourageant de n'en avoir eu que très peu. Mais bon, je n'écris pas pour vous, mes lecteurs, pas en premier lieu. J'écris avant tout pour moi, et ce n'est pas la principale raison pour laquelle j'ai mis autant de temps à publier, même si ça s'est ajouté au reste. Le reste, c'est juste la reprise d'une vie plus normale, de mes voyages, et des difficultés à écrire. Aussi, comme vous le verrez, ce chapitre est à nouveau long. Je pense que ça va être la norme pour les derniers. Quoi qu'il en soit, je renonce désormais à un rythme de publication régulier pour finir cette histoire. Je ne compte pas faire traîner, et j'espère toujours publier plus d'une fois par trimestre mais je ne fais pas de promesse. Normalement, il reste environ six chapitres (donc me connaissant ça peut très bien en devenir dix), et au moins le prochain devrait être facile à écrire.
Bref, tl;dr: plus de rythme fixe de publication.

Et puis désolée, mais relecture light, j'ai bossé aujourd'hui et je suis un peu HS, mais je voulais publier.

Je remercie tous ceux qui m'ont laissé des reviews et avec qui j'ai bavardé en MP, ça fait plaisir^^

Bonne lecture!


Lorsque nous arrivons sur le quai neuf trois quart, nous tombons sur Arthur et sa copine qui s'embrassent près de l'entrée. Al' siffle, faisant instantanément lever la tête au Poufsouffle dont le visage prend une intéressante teinte de rouge. Sa copine n'a pas l'air embarrassée, elle. Elle nous salue d'un hochement de tête avant d'engager la discussion, même si je remarque qu'elle serre la main d'Arthur dans la sienne.
« Bonjour, je suis Cian. Vous êtes des amis d'Arthur c'est ça ?
-C'est ça ! Je suis Alphonse et elle c'est Vivian, fait Al' d'un ton enthousiaste.
-Enchantée. » je dis, d'un ton assez neutre.
« Oh, je vois, Arthur m'a parlé de vous. C'est toi la gamine qui a gagné le concours d'obstacles que vous avez organisé, et qui a blessé des troisième années ? » Sa voix est calme, mais pas très chaleureuse. Je ne suis pas fan du « gamine » aussi, mais bon. Je réponds d'un ton courtois :
« Ma réputation me précède. »

Je ne sais pas ce qu'elle aurait répondu, parce qu'Al' se plaint de ne pas être aussi connu que moi, et fait valoir à grands cris son titre de capitaine de l'équipe de Gryffondor, tandis qu'Arthur sourit en saluant de la tête quelques élèves. J'en profite pour observer Cian d'un peu plus près. Elle est assez petite, surtout à côté d'Arthur qui frôle le mètre quatre-vingt dix. Elle est assez mignonne. Elle a la peau plutôt claire, des cheveux bruns ondulés retenus par un bandeau bleu assorti à son uniforme. Je suppose que ses parents sont des sorciers, du coup, les moldus n'arrivent pas à King's cross en tenue sorcière (j'en sais quelque chose). Je l'aurais supposée timide si je n'avais pas vu sa façon de réagir lorsque Alphonse a interrompu son baiser, et sa façon d'engager la conversation après. Je pense qu'elle cache une certaine volonté. Mon observation est interrompue par l'arrivée d'Ewald qui salue poliment Cian et chacun de nous. Il a l'air.. un peu fermé. Plus que d'habitude. Néanmoins, ça me fait vraiment plaisir de le revoir, je m'en rends compte. Arthur… il m'a manqué aussi je suppose, mais ce n'est pas le sentiment qui prédomine pour le moment en moi. Je trouve juste étrange de le voir interagir avec Cian.

Nous montons tous ensemble dans le train, et nous installons dans un compartiment vide. Deux amies de Cian nous rejoignent assez vite tandis qu'Alphonse s'éclipse pour rejoindre ses amis de l'équipe. Je me cale contre la fenêtre, Ewald face à moi, tandis que les autres discutent joyeusement. Je n'ai pas envie d'être là, je me demande à moitié ce que je fais ici. J'aurais aimé être seule. Mais je n'ai pas vraiment de prétexte pour partir de toute façon, alors je me déconnecte du mieux que je peux de la conversation animée qui s'est lancée entre les élèves plus âgés. Arthur sourit beaucoup, il a la main de Cian serrée dans la sienne. J'ignore le tressaillement de solitude en moi, je repousse le souvenir de Quentin. Je me sens vide. Les amies de Cian parlent de leurs vacances avec enthousiasme, et s'extasient en apprenant que Cian a passé du temps chez Arthur. Ewald garde le silence, par contre. J'ai l'impression qu'il ne va pas très bien, que quelque chose l'inquiète, mais je peux difficilement lui poser de question devant tout le monde. Arthur semble le remarquer aussi, à un moment, et je vois le regard qu'il échange avec son meilleur ami. Le serpentard se contente de secouer la tête brièvement, puis de sourire avant de s'intégrer au débat sur les sujets les plus importants à maîtriser pour les examens. Je relâche totalement mon attention sur le groupe, et je regarde par la fenêtre. Je n'ai pas ma place ici. Enfin, c'est pas nouveau, je n'ai ma place nulle part… Je me demande à nouveau, comme le jour de la rentrée, si il y a moyen de monter sur le toit du train. Intriguée, j'essaye de regarder à l'extérieur sans trop attirer l'attention, mais je renonce assez vite. Trop de gens autour. Finalement, je fais semblant de dormir pour le reste du trajet histoire d'avoir la paix, et personne ne me dérange. Au banquet, je suis assise à côté d'Ewald qui a l'air à nouveau totalement normal, alors je ne lui pose pas de question. J'ai peur qu'il m'en pose en retour si je le faisais de toute façon. À la place, je lui demande si lui et Arthur ont réussi à trouver de la poudre d'obscurité instantanée pour la chasse aux lucioles, et il m'assure qu'ils en ont une quantité suffisante. Après manger je regagne ma tour avec soulagement. Enfin seule… Et Arthur ne m'a pas parlé une seule fois. Qui sait, avec un peu de chance l'amour lui fera oublier qu'il voulait avoir une discussion avec moi…

Nous avons notre première réunion de préparation de la chasse aux lucioles dès le lendemain, avec Arthur, Ewald et Al'. Les amis d'Ewald qui s'y connaissent en runes et les juges de la course d'obstacles participeront aussi, mais plus tard. Pour l'instant, nous devons nous entendre sur l'organisation et les règles. Comme c'était mon idée, c'est moi qui lance le brainstorming.
« Alors, pour moi l'idée c'était de faire une grande bataille de sorts de marquage lumineux, dans le noir. Si quelqu'un est trop visible, il perd. Mais je pense qu'il faudrait un système de points, pour juger objectivement des vainqueurs.
-Pour commencer, tu voudrais faire ça où ? Demande Ewald
-Dans ma tête j'imaginais ça dans la grande salle, mais plus j'y réfléchis plus je pense que c'est une mauvaise idée. Je veux dire, j'aimerais bien que ça dure plus de trente secondes cette histoire. Il faudrait un endroit avec pas trop de passage le week-end, vu que je suppose qu'on va refaire ça un week-end pour que tout le monde puisse participer…
-On peut faire ça au septième étage, suggère Al', les seuls cours là bas sont l'astronomie de toute façon, y a rien d'intéressant là-haut pour les élèves qui font pas de saut en balais, pas vrai, Viv' ?
-J'allais suggérer les cachots, intervient Ewald. Le septième étage serait sans doute un peu plus calme, mais il y a plein de fenêtres partout, on va avoir du mal à obtenir l'obscurité.
-C'est vrai, renchérit Arthur. Aux cachots on n'a qu'à trouver un moyen d'éteindre les torches, et puis la poudre d'obscurité sera plus efficace dans un endroit clos.
-Mais la salle commune de Serpentard est par là non ? Demande Al'
-Oui, mais on peut s'enfoncer plus loin dans les cachots. Ce sera assez facile de délimiter la zone de jeu cette fois ci, grâce à l'obscurité.
-Je marche alors ! Fait Al' avec son enthousiasme habituel. On va faire comment d'ailleurs pour ça ? La poudre d'obscurité a pas des effets très durables il me semble.
-À priori, la poudre va servir pour le départ. Je ne pense pas qu'on puisse éteindre les torches, elles sont enchantées, mais Elric, celui qui a fait les poteaux pour la course d'obstacles, pense pouvoir créer des runes qui pourraient altérer suffisamment la lumière pour nous plonger dans un noir presque complet. La complexité sera surtout de ne pas bloquer la lumière des sorts. Il sera content de savoir qu'il n'y aura pas de fenêtres à gérer en plus du reste. »

On continue à discuter comme ça pendant presque une heure, nous mettant d'accord sur le nombre de participants (limité à trente, répartis en équipes de deux ou trois), le fonctionnement, incluant un système de points, et la fin. On se met d'accord pour aller repérer les lieux dans la semaine. Finalement, on conclut sur le plus important.
« Ça sonne déjà génial ! s'exclame Arthur, les yeux remplis d'excitation. On fait ça quand du coup ?
-Le week-end prochain ? Je propose, motivée par la perspective de l'événement
-Hm, ça risque d'être un peu compliqué de tout préparer en si peu de temps, objecte Ewald. Il faudra voir avec Elric de combien de temps il pense avoir besoin pour mettre au point de bonnes runes de ténèbres, et il faut aussi qu'on trouve un moyen d'empêcher que les gens utilisent des sorts non autorisés pendant le tournois. Et surtout, samedi prochain, il y a le match contre Gryffondor.
-Oh bordel, t'as raison ! Fait Al', d'un ton choqué.
-Et ça se prétend capitaine… persifle Ewald, sans méchanceté. Dois je prévenir le mien que les Gryffondor nous prennent si peu au sérieux qu'ils nous oublient ?
-Rho, c'est bon, proteste Al'. Qui te dit que ce n'est pas une tactique pour vous faire baisser votre garde ?
-Ton air paniqué.
-QUOI QU'IL EN SOIT, fait Alphonse pour ne pas s'enfoncer davantage, Ewald a raison. Il vaut mieux que ça ne soit pas le week-end prochain. Et je pourrai pas trop aider cette semaine, il faut qu'on bosse tactique avec l'équipe. D'ailleurs, ce serait bien que tu essayes d'être présente, au cas où, Viv'.
-D'accord. » je fais.

Arthur fait disparaître le sourire qui était apparu sur ses lèvres pendant l'échange, et demande :
« Je suppose qu'on a fait le tour ? Je propose qu'on se prépare une petite liste des gens à approcher pour participer à l'événement, en plus de nous, histoire de s'organiser et d'être sûrs qu'on sera pas trop nombreux, comme ça on pourra y réfléchir cette semaine.
-Bonne idée. On peut déjà écrire ceux dont on est sûrs, pour le reste on verra à notre prochaine réunion. »

Arthur écrit parce que c'est lui qui a suggéré l'idée. Comme il sait déjà qu'il veut faire équipe avec Cian et le marque, ce qui me laisse avec Ewald et Alphonse. Ce dernier dit qu'il se mettra sans doute avec un gars de l'équipe de Quidditch, mais comme ce n'est pas encore sûr la composition de notre équipe reste incertaine. En plus de notre groupe, nous ajoutons le nom d'Elric, qui a bien mérité de s'amuser un peu. Ça nous laisse encore de la place pour vingt-quatre personnes, en priorité des amis proches et fiables ou des gens ayant participé à la course d'obstacles. Je suis chargée de parler à Scorpius par Arthur, et j'accepte bon gré mal gré. Je sais que lui et les jumeaux vont adorer l'idée, et je n'ai pas de raison légitime de les exclure. Néanmoins, ils ne pourront probablement pas participer en l'état, vu que ça m'étonnerait qu'ils sachent maîtriser le sort de marquage coloré et le sort de bouclier (seul autre autorisé pour la chasse aux lucioles). Nous décidons d'arrêter notre liste le plus vite possible, histoire que tout le monde puisse être à pied d'égalité. Se battre en équipe dans le noir ne s'improvise pas, d'autant qu'on a décidé de mettre des points négatifs à qui touchera son allié.

Comme la dernière fois, Alphonse est responsable de la majorité des recrutements, avec Arthur. Ewald supervise la partie technique, et je suis chargée d'inspecter les cachots avec lui le lendemain pour trouver où faire la chasse aux lucioles. Lorsque la réunion se termine, il est l'heure de manger, et nous nous dirigeons ensemble vers la grande salle. Arthur en profite pour me tirer sur la manche, et on se laisse distancer de quelques mètres, tandis qu'Ewald engage (exprès?) une discussion sur le match de Quidditch à venir avec Alphonse. Je fais de mon mieux pour cacher mon manque de motivation à l'idée de discuter avec Arthur. Au moins, d'ici à ce qu'on arrive à la grande salle on devrait pas avoir le temps de se lancer dans une discussion trop agaçante… Le poufsouffle en a conscience aussi, parce qu'il se contente de dire :
« J'ai l'impression que ces vacances t'ont fait du bien ! Tu as pu parler avec tes parents ?
-Oui. » Je fais, sans développer.
« Tu auras du temps après les cours pour discuter ? » Il n'a pas oublié. Évidemment qu'il n'a pas oublié. Mais au moins, il a l'air beaucoup plus détendu que la dernière fois qu'on a parlé. Tant que je lui donne l'impression que je vais dans son sens, ça devrait aller.
« Oh, tu sais, il n'y a pas grand-chose à dire. Je n'ai rien appris de nouveau, à part qu'apparemment Longdubat, Mac Gonagall, Pomfresh et Aster savent pour le pédophile. Mes parents ne savaient pas comment, mais si l'information ne vient pas de toi, je suppose que les aurors ont parlé de ça à la directrice… ça me paraît un peu bizarre, mais peut-être que c'est normal. Je suppose que ce n'est pas anodin, une élève née moldue qui se trouve impliquée dans un truc comme ça…
-Effectivement » acquiesce Arthur d'un ton songeur, oubliant que j'ai occulté sa question. Pour achever de détourner le sujet, je lui demande alors qu'on arrive en vue de la grande salle :
« Et alors, toi, tes vacances ? Ça se passe bien avec Cian, on dirait ! »
Arthur rougit nettement.
« Ça se passe bien, oui… En fait… On a passé trois jours ensemble, dans ma famille. Je n'ai rien annoncé à mes parents encore, mais je suis à peu près sûr que ma grand-mère a deviné. C'est une ancienne Serpentard après tout, c'est dur de lui cacher des choses.
-Sans vouloir t'offenser, tu n'es pas la personne avec la meilleure pokerface que je connaisse, aussi » je fais, pour le taquiner, et ça le fait rire.
« En tout cas, je suis contente pour toi. J'espère que ça va durer.
-Moi aussi. Je l'aime vraiment... »

Notre conversation s'arrête là, parce qu'on arrive dans la grande salle. On s'assoit entre comploteurs, et Cian ne tarde pas à nous rejoindre pour s'asseoir à côté d'Arthur. Je me replie un peu en moi même, profitant de l'occasion pour entraîner un peu mon occlumencie, pendant que mes « aînés » bavardent cours, lorsque Arthur et Cian ne sont pas occupés à échanger des regards langoureux tellement clichés que j'en vomirais presque. En parallèle, je suis consciente de la douleur que ça me cause, de ne jamais avoir eu ça. Une fois n'est pas coutume, c'est Al' qui remarque que quelque chose cloche. Il me demande discrètement :
« Tout va bien ? Tu regardes Arthur bizarrement. »
Je secoue la tête, avant de lui dire tout bas, en français :
« Juste de vieux souvenirs, Arthur ressemble un peu à Quentin. Ça va passer. »
Je reprends le contrôle de mon corps et de mes expressions, et je lui fais un sourire rassurant, et je le taquine sur le match de Quidditch à venir. Il oublie vite l'incident. De fait, en y repensant une fois dans ma chambre (Arthur ayant oublié de me coincer, obnubilé comme il l'était par Cian, et sans doute rassuré par notre discussion avant le repas), je suspecte qu'Alphonse a dû ressentir une humeur similaire à la mienne. Azmi doit lui manquer. Enfin, dans tous les cas je devrais mieux cacher mes émotions. Je me suis un peu trop laissée aller pendant les vacances.

Les jours suivants, la routine s'installe à nouveau. Les gens de mon année me détestent toujours, j'ai le plaisir de recommencer à user de ruses ninjas pour pouvoir me doucher sans rencontrer de problèmes dans la tour de Gryffondor (je sais me servir du sort de nettoyage, à peu près, mais les douches restent quand même tellement plus agréables… et « à peu près » ne veut pas dire « bien »). Je profite de me retrouver à la bibliothèque en même temps que le quatuor de Scorpius, le mardi, pour me débarrasser de ma corvée. Je m'approche de leur table à contrecœur, même si à l'extérieur je ne montre que de l'assurance. Fichu Arthur… Eva me remarque et donne un coup de coude à Scorpius, qui lève la tête pour m'observer. Il n'a pas l'air hostile, mais pas particulièrement chaleureux non plus. Je pointe une chaise du doigt, comme si j'étais parfaitement à l'aise.« Bonjour, je peux m'asseoir ?
-Vas y, fait mon ancien ami en soupirant. Qu'est-ce qu'il y a ?
-Je suis envoyée par Arthur pour vous faire une proposition. Enfin, techniquement à toi, Scorpius, mais je pense que vous serez tous intéressés. »
Eva me regarde avec un air vaguement hostile, ce qui n'est pas surprenant étant donné que de son point de vue j'ai tabassé des amies à elle sans vraie justification, et qu'elle n'a sans doute jamais compris pourquoi Scorpius était ami avec moi (là dessus, on est deux), mais les autres semblent surtout curieux.
« Avec des amis, nous comptons organiser un nouvel événement, disons, sportif, bien qu'assez différent du précédent. Avant de vous en dire davantage, par contre, j'ai besoin que vous me promettiez d'en parler à personne, que vous décidiez ou non de participer.
-Tu veux dire, un truc comme la course d'obstacles ? » Demande Scorpius avec enthousiasme. Devant mon mutisme, il ajoute : « Okay, c'est promis ». L'un après l'autre, les autres suivent le mouvement, alors je reprends la parole, en chuchotant histoire de ne pas nous faire virer de la bibliothèque autant que pour garder le secret.
« L'événement que nous allons organiser s'appellera la chasse aux lucioles. Ce sera un jeu par équipes de deux à trois personnes maximum et ça se passera dans le noir. Le but, c'est d'utiliser des sorts de marquage lumineux pour toucher les autres équipes et gagner des points, et l'équipe gagnante est celle qui aura le plus de points à la fin. Si quelqu'un s'est fait toucher tellement qu'on peut plus voir les nouveaux sorts, il est éliminé. Les profs ne seront bien sûr pas au courant et se faire attraper par l'un d'eux est aussi éliminatoire, mais on gagne des points si on les touche. Vous avez des questions ?
-L'équipe gagnante gagne quoi ? »
Un éclair de génie me traverse.
« Alors, on en a pas encore discuté, mais je pense que tous les joueurs perdants devront teindre leurs cheveux ou leur vêtements dans la couleur de l'équipe gagnante pendant une journée entière ! »
Les jumeaux échangent un sourire diabolique, que je dois refléter, parce que je suis déjà en train de me demander quelle couleur choisir entre le vert kaki dégueulasse et le rose princesse. Je suppose que je devrai demander leur avis à mes coéquipiers… Et déjà que les autres acceptent ce plan. Eva interrompt mes réflexions :
« C'est bien gentil tout ça, mais tout le monde n'est pas une intello, on fait quoi si on connaît pas le sort ?
-Eva ! » fait Scorpius, en lui donnant, à en juger par le bruit, un coup de pied sous la table.
« Laisse. » je fais. « Eva, je me contrefous royalement de si tu m'apprécies ou pas, mais bon, il me semble pas t'avoir agressée, je suis venue pour vous proposer de participer à un truc cool, donc j'ai du mal à voir dans quel univers tu penses que c'est une façon acceptable de me traiter… Mais pour répondre à ta question, on se doute bien que tout le monde ne connaîtra pas ce sort, même dans les années plus élevées, vu que c'est pas très utile dans la vie de tous les jours. C'est pour ça, entre autres, qu'on prévient tout le monde à l'avance, histoire que les gens soient sur un pied d'égalité. Je pourrai vous l'apprendre si vous décidez de participer, ou Arthur Clifford, mon ami de septième année, Scorpius sait qui c'est. D'ailleurs, il faudra aussi que vous appreniez le protego, ce sera le seul autre sort autorisé. »
Les jumeaux ont presque l'air déçu. Eva a l'air un peu contrit, au moins. Je ne suis même pas en colère. Elle m'indiffère.
« Je… Désolée. »
Je hoche la tête sèchement, mais à part ça je l'ignore, et je demande :
-Vous avez d'autres questions ? Vous êtes intéressés, du coup, je suppose ?
-On a combien de temps pour apprendre les sorts ?
-On a pas encore fixé la date avec précision, mais environ deux semaines. Vous verrez, le sort de marquage est très facile. C'est le protego qui sera plus compliqué, il est un peu fatiguant pour des premières années, surtout utilisé à répétition.
-Père me l'a déjà appris. » fait Scorpius.
« Tant mieux, ça te sera utile. Je vous inscris, donc ? » je demande, pour me débarrasser du truc.
« Ouais ! Mets moi en équipe avec Albus ! » fait Severus d'un ton enthousiasme, oubliant de chuchoter, ce qui nous vaut une remarque sèche de Williamson, le bibliothécaire. Rappelés à l'ordre, nous prenons garde à baisser le volume, et Scorpius me répond à son tour.
« J'en suis aussi, tu fais équipe avec moi, Eva ? »
Elle hoche la tête, et Scorpius me demande :
« Mais du coup les équipes de trois risquent pas d'être avantagées ?
-Pas vraiment. On sera dans le noir presque complet, et ça risque déjà d'être compliqué de se synchroniser avec une personne sans se marcher sur les pieds. Oublie pas qu'un tir allié fait perdre des points. En vrai, je leur souhaite bien du courage, aux équipes de trois. Et puis, même si elles ont plus de puissance de feu, y a aussi plus de cibles.
-C'est vrai, vu comme ça… sourit Scorpius. Tu vas faire équipe avec qui d'ailleurs ?
-Probablement Ewald, mon ami Serpentard de septième, éventuellement avec Alphonse en plus, le mec de Gryffondor de sixième, mais il ira sans doute avec un gars de l'équipe plutôt. Et comme dit, je préfère être en équipe de deux. Bref, si vous avez plus de questions je vous fiche la paix. Je peux vous montrer le sort de marquage après le repas si vous voulez, c'est rapide. »

Ils acceptent et je rejoins ma table pour finir mes devoirs, avant d'aller bosser l'occlumencie tranquillement dans ma tour. Je garde de plus en plus mes barrières dressées ces temps-ci, et j'ai l'impression de progresser pas mal pour ce qui est de ma perception. Je me plonge dans un état presque méditatif pour continuer à peaufiner mes barrières jusqu'à l'heure du repas, et je me dirige vers la grande salle en essayant de les maintenir sans briser ma perception de l'extérieur. Lorsque je commence à croiser des élèves je ressens une impression étrange, comme si ma magie les percevait, alors que je suis plutôt sûre qu'aucun d'eux n'essaye de me légilimencer. Ce phénomène s'amplifie avec les nombre de gens et submerge ma perception, rompant violemment ma concentration. Un mal de tête vient la remplacer, léger mais lancinant. Je suppose que je vais devoir demander des explications à Ewald… En arrivant dans la grande salle, je vois Arthur déjà installé, avec Cian et tout un groupe bruyant de Poufsouffles et de Serdaigles. Je préfère m'asseoir au bout de la table des Serpentard, près de la sortie. Al' arrive bientôt, entouré de gars de l'équipe, et s'assoit avec eux à la table de notre maison, à mon soulagement certain. Pas très envie de les fréquenter plus que nécessaire, Al' mis à part. Je n'ai pas très faim, et je me sers rapidement une portion de riz et de poisson, l'esprit tournant à vide. Quelqu'un s'assoit en face de moi, et je ne suis pas très surprise de voir Ewald, même si je me serais attendue à ce qu'il préfère manger avec Arthur. Je le salue de la tête, et il a un petit sourire.
« Moi non plus, je n'aime pas trop les grands groupes. Même si je suis bien obligé de faire avec, Arthur est trop populaire pour mon bien.. »
Il se sert à manger sans plus de commentaire, et je me demande ce qu'il fait là. Il pourrait manger avec des gens de son année, il pourrait être avec son meilleur ami, et pourtant il me tient compagnie. Il ne devrait pas se forcer. Je le crois quand il dit qu'il n'aime pas la foule, c'est juste qu'il aurait sans doute de meilleures options quand même. Quoi qu'il en soit, je saisis l'occasion pour lui dire :
« Il s'est passé un truc bizarre tout à l'heure quand je m'entraînais en occlumencie.. »
Le serpentard relève la tête de son assiette, toute ouïe
« J'essayais d'améliorer ma perception, et j'ai eu une drôle de sensation en croisant les autres élèves, comme si je pouvais les sentir alors qu'à priori personne n'essayait de me légilimancer.
-Hm… Je pense que tu as trop poussé tes perceptions, mais je voudrais pouvoir voir ça de plus près. Tu es libre après le repas ?
-Je dois montrer aux première année les sorts pour la chasse aux lucioles…
-Alors viens me trouver au club de potions quand tu auras fini. Et d'ici là, ne fais pas de légilimencie, s'il-te-plaît. »
J'émets un grognement qui passera pour un agrément, et je finis mon dessert tout en essayant de repérer Scorpius et ses amis. Je finis par les voir à la table des Poufsouffle, et après avoir pris rapidement congé d'Ewald je me dirige vers eux pour indiquer à Scorpius que je les attendrai à la bibliothèque avant de sortir de la grande salle. J'ai envie d'être seule.

Une fois que j'ai retrouvé les première années, on se trouve une salle de classe abandonnée au septième étage pour s'entraîner. On commence par le sort de marquage, vu qu'au pire des cas Scorpius peut montrer le sort de bouclier aux autres lui même. Les gamins pigent assez vite le truc, d'un autre côté c'est pas beaucoup plus complexe qu'un Lumos. Scorpius y arrive en premier (en même temps, je me doute qu'il a commencé à apprendre la magie avant Poudlard), suivi par Eva et les jumeaux (qui ne sont pas très concentrés, occupés à se chahuter). Vu le temps que ça prend malgré tout, je leur recommande de s'entraîner à lancer des sorts d'une couleur particulière (il faut se concentrer pour teinter le sort), et propose de remettre le travail sur le protego au lendemain. Je les laisse continuer à s'entraîner pour aller retrouver Ewald. Arthur me regarde d'un air intrigué lorsque il finit sa préparation pour me rejoindre, mais le serpentard semble le rassurer avant de me suivre. Nous allons à notre QG habituel pour être au calme.
« Alors, quand le truc est arrivé tout à l'heure, qu'est-ce que tu essayais de faire exactement ? » demande mon ami, après avoir lancé quelques sorts de confidentialité pour s'assurer que personne ne nous interrompra par surprise.
-Je m'entraînais à maintenir mes barrières tout en étendant ma perception autour.
-Okay. Montre moi, mais si je te dis stop arrête immédiatement, okay ?
-Pas de souci. »
Je prends le temps de me concentrer, élevant mes barrières dans un souffle avec force. Cette partie est facile. Puis, je projette ma conscience au-delà de mes murailles, ce qui me vient avec bien plus de facilité qu'au début, avant d'essayer de l'étendre pour envelopper mes murailles, couvrant le plus de surface possible… Je me heurte à une présence, « devant moi ». À ce moment, Ewald me fait signe d'arrêter, en disant :
« Ça suffit. »
J'interromps tout de suite mes efforts, et attends que le Serpentard reprenne la parole, ce qui ne tarde pas :
« C'est ce que je craignais… Tu fais accidentellement de la légilimencie, et tu quittes les frontières de ton esprit pour t'étaler tout autour. C'est vraiment dangereux, si tu perds ton chemin ta conscience pourrait être incapable de regagner ton corps, ou seulement en partie. Si ça arrive, personne ne sera capable de te rassembler et ton corps restera là, incapable de quoi que ce soit.
-Merde, je lâche. Je préférerais éviter, va savoir pourquoi… Mais je sais pas comment faire, comment je peux savoir quand je vais trop loin ?
-Tu pourrais imaginer comme une deuxième couche transparente autour de ton esprit, suggère Ewald. Essaye de ressentir ses limites, de les visualiser, et de faire que ta conscience emplisse l'espace entre tes murailles et ces limites, un peu comme de l'air. »

La suggestion est bonne, et j'arrive à peu près à visualiser ce qu'il me suggère. La sensation est très différente de ce que j'éprouvais auparavant, j'ai conscience de ce qui est moi et ce qui ne l'est plus. On profite de l'occasion pour pratiquer un peu avec lui qui essaye de pénétrer dans mon esprit, et je suis contente de parvenir à me défendre pas trop mal tout en gardant ma conscience à l'extérieur. On fait une pause, et j'en profite pour lui demander, curieuse :
« Du coup, ce que je faisais était de la légilimencie, c'est ça ? J'ai toujours cru que ça servait à lire dans les pensées d'une personne, mais est-ce qu'on peut s'en servir pour ressentir la présence des gens ?
-Effectivement, c'est l'une des applications de la légilimencie », commence Ewald en s'asseyant sur une chaise, se préparant à une discussion plus longue, les exercices terminés. « L'usage le plus connu de cette compétence est de percer les secrets des gens en entrant dans leur esprit, mais ce n'est en fait qu'une infime fraction de ce que la légilimencie permet de faire. Déjà, il y a deux catégories de compétences : Les compétences ciblées et les non ciblées. La lecture de pensées est une compétence ciblée. Lorsqu'on l'utilise, on se focalise sur une personne, une cible, qui reçoit toute notre concentration. D'autres exemples de compétences concentrées sont la communication mentale, les meilleurs sorciers y parviennent sur des dizaines de kilomètres, mais aussi la modification de souvenirs. Petit aparté : il y a des sorts pour effacer la mémoire, mais quand il s'agit de la modifier ou de la déloquer il faut une minimum de compétences en légilimencie. Les oubliators ont dans leur rangs des légilimens célèbres. Les compétences non ciblées sont tout ce qui demande une attention plus diffuse, au lieu de se concentrer sur une personne, une cible, on étend sa concentration, comme tu as fait en fait. Les effets sont plus faibles qu'une légilimencie ciblée, mais tout aussi intéressants. La légilimencie non ciblée permet de ressentir l'énergie des gens pour les repérer, comme tu le suggérais, mais aussi, pour un légilimens doué, d'influencer les émotions d'un groupe de personnes, par exemple. Ce sera sans effet sur un occlumens, pour peu qu'il aie ses défenses prêtes, mais ça reste un outil très intéressant à utiliser sur la plupart des gens. Il paraît qu'Albus Dumbledore parvenait même à mêler un peu des deux et à lire les pensées de surface de plusieurs personnes à la fois, mais ça demande un niveau de maîtrise et de concentration tout bonnement hallucinant, sans parler d'être capable de traiter toutes ces informations. »

Ewald s'interrompt. Je n'ai rien dit, passionnée par ce qu'il racontait, mais je profite de son silence pour demander.
« Tu sais faire tout ça ?
-Je suis spécialiste en légilimencie, mais principalement en compétences ciblées, même si je n'ai pas eu l'occasion de beaucoup travailler la communication mentale, par exemple. Je suis capable de diffuser mon attention pour ressentir les énergies des gens mais il est bien plus aisé pour moi de me concentrer sur une seule personne et de maintenir un lien constant avec elle. D'ailleurs, ça pourrait être utile pour la chasse aux lucioles, maintenant que j'y pense.
-Tu veux dire, pour repérer les adversaires ?
-Je pensais surtout à nous coordonner en tant qu'équipe. Si on maintient un lien entre nous, ça nous permettrait de savoir où on est par rapport à l'autre, et de communiquer sans faire de bruit, peut-être.
-C'est une très bonne idée, je fais. Tu penses que c'est jouable ?
-Peut-être… fait mon ami avec une certaine réticence. Mais il y a plusieurs problèmes avec ça.
-À savoir ?
-Mis à part le fait que c'est totalement irresponsable d'enseigner ça à une gamine de ton âge », commence Ewald, et je sens son amusement. Il sait qu'il m'agace avec cette phrase. « Ce n'est pas quelque chose d'anodin, et ça requiert une certaine confiance, on rend son esprit plus vulnérable. » Il voit qu'il a touché sa cible, je ne cherche même pas à cacher mon petit sursaut lorsque je prends conscience de ce qu'il implique. Mais la suite, elle, me surprend vraiment. « Je n'ai rien contre Alphonse, mais si on fait équipe avec lui, même si il avait des compétences en magie de l'esprit, ce dont je doute, je ne lui fais pas assez confiance pour ça. ». Je le regarde, consciente de ce que ça implique, mais j'ai besoin de le vocaliser :
« Tu veux dire que tu me fais assez confiance pour ça ?
-Oui, admet Ewald. Je sais que tu es aussi pudique que moi, et je ne pense pas que tu abuserais de la situation, parce que pour toi ce serait une trahison terrible. C'est pour préserver tes secrets que tu as décidé d'apprendre l'occlumencie, après tout. » Je ne suis même pas surprise qu'il le sache. Il continue : « De plus, j'ai confiance en mes compétences. Je pense que je pourrais me défendre face à toi. La vraie question est de savoir si tu me fais suffisamment confiance. »

Je m'apprête à répondre sur-le-champ, même si je ne sais pas encore quoi, mais je m'interromps avant de céder à mon impulsion. Ce n'est pas un moment pour mes esquives et mes faux semblants. Nous le savons tous les deux. Ce qui se joue est sérieux, et j'ai conscience de toute la valeur de la confiance qu'il m'offre, alors qu'on ne se connaît pas depuis longtemps, alors que ses vrais amis se comptent sans doute sur les doigt d'une main et qu'il pense que je n'ai que onze ans. Même si il serait capable de m'empêcher de percer ses défenses, il me fait assez confiance pour se rendre vulnérable. Est-ce que je peux lui rendre ça ? En vérité, j'ai déjà donné ma réponse il y a longtemps, même si à l'époque je n'avais pas le choix, poussée par la nécessité d'apprendre l'occlumencie. Je lui fais assez confiance pour le laisser me légilimencer, alors même que je sais qu'il pourrait briser mes murailles. Il n'a jamais abusé de son pouvoir. Ce n'est pas beaucoup plus, finalement, et dans l'histoire c'est surtout lui qui prend des risques. C'est pour ça que je réponds tranquillement, après une minute de silence :
« Oui. »
Le serpentard hoche la tête solennellement, avant de reprendre la parole.
« Dans ce cas, ne restent que les autres problèmes. Je pense que tu devrais être capable de créer un lien avec moi, au vu de tes performances jusqu'à présent, même si j'ai l'impression que tu es davantage prédisposée à l'occlumencie qu'à la légilimencie. En revanche, rien ne dit que deux semaines te suffiront à maîtriser cette compétence, et même si c'était le cas ça risque de drainer ta magie pendant le combat.
-Je suppose que le meilleur moyen de savoir, c'est d'essayer ? » je fais avec un sourire un peu pâle, tentant de faire bonne figure.
« Je suppose. Mais pas avant que nous sachions si nous sommes deux ou trois dans l'équipe. Si Alphonse est avec nous, alors nous devrons penser à une autre stratégie. D'ici là, réfléchis à si tu es sûre de vouloir faire ça pour un jeu.
-Tu ne te poses pas la question, toi, non ? » je fais avec un sourire dur. Ewald hausse les épaules.
« Je joue toujours pour gagner… Et en soi, si la confiance est là, ce n'est pas une technique très risquée, mais qui peut nous apporter un avantage immense. Et après tout, je n'étais pas beaucoup plus âgé que toi quand j'ai appris la magie de l'esprit.
-Comment tu as appris d'ailleurs ? » Je fais, profitant de l'occasion. Ewald parle rarement de lui.
« Ma grand-mère m'y a initié, c'est une tradition familiale. Bien. Est-ce que tu veux faire encore un peu de pratique ? On a encore un peu de temps avant le repas. »

Comprenant qu'il n'a pas l'intention de s'étendre davantage, j'acquiesce et nous recommençons l'entraînement, mais j'ai pigé le truc. Le problème est surtout que j'ai du mal à rester concentrée longtemps dans cette nouvelle disposition. Je finis la séance avec un solide mal de crâne, et Ewald m'intime de ne pas refaire d'occlumencie avant au moins le lendemain, conscient que j'ai un peu poussé aujourd'hui. Alors que nous nous mettons en route vers la grande salle, une question me vient :

« Comment ça se fait que la magie de l'esprit soit si méconnue, au fait ? J'ai l'impression que presque personne ne sait que ça existe, et il y a presque rien dessus à la bibliothèque… Au temps d'Harry Potter, j'aurais, compris, mais maintenant ?
-Les magies de l'esprit sont très puissantes, et permettent de faire beaucoup de choses. Mais non seulement elles sont très complexes, mais aussi dangereuses. Celui qui veut devenir occlumens risque de se perdre en lui même, ou d'accidentellement endommager son esprit, perdre des souvenirs ou se couper de ses émotions. Celui qui travaille la légilimencie court le risque de se perdre dans l'esprit d'un autre, détruit par ses défenses ou de perdre le lien avec son corps. Aussi, si le sort legilimens et son emploi est le plus connu des magies de l'esprit, ce n'est pas un hasard. Ce sont des magies qui pour la plupart des applications s'emploient sans baguette, et il est difficile pour la majorité des sorciers de dépasser leurs habitudes, de prendre le temps d'apprendre et de ressentir leur magie différemment. Il est communément admis que pour devenir vraiment bon dans ces disciplines, le travail ne suffit pas. Sans talent naturel, on sera toujours bien limité. C'est difficile de savoir si c'est totalement vrai, puisque c'est une magie marginale, pour beaucoup de raisons. Déjà, c'est traditionnellement une magie enseignée dans les milieux sang purs, et ils sont jaloux de leur savoir. Ensuite, c'est une magie très puissante, et certains refusent de partager leur savoir de crainte qu'il ne tombe entre de mauvaises mains. Enfin, ce n'est pas vraiment dans la culture de la plupart des sorciers de devoir faire beaucoup d'efforts pour maîtriser un sort, et c'est déroutant et contre intuitif pour eux de pas avoir leur baguette comme point de focus, d'accéder directement à leur magie, et de ne pas avoir tout, tout de suite.
-Ça a du sens… je réponds, songeuse.
-Je trouve d'ailleurs dommage que ce soit une éducation limitée principalement aux cercles sang-purs, d'ailleurs, ajoute Ewald. Plus le temps passe, plus ces savoirs se perdent, et tu es la preuve, comme de nombreux maîtres, que le talent pour les magies de l'esprit ou son absence n'a rien à voir avec ses origines. »

Le lendemain, je montre les bases du protego aux première années, avec un succès plus discutable qu'avec le sort de marquage. C'est un sort plus avancé, après tout. Même Scorpius, qui sait le faire, a du mal à le tenir très longtemps, ou à bouger en le maintenant. Je supervise leur entraînement jusqu'à ce qu'ils arrivent tous à lancer le sort au moins une fois, et leur recommande de s'entraîner à faire des duels avec le protego et le sort de marquage. Je suspecte que ç'aurait pu aller plus vite avec quelqu'un de plus pédagogue que moi, mais le fait est que je suis très mauvaise pour enseigner. Après m'être débarrassée de cette corvée, en début d'après midi, je vais repérer la zone avec Ewald pour la chasse aux lucioles. On délimite une zone située dans les cachots, à l'opposé des salles de potions et pas trop près de la salle commune de Serpentard, qui conviendra à nos plans. Les couloirs y sont assez larges, et encombrés de vieilleries, surtout de vieilles armures et quelques armoires. On inclut trois salles de classe reliées entre elles par des portes communicantes, plus deux autres de l'autre côté du couloir. Les vieux bureaux et chaises pourront servir de barricades.

Le soir, c'est Halloween. La décoration est grandiose, dans la grande salle. Je mange avec tout le groupe, Al', Arthur et Ewald. Cian n'est pour une fois pas collée au Poufsouffle, et nous passons le repas à plaisanter joyeusement et à profiter de l'ambiance fantastique de la grande salle. Quelqu'un s'amuse à lancer quelques feux d'artifice tout droit venus de chez Weasley, ce qui cause un léger chaos mais qui apparemment est une sorte de tradition, à en croire Al'. Après le repas, on se fait un point rapide sur les participants. Je confirme la présence des première années, Al' celle d'un gars de l'équipe de Gryffondor avec qui il participera. Il y aura aussi le président du club de vol, Lily Potter et des amies entre elle, et un mélange de cinquième, sixième et septième années que je ne connais pas. Alphonse propose l'idée d'un bracelet « tabou » qui nous empêcherait de lancer d'autres sorts que ceux autorisés. Il a fait ses recherches sur les règles du secret apparemment, et ça l'a inspiré. Ewald promet d'en parler à Elric, mais pense que ça va être compliqué à mettre en œuvre. Les autres ont l'air satisfaits lorsqu'on leur parle de l'endroit qu'on a trouvé, et notre Serpentard de compagnie est chargé d'y amener l'expert en runes pour qu'il confirme que la surface à préparer n'est pas trop grande. Nous décidons d'une grande réunion préparatoire le dimanche pour mettre les derniers détails au point, avec Elric aussi présent, ainsi que les personnes qui accepteraient de juger si nécessaire. Je réalise au milieu de la réunion que ce que nous organisons n'est ni plus ni moins qu'un lasergame sorcier, et Al' partage l'amusement qui naît en moi à cette réflexion, et qui redouble devant la perplexité des septième année.

Les derniers jours de la semaine sont tranquilles. J'assiste aux séances d'entraînement de mon équipe, pour une fois, même si je ne vais normalement pas jouer, je me familiarise avec les stratégies… La tension monte, il y a plus de divisions que d'habitude entre Serpentard et Gryffondor, surtout dans les années plus élevées, même si je vois surtout de l'émulation, et quelques supporters un poil plus agressifs, mais rien d'extraordinaire. Ewald me donne aussi rendez-vous après la réunion dimanche pour travailler la légilimencie et s'entraîner pour la chasse aux lucioles, maintenant qu'on sait qu'on fera équipe juste tous les deux.

J'assiste à mon premier match de Quidditch depuis les tribunes de Gryffondor, étant donné que notre attrapeur en titre est en forme. Car oui, c'est bien joli d'être remplaçante, mais ça veut dire que je ne jouerai que si il tombe malade ou se blesse peu avant un match, étant donné qu'un joueur qui doit quitter la partie en cours ne peut pas être remplacé. C'est une des deux choses que je trouve débiles dans ce jeu, avec le nombre de points ahurissant donné par le vif… Apparemment, c'est une affaire de traditions, mais mon esprit logique vomit ces principes et estime que rendre le jeu intéressant et rationnel serait plus important. Enfin bref. J'ai pour la première fois l'occasion de voir Ewald véritablement en action, vu que j'ai déjà vu un peu ce dont Alphonse était capable à l'entraînement. Ewald se sert de sa position avantageuse pour faire passer des informations ou coordonner son équipe tout en cherchant le vif d'or, en servant de relais à son capitaine, une batteuse étonnamment menue au regard de glace. Al', lui, est gardien, et comme Ewald exploite sa position légèrement en retrait de la mêlée pour coordonner son équipe. C'est la première fois que je le vois jouer sérieusement, par contre, vu qu'aux entraînements il passe plus de temps à conseiller et diriger qu'à jouer. Je n'ai aucune idée d'à quoi ressemble le Quidditch professionnel, mais de mon point de vue, Alphonse se démarque vraiment. En dépit de l'habilité des joueurs de Serpentard, qui réussissent assez souvent à placer des attaques, Al' est un mur. Le souaffle ne passe pas. Les poursuiveurs de Gryffondor réussissent à marquer un but, puis deux, et nos points augmentent peu à peu, avec la pression. Les Serpentard finissent par marquer leurs premiers points, mais ma maison mène déjà de cinquante points. Les deux équipes se valent, je pense, en terme de compétences, sauf pour ce qui est des gardiens, et ça fait toute la différence. Al' se prend un cognard vicieux, envoyé par la capitaine adverse qui en a bien conscience, et ce malgré les efforts de Williams, l'un de nos batteurs, qui se concentre sur la protection d'Alphonse. Emma, nôtre deuxième batteuse, ne tarde pas à venger mon ami en envoyant à son tour un cognard au capitaine adverse, qui évite une blessure à la tête qui l'aurait sans doute mise hors de combat de justesse. À la place, c'est son épaule qui prend, et à sa tête manier la batte risque d'être moins facile qu'au début du match. Tout ce petit combat de projectiles permet aux verts et argent de marquer un nouveau but, mais ensuite mon équipe en enchaîne cinq, et je remarque qu'Ewald semble se concentrer entièrement sur la recherche du vif, à présent. Jenkins aussi, et je rage intérieurement. Cet abruti est trop proche de la mêlée, et se laisse trop distraire par le jeu, perdant du temps à narguer le goal adverse après un énième but de nos poursuiveurs. C'est pour ça que je ne suis pas étonnée quand Ewald remonte soudainement en chandelle pour se lancer à la poursuite du vif, après une quarantaine de minutes de jeu, et que notre attrapeur ne réagit pas à temps pour le rattraper. Mon ami se pose en brandissant triomphalement le vif d'or vers les tribunes, mettant fin à la rencontre. Score final : Cent soixante-dix à cent cinquante en faveur des vert et argent. Le bruit des applaudissements et des huées manque de me percer un tympan, mais j'applaudis quand même. C'était un beau match, même si je l'ai vraiment mauvaise pour Jenkins. Je ne suis pas la seule, d'ailleurs, parce que je vois Alphonse lui passer un savon, alors qu'il commence à insulter Ewald. Je suis trop loin pour attendre, mais les gestes sont assez parlants.

Après le petit-déjeuner, le dimanche nous nous réunissons en grand comité dans une salle de classe abandonnée du sixième étage. En plus de notre groupe habituel il y a Cian, Elric et deux autres septième années, et les juges de la course d'obstacles, qui sont apparemment d'accord pour juger à nouveau. Je ne parle pas beaucoup pendant cette réunion. Il s'agit surtout de mettre au clair les règles pour tout le monde, et de toute la partie technique prise en charge par Elric. Il félicite Alphonse pour son idée de bracelets, apparemment il apprécie le défi, mais ce n'est pas réalisable en si peu de temps, alors on devra se résoudre à se reposer sur les juges. Nous décidons que la chasse aura lieu le samedi d'après, le dix. Un sort non autorisé sera sanctionné par une élimination instantanée de l'équipe, sans possibilité de gagner. Je mentionne mon idée de récompense pour les gagnants, qui est adoptée à l'unanimité par les gens. Nous mangeons tous ensemble à midi, après la réunion, puis Arthur propose une petite séance d'escalade qu'Ewald décline pour nous deux, disant qu'on doit s'entraîner pour la chasse aux lucioles. Alphonse a l'air de trouver l'idée bonne, puisqu'il se met en quête de son partenaire, tandis qu'Arthur se résigne sans trop de mal à passer du temps avec Cian.

Une fois n'est pas coutume, nous renonçons à aller dans notre salle habituelle, parce qu'il y a pas mal de monde dans les couloirs, étant donné que nous sommes en week-end, et qu'il nous faut un endroit vraiment calme pour ce qu'on a l'intention de faire. Au final, j'amène Ewald jusqu'à ma tour.
« Ton repaire secret ? C'est une bonne idée, effectivement. » Fait le Serpentard en reconnaissant l'endroit. Je me rappelle des circonstances dans lesquelles il était venu la dernière fois, et je grimace intérieurement. Je n'ai jamais su comment il m'avait retrouvée, d'ailleurs, mais je n'ai pas le temps de m'attarder sur cette pensée, parce que je réalise qu'il s'attend à ce qu'on monte par la trappe. J'ai un court moment d'hésitation, puis je blinde ma détermination. Je m'apprête à créer un lien mental avec lui. Il peut bien savoir où je dors. Alors, nous lévitons jusqu'à la trappe. Je vois le moment où il réalise que cet endroit est ma chambre, mais il ne me pose pas de questions après que je lui aie expliqué que je déteste dormir avec des gens, et que je voulais avoir la paix. Il doit sentir que je n'ai pas envie de parler de ça, et il commente juste :
« Je donnerais cher pour échapper aux ronflements des gars de ma chambre, moi aussi, des fois, je peux comprendre. »
Je m'assieds en tailleurs sur le sol devant mon hamac, tandis qu'Ewald reste debout. Un peu mal à l'aise, je romps le silence assez vite.
« Comment on fait ça du coup ? »
Mon ami garde le silence un instant avant de s'asseoir sur le plancher à son tour en face de moi, non sans s'assurer de ne pas froisser son uniforme.
« Tu vas devoir me legilimencer.
-Tu es sûr ? » Je lui demande, en le regardant dans les yeux. Je pense qu'il sait autant que moi que ce que je demande n'est pas si il est certain de la marche à suivre, mais plutôt de vouloir me laisser entrer dans son esprit.
« Je pense que tu me connais assez pour savoir que les décisions que je prends sont réfléchies, donc oui, je suis sûr, me répond il calmement. Tant que c'est bon pour toi, c'est bon pour moi.
-Très bien.
-Alors, quand tu auras lancé le sort, ta conscience sera aspirée dans mon paysage mental. Tu verras, c'est très instinctif. Mes défenses occlumentiques sont assez différentes des tiennes, et ce n'est pas quelque chose que je peux réellement désactiver. Ne te laisse pas perturber. De toute façon, je te guiderai et je communiquerai avec toi.
-Okay..
-Tout ce que tu as à faire, c'est de dire « legilimens » en pointant ta baguette vers moi, sans chercher à résister lorsque ta conscience sera attirée dans mon esprit.
-D'accord.
-Quand tu voudras. » conclut Ewald, sa posture presque relâchée. Je pointe ma baguette sur lui, ignorant le sentiment étrange que j'ai à effectuer ce geste, menaçant d'une certaine façon, en direction d'un ami dans un cadre qui n'est plus celui du jeu. Je prononce la formule, ignorant aussi mon inquiétude à l'idée que le lien permette à Ewald d'apprendre quoi que ce soit de compromettant sur moi. C'est trop tard, et puis, je ne crois pas que le lien permette de faire ça.

L'instant d'après, ma conscience est aspirée et je me retrouve au milieu d'une étendue d'eau immense. Tout autour de moi, il n'y a que de l'eau, à perte de vue. Une eau sombre, profonde, mais dont la surface est parfaitement lisse. Le ciel s'y reflète, et je lève les yeux pour l'admirer (okay, je n'ai pas d'yeux sous forme de conscience, mais j'y porte mon attention quoi). Il n'y a pas de soleil en vue, mais la visibilité est excellente. De grands nuages blancs et gris, étalés sur plusieurs niveaux, apportent du relief au ciel. Je rapporte à nouveau mon attention vers la mer, curieuse, réalisant que je suis dans l'esprit d'Ewald. Tout ce que je vois, c'est donc ses défenses… Comment fonctionnent elles ?

Je n'ai pas le temps de vraiment réfléchir à la question, car je sens comme un effleurement sur ma conscience, une sorte de pression assez douce mais insistante qui m'invite à la suivre. Je reconnais l'essence d'Ewald. Il m'entraîne vers le ciel, ce qui me surprend brièvement, jusqu'à un nuage biscornu. Dès que nous commençons à y pénétrer, le décor disparaît, et je ne « vois » plus rien, mais la vision d'air et d'eau est remplacée par des sensations, des pensées, et des tourbillons d'images presque à portée de main. L'esprit d'Ewald, ouvert. Je résiste à ma curiosité qui me dicte de plonger dans les souvenirs, d'attirer à moi les pensées que je sens tourbillonner tout près de moi. J'entends Ewald me dire : « Très bien, maintenant, essaye de ressentir la connexion entre nos esprits. », sauf qu'il ne me dit pas ça avec sa voix, mais dans ma tête. Sa conscience dirige mon attention, et je ressens le chemin que j'ai emprunté pour rejoindre son esprit, une sorte de fil ténu qui me relie à mon esprit à moi, derrière son mur. « Regagne ton esprit maintenant, mais sans briser le lien, et essaye d'ouvrir les yeux. », m'intime mon ami, toujours de façon inaudible. Son esprit me… pousse gentiment en direction du mien, mais sans me repousser, et je regagne les contours familiers de ma conscience. J'ouvre les yeux. Ewald relève la tête, croise mon regard. Il me demande, cette fois ci à haute voix :
« Tu vas bien ?
-Je crois… » je fais, honnête pour une fois. Je me sens… étrange.
« Tu as réussi. Tu sens le lien ? »
Je me concentre à peine sur les frontières de mon esprit, et le voilà, comme un fil, un canal ouvert entre nos esprits. Je hoche la tête doucement, puis je réalise que notre lien traverse ma muraille. Instinctivement, j'ai envie de reformer mes protections, et le lien se rompt d'un coup alors que mes barrières occlumentiques remontent à pleine puissance.
« ça va ? » me demande à nouveau Ewald. Je réalise que j'ai paniqué.
« Désolée, je.. je n'ai pas réfléchi.
-Ce n'est pas grave, c'est normal que ça soit contre intuitif pour toi après que tu aies autant travaillé à garder ton esprit fermé. Mais si on veut s'entraîner, il va falloir reformer le lien. Ça ira ? Ou tu préfères continuer l'entraînement un autre jour ?
-On continue » je fais.

Et c'est ainsi que nous passons plus d'une heure enfermés dans ma tour à pratiquer. Une fois le lien reformé, on essaye de communiquer sans parler, essayer de se repérer l'un l'autre les yeux fermés, attirer l'attention de l'autre sur des choses sans bouger, etc. Une fois habituée un peu au lien qui outrepasse mes murailles, je ne le vois plus comme une menace, et Ewald m'explique que tant qu'aucun legilimens le détecte, il ne représente pas une vulnérabilité dans nos défenses. Apparemment, c'est très dur à détecter, et c'est surtout en observant le comportement de deux personnes liées qu'on peut comprendre qu'elles le sont. Ewald me parle aussi un peu de ses défenses. Apparemment, c'est de l'occlumencie par les éléments, il faut exploiter ses affinités élémentaires pour construire des défenses comme ça, ça a l'air assez avancé. Ce qui me marque aussi, c'est de réaliser qu'un combat légilimentique, c'est avant tout un combat d'imagination. Si quelqu'un essaye de percer les défenses d'Ewald, en pensant que son esprit est sous l'eau, par exemple, il pourra imaginer l'autre en train de manquer d'air, ou attaqué par une créature marine. L'eau étant connue comme l'élément de Serpentard, il est probable qu'un attaquant se concentre dessus en premier. Je trouve ça vraiment astucieux, même si c'est complètement hors de ma portée. Mes murailles font le taf, de toute façon. Nous descendons ensemble pour le repas du soir, conservant le lien entre nous aussi longtemps que possible. Cette connexion nous permet seulement de convoyer les impression et les mots que nous voulons partager, pas d'espionner l'autre ou de se servir de ses sens.

Arthur est déjà attablé lorsque nous arrivons, et nous fait signe de le rejoindre avec un grand sourire. Cian est à côté de lui, en train de discuter avec une de ses amies. Il nous demande comment s'est passé l'entraînement, et Ewald lui dit qu'il ferait mieux de se tenir sur ses gardes lors de la chasse. Pour toute réponse, le Poufsouffle vole un baiser à sa dulcinée et je regarde ailleurs tandis qu'Ewald secoue la tête, faussement exaspéré.

La semaine suivante passe assez vite. Les premières années ne me sollicitent plus pour s'entraîner, mais je passe en revanche pas mal de temps avec Ewald à travailler la légilimencie et les sortilèges qu'on utilisera pour la chasse aux lucioles. Il est capable de les utiliser de façon informulée, mais c'est hors de ma portée. À défaut de mieux, je m'entraîne à chuchoter mes sorts plutôt qu'à les crier, histoire de pas trop être un boulet le samedi d'après. En milieu de semaine, Elric nous annonce tout fier que sa rune d'obscurité est totalement au point, et rajoute qu'avec toutes nos conneries il aura plein de choses à mettre dans son dossier scolaire. Malgré toute cette effervescence, je ne perds pas mon but de vue. Une part de moi apprécie le temps passé avec mes amis, et se réjouit de participer à la chasse aux lucioles, mais cet enthousiasme ne suffit pas vraiment. Je le cache bien, comme toujours, mais mon esprit s'engourdit de plus en plus, et je recommence à me couper plus souvent. La pression monte en moi, à me rapprocher d'Ewald, à côtoyer Arthur et sa copine alors que le Poufsouffle me rappelle Quentin, à éviter de me retrouver seule avec lui pour ne pas qu'il pose de question gênante…

Le jeudi, je participe à l'entraînement de l'équipe de Quidditch, et je me retrouve à rentrer au château avec Alphonse. La discussion dérive sur ce qu'il a pu découvrir sur les lois régissant le secret magique.
« Au final, c'est plus facile que je croyais de révéler le secret à un moldu, mais c'est très contraignant et ça doit être justifié. Il faut un rendez-vous avec des Oubliators qui poseront un sceau runique sur la personne pour l'empêcher de révéler l'existence de la magie à quiconque, et la personne sera inscrite sur un registre. Si elle s'avère représenter un quelconque danger pour le monde magique, les Oubliators peuvent lui faire perdre la mémoire… Ou pire…
-Ils ont le droit de tuer ?
-C'est pas dit comme ça, mais je suis pas naïf au point de croire que ce n'est pas une possibilité… soupire Al'
-Et comment ça se passe si un moldu apprend l'existence de la magie par accident ?
-ça dépend pas mal des conséquences que ça a, mais en général on lui fait perdre la mémoire. Le sorcier peut être sanctionné, selon les circonstances. Il y aussi le cas où le sorcier a délibérément violé le secret magique… Dans ce cas encore une fois les circonstances et l'impact de la révélation vont vraiment influencer la sentence. Dans le meilleur des cas, le moldu concerné a droit à une séance avec les oubliators comme si ça avait été fait dans un cadre légal, et le sorcier s'en tire avec une réprimande… Apparemment c'est assez courant que des gens révèlent l'existence de la magie à leur conjoint ou conjointe avant de prévenir les autorités, c'est pas très légal mais c'est assez bien toléré…
-Je suppose que c'est un bon point dans ton cas, on sait jamais. Des fois on parle sans l'avoir prémédité » je fais, en parfaite connaissance de cause. Curieuse, je lui demande : « Et qu'est-ce qu'il se passe dans le pire des cas ?
-La mémoire du ou des moldus impliqués est toujours effacée, voire pire si la situation est jugée trop dangereuse, je suppose. Pour le sorcier, la peine maximale est de se faire briser sa baguette avant de se faire apposer un sceau de Secret et envoyer dans le monde moldu. Il y a quelques cas d'emprisonnement à Azkaban, mais c'est rare. Apparemment vivre comme un moldu est la sanction pour les amis des moldus…
-Je vois. » je fais, un poil amère. Je sens qu'Alphonse pense un peu comme moi. Comme si être moldu était une punition. La magie, c'est cool, c'est vrai, j'adore ça et maintenant je vois mal comment je pourrais m'en passer… Mais le monde moldu est loin d'être si limité que les sorciers veulent le croire, et je pense que la magie n'apporte pas le bonheur, loin de là, surtout avec une société aussi arriérée.

Vendredi midi. Je plante mes ongles dans ma peau sous la table, frottant mes coupures récentes qui brûlent encore, m'infligeant la douleur avec désinvolture.
« Tu as vu ce qu'il s'est passé avec Urgalt?
-Ouiiii! Je fais en riant, j'ai cru qu'il allait vraiment tuer Von Saxen cette fois ci! »
C'est tellement fatiguant de faire semblant tout le temps. Mais "show must go on". La représentation est toujours en cours et mon masque bien en place.
« Tu as cours avec lui tout à l'heure d'ailleurs, non?
-Oui... J'hésite à ramener du popcorn. Y a un sort qui permet d'en faire apparaître ? »
Je souris en écoutant les explications d'Arthur. Non, il n'y a pas de sort qui permette de faire apparaître du popcorn directement, mais on peut en invoquer si on en a quelque part. Je fais la liste des moyens que j'ai à disposition pour le tuer. Mon poignard. La fourchette dans ma gorge. M'étrangler avec mes vêtements. C'est un jeu habituel, pour moi. Je sens un léger tiraillement à la lisière de mon esprit. Ewald essaye d'attirer mon attention. Je m'ouvre à la communication avec l'assurance toute neuve acquise cette semaine, et je tourne la tête vers le Serpentard.
« On s'entraîne après mon cours de DCFM ?»
Je hoche la tête en réponse. Nous arrivons à communiquer par télépathie, mais pas de façon très élaborée, et seulement quand nous sommes à proximité. Ça reste encore assez fatiguant pour moi, alors je préfère m'économiser.

Enfin, le samedi arrive et avec lui la chasse aux lucioles. Après mûre réflexion, nous avons décidé de faire ça le matin. Il y aura probablement moins de monde dans les couloirs, y compris de profs. Même eux font la grasse matinée des fois ! Je me lève tôt, j'ai eu du mal à dormir parce que mon esprit ne se désemplissait pas de pensées. Même si je n'ai pas très faim, je me rends au petit-déjeuner, parce que mon absence serait remarquée. Je grignote rapidement un truc pour la forme, puis je me glisse dans les cachots avec nôtre équipe de comploteurs au grand complet. Il n'y a pas grand-chose à mettre en place, Elric ayant déjà installé les runes la veille au soir. Il part vérifier qu'elles sont toutes en bon état tandis que nous attendons les participants. Au final, cinq élèves de sixième et septième année nous serviront de juges. Il se répartissent le terrain et s'organisent entre eux un peu à l'écart. Alphonse, lui, a entrepris de faire le tour des équipes pour leur demander quelle sera leur couleur, vu que ma proposition de prix a été retenue. Ewald et moi avons choisi un vert vaguement orangé de type moisissure, Al' et son partenaire un rose tellement vif que je le sens me brûler les yeux même les paupières fermées. Nous sommes vingt-quatre participants au total, la plupart répartis en duos, même si on a deux trios : Lily (avec qui j'échange un sourire carnassier) et deux amies à elle, et un groupe de cinquième année de Gryffondor. Je connais la majorité des participants, entre mon duo, le quatuor des premières années, Scorpius en tête, Cian, Arthur, Alphonse et son partenaire… Elric s'est appairé avec le président du club de vol. Je connais aussi de vue une autre paire, deux personnes du club de vol. Les quatre restants sont deux filles en couple de sixième année, et deux frères, l'un en cinquième à Serpentard, l'autre en septième à Poufsouffle, un ami d'Arthur apparemment, ou du moins une connaissance. Les juges garderont leur baguette allumée avec un Lumos de faible intensité pour qu'on les différencie des autres participants. Il vaut mieux ne pas se tromper, car toucher un juge fait perdre cinq points à son équipe.

Le leader des juges rappelle les règles, puis nous avons dix secondes pour nous répartir à nôtre guise dans les salles. Ensuite, tous les juges répandent la poudre d'obscurité instantanée tandis qu'Elric active ses runes, puis on attend le signal des juges (un son de trompette) pour commencer à viser. La tension monte d'un coup. Je suis dos à dos avec Ewald, on s'est dirigés vers une salle en bout de couloir tout en activant nôtre communication mentale. Autour de nous, je sais qu'il y a au moins deux équipes, celle des jumeaux Potter et celle de la fratrie. On les a vus avant que l'obscurité tombe. Je pense que Lily n'est pas loin, après tout elle veut en découdre avec moi suite à la course d'obstacle. Le silence se fait pesant. La tension monte encore.
« Les première années sont à droite. Les autres à en face un peu sur ma gauche »
« Je les entends » je réponds à Ewald. « Au signal, on se déplace un peu dans ta direction, okay ? » Je sens son assentiment par le biais de nôtre lien.

Le signal retentit.

L'univers s'illumine de couleurs. Ewald et moi plongeons instinctivement à terre, nous rentrant légèrement l'un dans l'autre dans le processus, mais évitant grâce à ça les premiers sorts lancés dans nôtre direction. On dirait que les Potter n'ont pas hésité. Néanmoins, ils ne tardent pas à regretter leur entrée en matière. Avant même que j'aie réussi à me relever, Ewald a lancé un informulé qui a touché sa cible, l'un des jumeaux, tandis que l'autre équipe touche aussi les première année. Tentant ma chance, je murmure le sort de marquage, visant les frères de cinquième et septième, et les rate de justesse. La riposte ne se fait pas attendre, mais va se perdre au-dessus de ma tête.

Après un début frénétique, je m'adapte, et Ewald aussi. Nous nous déplaçons le plus silencieusement possible, communiquant d'un effleurement de pensée entre nous lorsque nous repérons du monde. Les sorts informulés d'Ewald surprennent beaucoup de cibles. Nous ne sommes pas les seuls à avoir compris l'intérêt d'une approche discrète, et bien vite le champ de bataille devient plus silencieux, l'ambiance plus tendue. J'adore ça. Je repère facilement les gens, on voit bien que la plupart n'ont pas pour habitude de se déplacer silencieusement, encore moins dans la pénombre. On entend quelques jurons lorsque certains font une rencontre inopinée avec un mur ou un objet, voire même des gens. Le problème, c'est surtout que je suis obligée de prononcer mes sorts de façon audible, et que j'ai encore des progrès à faire en terme de précision. Je ne dois toucher ma cible que la moitié du temps. La plupart des élèves des années supérieures réussissant souvent à lancer leurs boucliers à temps, quand je ne tire pas bonnement et simplement à côté. La plupart des équipes se sont organisées de façon à ce qu'une personne se concentre sur la défense et l'autre sur l'attaque. Ewald et moi optons pour une stratégie différente. Nous disposons d'un énorme avantage de par nôtre connexion mentale, que nous exploitons en nous séparant pour cibler les gens de plusieurs côtés à la fois tout en étant plus discrets. Tant que nous restons à moins de cinq mètres de distance, nous parvenons à garder nôtre lien intact. Peu à peu, la partie évolue en guerre de position. La plupart des gens restent dans la même pièce, mis à part pour quelques équipes qui comme nous passent de salle en salle. Je me glisse le long des murs, en rampant, dans le couloir, puis un instant plus tard j'atteins quelqu'un de dessous un bureau… Ewald est d'une efficacité redoutable, et il ne s'est encore pris qu'un seul tir. Pour ma part, j'ai déjà subi cinq ou six tâches colorées, mais j'ai eu l'idée de garder ma cape dans mon sac, et je m'en sers pour cacher les tâches lumineuses, même si à vrai dire le mobilier a maintenant suffisamment été touché pour qu'il soit bientôt plus repérable de ne pas porter de tâches colorées plutôt que l'inverse. À un moment, je sens Ewald lancer un sort qui atteint Arthur en pleine tête. J'ai un petit ricanement en le voyant chercher autour de lui d'où le tir est parti avec un air perdu.

Et puis, les participants devenant de moins en moins discrets à cause de tous les sorts échangés, une nouvelle phase de combat plus ouverte s'engage. Une ou deux personnes se font sortir par les juges. Je finis par me retrouver dos à dos avec Ewald, face à l'équipe de Lily qui semble déterminée à m'éliminer, au vu de la fréquence à laquelle elle me bombarde de sorts. Heureusement pour moi, mon sort de bouclier tient bien, mais je suis réduite à la défensive, forcée à mettre toute ma concentration dans mon sort pour éviter qu'Ewald ou moi ne soyons touchés. En revanche, ce dernier est toujours en forme, et surtout capable d'attaquer. Il tient en respect un mec devant lui tout en envoyant régulièrement des sorts à Lily et son équipe. Et c'est alors que la mêlée générale s'éternise et devient de plus en plus chaotique, de nouveaux combattants n'arrêtant pas de rejoindre la salle, que la voix de Mac Gonagall et du concierge nous parviennent depuis le couloir, couvrant les bruits de la bataille. Parce que Mac Gonagall ne parle pas. Elle hurle. Et c'est pas bon pour nous.

En un instant, je passe du mode « combat » à « fuite », et Ewald est sur la même longueur d'onde. Il me saisit le poignet pour m'entraîner à sa suite, arrêtant de bombarder le reste de la salle de sorts, formant juste un bouclier pour nous protéger alors qu'on arrive dans les premiers dans le couloir, disparaissant juste à temps à l'angle de celui ci pour éviter les professeurs qui arrivent de la direction opposée. On réussit à se rapprocher de la salle commune des Serpentard, et Ewald nous guide jusqu'au passage secret qui monte à l'étage des profs vers la salle sur demande. Il lâche mon poignet pour ouvrir le passage, et je le suis rapidement. C'est une fois la porte du passage refermée derrière nous que je réalise qu'il m'a touché le poignet. J'espère qu'il n'a rien remarqué d'étrange. Je baisse les yeux par réflexe. Merde ! Mes glamours ont dû tomber pendant la chasse, parce que mes cicatrices sont bien visibles. Je rabats vivement ma manche dessus et empoigne ma baguette dans ma poche pour relancer le sort. Je n'ose pas lever les yeux vers Ewald. Je ne pense pas qu'il aie eu le temps de voir mon poignet de toute façon. Et heureusement, des bruits de poursuite se font entendre alors que je murmure le sort pour rétablir mes glamours. Je relève la tête, tendue, mais Ewald ne me prête pas attention, l'air concentré sur le couloir.

Quand les bruits disparaissent, nous attendons encore quelque temps en silence avant de nous aventurer hors de nôtre cachette. Nous nous dirigeons vers un point de repli, déterminé à l'avance, où un juge va compter combien de coups on a reçu, et la part de quelle équipe. Lorsque nous y arrivons, nous retrouvons deux juges et deux équipes en plus de la nôtre. Les deux filles de sixième année, et Elric et son partenaire. Les deux équipes présentent un bon nombre de tâches lumineuses, bien plus qu'Ewald et à peu près le même nombre que moi. À ma satisfaction certaine, plusieurs sont couleur vert moisissure, et j'envoie à Ewald une touche de joie via nôtre lien, que nous n'avons pas encore désactivé. Une fois les autres équipes inspectées, c'est nôtre tour. Le juge nous demande d'abord de lui présenter nos baguettes, et lance un primo incantatem dessus pour vérifier que nous n'aillons pas effacé les tâches de lumière. La baguette d'Ewald ne révèle rien de spécial, mais le glamour lancé par la mienne fait hausser des sourcils.
« Pourquoi tu as lancé ce sort ? Demande le juge
-Je n'ai caché aucun sort de marquage, juste une égratignure sur le visage, j'avais peur de croiser des profs plus tard, je n'ai pas réfléchi…
-Enlève le sort, histoire qu'on soit sûrs.
-Ce n'est pas nécessaire, je proteste. Si vous savez un minimum comment ça marche, ça dissimule tout d'un coup, je n'aurais pas pu choisir de ne laisser que quelques marques visibles sur ma peau, et Ewald peut témoigner que je n'ai pas triché ! »
Je panique. Je suis coincée. Pourquoi je n'ai pas réfléchi ? Je n'avais pas le choix.
« Allons, sois raisonnable… Tu as juste à lever le sort et on te laisse tranquille. On peut même se mettre un peu plus à l'écart si tu veux. Qu'est-ce que tu cherches à cacher de toute façon ? Tu n'as pas de souci à te faire, j'en ai vu de l'acné. À moins que ça soit une marque des ténèbres ? » rajoute le juge, pour plaisanter. Je sens un tiraillement à la lisière de mon esprit, que j'ignore. J'ai rompu le lien avec Ewald en me mettant en colère, et il doit essayer de me parler, mais il ne peut pas vraiment m'aider.
« Ma vie privée ne regarde que moi. Je n'ai pas triché, et ce sort ne m'aurait pas permis de dissimuler de marques lumineuses.
-Peut-être, mais je voudrais vraiment savoir pourquoi-
-Elle a raison, ce ne sont pas tes affaires, le coupe Ewald. Je peux confirmer qu'elle n'a pas triché, et regarde... »
Ewald se lance le sort de glamour, faisant disparaître toutes les traces de son corps, avant de lever le sort, puis de le relancer, en expliquant qu'il ne cible cette fois ci pas les lumières. Elles restent visibles, preuve irréfutable de ce que j'ai dit.
« Ton boulot, c'est juste de s'assurer que personne n'a triché, et là, la seule façon pour elle de le faire aurait été de tout effacer pour ne relancer qu'un nombre de sorts qui l'arrange, auquel cas elle n'aurait pas laissé sa baguette montrer qu'elle avait lancé un tel sort. Ce qu'elle a à cacher ne regarde qu'elle, point. »
Bon gré mal gré, le juge se rend aux arguments d'Ewald et compte enfin le nombre de fois où on a été touchés afin qu'on puisse effacer les tâches lumineuses. Nous restons encore quelques minutes avec les autres, le temps pour Ewald de discuter avec les autres afin d'avoir une idée de la situation, tandis que je garde le silence. Elric résume pour tout le monde :
« Les profs ont réussi à attraper une dizaine de personnes, je crois, et on a un juge de cinquième qui a fait exprès de leur lancer un sort de marquage pour se faire embarquer aussi histoire de compter les points… Un Gryffondor, sans surprise. Ton pote s'est fait attraper d'ailleurs, Arthur. Le reste a réussi à s'éparpiller ou se cacher jusqu'à ce que les profs soient partis, même si certains sont restés dans la zone pour nettoyer le couloir… Il vont forcément voir mes runes, mais ils ont pas de preuves que ce sont les miennes.
-Je vois, merci. Bien joué en tout cas » le félicite Ewald.
Lorsque nous quittons les autres pour aller manger, il me demande d'un ton tranquille :
« Tu veux en parler ? »
Lorsque je secoue la tête, il se contente de hocher la sienne, et ne pose pas d'autre questions sur le glamour. Je voudrais le remercier de m'avoir tirée d'affaire, et de me laisser en paix comme ça, mais je préfère garder le silence.

Nous retrouvons tout le monde à midi à la table des Poufsouffle. La grande salle est plongée dans une ambiance électrique, tout le monde discute avec excitation de la chasse aux lucioles, et les profs fusillent l'assemblée du regard. Mac Gonagall, en particulier, a l'air d'être d'une humeur massacrante. Apparemment, nôtre pseudo lasergame est loin d'être passé aussi inaperçu que nôtre course d'obstacles. Pour éviter les oreilles indiscrètes, on se donne rendez-vous après le repas pour le debrief avec les juges dans une salle au septième étage. Arthur a écopé de deux heures de colle, comme sa copine. Alphonse s'est aussi fait attraper, mais il est bon pour trois heures pour sa part. Apparemment son dossier scolaire moins irréprochable que celui des deux autres n'a pas joué en sa faveur. Au final, c'est l'équipe d'Elric qui a gagné, même si pas de beaucoup. Ewald et moi sommes arrivés deuxième. Elric et le président du club de vol ont eu une stratégie diamétralement opposée à la nôtre. Ils se sont séparés en tirant sur tout ce qui bougeait, mais même si ils se sont fait davantage toucher que nous, ils ont eu à peu près tout le monde. Ils sont tous les deux bons en duel, et en septième année. Je pense qu'Ewald aurait gagné haut la main avec n'importe qui au-dessus de la troisième année comme partenaire. Moi, j'étais trop lente et faible. Je ne culpabilise pas trop, vu qu'on s'est bien amusés, et que je doute qu'il aurait laissé quiconque d'autre qu'Arthur partager un lien psychique avec lui de toute façon.

Après le debrief, je vais me promener à l'extérieur du château. Je suis un peu fatiguée des gens. Mon regard est attiré par la forêt interdite. Ça fait longtemps que je pense à y aller, pourquoi pas aujourd'hui.. ? Je vérifie que personne ne me surveille, et je me glisse entre les arbres. Bien vite, je suis hors de vue du château, et je respire à plein poumons l'air chargé d'odeurs qui me renvoient longtemps en arrière. Mes jeux quand j'étais petite, des colonies, des promenades autour de chez moi… Plus tard, les pauses de midi avec Quentin. Tailler des bouts de bois avec mes couteaux, construire des cabanes… Je n'ai pas eu beaucoup l'occasion de retourner dans les bois dans ma deuxième vie, alors tous mes souvenirs sont liés à longtemps en arrière. Je ne m'enfonce pas très profond dans la forêt, mais suffisamment pour ne plus entendre de bruit humain, pour ne plus apercevoir Poudlard ou le lac, et que la voûte des branches se resserre au-dessus de ma tête. J'entends quelques créatures, et je reste sur mes gardes, mais je n'en rencontre pas. Je finis par trouver un beau chêne que j'escalade avec joie. Je reste en haut un certain temps, à profiter du calme et à penser. À m'égarer dans la nostalgie de ces temps que je ne reverrai jamais plus. Je pense à Ewald aussi, à la joie d'agir de concert avec lui, et au fait que je vais devoir me méfier davantage. Il en sait déjà beaucoup trop. Al' aussi. Encore une fois, j'essaye d'imaginer une raison qui expliquerait que je vis. Encore une fois, j'échoue à trouver une explication logique. C'est marrant comme mes questionnements se rapprochent, dans le texte, des grands questionnements humains, mais sont motivés par quelque chose de plus concret. Je ne cherche pas un sens à ma vie, je cherche une explication à ma réincarnation manifeste. Je rentre au château trop tard pour manger, volant jusqu'au septième étage pour éviter les profs. J'ai un peu faim. Je savoure la sensation, que j'agrémente de deux coupures sur le dos de ma main gauche, qui forment une croix. Je ne me coupe pas aux mains d'habitude, mais c'est pour me souvenir, pour garder ma résolution de ne pas m'attacher-et de ne pas les laisser s'attacher à moi.

Le lendemain, je suis à la bibliothèque, tentant d'ignorer les regards appuyés sur mes cheveux bleu électrique (vraiment, on aurait pu tomber sur pire…) lorsque Arthur vient me voir, seul. Il tire une chaise pour s'asseoir en face de moi et je le salue distraitement. Au lieu de sortir ses livres, il me demande simplement :
« Combien de temps ? »
Je relève la tête, confuse.
« Combien de temps pour quoi ? Je demande
-Avant que tu te décides à me raconter un peu plus tes vacances, et à reprendre la discussion que nous avons eu avant de prendre le train.
-Il n'y a pas grand-chose à rajouter pour les vacances, et encore moins par rapport à notre discussion. Tu sais ce que j'en pense, tu n'es pas d'accord, qu'est-ce que tu veux que j'y fasse ? »
Je frotte le dos de ma main gauche, réveillant les coupures que le Poufsouffle ne peut pas voir. Je m'attends à ce qu'il insiste, mais il me surprend, préférant demander :
« Ewald m'a dit que vous avez utilisé de la légilimancie pendant le tournois ?
-Effectivement. Ça ne nous a pas permis de gagner, malheureusement.
-Je trouve ça bien que vous aillez pu vous faire suffisamment confiance pour ça. »
Arthur fait une pause, puis reprend, après un soupir :
« Écoute, si tu ne veux vraiment pas me parler… Je t'avoue que ça me fait un peu de mal, mais c'est pas grave, si tu parles à Ewald. Juste, arrête de tout cacher, d'accord ? Je veux bien te laisser tranquille si tu lui parles à lui. C'est le plus important. Juste parle, d'accord ? »
J'émets un grognement qui sur un malentendu pourrait passer pour une approbation, mais Arthur pose sa main sur mon épaule :
« Vraiment Vivian. Je veux te l'entendre dire.
-Je parlerai à Ewald. Content ?
-Pour le moment. Et sache que je suis toujours là, si tu veux, d'accord ?
-T'inquiète, je sais. » je fais, forçant un sourire. J'arrive pas à croire qu'il soit naïf à ce point. Ça confine à la bêtise ! J'ai un petit rictus, qu'Arthur remarque .
« Vivian ? »
Il comprend, je le vois sur son visage. Parler, ça ne m'oblige pas à lui dire grand-chose de plus que « bonjour »… Je mets mes affaires dans mon sac et pars en ricanant, esquivant la main d'Arthur qui veut me retenir et quittant la bibliothèque, le Poufsouffle à ma suite. Et justement, on tombe sur Ewald dans le couloir, alors je le salue avec un grand sourire, avec un hochement de tête à l'adresse d'Arthur. Ewald nous regarde, l'air un peu perdu, et le jaune et noir explose :
« Vivian, ça suffit !
-Tu ne veux pas juste laisser tomber ? Je soupire.
-Qu'est-ce qu'il se passe ? » Demande Ewald, d'un ton incertain
Je profite qu'Arthur lui explique pour m'en aller. Il me voit partir, je pense, mais il est trop en colère pour me retenir. C'est triste, mais je pense qu'on ne va plus rester amis bien longtemps.

xxx

« Si je regarde devant moi, ce qui m'attend, mon futur, je ne vois pas comment je pourrais vivre. Je suis inadaptée. Je ne peux pas m'imaginer travailler toute ma vie, métro boulot dodo. Comment appeler ça une vie quand c'est une prison ? Juste imaginer devoir grappiller quelques heures de liberté, épuisée à cause du travail, c'est comme mendier du rêve pour moi. Ça n'en vaut pas le coup. À ça s'ajoutent mes cauchemars, ces images qui me hanteront à jamais. Ils me condamnent déjà bien assez. Mais peut-être que je pourrais voyager, m'évader, partir loin, et là bas trouver un plaisir à exister, d'esquive en esquive… Mais je ne pourrai jamais fuir mes souvenirs. »

-Extrait d'un carnet d'Aurore Berger, conservé par Quentin Lemage à sa mort-


Et voilà pour ce chapitre, j'avoue n'être pas satisfaite de la fin mais bon. On fera avec. Je vous dis à la prochaine donc, et laissez des reviews, ne soyez pas timides!

Ciao