NDA 01/05/2024 : Bonjour! Bonne fête du travail à tous et à toutes! J'espère que vous allez bien et qu'il ne pleut pas trop chez vous. Voyez comme je suis à l'heure, encore, et rassurez-vous, j'ai le chapitre du mois prochain de prêt, aussi. Donc il n'y aura pas de retard. J'espère que ma conseption du procés que vous allez lire vous conviendra, et avec un peu de chance, vous reconnaîtrez mes références idiotes!
N'hésitez pas à donner votre avis, même si ça ne vous plaît pas, ou que vous vous attendiez à autre chose, toutes les critiques sont bonnes à prendre!
À Huguette, à qui je ne peux répondre par MP. Outre ton pseudo qui m'a fait cracher mon thé de rire, j'espère sincèrement que le procés des Chnocks sera à ta convenance ~
Chapitre 5 : L'avenir d'une amie.
Je ne sais pas vraiment où je suis depuis des jours.
Mais qui s'en soucie, de toutes façons ? Je me contente de sortir de cette maison, de marcher dans les jardins fleuris, de respirer le lilas et caresser les plumeaux de vulpins à chat qui entourent l'habitation. Il ne fait jamais nuit. Mais il ne fait pas jour non plus. Cet endroit est bloqué dans un crépuscule chaleureux. Il ne fait pas froid, pas chaud non plus. On est juste bien. Même s'il n'y a rien.
Parfois, je me rends compte que j'ai soif, mais ça ne dure qu'une seconde, et ça passe. De toutes façons, je ne suis pas réellement là, alors je ne vais pas boire de l'eau imaginaire, ce serait idiot. Non ? Je ne sais pas. Même si je ne fais rien, je me sens toujours épuisée, et malgré l'atmosphère bucolique, il y a cette angoisse permanente qui me tiraille.
J'ai essayé de l'oublier. J'ai couru dans les champs de fleurs, dans un sens, dans l'autre, je reviens toujours vers la petite maison. Il n'y a pas de sens. Pas de gauche, ou de droite. Une loupe. Quand j'angoisse trop, je cours, et après, je me laisse tomber dans l'herbe, à peine essoufflée, parce que mon corps n'a pas couru. Il ne s'est pas dépensé. Le plus effrayant, c'est que je peux crier de tout mon saoul, il n'y a même pas d'écho. Rien. Et c'est un silence gelé qui me réponds. Je suis toute seule. Toujours toute seule. Et je ne sais pas pourquoi.
L'intérieur de la bâtisse n'est pas non plus prévu pour accueillir une personne. C'est comme un petit cabanon, et la pièce unique se compose d'une petite table de campagne avec deux chaises bancales, d'un pot de fleur que je remplis tous les jours, et d'une marmite suspendue à un crochet dans une cheminée vétuste en pierre. Il y a aussi un tout petit miroir à main en bronze, mais je n'aime pas regarder dedans, outre le fait que je n'aime pas ma tête, il me renvoie une image encore plus tordue.
Alors, quand j'ai besoin de croire qu'on ne m'a pas abandonnée ici, que quelque part, quelqu'un se souvient de moi, je me mets à chanter. C'est bête, parce que personne n'entend… Mais dans les films, c'est toujours comme ça que ça marche. Le protagoniste chante, et quelque part, parfois même dans un autre monde, ses amis ou sa famille chantent la même chose.
J'ai toujours aimé ce dessin-animé. Fievel. Cet Oliver Twist version souris, dont la musique nous transperce l'âme. Et si naturellement, « très loin là-bas » s'impose comme la scène la plus iconique de tout le film. Moi, ce n'est pas celle-là qui me vient à l'esprit. Non. Je suis comme Fievel qui entends soudainement le morceau de violon que son père jouait tout le temps, je me mets à courir vers la musique, je la cherche désespérément. Et quand enfin je pense avoir atteint sa source, je me rends compte que ce n'est qu'un gramophone.
Personne ne joue pour moi ici. Il n'y a personne avec moi. Personne ne viendra à mon secours. Pourquoi le feraient-ils ? Je ne suis personne. Pas quelqu'un de bien. Même pas de ce monde. Juste une idiote ayant remplacée une héritière. Je n'ai jamais pu rentrer dans un moule chez moi, alors ici. Luna était sympa, c'est vrai… Et Fred aussi. Cédric… Non. Je ne dois pas. Il faut juste oublier.
Ça ne sert à rien de pleurer pour quelqu'un qui n'existe pas vraiment. Oui. Voilà. Il n'est qu'un personnage d'un bouquin. Ils ne sont que ça. Je vais juste attendre de pouvoir sortir de ce rêve idiot, et ensuite, j'irais fouiller pour rentrer chez moi. Ce sera mieux pour tout le monde, j'arrêterai de foutre la merde dans leurs vies comme ça. D'être un boulet. Je suis toujours un boulet. Même Meleth s'en est rendu compte. Ça se finit toujours de cette manière, les gens que j'aime m'abandonnent. Alors à quoi bon ? Là, au moins, je ne fais de mal à personne. Je suis juste…
Toute seule… Et malheureuse.
En fait, c'est de ma faute. C'est moi qui me suis remise à espérer. A croire que je pouvais me lier avec des gens, me faire des amis. À chaque fois que je recommence, je tombe de haut. Cédric est mort par ma faute, mais ce n'est pas le premier qui part à cause de moi. J'ai fait fuir tout le monde. Meleth refuse carrément de me voir. Il ne voulait pas… Le bal était une erreur, c'est tout. Un délire de ma part, sûrement, même.
Les faux espoirs font toujours mal. Je suis débile à penser que peut-être, quelqu'un m'entendra… Et même si cette personne m'entend. Pourquoi viendrait-elle me sauver ? Je n'ai aucune importance. Je suis comme cette fillette dans Bernard et Bianca, Penny.
« Qui veut me sauver ?
Qui voudra me sauver ?
Qui pourra me trouver ? »
Je suis fatiguée de pleurer dans ces jardins. Et ça dure, pourtant. Comme une orpheline perdue au milieu de nulle part. Je n'ai personne à appeler. Et personne ne viendra me chercher. Toute seule avec ma peine et mon dégoût de moi-même. Qui a cru que les vieux dessins-animés étaient bourrés de jolies chansons ? Certaines ont deux lectures. Celle pleine d'espoir, que les enfants vont naturellement entendre. Et l'autre, plus sombre, plus réaliste. Celle qui sait qu'aucune lumière ne nous attends au bout du tunnel.
« Perdue en mer sans un ami
Mon voyage est déjà fini
Qui veut me sauver ?
Me sauver ? Me sauver ? »
oOoOoOo
« Peux-tu la réveiller ? » Demanda Luna, la haute silhouette à ses côtés sembla réfléchir.
« Moi non. »
« Alors celui qui est en toi ? » L'homme tourna la tête tellement vite dans sa direction que ses cervicales émirent un crac sonore.
« Celui qui est… ? »
« Celui qui est en toi, oui. Tom. » Affirma Luna avec son assurance lunatique.
« Qu'est-ce que tu sais de… ? »
« Tu ne m'as pas répondu, Arman. C'est coutume chez les norrois de répondre aux questions par d'autres questions ? »
Le colosse nordique fixa avec ahurissement, la petite chose blonde qui lui avait répondu. Luna avait beau avoir 14 ans, elle n'en faisait encore que douze. Vraiment petite, toute fine et d'aspect fragile, ses longs cheveux blonds étaient emmêlés avec des épis de blés murs. Les grands yeux bleus le fixaient avec cette même insistance qu'Arman avait décelé plusieurs fois.
« Euh… Non. »
« Non ? » Elle pencha alors la tête sur le côté, faisant danser les cerises jumelles qu'elle avait aux oreilles. « Non, ce n'est pas une coutume, ou non, Tom ne peut pas la réveiller ? »
« Non… Non aux deux… Comment sais-tu que Tom est… » Il n'eut pas le temps de finir sa phrase, qu'elle répondait dans un sourire lunatique.
« Ce sont les sombrals qui me l'ont expliqué. Ils sentent ces choses-là. Ils ont dit qu'il y avait quelqu'un d'autre avec toi. Et ensuite, j'ai déduit toute seule que tu étais Meleth nin. Puisqu'il n'est apparu que lorsque toi, tu disparaissais.»
Arman dévisagea Luna encore un moment. Outre la sensation de feu dans son ventre, au moment où elle avait prononcé le nom maudit en elfique, plusieurs informations semblaient se contredire dans sa mémoire. Il avait toujours expressément fait attention à ce que personne ne puisse le rattacher à Tom, plaçant des sortilèges d'illusions dans des endroits opposés, pour qu'il puisse être vu en même temps que l'héritier. Ensuite, il n'avait pas le moindre souvenir que les sombrals puissent identifier ce genre de situation, et encore moins le communiquer. Enfin, qu'une élève qui allait rentrer en 4e année à Poudlard puisse avoir conscience de tous ces détails, n'était pas normal.
Il aurait plutôt qualifié son statut d'impossible.
Mais il ne pouvait pas s'appesantir sur cette jeune fille et ses étrangetés. Il devait sortir rapidement Sacha de son apathie infernale. La réveiller. Il voyait bien que la gestuelle était automatique. Il suffisait qu'il pose sa grande main sur la sienne pour qu'elle tressaille. Mais dans son regard constellé de gris, rien ne changeait. Une seconde…
Gris ?
Prit d'un affreux doute, il se saisit du menton de la jeune femme et tourna son visage stoïque vers lui. Un frisson d'horreur remonta le long de son échine. Les yeux noisette étaient constellés de paillettes grises. Une teinte qu'il n'avait vu que chez Sacha O'Nigay. La sienne. Celle qui devait se trouver cachée au fond de l'âme de l'héritière, se reconstituer loin de la tyrannie de sa famille. Il comprit instantanément d'où venait le problème. Ce n'était pas l'héritière qui était aux commandes. Pas totalement. L'âme fragilisée de son amie luttait avec elle.
« Non… Pas maintenant… Tu n'es pas prête !»
Mais Arman savait qu'aucune parole ne pouvait atteindre sa Sacha. L'obscuriale en elle était peut-être apaisé, mais son âme elle-même était désormais fragmentée en petits morceaux instables qui s'accrochaient désespérément à celle, puissante, de l'héritière. Sa main dériva sur le visage rond de la jeune femme, se posant sur sa joue qu'il caressa du bout de son pouce.
« Sacha… » Un murmure, alors qu'il se penche sur elle pour embrasser son front. Il secoua finalement la tête, avant de se redresser, lâchant ladite Sacha. « Personne ne peut rien faire… Je n'ai aucun moyen de l'atteindre. Personne n'en a. »
« La personne ici… C'est ta Sacha… ? » Demanda Luna d'une petite voix pleine de compassion.
« Oui… Ma sacha… »
Il se souvenait comme si c'était hier de leur rencontre, et pourtant, elle remontait à quelques années déjà. Il avait obtenu le droit de voyager en Angleterre avec son frère ainé et leur mère, et le chemin de Traverse s'imposait comme un point de visite obligatoire. C'était là qu'il avait rencontré une incroyable petite fille. Blonde aux yeux gris, ronde de l'enfance, et pourtant pleine d'espièglerie. Elle l'avait bousculé plein de fois, juste pour pouvoir le croiser et lui faire des grimaces.
Ils avaient joué un moment malgré l'écart d'âge et la barrière de la langue, pendant que leurs parents discutaient. Ils avaient cassé un flacon dans leur course, fiole au contenant inconnu, qui s'était renversé sur la robe de la demoiselle. Soudainement, la fillette pleine de joie s'était retrouvée mortifiée et terrorisée. Il avait d'abord cru que c'était la souillure sur sa robe d'été, mais il n'en était rien.
Sacha lui avait saisi les mains en tremblant. Le suppliant de l'emmener loin de sa famille, qu'elle ne voulait plus recevoir de sorts, qu'il l'avait libéré par mégarde mais que ça ne durerait pas. La mère de la fillette était intervenue, disant qu'elle était un peu malade, et l'avait emporté à l'arrière du magasin de potion. Mais il avait suivi les deux, et avait vu l'impensable. Cette femme aux cheveux hirsute avait jeté un sort à sa propre fille. Un impero.
Et même s'il n'avait fait qu'un trimestre à Dumstrang pour le moment, il savait très bien quels étaient les impardonnables. Sacha était revenue, aussi espiègle et joyeuse qu'avant, n'ayant aucun souvenir de sa supplique, et il avait eu toutes les peines du monde à se remettre à jouer avec elle. Hanté par l'expression de pure horreur qui avait marqué ses traits lors de sa libération.
Arman s'était juré de devenir le sorcier le plus puissant qui soit, pour que malgré leurs pays d'origines, il soit assez fort pour vaincre cette famille ignoble et libérer la vraie Sacha. Ils avaient gardé une correspondance assidue, même lorsqu'elle était rentrée à Poudlard. Et pourtant, dans chacune des lettres, entre chaque phrase pleine de condescendances, il lisait des appels à l'aide. Il avait eu mal au cœur lorsqu'elle avait parlé de sa relation double, et de ce qu'elle faisait de son corps. Parce qu'il savait que dessous, il y avait une vraie personne qui subissait toutes ces horreurs.
Et Tom l'avait trouvé, un peu après l'accident qu'elle avait eu chez les moldus. Ce faux accident. Il avait alors compris à quel point les choses allaient se compliquer. Même s'il n'en avait pas mesuré l'ampleur.
« Tu dois être très amoureux… » Fut le constat de la petite blonde.
« Quoi ? Non. Bien sûr que non, c'est mon amie, c'est tout. » Dire cette phrase lui fila un pincement au cœur, mais il garda tout son aplomb.
« Ton amie… Huhu… Si tu le dis. » Elle croisa cependant les bras, faisant une moue un peu triste. « Mais tu ne peux pas la réveiller non plus. »
« Non… » Avoua le garçon, honteux.
Il y eu quelques minutes de silence, avant que le visage de Luna ne s'éclaire d'un sourire radieux. Elle posa ses yeux bleus sur le corps de son amie et hocha la tête comme si cette dernière lui avait parlé.
« Oui. Exactement. Je sais. » Se tournant vers Arman qui s'était pris la tête entre les mains, elle lui tapota l'épaule avec compassion. « Je peux la réveiller, mais il va falloir que tu surveilles qu'aucun elfe n'approche, ni aucun Malfoy. D'accord ? »
« Je… D'accord. » Et si Arman fut contraint de faire confiance à la petite demoiselle, ça ne l'empêcha pas de frissonner en fermant la porte de la chambre d'ami du manoir Malfoy pour se rendre dans les couloirs.
Luna, son sourire toujours scotché aux lèvres, vint s'asseoir sur le bord du lit, et serra la main inerte de son amie qui tressaillit de plus belle.
« J'espère que tu ne m'en voudras pas de bafouiller, je ne t'ai entendu la chanter qu'une fois, mais tu avais promis de me raconter l'histoire de ces amis qui chantent pour s'entraider. Alors je vais te le rappeler dès maintenant. »
Et Luna, de sa petite voix fluette, entama un morceau qui n'existait que dans le véritable monde de Sacha. Une reprise de Bowie dans une série sorcière pour adultes bourrés de références fantastiques. Mais comment pouvait-elle le savoir ? Comment pouvait-elle savoir que ce qu'elle allait faire, allait réunir de force les héritiers nés au contact de Séléné ?
oOoOoOo
Comme convenu par le magenmagot, les témoins se levèrent un à un, jurant de ne dire que la vérité après s'être présenté devant l'audience au complet. Plusieurs médicomages étaient passés, expliquant avoir traité la jeune fille après son accident, et parlant de la terreur qu'elle avait exprimée devant ses parents. Son refus du moindre contact avec eux, allant jusqu'à vomir d'angoisse. Certains élèves s'exprimèrent sur les nombreux malaises qu'elle avait fait en classe, d'autres sur son refus systématique d'ouvrir les courriers de ses parents, ou les dons qu'elle avait fait de tous les cadeaux reçus pour ne pas avoir à garder des affaires provenant de sa famille.
Malfoy se leva, dans sa robe de sorcier de sang-pur brodé d'argent. Il jeta un regard à l'assemblée, comme pour captiver toute leur attention, et se tint si droit que le noiraud à ses côtés se demanda ce qu'il cherchait à faire. Il se présenta d'abord, comme les autres avaient fait, puis prêta serment à son tour.
« J'ai eu plusieurs rencontres au cours de l'année scolaire avec Sacha O'Nigay, qui m'ont laissé à la fois inquiet et perplexe. La première s'est faite sur le chemin de Traverse lors de nos achats respectifs pour la rentrée. Elle était habillée d'une robe noire, et je me suis moquée de sa tête d'enterrement, car jamais je ne l'avais vu aussi taciturne. C'est là qu'elle m'a regardé bizarrement. Je me suis senti en danger, et je l'ai senti en danger. Je ne saurais pas expliquer, mais… Il y avait quelque chose de différent chez ma camarade et ça m'a fait peur. »
Un tel aveu, même s'il était surjoué par le garçon, fit frémir Harry. Ça avait commencé bien avant, alors ? Même s'il était d'accord sur l'idée, pour avoir déjà eu l'impression que Sacha allait mourir juste en la fixant… Mais… Le saut de l'ange qu'elle avait manqué de faire du haut de la tour d'Astronomie l'avait marqué pour de bon.
Malfoy poursuivit son témoignage. Expliquant qu'il avait dû l'aider pour défendre une élève de serpentard plus jeune et qu'elle était venue le chercher, lui donnant même une gifle pour s'être moqué d'elle. Il parla de son regard à nouveau, qu'il avait eu l'impression qu'elle allait mourir s'il n'agissait pas. Il parla de ses ennuis avec un ancien petit ami, qu'il l'avait défendu à son tour, à charge de revanche, mais qu'elle avait réagi cette fois comme une jeune femme traumatisée par les contacts physique. Qu'il s'était posé la question d'une agression en ce sens.
Il parla de leur marchandage pendant qu'elle allait à la banque Gringott pour un rendez-vous, pendant qu'il devait rester avec son amie à sa place. Qu'à cet instant, il avait contacté sa mère pour lui parler de sa camarade qui agissait de plus en plus bizarrement et cherchait à se faire émanciper. Qu'elle eût dit ne pas pouvoir supporter à nouveau d'être au contact de sa famille. Et que si Sacha avait refusé de prime abord, l'accident du lac lors de la seconde tâche du tournoi l'avait décidé à la prendre comme avocate. Et après de nombreux passages sur la vie qu'elle espérait obtenir, il se décida à parler de l'état de la demoiselle depuis le début de l'été.
« Ma camarade de classe ne bouge plus. Elle est couchée dans une chambre d'ami au manoir, mais ne parle plus, ne s'alimente plus toute seule. Elle ne répond même pas à son prénom lorsqu'on l'appelle. Et elle gardera pour toujours les cicatrices causées par sa famille. » Il marqua une pause, qui parut presque théâtrale, mais Harry étant à côté du garçon, il sut que ce n'était pas du cinéma. « Il est plusieurs fois arrivé que mon père et moi-même soyons contraint de la ramasser de nuit, car hurlant et tremblants sous les séquelles des doloris… »
D'aucun aurait pu penser que cette dernière partie visait à redorer le blason Malfoy, surtout avec les allégations de Potter sur le retour du seigneur des ténèbres et l'attaque de la coupe de feu. Mais Harry voyait bien que non, et que le blond à ses côtés tremblait sur cet aveu. Il n'était pas bien du tout, et il n'osait imaginer ce que ce serait. Probablement la même terreur que lorsqu'il avait ramassé la demoiselle avec Fred et Rusard.
« Merci monsieur Malfoy, pour votre témoignage. » Dit enfin Madame Bones de sa place, les yeux brillants. Il était clair que la dernière partie elle ne l'aimait pas du tout. « Témoin suivant. »
Et ce fut son tour. Harry soupira, prêt à être fixé comme une bête de foire à nouveau. Mais il resta le plus digne possible en se relevant du banc. Aussitôt, le ministre Fudge darda un regard mauvais dans sa direction, mais il l'ignora superbement. Il avait gagné l'audience précédente, et il n'allait certainement pas ignorer l'état de son amie juste par crainte d'être moqué ou ignoré. Il avait combattu Voldemort dans ce cimetière, et si le magenmagot le mettait mal à l'aise, le seigneur des ténèbres était bien pire.
« Je m'appelle Harry James Potter, et je jure de ne dire que la vérité au sujet de Sacha O'Nigay. »
« Allons, Monsieur Potter, si c'est une nouvelle tentative pour attirer l'attention, vous seriez … » Mais Fudge fut coupé par Augusta Londubat, deux bancs au-dessus, dans sa robe violette. La vieille femme arborait une expression austère et le ton de sa voix était sec.
« Monsieur le ministre, nous avons plus d'une centaine de témoins, y compris parmi les étudiants de Poudlard. Si Monsieur Potter, qui est reconnu comme un ami de mademoiselle Sacha O'Nigay, est venu pour attirer l'attention, qu'en est-il de tous les étudiants qui ne sont même pas dans sa promotion ni sa maison à Poudlard ? » Le ministre s'empourpra légèrement, mais hocha la tête avant de se racler la gorge pour reprendre contenance.
« Certes… Certes. Poursuivons, monsieur Potter. » Harry remercia mille fois la grand-mère de Neville, et se racla la gorge pour reprendre.
« Comme tous les élèves de notre année, j'ai plusieurs fois assisté aux malaises de Sacha lorsque nous étions en classe, mais aussi en dehors des cours. Et certains malaises étaient plus violents que d'autres. Beaucoup trop même. » Il se lécha la lèvre inférieure avant de reprendre. « La plupart d'entre nous se souviendront de sa crise de nerfs le soir de la première tâche du tournoi, à l'encontre de ses anciennes meilleures amies. Ce jour-là, je l'ai rattrapé lorsqu'elle est tombée dans la grande salle, et elle pleurait du sang. Mais le lendemain soir, elle a… » Comment il pouvait expliquer ça ? Il ne pouvait pas parler de la carte du maraudeur et encore moins de sa cape d'invisibilité. Tant pis, il allait modifier un peu sa version. « Fred Weasley était inquiet pour elle, et nous sommes allés la chercher malgré le couvre-feu. »
Fudge voulut clairement signifier quelque chose, probablement au sujet de sa propension à désobéir aux ordres et aux règlements sorciers, mais Madame Bones lui jeta un regard oblique, et il se tut. Harry ne pouvait toujours pas oublier ce qu'il avait vu. Car jamais une aussi grosse quantité de sang ne s'était retrouvée devant lui. Et il n'avait pas été capable de déterminer d'où l'hémoglobine venait.
« Nous l'avons retrouvé au sommet de la tour d'astronomie, debout sur la barrière en étant à moitié nue. Il y avait… Je n'ai jamais vu autant de sang. Elle pleurait du rouge, elle en avait sur les mains, et pleins les cuisses… C'était terriblement effrayant.»
Trop prit dans son témoignage, Harry ne vit pas toutes les femmes de l'assemblée se jeter des regards mitigés, à la fois inquiet et dégoûté. Comment pouvait-il savoir que ce qu'il venait de décrire ressemblait à s'y méprendre à une fausse-couche ? Et que cette information pouvait amener à de nombreuses autres suppositions quant aux traitements infligés à l'encontre de la jeune fille ?
« Le concierge, Argus Rusard, nous avais suivi pour nous punir d'être sorti, il nous a aidé à la remonter lorsqu'elle a basculé dans le vide. Ensuite, j'ai foncé vers l'infirmerie pour prévenir qu'ils arrivaient avec elle. »
Madame Malfoy, en qualité d'avocate, avait gardé son visage impassible. Pourtant, dans ses yeux brillait une haine viscérale. Ce qu'elle venait d'entendre la dégoûtait au plus haut point. Une tentative de suicide, à n'en pas douter, et possiblement une fausse-couche. Lequel de ces connards avaient violé sa cliente ? Elle n'avait aucun moyen de le savoir, mais l'avantage, c'était que personne dans l'assemblée n'allait plus douter après de telles informations.
Harry parla du bal et de l'étrange magie froide que Sacha avait utilisé pendant son concert avec les bizarre'sisters. Puis, omettant bien sûr l'attaque dans le parc, il parla du jour de la dernière tâche. Lorsqu'après un passage à la table de Poufsouffle pour manger en compagnie de Cédric et ses parents, elle s'était réfugiée à la leur, expliquant son état. Il retranscrit mot pour mot les insultes qu'il avait entendu de la part de Marlène Diggory, s'inquiétant tout de même de la réaction de son mari, présent dans l'assemblée de témoins.
Bill se leva à son tour, alors qu'Harry se rasseyait, ayant terminé. Le sorcier, bien que mieux habillé que d'habitude, avec son uniforme de Gringott, ne se laissa pas démonter par l'assemblée de nobles du magenmagot devant lui.
« Moi, William Arthus Weasley, Travaillant comme conjureur de sort pour la Banque Gringott, jure de ne dire que la vérité au sujet de Sacha O'Nigay et de ses relatifs. » La main sur le cœur, il s'inclina légèrement, avant de se redresser. « Si j'avais déjà entendu parler de cette demoiselle par mes frères et ma sœur auparavant, je n'ai fait sa rencontre véritablement qu'en janvier de cette année, dans la banque. » Il leva une main pour bloquer les questions du ministre et de sa sous-secrétaire à nœud hideux. « Je n'expliquerai pas les raisons pour lesquelles mademoiselle O'Nigay était présente, il en va de la confidentialité de ses affaires avec la banque. Cependant, j'ai constaté d'une part qu'elle tremblait chaque fois que quelqu'un approchait trop près d'elle, et surtout, qu'elle paraissait terrorisée à l'idée que sa famille apprenne sa présence à la banque. »
On supposa immédiatement que le passage à la banque concernait l'émancipation à venir, ainsi que son futur dans la musique. Futur qu'avait soigneusement critiqué toute la famille O'Nigay lors de la première audience. Alors qu'il était impossible de nier l'évidence. Les morceaux de la jeune femme étaient si populaires qu'ils avaient permis aux Bizarr'sisters de s'ouvrir à un autre genre musical, doublant les ventes de CD et Vyniles.
« Le jour de la dernière tâche du tournoi des trois sorciers, j'ai été invité avec ma mère à l'école Poudlard pour soutenir Harry Potter. Les familles des champions étant invitées, et sa famille moldue n'ayant aucunement l'intention de venir. J'ai donc revu Sacha O'Nigay. Cette dernière s'est invitée à la table gryffondor, et après des explications sur son lien de parenté avec Madame Diggory, j'ai accepté de jouer la comédie au sujet d'une romance entre elle et moi. Aussitôt qu'elle s'est assise à mes côtés, nous avons entendus des insultes à son propos, et sur sa sexualité. »
On lui demanda les mots en question, et comme Harry, il les donna avec précision malgré leur vulgarité. Dans l'assistance, Amos Diggory renifla d'horreur. Il avait perdu son fils dans cette tragédie, mais il venait surtout d'apprendre que sa petite nièce avait vécu l'horreur parce qu'il n'avait pas osé répudier son épouse, et seulement la chasser de leur domicile. L'homme avait conscience de la tendresse qui unissait son garçon et sa cousine, et il n'avait pas aidé cette demoiselle, alors qu'elle avait été en charge de la dernière demeure de Cédric. Elle, une adolescente encore si fragile…
La file de témoins fut remontée de leur côté jusqu'à atteindre la toute première personne à être rentrée dans la grande salle d'audience. Une personne dont Harry avait parlé, mais à laquelle il ne s'attendait pas se faire face. D'autant plus qu'elle se trouvait tout en haut sur les bancs.
Argus Rusard.
Le cracmol fut obligé d'expliquer une première fois son statut, ignorant les moqueries de certains sorciers du magenmagot. Mais par la suite, il décrivit comment il avait fait la seconde rencontre avec Sacha. Le fait qu'il ne cesse de la ramasser dans les couloirs, qu'il ait envoyé à plusieurs reprises son familier à sa recherche par inquiétude, puis leur discussion au sujet de la magie qu'elle ne pouvait pas utiliser. Sa crainte avec sa propre famille. Le bouleversement émotionnel qui ressortait sur son visage était poignant d'honnêteté et de douleur pour la jeune femme.
Personne n'aurait pu se douter qu'il avait découvert les sévices subis en même temps que tous les autres, et côtoyait une Sacha qui n'avait rien à voir avec la victime dépeinte.
Amélia Bones se leva de son fauteuil et dû réclamer le silence après la description complète du comportement de madame Diggory lors de l'enterrement de Cédric. Cercueil fermé, car Sacha avait en vérité purement refusé de rendre le corps à cette horrible femme. Cédric dormirait éternellement dans le coffre-fort de l'héritière. Protégé par toutes sortes de maléfices gobelins. C'était un choix qu'aucun sorcier ne pouvait tolérer. Un choix que seul Argus était capable de comprendre, cependant. Pour avoir vu la jeune femme à l'œuvre sur Miss-Teigne.
Elle refusait d'enterrer Cédric, parce qu'elle avait l'intention de le ramener, de gré ou de force, à la vie. Et les nombreuses insultes et gifles de Marlène n'y aurait rien changé. Mais pas les agressions des O'Nigay, qui risquaient de l'avoir brisé. Ce qu'il avait entendu, allié au témoignage de Nora qui s'était donné pour mission d'infiltrer le manoir Malfoy où reposait la demoiselle afin d'avoir de ses nouvelles, lui faisait craindre le pire.
Comment gérer une héritière aux pouvoirs infiniment dangereux et grandissants, lorsque sa conscience n'est plus là ? Il n'en savait rien, mais il craignait la suite des évènements.
« SILENCE ! » Gronda de nouveau madame Bones en faisant claquer sa baguette. Elle attendit que tous se taisent, pour se redresser de toute sa hauteur et toiser les accusés, en bas, d'un regard glacial.
« Monsieur le ministre, je vous donne la parole. »
« Hm ? Oui. Aux vues des chefs d'accusation à votre encontre, et des très nombreux témoignages sur l'état de Sacha O'Nigay, qu'osez-vous plaider ? » Si Cornélius Fudge paraissait complètement ailleurs, c'était pour d'autres raisons que son ennui profond pour la justice. Organiser une chasse à l'homme, il avait déjà donné avec Sirius Black, et ça allait recommencer, cette fois, pour deux individus qui jusqu'à lors, étaient des membres respectables de leur société.
« Non coupable ! » Osa hurler Cathy O'Nigay, avant de cracher par terre. « Cette petite peste était un monstre dès la naissance, je n'ai fait que mon devoir de sorcière de la modérer ! »
Et Emmanuel la fixa avec désolation. S'il avait eu à cœur les tortures de sa propre progéniture, il avait parfaitement conscience, là, qu'ils allaient être condamné à la prison à Azkaban à vie. Mais la réponse de son épouse allait les envoyer directement au baiser du détraqueur. Et la réaction du jury ne tarda pas, en provenance directe de Millicent Bagnold, l'ancienne ministre de la magie, revenue pour assister à l'audience en tant que membre imminent du magenmagot.
« Vous et tout votre clan êtes aussi fou à lier que l'étaient les Lestranges au service de Voldemort ! » Le fait même qu'elle emploie le nom du lord noir, après l'annonce - évidemment fausse ! - de son retour par Potter et Dumbledore, fit naître des exclamations d'horreur dans toute la salle.
« SILENCE ! » Réclama de nouveau Amélia Bones. « Maître Malfoy, la parole est à vous. »
S'attendant à voir Lucius Malfoy apparaître, Harry dû reconnaître que la mère de son rival avait bien plus de prestance que l'homme qui avait voulu l'assassiner à la fin de sa seconde année d'étude.
« Après constat de l'état de ma cliente, et des crimes commis par l'ensemble du clan O'Nigay, je demande d'une part, réparation, en nommant Mademoiselle Sacha O'Nigay unique bénéficiaire des biens matériels et économiques du clan dont elle était issue jusqu'à lors. »
« Les jurés en faveur de cette option ? » Demanda Miranda Bones par-dessus ses lunettes. Bien que quelques réfractaires se refusent à plaider, la quasi-totalité du jury approuva la demande, levant une main bien haute. « Bien, la motion est approuvée ! » Il y eu un claquement de baguette sonore, alors qu'elle se tournait de nouveau vers l'avocate. « Vous vouliez demander autre chose ? »
À ce qui suivit, Harry frissonna d'appréhension. Narcissa Malfoy était bien plus dangereuse que son mari, et il n'en douterait plus jamais.
« Je réclame la peine de mort par baiser du détraqueur pour tous les membres du clan O'Nigay coupable de crimes contre la société sorcière et leur héritière. » Là encore, les exclamations d'horreurs s'entendaient de tous côtés. Peut-être était-ce parce qu'il manquait celle qui était à l'origine de tous les crimes en question, à la barre des accusés. Toujours est-il que ça n'annonçait qu'une seule chose. Les détraqueurs allaient être envoyés à la recherche de Paulette et Henry O'Nigay.
« Ceux en faveur de la motion ? » Les mains des plus anciens membres du Magenmagot se levèrent, Augusta Londubat extermina les parents de Sacha du regard, avant de lever la main à son tour. Rufus Scrimgeour, a l'autre bout de la salle, fit de même. Et ce, jusqu'à ce que le ministre lève enfin la sienne.
« Bien. Par les pouvoirs qui me sont conférés, en tant que juge principale de cette audience et directrice du département de la justice magique, je vous déclare coupable de tous les chefs d'accusation et vous condamne à recevoir le baiser du détraqueur avant la fin du mois. » Des hurlements retentirent, alors que les chaines se resserraient autour des poignets des accusés. Marlène s'écroula à genoux, hurlant qu'on lui avait pris son fils et qu'elle n'avait fait que le venger.
Amos Diggory, dans la tribune des nombreux témoins, grogna de honte et de douleur mêlée. Condamnée au baiser du détraqueur… Il n'avait pas eu en détails les aliénations commises par son épouse, seule l'avocate et le département de la justice magique savaient avec précision. Et même s'il n'était pas certain de ces informations, on lui avait dit qu'Emmanuel et Cathy avaient fait leurs aveux sous véritasérum. Et … Poupette, que Cédric avait toujours adoré plus jeune, alors qu'elle lui lisait les contes sorciers, retrouvée morte et enterrée dans une fosse récente, sans plus de considération.
Il y eut un claquement sonore, et le père de l'ancien champion de Poufsouffle se tourna vers la directrice du département de la justice magique. Pour autant, si elle venait de réclamer le calme dans l'assemblée, ce ne fut pas elle qui prit la parole.
« Affaire suivante. Greffier. » Et tandis qu'on sortait les criminels, toujours enchainés entre eux, Percy reprit la parole, cette fois, avec un léger tremblement.
« Demande d'évaluation du potentiel gardien d'une obscuriale, daté du 20 août. Severus Tobias Rogue pour la tutelle de Sacha O'Nigay. »
Harry tiqua, sa nuque vrilla tandis qu'il cherchait son professeur de potion des yeux. Une évaluation ? Ce n'était pas au programme, si ? Et qu'est-ce que ça allait donner ? Il le vit descendre de l'estrade pendant que les aurors encore présents dégageaient le centre de la pièce de la barre et des chaînes mises en place pour les accusés. Qu'est-ce que c'était que ça ? Le noiraud se crispa soudain, le bourdonnement, qui jusque-là, s'était calmé, reprenait d'un coup du volume. Et le professeur Rogue était suivi de la femme blonde avec sa mallette.
Lorsque toute la zone fut dégagée, la mallette fut déposée au centre, juste à côté du professeur Rogue et de ses longues robes noires. La femme en blouse remonta alors aussi vite que possible dans les estrades, et commença à psalmodier quelque chose que ni Harry, ni Draco ne comprirent. Un dôme doré se forma lentement au-dessus du potioniste, qui sorti sa baguette, prêt à agir mais… Sur quoi ?
5 hommes, en blouses du département des mystères et du département de la justice, se postèrent de part et d'autre du dôme, en intérieur, et levèrent à leur tour, leurs baguettes, mais cette fois, pointées sur la valise. Un frisson descendit le long de la colonne du survivant, alors que le bourdonnement augmentait de plus belle. Ce devenait carrément douloureux.
« Bien. Comme vous le savez, cette évaluation consistera à protéger l'obscurus des sorts, tout en le canalisant de la meilleure manière possible. Nous vous donnons 20 minutes pour se faire. Votre réussite déterminera l'acceptation du placement de mademoiselle O'Nigay sous votre garde. » Annonça l'un des hommes derrière le dôme. Il portait la robe du département des mystères, et une barbe bien fournie poivre et sel. Avec ses lunettes, Harry parvenait juste à lire « Funes » sur le début de l'étiquette qui ornait son buste.
« Je suis prêt. » Répondit seulement l'ancien mangemort.
Dans un déclic, la mallette s'ouvrit, le bourdonnement que percevait Harry devint aussi intense que s'il était collé à l'enceinte d'une discothèque, et une terreur sourde s'empara de son ventre. Une sorte de nuage composé de mouches s'échappa en bourdonnant de colère de la mallette, et vint s'étaler sur la pierre devant le sorcier, prenant lentement une forme humanoïde.
C'était mort. Harry le savait, il le sentait. Cette chose n'avait plus rien de vivant, c'était bien pire que tous les esprits corrompus qu'il avait croisé cet été. Ce truc au milieu de la salle était un danger pour eux tous. Une ombre d'âme, une erreur de la nature. Peeves était un enfant de chœur à côté. Sa main se crispa sur l'obsidienne à sa taille, et il constata la chaleur intense qu'elle dégageait sous la pulpe de ses doigts. Ce n'était pas une bonne chose, ça confirmait la sensation funeste.
« Potter, c'est quoi cette tête ? » Grogna Draco en lui donnant un coup de coude.
« Il ne pourra pas y faire face. »
« Ne raconte pas des salades, le professeur Rogue est puissant, il neutralisera les sorciers et tiendra cette créature au calme. »
« Non. Il ne pourra pas. L'obscurus est différent de ce qu'ils pensent. C'est déjà mort. » Chuchota Harry pour n'être entendu que de son rival.
« Evidemment que c'est mort. Cet obscurus a tué son obscurial comme la plupart des autres… »
« Tu ne comprends pas. Cette chose n'est pas juste un obscurus. C'est une entité morbide, comme… »
« Qu'est-ce que tu viens de dire ? » Demanda Malfoy, désormais très pâle. »
« Une entité morbide… Tu sais ce que c'est ? » C'était impossible, non ? Malfoy pouvait-il savoir ce que ces termes désignaient ? Cédric le lui avait expliqué en compagnie d'autres esprits, mais il croyait que les sorciers n'avaient aucune idée de la présence des âmes errantes dans les limbes.
Le nuage de mouches acheva sa transformation. Il dévoila une apparence de petit garçon en uniforme scolaire privé. Une chemise blanche rentrée dans un short court et noir, des chaussettes hautes, des petits mocassins, et une blouse sombre avec l'écusson d'une école primaire anglaise. L'enfant avait les cheveux blanc peigné sur le côté avec de la cire, il devait avoir grandi dans les années 40, à n'en pas douter. Et la petite cravate, dénouée, pendait à son cou.
Il pencha la tête sur la gauche avant de sourire. Mais ses lèvres s'étirèrent bien trop grandement et dévoilèrent des crocs pointus.
« Expelliarmus ! » Envoya l'un des aurors dans le cercle. Severus se plaça automatiquement entre le gamin et le sort, agitant sa baguette pour dresser un bouclier sur lequel l'éclair rouge ricocha. Le professeur para le second sort, et renvoya le 3e avec un bonus supplémentaire de son cru, mais la chose derrière lui ricana, et il fut brutalement expulsé contre son propre bouclier.
Harry se couvrit automatiquement les oreilles. Le bourdonnement devint tellement horrible, qu'il eut l'impression d'entendre des sons au travers de la nuée. Non. Ce n'était pas une impression. La chose parlait ! Grinçait ? Il ne savait pas, mais il la comprenait.
« Humains misérables, je vous dévorerais tous. »
C'était pire que d'entendre le basilic réclamer à manger dans les tuyaux de l'école.
« Potter, qu'est-ce que tu fais ? » S'alarma Malfoy. Mais Harry ne répondit rien. Du moins, pas à son adresse …
« Laisse le tranquille. » Un murmure. Comme pour du fourchelang, il sentait que c'était différent de sa façon de parler habituelle. Il aurait eu confirmation rien qu'en voyant la tête du blond à ses côtés.
Draco savait que ça existait. Son père ne lui avait pas enseigné les bases de la magie noire pour rien. Et sa mère ne lui avait pas prêté les livres les plus intéressants de la famille Black pour qu'il les ignore sur son étagère. Mais entre savoir, et voir, il y avait tout un monde. Potter l'avait déjà énervé en parlant la langue des serpents. Son animal totem, quand même ! Mais là, c'était autre chose. Les frissons qui descendirent le long de son échine étaient formels. Seuls ceux ayant des affinités avec la magie noire pouvaient l'entendre.
Potter parlait la langue des morts. L'enochien. Les moldus avaient décrit cette langue comme issue des anges, une œuvre biblique supplémentaire. Mais les sorciers les plus noirs avaient conscience qu'il s'agissait de tout le contraire. Draco ne comprenait pas ce que disait Potter, il n'en avait même aucune foutue idée. Mais il le sentait. Ça rampait sur sa peau, se glissait sous ses ongles, dans ses oreilles… C'était infect et gluant.
L'obscurus jeta un bref coup d'œil ennuyé vers eux, avant de reporter son attention sur le sorcier qui se relevait. La petite main se plaça dans les airs, avant de claquer des doigts, et des flammes noires d'encre se propagèrent de la main jusqu'au professeur de potion, mais aussi en direction des autres hommes.
« Non ! » Severus gronda, déployant un autre bouclier, mais il fut tout de même brûlé dans le processus, et contrairement aux flammes magiques habituelles, ces dernières ne s'éteignirent pas.
L'obligeant à serrer les dents, en retirant sa cape. Grignotant peu à peu son épaule et maculant sa chemise de sang, il ne dit rien d'autre. Il avait protégé les aurors, et évité le plus gros de la charge. Mais ce n'était pas suffisant. Le temps semblait s'allonger. 20 minutes. Il n'allait jamais tenir. Il le savait. Les séances de doloris avec le seigneur des ténèbres duraient moins que ça. Et elles ne laissaient que des séquelles nerveuses. Là, à cette vitesse, il allait perdre son bras gauche. Il jura dans sa barbe.
Une pluie de sort fonça de nouveau sur la créature qui les reçu sans bouger…
Et une nuée de mouche s'échappa de la gorge de l'enfant pour frapper l'un des aurors. Severus eu juste le temps de créer un jet d'eau suffisamment puissant avec sa baguette pour repousser les insectes. Le garçonnet ricana, et Harry se couvrit de plus belle les oreilles.
« Harry, que se passe-t-il ? » Bill n'en avait aucune idée, mais il était évident que la présence de l'obscurus avait un effet sur le garçon. Il vint le soutenir à l'épaule, le serrant. Mais Harry avait du mal. La bête grondait, grinçait sa haine sur tous les hommes présents. Il avait soif de sang. Et il prévoyait de manger son professeur de potion.
« Mm-noom-ba-deh
Doom-boom-ba-beh
Doo-boo-boom-ba-beh-beh»
Il eut du mal à se rendre compte de la présence d'un autre contact sur sa personne. Une main qui se glissait lentement, mais sûrement, dans la sienne. Levant les yeux sur sa main prise, Harry chercha à comprendre ce qu'il se passait. Et puis, derrière la nuée de mouches et les vrombissements, il reconnut une petite voix, lointaine, chanter. Une petite voix avec laquelle il avait déjà partagé bien des choses.
Luna.
Les souvenirs de la dernière tache affluèrent. Cette harmonie dans les limbes qui lui avait permis de se défendre plus efficacement contre Voldemort durant leur duel. Qui lui avait permis de découvrir Cédric, sous cet aspect fantomatique. Et à quel point leur amie oracle était si particulière.
« Quoi qu'il se passe, reste conscient. Je ne sais pas ce que tu fais, mais si tu communiques avec cette chose, tu peux la calmer, et on en a tous besoin. Sacha en a besoin. Alors grouille toi, et moi je t'ancre ici. » Le temps que les propos du blond lui montent au cerveau, et Harry hocha la tête.
Draco n'avait pas les ongles longs. Ils étaient toujours très courts et propres. Loin des griffes à peine arrondies de Sacha. Mais il avait de la force. Et s'il tenait jusqu'à lors la main de Potter, il la serra avec toute la conviction nécessaire pour garder ce dernier assez douloureux et resté éveillé. Autrement dit, il lui broya les doigts.
« Pressure pushin' down on me
Pressin' down on you, no man ask for… »
En revanche, pour lui-même, ça commençait à devenir difficile. Chaque clignement lui provoquait une vision. Une étrange prairie, avec un cabanon. Et au loin, le regard bleu de Luna qui lui intimait de l'aide. Il hocha la tête dans le vide. Garder conscience de son corps ici, et s'éloigner pour là-bas. Ça allait être compliqué. Mais ce n'était pas impossible. Il pouvait le faire. Il DEVAIT le faire. Serrant toujours la main du survivant avec violence, il prit le risque. L'obscurus poussa un cri déchirant, expulsant les aurors et le futur tuteur de Sacha contre le bouclier doré, blessant tous ces derniers en un coup. Draco ferma les yeux, fredonna l'air inconnu mais qui emplissait sa tête avec de plus en plus de force…
Et plongea dans les limbes où l'attendait Luna.
