Petit mot de l'auteure : j'avais écrit ce texte pour l'anniversaire de Nicolas Gabion. Nanthana m'avait défié d'écrire un Jaskier & Bohort ce qui a donné ceci. J'ai tellement aimé ce duo que j'ai décidé de ré-écrire sur eux et en faire un recueil.
Arthur n'avait jamais aimé les mercenaires.
Ils étaient trop violents, trop prompts à vous trahir sitôt qu'une occasion financière plus alléchante se présentait, trop... Trop peu chevaleresques. Alors oui, ce n'était pas avec son équipe de branquignoles qu'il pouvait donner une haute idée de la chevalerie, mais quand même. Il y avait certains standings à respecter.
Donc non, Arthur n'aimait pas les mercenaires.
Mais il les aimait encore moins quand ceux-ci lui fichait un vent.
Les attaques sur Kaamelott avaient été tellement incessantes que Arthur n'avait eu d'autre choix que de recourir aux services d'un drôle de bonhomme. L'homme, qui répondait au nom de Geralt de Riv, se définissait comme un Sorceleur traqueur de monstres. Pour Arthur, tout cela n'était qu'un joli nom pompeux pour dire « mercenaire » : après tout, on payait cet individus flippant pour qu'il vous rende service en allant occire quelque ennemi. Si ça se n'était un mercenaire... Néanmoins, il avait évité de trop argumenter quand il avait vu les yeux froids du « Sorceleur ». Si ça lui faisait plaisir de se faire appeler ainsi, soit.
Il n'allait pas chipoter : tant que le travail était fait, lui, il était content.
Sauf que le travail n'était pas prêt d'être fait.
Quand ils étaient arrivés au champ de bataille, il avait montré à Geralt l'ennemi à terrasser, à savoir leurs opposants. L'armée ennemie avait des engins de guerre développés, beaucoup plus d'hommes et une meilleures organisation. Non pas que ce dernier point soit surprenant. Enfin quoi qu'il en était, Arthur avait été heureux – et confiant – de pouvoir sortir sa nouvelle carte.
Nouvelle carte qui n'avait rien trouvé de mieux à grommeler que « Je ne me battrais pas contre des humains ».
Avant de le planter là.
À cet instant, Arthur avait fulminé – pendant environ trente-sept secondes, car les troupes adverses n'avaient pas tardé à remarquer leur présence et à lancer l'assaut. Foutu pour foutu, le roi se résolut à au moins riposter, histoire de sauver l'honneur.
Il se ordonna donc à Bohort, en charge des signaux depuis que le dernier porte drapeaux avait manqué de déclencher une guerre en insultant par inadvertance leurs ennemis, de lancer le combat.
« Signale la formation que nous avons étudié. Avec celle-ci, nous avons peut-être une chan... »
Ce fut à cet instant là qu'Arthur réalisa qu'il parlait dans le vide.
…
Bohort était une âme sensible.
Il avait beau être un chevalier reconnu et émérite de la table ronde, il arrivait qu'il se sentait à l'écart.
C'est pourquoi lorsqu'il vit que le mercenaire engagé par le roi était accompagné d'un barde, il s'était empressé d'aller discuter avec lui. Bien lui en avait prit : que la conversation de ce Jaskier était intéressante ! Quel sens des rimes et des mots il avait ! Que son sens des mélodies était aiguës ! Mais le barde ne se contentait pas d'être talentueux : il s'intéressait aussi à lui. Quand il avait vu combien Bohort était connaisseur de musique, il lui avait demandé de lui jouer quelque chose. Devant un tel talent, le chevalier avait d'abord refusé ; jamais il n'oserait déclamer ses pauvres et modestes vers. Mais Jaskier avait tellement insisté qu'il avait cédé. Le résultat avait été fabuleux. Le musicien l'avait applaudit pour ses mots, avant de suggérer la plus merveilleuse des idées : et si il mettait en musique les poèmes de son nouvel ami ?
Ils avaient ainsi passé plusieurs heures, Jaskier jouant, Bohort chantant. Jamais le chevalier s'était sentit en aussi belle harmonie avec quelqu'un... Il se sentait si bien qu'il commençait à être étourdit de rêves : et si ils jouaient à la cour ensemble ? Il eu peur que le barde lui rit au nez mais il accueillit son idée avec enthousiasme.
- Il me faudrait simplement l'autorisation de mon roi, expliqua Bohort.
Et là, comme par un enchantement planifié par une entité supérieure, Athur débarqua en trouble dans la chambre où ils répétaient.
- Bohort... gronda-t-il.
- Oh, Sire, c'est merveilleux ! S'exclama le chevalier. Mon ami Jaskier et moi-même demandons votre bénédiction pour...
- Vous faites ce que vous voulez de votre cul, le coupa le roi. Ma bénédiction... Qu'est-ce que vous voulez que ça me foute sérieux. Par contre, moi ce qui m'intéresse, c'est de savoir pourquoi vous n'avez pas daigné vous pointer sur le champ de bataille alors qu'on avait besoin de vous.
Là, Bohort resta complètement figé.
- Le champ de bataille ?
- Oui, vous savez, celui où vous étiez censé envoyer les signaux pour coordonner nos troupes ? Celui où on s'est fait défoncer justement car vous étiez trop occupé avec votre ami pour venir ?
- Sire, je suis confus, je... balbutia Bohort. J'ai oublié... Nous passions un moment si délicieux que...
- Ouais, bah la prochaine fois, comptez vous fleurette si vous voulez, mais faites le là où on a besoin de vous. Merde alors !
Et sur ces élégantes paroles, le roi tourna les talons et claqua la porte, laissant un Bohort désemparé.
- Du coup... j'imagine que c'est non pour le concert ? Demanda prudemment Jaskier.
Il imaginait bien.
