Le miracle de Noël
Bobby remua la sauce.
Ils étaient à deux heures de la fin de leur garde et celle-ci avait été très calme pour une veille de noël. Pas qu'il s'en plaigne mais il ne voulait pas voir venir la fin de cette garde. Il ne voulait pas rentrer et passer la soirée à regarder les cadeaux de Buck sous le sapin.
Il savait que ce n'était pas grave, que Buck serait bientôt avec lui et qu'il lui donnerait ses cadeaux, qu'il ne se souviendrait même pas de son premier noël.
Mais il trouvait ça injuste.
En fait, c'est pour lui que c'était dur. Savoir que Buck allait passer noël dans un foyer d'accueil, en compagnie d'autres enfants abandonnés, lui filait la nausée. Il avait envie de passer au foyer, déguisé en père noël et d'apporter des cadeaux à tous les enfants, seulement pour pouvoir être avec lui. Mais il savait que cela risquait de jouer en sa défaveur et il ne voulait pas leur donner une raison de revenir sur leur décision de le lui confier.
– Qu'est-ce qui se passe, gamin ? demanda Ray en venant s'installer à ses côtés.
– Rien d'important, lui sourit-il.
– Il sera bientôt avec toi, lui rappela-t-il. C'est une question de jours.
– Chaque seconde passée loin de lui est une seconde de trop.
– Je sais mais tu dois faire avec.
– Je me demande ce qui prend autant de temps.
– C'est noël, lui rappela Ray. Les effectifs sont réduits et tout prend plus de temps.
– Je sais mais c'est injuste. Je suis là et disponible pour passer tout ce temps avec lui. Il devrait déjà être avec moi.
– Sois patient, lui conseilla-t-il encore. Est-ce que tu as parlé au cap ?
– Oui, je prends un congés dés que Buck est avec moi, le temps de tout mettre en place.
– Ok, lui sourit-il. Et comment va la jolie infirmière ?
– Oh, je devais justement t'en parler, lui reprocha-t-il. Tu lui as donné mon adresse.
– Evidemment, lâcha-t-il. Cette fille est dingue de toi et toi d'elle. Il fallait bien quelqu'un pour vous ouvrir les yeux. Dis-moi que tu les as ouverts tes foutus yeux !
– Ça ne te regarde pas, maugréa-t-il.
– J'en conclu que ça veut dire oui, sourit-il.
– Nash ! l'appela soudain Sacha. T'as de la visite.
– Moi ?
– Une très jolie visite, insista Sacha.
– Et on dirait qu'elle est déjà accro, se moqua Ray. Bien joué Nash !
– La ferme, grogna-t-il en éteignant le gaz. Et ne touche pas à ma cuisine ou tu seras privé de dessert.
Ray ronchonna et Bobby quitta la cuisine pour se rendre dans le hangar.
Lorsqu'il aperçu Mme Fitzpatrick, il ne comprit pas tout de suite et il s'approcha incertain, avant de remarquer Buck, niché contre son épaule. Il pressa le pas et put l'entendre geindre.
Il le récupéra et le posa sur sa poitrine, comme lui avait montré Marcy, ce qui était redoutablement efficace pour le calmer.
– Là Buck, tout va bien, lâcha-t-il en le berçant. Je suis là, petit, je suis là.
Buck renifla et serra sa chemise d'uniforme dans ses petits poings.
Bobby prit le temps de le laisser s'installer et de se calmer, avant de tourner un regard interrogatif vers madame Fitzpatrick, qui les regardait, attendrie.
– Qu'est-ce qui se passe ?
– Je me suis dit que ça serait bien pour Buck de passer son premier noël avec son nouveau tuteur.
– Vous… ? Vraiment ? articula-t-il aux bords des larmes.
– Oui, vraiment, lui confirma-t-elle.
– Mais je croyais que les formalités prenaient du temps.
– Disons que j'ai usé de quelques cartes joker.
– Je ne sais pas comment vous remercier.
– Aimez cet enfant et prenez bien soin de lui, M. Nash. C'est tout ce que je demande.
– Je vais prendre soin de lui, promit-il. Et l'aimer encore plus fort chaque jour.
– Je sais, sourit-elle. Je ne me trompe que très rarement sur les gens.
– Merci, souffla-t-il alors que les larmes roulaient sur ses joues.
Il serra Buck plus fort contre lui et récupéra le sac qu'elle lui tendait. Il ne pouvait pas croire qu'il avait enfin Buck. Il ne le laisserait plus jamais avoir peur ou être blessé comme il l'avait été.
– Joyeux noël à vous deux, lâcha-t-elle en partant.
Bobby la salua, berçant Buck contre lui, lui faisant la promesse encore et encore qu'il serait l'enfant le plus heureux du monde. Il se promit de faire une offrande plus importante à la messe de noël, en remerciement de ce miracle, et se tourna pour trouver ses collègues, qui le regardait tout sourire.
– Notre Bobby a tellement grandit, fit mine de pleurer Mike alors que Sacha lui tapotait l'épaule comme s'ils étaient ses parents et Bobby eut envie de rouler des yeux.
Ray était tout sourire et Dana semblait être sur le point de pleurer. Le capitaine s'approcha mais Buck garda son visage dans son cou.
– Rentres chez toi, Nash. Tu as des tas de choses à faire encore.
– Merci capitaine.
– Et tiens moi au courant de ta date de retour dés que tu le sais.
– Je le ferai capitaine, promit-il.
– Attends, ça veut dire que tu ne finis pas la cuisine ? s'alarma Robbins. Mais qu'est-ce qu'on va manger ?
– On commandera, s'insurgea Dana. Ou je peux m'y coller.
– Nash, tu ne peux pas nous faire ça. Je te promets de lui changer sa première couche si tu finis de préparer le repas. Allez, c'est noël, mec.
– J'avais fini, Robbins, rit-il de sa moue. Mais je te retiens pour le changement de couches.
– Je parie que ça sera quelque chose, se moqua Ray en l'entrainant vers la cuisine.
Dana laissa leurs collègues partir, avant de venir vers lui.
– Appelle-moi au moindre doute, souffla-t-elle. La moindre bosse, le moindre début de nez encombré.
– Je le ferai, promit-il.
– Et prends des milliers de photos, lui conseilla-t-elle. Tu chériras ces souvenirs plus tard.
Elle caressa le dos de Buck et rejoignit les autres.
Bobby baissa les yeux sur Buck, qui semblait sur le point de s'endormir. Il sourit tendrement et l'embrassa sur le sommet du crâne.
– Allez Buck, on rentre à la maison maintenant.
Il récupéra ses affaires, sans se changer et alla jusqu'à la voiture.
Il ouvrit la portière arrière, en se bénissant d'être prévoyant et d'avoir déjà monter le siège auto, flambant neuf, qu'il avait acheté spécialement pour l'arrivée de Buck. Buck ne broncha pas quand il l'attacha, en sécurité.
Il posa son sac à ses côtés et vérifia rapidement le contenu des affaires de Buck.
Il s'installa ensuite derrière le volant. Ray vint vers lui, en courant, avec des tupperwares et il ouvrit la fenêtre pour les récupérer.
– Joyeux noël gamin, lâcha-t-il en les lui remettant. Et si tu en as le courage, passe demain pour la remise des cadeaux aux enfants défavorisés.
– Je suppose que tout va se jouer cette nuit, soupira-t-il.
– Tu t'en sortiras, lui assura-t-il, avant de retourner vers la caserne.
Bobby regarda de nouveau Buck dormant paisiblement dans son siège auto et il ne put s'empêcher de sourire. Enfin, il mit le contact.
– Allez Buck, rentrons à la maison.
